[39,5] Κινδυνεύουσιν δὲ οἱ ἄνθρωποι, καθάπερ τοῖς ἀγαθοῖς,
οὕτω καὶ τοῖς θεοῖς ζυγοστατεῖν τὰς τιμάς. Τίς
οὗτος; Ζεύς· ἀρχέτω. Τίς οὗτος; Κρόνος· δεδέσθω.
Ἥφαιστος· χαλκευέτω. Ἑρμῆς· ἀγγελλέτω. Ἀθηνᾶ·
ὑφαινέτω. 〈Διόσκουροι· ἐπὶ νε〉ὼς Πελοποννησίοις
ἑπέσθωσαν. Ἀγνοοῦσιν γάρ, οἶμαι, ὡς θεοῖς πᾶσιν
εἷς νόμος καὶ βίος καὶ τρόπος, οὐ διῃρημένος, οὐδὲ
στασιωτικός· ἄρχοντες πάντες, ἡλικιῶται πάντες, σωτῆρες
πάντες, ἰσοτιμίᾳ καὶ ἰσηγορίᾳ συνόντες τὸν
πάντα χρόνον· ὧν μία μὲν ἡ φύσις, πολλὰ δὲ τὰ
ὀνόματα. Ὑπὸ γὰρ ἀμαθίας αὐτῶν τὰς ὠφελείας τὰς
ἑαυτῶν ἕκαστοι ἐπονομάζομεν ἄλλος ἄλλῃ κλήσει θεοῦ.
Καθάπερ καὶ τὰ μέρη τῆς θαλάττης, Αἰγαῖον τοῦτο,
Ἰώνιον ἐκεῖνο, Μυρτῶον ἄλλο, Κρησαῖον ἄλλο· ἡ δ´
ἐστὶν μία, ὁμογενής, καὶ ὁμοπαθής, καὶ συγκεκραμένη·
οὕτω καὶ τἀγαθόν, ἓν ὂν καὶ ὅμοιον αὑτῷ καὶ ἴσον
πάντοθεν, ὑπὸ ἀσθενείας τῆς πρὸς αὐτὸ καὶ ἀγνωσίας
ταῖς δόξαις διαιρούμεθα. Πλουτεῖ Καλλίας, μακάριος
τῶν ἀγαθῶν· ἀλλὰ Ἀλκιβιάδης Καλλίου ὡραιότερος.
Ἀντιθῶμεν τἀγαθά, πλοῦτον κάλλει· Ποῖον αὐτῶν
ἑκατόμβοιον; ἐννεάβοιον ποῖον; πότερον ἑλώμεθα; πότερον
εὐξόμεθα; Οὐκοῦν ὁ μὲν Φοῖνιξ καὶ ὁ Αἰγύπτιος
τὸ Καλλίου ἀγαθὸν εὔξεται· ὁ δὲ Ἠλεῖος καὶ ὁ
Βοιώτιος τὸ Ἀλκιβιάδου. Εὐγενὴς Παυσανίας,
ἀλλ´ ἐνδοξότερος Εὐρυβιάδης. Ἀντιθῶμεν εὐδοξίᾳ γένος·
τίς κρατεῖ; τίνι δῶμεν τὰ νικητήρια φέροντες;
Σωκράτης πένης, Σωκράτης αἰσχρός, Σωκράτης ἄδοξος,
Σωκράτης δυσγενής, Σωκράτης ἄτιμος. Πῶς γὰρ οὐκ
αἰσχρὸς καὶ ἄτιμος καὶ δυσγενὴς καὶ ἄδοξος καὶ πένης
ὁ τοῦ λιθοξόου, ὁ σιμός, ὁ προγάστωρ, ὁ κωμῳδούμενος,
ὁ εἰς δεσμωτήριον ἐμβαλλόμενος, ἀποθνήσκων
ἐκεῖ, ἔνθα καὶ Τιμαγόρας ἀπέθανεν; Ὢ τῆς ἐρημίας
τῶν ἀγαθῶν· ὀκνῶ γὰρ εἰπεῖν πλῆθος κακῶν. Τί
τούτοις ἀντιθῶμεν; τί φῶμεν; Παράβαλλε τοῖς ἀνταγωνισταῖς
τὸν Σωκράτην ἐν κτήσει ἀγαθῶν· οὐχ ὁρᾷς
ἡττώμενον ἐν πλούτῳ Καλλίου, ἐν σώματι Ἀλκιβιάδου,
ἐν τιμῇ Περικλέους, ἐν δόξῃ Νικίου, ἐν θεάτρῳ Ἀριστοφάνους,
ἐν δικαστηρίῳ Μελήτου; Μάτην ἄρα αὐτῷ
ὁ Ἀπόλλων τὰ νικητήρια ἔδωκεν, μάτην ἐπεψηφίσατο.
| [39,5] L'erreur où les hommes tombent d'ailleurs en admettant plusieurs sortes
de bien, ils la commettent en admettant plusieurs Dieux, et en leur
distribuant à chacun son apanage, comme avec une balance. Quel est celui
des Dieux qui se présente ? Jupiter. Qu'il règne. Quel est cet autre?
Saturne. Qu'il soit garrotté. Vulcain, qu'il ait une forge. Mercure, qu'il
soit messager. Minerve, qu'elle travaille à l'aiguille. Ils ignorent, je
pense, que tous les Dieux n'ont qu'une même loi, les mêmes mœurs, une même
manière d'être, sans nulle division, sans nul conflit. Ils ont tous la
même part à l'Empire ; ils sont tous du même âge ; ils s'intéressent tous
également à la conservation des hommes ; ils sont revêtus des mêmes
prérogatives ; ils partagent la même autorité, et cela dans tous les
temps. Ils ne forment qu'une même nature sous des noms divers. Dans
l'ignorance où nous sommes, à leur égard, nous attribuons à chacun d'eux
les bienfaits de leur providence commune. Les dénominations se multiplient
et se diversifient, comme celle des plages de la mer : tantôt, en effet,
c'est la mer Egée, tantôt la mer Ionienne ; ici, c'est la mer de
Myrto; là, c'est la mer de Crète; quoique la mer soit une, homogène,
soumise aux mêmes impressions et cohérente dans toutes ses parties. Il en
est ainsi du Bien. Il est un, semblable à lui-même, et identique sous tous
les rapports. Notre opinion ne le divise que parce que notre faiblesse et
notre ignorance nous empêchent d'atteindre à sa véritable essence. Callias
est opulent, il est heureux, sous le rapport de ce genre de bien. Mais
Alcibiade est plus beau que Callias. Comparons ces deux genres de bien
ensemble, l'opulence avec la beauté. Laquelle des deux vaut cent bœufs ?
Laquelle des deux n'en vaut que neuf ? A laquelle des deux
donnerons-nous la préférence ? Pour laquelle ferons-nous des vœux? Le
Phénicien et l'Egyptien feront des vœux pour le bien de Callias.
L'habitant d'Elée et celui de la Béotie en feront pour le bien
d'Alcibiade. Pausanias était d'une naissance illustre, mais Eurybiade
avait plus de renommée. Comparons la renommée avec la noblesse. Laquelle
des deux vaut mieux ? A laquelle des deux irons-nous présenter la palme ?
Socrate était pauvre : Socrate n’était pas beau : Socrate n’avait point de
renommée : Socrate était d'une naissance obscure : Socrate ne jouissait
d'aucune considération. Mais le moyen qu'il fût sans quelque difformité,
qu'il jouît de quelque considération, qu'il fût distingué par sa
naissance, qu'il eût quelque renommée, qu'il possédât quelque bien, celui
qui était le fils d'un simple lapidaire, qui était camus, qui avait un
gros ventre, qui fut joué sur le théâtre, qui fut jeté en prison, et qui
mourut dans le même lieu où était mort Timagoras. O quelle pénurie de
bien, pour ne pas dire quelle abondance de maux. Avec quoi les
mettrons-nous en parallèle? Que dirons-nous? Comparons Socrate avec ses
antagonistes, sous le rapport de la possession des biens. Ne voyez-vous
point qu'il est vaincu par Callias sous le rapport de la fortune, par
Alcibiade sous le rapport de la beauté du corps, par Périclès sous le
rapport de la considération publique, par Nicias sous le rapport de la
renommée ? Ne voyez-vous pas qu'Aristophane triomphe à ses dépens, sur le
théâtre, et Mélitus, dans les tribunaux ? C’est en vain qu'Apollon lui a
décerné la palme. Ce Dieu a eu beau le proclamer le plus sage des mortels.
|