HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Marc-Aurèle, Pensées, livre VI

Pensées 20-29

  Pensées 20-29

[6,20] 20. Ἐν τοῖς γυμνασίοις καὶ ὄνυξι κατέδρυψέ τις καὶ τῇ κεφαλῇ ἐῤῥαγεὶς πληγὴν ἐποίησεν, ἀλλ οὔτε ἐπισημαινόμεθα οὔτε προσκόπτομεν οὔτε ὑφορώμεθα ὕστερον ὡς ἐπίβουλον· καίτοι φυλαττόμεθα, οὐ μέντοι ὡς ἐχθρὸν οὐδὲ μεθ ὑποψίας, ἀλλ ἐκκλίσεως εὐμενοῦς. Τοιοῦτόν τι γινέσθω καὶ ἐν τοῖς λοιποῖς μέρεσι τοῦ βίου· πολλὰ παρενθυμώμεθα τῶν οἷον προσγυμναζομένων. Ἔξεστι γάρ, ὡς ἔφην, ἐκκλίνειν καὶ μήτε ὑποπτεύειν μήτε ἀπέχθεσθαι. 21. Εἴ τίς με ἐλέγξαι καὶ παραστῆσαί μοι, ὅτι οὐκ ὀρθῶς ὑπολαμβάνω πράσσω, δύναται, χαίρων μεταθήσομαι· ζητῶ γὰρ τὴν ἀλήθειαν, ὑφ ἧς οὐδεὶς πώποτε ἐβλάβη, βλάπτεται δὲ ἐπιμένων ἐπὶ τῆς ἑαυτοῦ ἀπάτης καὶ ἀγνοίας. 22. Ἐγὼ τὸ ἐμαυτοῦ καθῆκον ποιῶ, τὰ ἄλλα με οὐ περισπᾷ· ἤτοι γὰρ ἄψυχα ἄλογα πεπλανημένα καὶ τὴν ὁδὸν ἀγνοοῦντα. 23. Τοῖς μὲν ἀλόγοις ζῴοις καὶ καθόλου πράγμασι καὶ ὑποκειμένοις, ὡς λόγον ἔχων λόγον μὴ ἔχουσι, χρῶ μεγαλοφρόνως καὶ ἐλευθέρως· τοῖς δὲ ἀνθρώποις, ὡς λόγον ἔχουσι, χρῶ κοινωνικῶς· ἐφ ἅπασι δὲ θεοὺς ἐπικαλοῦ. Καὶ μὴ διαφέρου πρὸς τὸ πόσῳ χρόνῳ ταῦτα πράξεις· ἀρκοῦσι γὰρ καὶ τρεῖς ὧραι τοιαῦται. 24. Ἀλέξανδρος Μακεδὼν καὶ ὀρεωκόμος αὐτοῦ ἀποθανόντες εἰς ταὐτὸ κατέστησαν· ἤτοι γὰρἀνελήφθησαν εἰς τοὺς αὐτοὺς τοῦ κόσμου σπερματικοὺς λόγους διεσκεδάσθησαν ὁμοίως εἰς τὰς ἀτόμους. 25. Ἐνθυμήθητι πόσα κατὰ τὸν αὐτὸν ἀκαριαῖον χρόνον ἐν ἑκάστῳ ἡμῶν ἅμα γίνεται σωματικὰ ὁμοῦ καὶ ψυχικά, καὶ οὕτως οὐ θαυμάσεις εἰ πολὺ πλείω, μᾶλλον δὲ πάντα τὰ γινόμενα ἐν τῷ ἑνί τε καὶ σύμπαντι, δὴ κόσμον ὀνομάζομεν, ἅμα ἐνυφίσταται. 26. Ἐάν τίς σοι προβάλῃ πῶς γράφεται τὸ Ἀντωνίνου ὄνομα, μήτι κατεντεινόμενος προοίσῃ ἕκαστον τῶν στοιχείων; Τί οὖν ἐὰν ὀργίζωνται, μήτι ἀντοργιῇ; Μήτι οὐκ ἐξαριθμήσῃ πρᾴως προϊὼν ἕκαστον τῶν γραμμάτων; Οὕτως οὖν καὶ ἐνθάδε μέμνησο ὅτι πᾶν καθῆκον ἐξ ἀριθμῶν τινῶν συμπληροῦται. Τούτους δεῖ τηροῦντα καὶ μὴ θορυβούμενον μηδὲ τοῖς δυσχεραίνουσιν ἀντιδυσχεραίνοντα περαίνειν ὁδῷ τὸ προκείμενον. 27. Πῶς ὠμόν ἐστι μὴ ἐπιτρέπειν τοῖς ἀνθρώποις ὁρμᾶν ἐπὶ τὰ φαινόμενα αὐτοῖς οἰκεῖα καὶ συμφέροντα. Καίτοι τρόπον τινὰ οὐ συγχωρεῖς αὐτοῖς τοῦτο ποιεῖν, ὅταν ἀγανακτῇς, ὅτι ἁμαρτάνουσι· φέρονται γὰρ πάντως ὡς ἐπὶ οἰκεῖα καὶ συμφέροντα αὐτοῖς. “Ἀλλ οὐκ ἔχει οὕτως.” Οὐκοῦν δίδασκε καὶ δείκνυε μὴ ἀγανακτῶν. 28. Θάνατος ἀνάπαυλα αἰσθητικῆς ἀντιτυπίας καὶ ὁρμητικῆς νευροσπαστίας καὶ διανοητικῆς διεξόδου καὶ τῆς πρὸς τὴν σάρκα λειτουργίας. 29. Αἰσχρόν ἐστιν, ἐν βίῳ τὸ σῶμά σοι μὴ ἀπαυδᾷ, ἐν τούτῳ τὴν ψυχὴν προαπαυδᾶν. [6,20] XX. Quelqu’un, dans les exercices du gymnase, nous a égratignés avec ses ongles, ou nous a fait une contusion en nous frappant d’un coup de tête ; nous ne paraissons même pas nous en apercevoir ; surtout nous n’en sommes point offensés, et nous ne le prendrons pas plus tard pour un homme que nous devions soupçonner de nous tendre des piéges. Toutefois nous nous en méfions ; mais ce n’est pas comme d’un ennemi ; ce n’est pas une méfiance hostile ; et si nous l’évitons, c’est avec bienveillance. Sachons en faire autant dans tous les autres détails de la vie. Il y a bien des choses que nous pouvons garder pour nous comme si nous nous exercions encore au gymnase ; car il est toujours loisible, ainsi que je viens de le dire, d’éviter les gens sans avoir contre eux ni soupçon ni haine. XXI. Si quelqu’un veut bien me convaincre et s’il m’arrête en me prouvant que ma pensée n’est pas juste, ou que mon action n’est pas bonne, je suis à la joie de mon cœur de me redresser ; car je ne cherche que la vérité, qui n’a jamais nui à personne, tandis qu’on se fait le plus grand tort en persévérant dans son erreur et dans son ignorance. XXII. En ce qui me concerne, j’accomplis le devoir qui m’est imposé ; et quant au reste des êtres, ils ne me préoccupent point ; car, ou bien ce sont des choses sans vie et des êtres qui ne sont pas doués de raison ; ou bien, ce sont des hommes qui s’égarent et méconnaissent la voie qu’il faut suivre. XXIII. A l’égard des êtres qui n’ont pas la raison en partage, et d’une manière générale à l’égard des choses et des simples objets, sache en user comme un être doué de raison doit le faire à l’égard des êtres qui n’ont pas de raison, c’est-à-dire, avec une certaine hauteur d’âme et avec liberté Dans tes rapports avec les hommes que la raison éclaire, conduis-toi comme faisant partie avec eux d’une société commune. Dans tous les cas, appelles-en aux Dieux en les invoquant, et ne t’inquiète guère de savoir combien de temps tu aurais à te conduire de la sorte ; car trois heures suffisent, employées de cette façon. XXIV. Alexandre de Macédoine et le muletier qui le servait, une fois morts, en sont au même point. Tous deux également ont été, ou repris dans les mêmes raisons séminales de l’univers, ou également dissous dans les atomes. XXV. Essaie de calculer le nombre énorme de choses, corporelles ou morales, qui se passent en chacun de nous, pendant un seul et même instant imperceptible ; alors tu ne seras plus surpris qu’un nombre encore beaucoup plus grand de choses, ou pour mieux dire que tout ce qui se produit dans cette unité et cette totalité qui se nomme le monde, puisse y tenir et y exister simultanément. XXVI. Si l’on te demandait comment s’écrit le mot d’Antonin, aurais-tu donc grands efforts à faire pour en épeler toutes les lettres une à une ? Et si par hasard quelqu’un se mettait en colère contre toi en te les entendant prononcer, est-ce que tu croirais devoir montrer colère pour colère ? Ne pourrais-tu pas continuer doucement à énumérer les lettres l’une après l’autre ? De même aussi dans la vie, il faut bien te dire que tout ce que nous avons à faire s’accomplit également, au fur et à mesure, par nombre de choses. Ce sont donc ces proportions nécessaires qu’il te faut observer avec soin ; et sans te troubler, sans rendre à qui que ce soit reproches pour reproches, tu dois marcher tout droit au but que tu t’es proposé. XXVII. Quelle cruauté de ne pas laisser les hommes prendre les moyens qu’ils jugent les plus convenables pour servir leur intérêt, tel qu’ils l’entendent ! Eh bien ! c’est là pourtant ce que tu les empêches de faire en quelque façon, quand tu t’emportes contre eux pour les fautes qu’ils commettent ; car toujours ils suivent absolument leurs propres habitudes, ou ce qui leur semble leur intérêt. — « Mais, dis-tu, ils se trompent du tout au tout ! » — Soit ; mais redresse-les, et montre-leur qu’ils se trompent, sans pour cela te courroucer contre eux. XXVIII. La mort, c’est le repos pour notre sensibilité, qui ne peut plus imprimer en nous les objets du dehors ; pour nos désirs, qui ne peuvent plus épuiser nos nerfs ; pour notre intelligence, qui sort d’esclavage et qui se soustrait à la servitude de la chair. XXIX. C’est une honte que, dans cette existence où ton corps ne t’a point manqué et ne t’a point refusé son service, ton âme ait été la première à te manquer.


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Dernière mise à jour : 25/02/2010