[19,0] XIX. ΥΠΕΡ ΤΩΝ ΑΡΙΣΤΟΦΑΝΟΥΣ ΧΡΗΜΑΤΩΝ, ΠΡΟΣ ΤΟ ΔΗΜΟΣΙΟΝ.
(1) Πολλήν μοι ἀπορίαν παρέχει ὁ ἀγὼν οὑτοσί, ὦ ἄνδρες δικασταί, ὅταν ἐνθυμηθῶ ὅτι, ἐὰν ἐγὼ μὲν μὴ νῦν εὖ εἴπω, οὐ μόνον ἐγὼ ἀλλὰ καὶ ὁ πατὴρ δόξει ἄδικος εἶναι, καὶ τῶν ὄντων ἁπάντων στερήσομαι. Ἀνάγκη οὖν, εἰ καὶ μὴ δεινὸς πρὸς ταῦτα πέφυκα, βοηθεῖν τῷ πατρὶ καὶ ἐμαυτῷ οὕτως ὅπως ἂν δύνωμαι. (2) Τὴν μὲν οὖν παρασκευὴν καὶ <τὴν> προθυμίαν τῶν ἐχθρῶν ὁρᾶτε, καὶ οὐδὲν δεῖ περὶ τούτων λέγειν: τὴν δ᾽ ἐμὴν ἀπειρίαν πάντες ἴσασιν, ὅσοι ἐμὲ γιγνώσκουσιν. Αἰτήσομαι οὖν ὑμᾶς δίκαια καὶ ῥᾴδια χαρίσασθαι, ἄνευ ὀργῆς καὶ ἡμῶν ἀκοῦσαι, (3) ὥσπερ <καὶ> τῶν κατηγόρων. Ἀνάγκη γὰρ τὸν ἀπολογούμενον, κἂν ἐξ ἴσου ἀκροᾶσθε, ἔλαττον ἔχειν. Οἱ μὲν γὰρ ἐκ πολλοῦ χρόνου ἐπιβουλεύοντες, αὐτοὶ ἄνευ κινδύνων ὄντες, τὴν κατηγορίαν ἐποιήσαντο, ἡμεῖς δὲ ἀγωνιζόμεθα μετὰ δέους καὶ διαβολῆς καὶ κινδύνου <τοῦ> μεγίστου. Εἰκὸς οὖν ὑμᾶς εὔνοιαν πλείω ἔχειν τοῖς ἀπολογουμένοις. (4) Οἶμαι γὰρ πάντας ὑμᾶς εἰδέναι ὅτι πολλοὶ ἤδη πολλὰ καὶ δεινὰ κατηγορήσαντες παραχρῆμα ἐξηλέγχθησαν ψευδόμενοι οὕτω φανερῶς, ὥστε ὑπὸ πάντων τῶν παραγενομένων μισηθέντες ἀπελθεῖν· οἱ δ᾽ αὖ μαρτυρήσαντες τὰ ψευδῆ καὶ ἀδίκως ἀπολέσαντες ἀνθρώπους ἑάλωσαν, (5) ἡνίκα οὐδὲν ἦν πλέον τοῖς πεπονθόσιν. Ὅτ᾽ οὖν τοιαῦτα πολλὰ γεγένηται, ὡς ἐγὼ ἀκούω, εἰκὸς ὑμᾶς, ὦ ἄνδρες δικασταί, μήπω τοὺς τῶν κατηγόρων λόγους ἡγεῖσθαι πιστούς, πρὶν ἂν καὶ ἡμεῖς εἴπωμεν. Ἀκούω γὰρ ἔγωγε, καὶ ὑμῶν δὲ τοὺς πολλοὺς οἶμαι εἰδέναι, ὅτι πάντων δεινότατόν ἐστι διαβολή. (6) Μάλιστα δὲ τοῦτο ἔχοι ἄν τις ἰδεῖν, ὅταν πολλοὶ ἐπὶ τῇ αὐτῇ αἰτίᾳ εἰς ἀγῶνα καταστῶσιν. Ὡς γὰρ ἐπὶ τὸ πολὺ οἱ τελευταῖοι κρινόμενοι σῴζονται· πεπαυμένοι γὰρ τῆς ὀργῆς αὐτῶν ἀκροᾶσθε, καὶ τοὺς ἐλέγχους ἤδη ἐθέλοντες ἀποδέχεσθε.
(7) Ἐνθυμεῖσθε οὖν ὅτι Νικόφημος καὶ Ἀριστοφάνης ἄκριτοι ἀπέθανον, πρὶν παραγενέσθαι τινὰ αὐτοῖς ἐλεγχομένοις ὡς ἠδίκουν. Οὐδεὶς γὰρ οὐδ᾽ εἶδεν ἐκείνους μετὰ τὴν σύλληψιν· οὐδὲ γὰρ θάψαι τὰ σώματ᾽ αὐτῶν ἀπέδοσαν, ἀλλ᾽ οὕτω δεινὴ <ἡ> συμφορὰ γεγένηται ὥστε πρὸς τοῖς ἄλλοις καὶ τούτου ἐστέρηνται. (8) Ἀλλὰ ταῦτα μὲν ἐάσω· οὐδὲν γὰρ ἂν περαίνοιμι· πολὺ δὲ ἀθλιώτεροι δοκοῦσί μοι οἱ παῖδες οἱ Ἀριστοφάνους· οὐδένα γὰρ οὔτ᾽ ἰδίᾳ οὔτε δημοσίᾳ ἠδικηκότες οὐ μόνον τὰ πατρῷα ἀπολωλέκασι παρὰ τοὺς νόμους τοὺς ὑμετέρους, ἀλλὰ καὶ ἣ ὑπόλοιπος ἐλπὶς ἦν, ἀπὸ <τῶν> τοῦ πάππου ἐκτραφῆναι, ἐν οὕτω δεινῶ καθέστηκεν. Ἔτι δ᾽ ἡμεῖς ἐστερημένοι μὲν κηδεστῶν, (9) ἐστερημένοι δὲ τῆς προικός, παιδάρια δὲ τρία ἠναγκασμένοι τρέφειν, προσέτι συκοφαντούμεθα καὶ κινδυνεύομεν περὶ ὧν οἱ πρόγονοι ἡμῖν κατέλιπον κτησάμενοι ἐκ τοῦ δικαίου. Καίτοι, ὦ ἄνδρες δικασταί, ὁ ἐμὸς πατὴρ ἐν ἅπαντι τῷ βίῳ πλείω εἰς τὴν πόλιν ἀνήλωσεν ἢ εἰς αὑτὸν καὶ τοὺς οἰκείους, διπλάσια δὲ ἢ νῦν ἔστιν ἡμῖν, ὡς ἐγὼ λογιζομένῳ αὐτῷ πολλάκις παρεγενόμην.
| [19,0] XIX. PLAIDOYER SUR LES BIENS D'ARISTOPHANE DEVANT LE TRESOR.
(1) L'affaire que j'ai à plaider devant vous, ô Athéniens, me cause les plus vives alarmes, quand je viens à penser que, si je la défends mal, nous paraîtrons coupables mon père et moi, et que je me verrai dépouillé de toute ma fortune. Ainsi, quoique la nature ne m'ait accordé aucun talent pour la parole, je me trouve néanmoins forcé de défendre la mémoire de mon père, et de me défendre moi-même le mieux qu'il me sera possible. (2) Vous voyez les intrigues et l'animosité de mes ennemis, il serait inutile de vous entretenir de leurs manœuvres : tous ceux qui me connaissent savent combien peu je suis éloquent. Je vais vous demander une grâce qui est aussi juste que facile à obtenir ; c'est de vouloir m'écouter sans prévention (3) comme vous avez entendu nos accusateurs. Quand vous écouteriez l'accusé avec la même bienveillance, il n'aura que trop de désavantage encore. Hors de tout péril et sans avoir rien à craindre, nos adversaires ont formé et disposé de loin le plan de leur accusation. Pour moi, ce n'est qu'avec une extrême inquiétude que je parais ici, attaqué par la calomnie, et courant les plus grands risques. Vous devez donc être d'autant plus portés à écouter ceux qui ont à se justifier devant vous, que plus d'une fois, vous le savez mieux que moi-même, on a vu les auteurs des accusations les plus graves, convaincus sur-le-champ d'imposture, et avec une telle évidence, que leurs procédés odieux étant dévoilés, ils n'ont plus été regardés que comme de vils calomniateurs. Vous n'ignorez pas non plus que des témoins qui sur de fausses dépositions avaient fait périr des accusés innocents, (5) ont été condamnés trop tard pour ces malheureux. Ainsi, puisqu'il est déjà arrivé, dit-on, nombre d'événements pareils, il est de votre équité de ne pas ajouter foi aux discours de nos accusateurs, avant que d'avoir entendu ma réponse. On m'a répété souvent, et plusieurs de vous doivent le savoir par expérience, qu'il n'est rien de si redoutable au monde que la calomnie. (6) Mais ce qu'il y a de plus effrayant, c'est lorsque plusieurs personnes se trouvent enveloppées dans la même accusation. Pour l'ordinaire il n'y a que les derniers jugés qui échappent : ce sont les seuls que vous écoutiez sans prévention, et dont vous vouliez recevoir les défenses.
(7) Il faut que vous sachiez avant tout, Athéniens, que Nicophème et Aristophane ont été mis à mort sans jugement préalable, avant qu'on pût même les défendre et travailler à leur justification. On ne les revit plus dès qu'ils furent pris, on n'a pas même rendu leurs corps pour la sépulture ; et par la rigueur d'un sort cruel, cet avantage même, sans parler du reste, leur a été refusé. (8) Mais laissons ces plaintes qui d'ailleurs seraient superflues. Les enfants d'Aristophane me semblent bien plus dignes de compassion. Dépouillés contre nos lois de leur patrimoine, sans avoir causé aucun préjudice ni à l'état ni aux particuliers, la dernière ressource qu'ils avaient, d'être élevés par leur aïeul, est réduite où nous la voyons. Quant à moi, privé de mes parents, (9) et frustré de la dot de ma femme, je me vois encore chargé de nourrir trois enfants en bas âge ; je me vois poursuivi juridiquement, courant risque de perdre les biens qui m'ont été laissés par mes ancêtres, et dont je suis légitime possesseur. Cependant, durant tout le cours de sa vie, mon père a fait plus de dépenses pour l'état que pour lui-même et pour ses proches. Sa fortune, d'après le détail que je lui en ai souvent entendu faire, était le double de ce qu'elle est actuellement.
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