HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Lucien, Demonax

Chapitre 1-4

  Chapitre 1-4

[0] ΔΗΜΩΝΑΚΤΟΣ ΒΙΟΣ. [0] DÉMONAX.
[1] Ἔμελλεν ἄρα μηδὲ καθ´ ἡμᾶς βίος τὸ παντάπασιν ἄμοιρος ἔσεσθαι ἀνδρῶν λόγου καὶ μνήμης ἀξίων, ἀλλὰ καὶ σώματος ἀρετὴν ὑπερφυᾶ καὶ γνώμην ἄκρως φιλόσοφον ἐκφαίνειν· λέγω δὲ εἴς τε τὸν Βοιώτιον Σώστρατον ἀναφέρων, ὃν Ἡρακλέα οἱ Ἕλληνες ἐκάλουν καὶ ᾤοντο εἶναι, καὶ μάλιστα εἰς Δημώνακτα τὸν φιλόσοφον, οὓς καὶ εἶδον αὐτὸς καὶ ἰδὼν ἐθαύμασα, θατέρῳ δὲ τῷ Δημώνακτι καὶ ἐπὶ μήκιστον συνεγενόμην. περὶ μὲν οὖν Σωστράτου ἐν ἄλλῳ βιβλίῳ γέγραπταί μοι καὶ δεδήλωται μέγεθός τε αὐτοῦ καὶ ἰσχύος ὑπερβολὴ καὶ ὕπαιθρος ἐν τῷ Παρνασσῷ δίαιτα καὶ ἐπίπονος εὐνὴ καὶ τροφαὶ ὄρειοι καὶ ἔργα οὐκ ἀπῳδὰ τοῦ ὀνόματος ὅσα λῃστὰς αἴρων ἔπραξεν ὁδοποιῶν τὰ ἄβατα γεφυρῶν τὰ δύσπορα. [1] Notre siècle devait donc avoir sa part d'hommes dignes de réputation et de mémoire, en produisant un héros d'une force de corps surnaturelle, et un philosophe d'une sagesse accomplie. Je parle de Sostrate le Béotien, que les Grecs appelaient Hercule, persuadés qu’il était ce demi-dieu lui-même, et du philosophe Démonax. Je les ai vus, je les ai admirés tous les deux, et j'ai même vécu assez longtemps avec le second. A l'égard de Sostrate, j'ai parlé de lui dans un autre ouvrage : j'ai dit quelle était sa taille, sa forme prodigieuse, comment il demeurait en plein air sur le Parnasse, dormant sur le gazon, vivant d'une vie sauvage ; j'ai raconté ses actions, conformes au nom qu'il portait, comment il a détruit nombre de scélérats, ouvert des chemins à travers des lieux impraticables, établi des ponts sur des passages dangereux.
[2] περὶ δὲ Δημώνακτος ἤδη δίκαιον λέγειν ἀμφοῖν ἕνεκα, ὡς ἐκεῖνος τε διὰ μνήμης εἴη τοῖς ἀρίστοις τό γε κατ´ ἐμὲ καὶ οἱ γενναιότατοι τῶν νέων καὶ πρὸς φιλοσοφίαν ὁρμῶντες ἔχοιεν μὴ πρὸς τὰ ἀρχαῖα μόνα τῶν παραδειγμάτων σφᾶς αὐτοὺς ῥυθμίζειν, ἀλλὰ κἀκ τοῦ ἡμετέρου βίου κανόνα προτίθεσαι καὶ ζηλοῦν ἐκεῖνον ἄριστον ὧν οἶδα ἐγὼ φιλοσόφων γενόμενον. [2] Il est juste de parler aussi de Démonax, et cela pour deux motifs : d'abord pour le faire vivre, autant qu'il est en mon pouvoir, dans la mémoire des hommes vertueux ; ensuite pour que les jeunes gens bien nés et portés vers la philosophie ne soient plus réduits à ne trouver des modèles que dans l'antiquité, mais qu'ayant sous les yeux un exemple tiré de notre époque, ils puissent marcher sur les traces du plus parfait des philosophes que j'aie connus.
[3] Ἦν δὲ τὸ μὲν γένος Κύπριος, οὐ τῶν ἀφανῶν ὅσα εἰς ἀξίωμα πολιτικὸν καὶ κτῆσιν. οὐ μὴν ἀλλὰ καὶ πάντων τούτων ὑπεράνω γενόμενος καὶ ἀξιώσας ἑαυτὸν τῶν καλλίστων πρὸς φιλοσοφίαν ὥρμησεν οὐκ Ἀγαθοβούλου μὰ Δί´ οὐδὲ Δημητρίου πρὸ αὐτοῦ οὐδὲ Ἐπικτήτου ἐπεγειράντων, ἀλλὰ πᾶσι μὲν συνεγένετο τούτοις καὶ ἔτι Τιμοκράτει τῷ Ἡρακλεώτῃ σοφῷ ἀνδρὶ φωνήν τε καὶ γνώμην μάλιστα κεκοσμημένῳ· ἀλλ´ γε Δημῶναξ οὐχ ὑπὸ τούτων τινός, ὡς ἔφην, παρακληθείς, ἀλλ´ ὑπ´ οἰκείας πρὸς τὰ καλὰ ὁρμῆς καὶ ἐμφύτου πρὸς φιλοσοφίαν ἔρωτος ἐκ παίδων εὐθὺς κεκινημένος ὑπερεῖδεν μὲν τῶν ἀνθρωπείων ἀγαθῶν ἁπάντων, ὅλον δὲ παραδοὺς ἑαυτὸν ἐλευθερίᾳ καὶ παρρησίᾳ διετέλεσεν αὐτός τε ὀρθῷ καὶ ὑγιεῖ καὶ ἀνεπιλήπτῳ βίῳ χρώμενος καὶ τοῖς ὁρῶσι καὶ ἀκούουσι παράδειγμα παρέχων τὴν ἑαυτοῦ γνώμην καὶ τὴν ἐν τῷ φιλοσοφεῖν ἀλήθειαν. [3] Démonax était né dans l'île de Chypre, d'une famille distinguée par le rang qu'elle occupait et par ses richesses. Supérieur toutefois à ces avantages, et se sentant entraîné vers les hautes régions du bien, il s'appliqua à la philosophie, sans y être poussé par Agathobule, par son devancier Démétrius ou par Épictète. Il vivait dans leur commerce, et suivait de plus les leçons de Timocrate d'Héraclée, homme éclairé, plein de savoir et d'éloquence. Mais, ainsi que je l'ai dit, ce ne furent pas ces maîtres qui l'appelèrent à l'étude de la sagesse. Il y fut conduit, dès son enfance, par un penchant naturel vers la vertu et par un amour inné de la philosophie ; et, méprisant tous les biens de ce monde, il se voua tout entier à la liberté et à la franchise, menant une vie droite, pure, irréprochable, offrant en exemple à ceux qui le voyaient ou qui l'entendaient, sa prudence et sa sincérité philosophique.
[4] οὐ μὴν ἀνίπτοις γε ποσίν, τὸ τοῦ λόγου, πρὸς ταῦτα ᾖξεν, ἀλλὰ καὶ ποιηταῖς σύντροφος ἐγένετο καὶ τῶν πλείστων ἐμέμνητο καὶ λέγειν ἤσκητο καὶ τὰς ἐν φιλοσοφίᾳ προαιρέσεις οὐκ ἐπ´ ὀλίγον οὐδὲ κατὰ τὴν παροιμίαν ἄκρῳ τῷ δακτύλῳ ἁψάμενος ἠπίστατο, καὶ τὸ σῶμα δὲ ἐγεγύμναστο καὶ πρὸς καρτερίαν διεπεπόνητο, καὶ τὸ ὅλον ἐμεμελήκει αὐτῷ μηδενὸς ἄλλου προσδεᾶ εἶναι· ὥστε ἐπεὶ καὶ ἔμαθεν οὐκέτι ἑαυτῷ διαρκῶν, ἑκὼν ἀπῆλθε τοῦ βίου πολὺν ὑπὲρ αὑτοῦ λόγον τοῖς ἀρίστοις τῶν Ἑλλήνων καταλιπών. [4] Ce ne fut pas, comme on dit, sans s'être lavé les pieds, qu'il entreprit de vivre de la sorte. Nourri des meilleurs poètes, qu'il savait presque tous par cœur, il avait la parole exercée, connaissait toutes les sectes de la philosophie, non point à la surface, et, selon le proverbe, pour les avoir touchées du bout des doigts, mais il les avait approfondies, s'était fortifié le corps par le gymnase, et l'avait endurci par de rudes travaux ; en un mot, il s'était mis en état de n'avoir besoin de personne. Aussi, dès qu'il comprit qu'il ne pouvait plus se suffire à lui-même, il quitta volontairement la vie, laissant aux meilleurs des Grecs un long souvenu de ses vertus.


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Dernière mise à jour : 7/05/2009