[3,3] Ἔτ´ οὖν ποθεῖς σκέψασθαι περὶ Σωκράτους, εἰ
ὀρθῶς ταῦτα ἔδρα ἢ μή; τί οὖν, εἴ τις σοι παρελθὼν
διηγεῖτο, ὅτι ἀνὴρ Ἀθηναῖος, γέρων τὴν ἡλικίαν,
φιλόσοφος τὴν ἐπιτήδευσιν, πένης τὴν τύχην, δεινὸς
τὴν φύσιν, ἀγαθὸς εἰπεῖν, συνετὸς νοῆσαι, ἄγρυπνος
καὶ νηφάλεος, καὶ οἷος μηδὲν εἰκῇ μήτε ἔργον πρᾶξαι,
μήτε εἰπεῖν λόγον, βεβιωκὼς μὲν πόρρω ἡλικίας, ἐπαινέτας
δὲ σχὼν τοῦ τρόπου Ἑλλήνων μὲν οὐ τοὺς φαυλοτάτους
τὴν φύσιν, θεῶν δὲ τὸν Ἀπόλλωνα· οὗτος
ἐπαναστάντων αὐτῷ φθόνῳ καὶ ἀπεχθείᾳ καὶ τῇ πρὸς
τὰ καλὰ ὀργῇ ἐκ μὲν τοῦ θεάτρου Ἀριστοφάνους, ἐκ
δὲ τῶν σοφιστῶν Ἀνύτου, ἐκ δὲ τῶν συκοφαντῶν
Μελήτου, ἐκ δὲ τῶν ῥητόρων Λύκωνος, καὶ τοῦ μὲν
κωμῳδοῦντος, τοῦ δὲ γραφομένου, τοῦ δὲ εἰσάγοντος,
τοῦ δὲ λέγοντος, τῶν δὲ δικαζόντων, ἐχαλέπαινεν
πρῶτα μὲν τῷ Ἀριστοφάνει, καὶ καταστὰς ἐν Ἀθηναίοις
ἀντεκωμῴδει τὸν ἄνδρα ἐν Διονυσίοις, ἔτι μεθυόντων
δικαστῶν· ἔπειτα εἰς τὸ δικαστήριον παρελθὼν ἀντερρητόρευεν
τοῖς λέγουσι καὶ λόγους διεξῄει μακρούς,
ἀπολογίαν εὖ μάλα εἰς ἐπαγωγὴν δικαστῶν συγκειμένην,
ἐξευμενιζόμενος μὲν τὸ δικαστήριον τοῖς προοιμίοις,
πείθων δὲ τοῖς διηγήμασιν, ἀποδεικνὺς δὲ τεκμηρίοις
καὶ πίστεσιν καὶ εἰκάσμασιν, ἀναβιβαζόμενος δὲ καὶ μάρτυρας
τῶν πλουσίων τινὰς καὶ ἀξιόχρεων ἐν Ἀθηναίοις
δικασταῖς, κἂν τοῖς ἐπιλόγοις ἱκετεύων καὶ ἀντιβολῶν
καὶ δεόμενος καί που καὶ δάκρυα ἐν καιρῷ ἀφιείς,
καὶ μετὰ τοῦτο τελευτῶν τὴν Ξανθίππην ἀναβιβασάμενος
κωκύουσαν, καὶ τὰ παιδία κλαυμυριζόμενα, διὰ
τούτων ἁπάντων μετεχειρίσατο τοὺς δικαστάς, καὶ
ἀπεψηφίσαντο αὐτοῦ, καὶ ᾤκτειραν, καὶ ἀφῆκαν;
| [3,3] III. Vous désirez donc d'examiner si Socrate, dans ces circonstances, se conduisit
bien ou mal. Si quelqu'un s'approchait de vous, et vous disait : « Il fut un homme à
Athènes, avancé en âge, Philosophe de profession, mal à son aise du côté de la
fortune, doué d'ailleurs d'excellentes qualités morales, bon orateur, ayant beaucoup de
sagacité, actif, sobre, incapable de rien faire ni de rien dire, sans avoir un objet
déterminé ; ayant parcouru une assez longue carrière en se conciliant sous le rapport
des mœurs les éloges des plus recommandables d'entre les Grecs, et d'Apollon entre
les Dieux. L'envie, l'animosité, la haine du beau moral, soulevèrent contre lui, parmi les
poètes comiques Aristophane, parmi les Sophistes Anytus, parmi les sycophantes
Mélitus, parmi les orateurs Lycon, parmi les Grecs les Athéniens ; et tandis qu'il
était ainsi joué sur le théâtre par l'un, accusé par l'autre, tandis que celui-ci le traduisait
en jugement, que celui-là parlait contre lui, et qu'il était d'ailleurs en présence du
tribunal, il commença par user de représailles vis-à-vis d'Aristophane, il le mit à son
tour sur la scène durant les fêtes de Bacchus, pendant que les spectateurs étaient
encore échauffés par la licence des orgies. De là, il se rendit vers ses propres juges, il
parla à son tour contre ceux qui avaient parlé contre lui, il entra dans de très longs
détails ; son but principal dans sa défense fut de se concilier le tribunal, de gagner sa
bienveillance dès le début de son discours, de le convaincre par l'exposition des faits,
de faire éclater l'évidence à ses yeux, par la force et la vérité de ses preuves, par la
justesse des rapprochements, par le témoignage de ses concitoyens les plus
recommandables, et les plus dignes de faire foi devant des juges athéniens. Dans sa
péroraison, il eut recours aux supplications, aux prières, il excita la pitié, il laissa
échapper de temps en temps quelques larmes ; à tout cela, il finit par ajouter
l'apparition de Xantippe, le tableau de ses lamentations, celui des pleurs et des cris de
ses enfants ; et par le concours de tous ces moyens, ses juges, fléchis, attendris,
touchés de commisération, se décidèrent en sa faveur, et le renvoyèrent absous ».
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