Texte grec :
[35] Τὰ δὲ ἐπὶ τῇ νίκῃ γενόμενα καὶ ὅπως ξίφους μὲν
οὐδὲν ἐδέησεν ἔτι, οὐδ´ εἴ τις ἀδικημάτων μειζόνων εἶχεν
ὑποψίαν, οὐδὲ εἴ τῳ πρὸς τὸν τύραννον οἰκειοτέρα γέγονε
φιλία, οὐδὲ μὴν εἴ τις ἐκείνῳ χαριζόμενος φέρειν τε ἠξίου
κηρύκιον καὶ ἐλοιδορεῖτο βασιλεῖ, τῆς προπετείας ἀπέτισε
δίκην, ὅ τι μὴ τἆλλα μοχθηρὸς ἦν, ἐννοήσατε δὴ πρὸς
φιλίου Διός. Ποταπὸν δὲ χρῆμα λοιδορία; ὡς θυμοδακὲς
ἀληθῶς καὶ ἀμύττον ψυχὴν μᾶλλον ἢ σίδηρος χρῶτα;
οὐκοῦν καὶ τὸν Ὀδυσσέα παρώξυνεν εἰς δύναμιν ἀμύνασθαι
λόγῳ τε καὶ ἔργῳ (διηνέχθη γοῦν ὑπὲρ τούτου πρὸς
τὸν ξενοδόκον αὐτὸς ὢν ἀλήτης καὶ ξένος, καὶ ταῦτα
εἰδὼς ὅτι Ἄφρων—καὶ οὐτιδανὸς πέλει ἀνήρ,
Ὅστις ξεινοδόκῳ ἔριδα προφέρῃσι βαρεῖαν)
καὶ Ἀλέξανδρον τὸν Φιλίππου καὶ Ἀχιλλέα τὸν τῆς
Θέτιδος καὶ ἄλλους δέ τινας οὐ φαύλους οὐδὲ ἀγεννεῖς
ἀνθρώπους. Μόνῳ δὲ ὑπῆρχεν οἶμαι Σωκράτει καὶ σπανίοις
τισὶν ἐκείνου ζηλωταῖς, εὐδαίμοσιν ἀληθῶς καὶ μακαρίοις
γενομένοις, τὸν ἔσχατον ἀποδύσασθαι χιτῶνα τῆς φιλοτιμίας·
φιλότιμον γὰρ δεινῶς τὸ πάθος, καὶ ἔοικεν ἐμφύεσθαι
διὰ τοῦτο μᾶλλον ταῖς γενναίαις ψυχαῖς· ἄχθονται
γὰρ ὡς ἐναντιωτάτῳ σφίσι λοιδορίᾳ, καὶ τοὺς ἀπορρίπτοντας
ἐς αὐτοὺς τοιαῦτα ῥήματα μισοῦσι μᾶλλον ἢ τοὺς
ἐπάγοντας τὸν σίδηρον καὶ ἐπιβουλεύοντας φόνον, διαφόρους
τε αὑτοῖς ὑπολαμβάνουσι φύσει καὶ οὐ νόμῳ, εἴ γε
οἱ μὲν ἐπαίνου καὶ τιμῆς ἐρῶσιν, οἱ δὲ οὐ τούτων μόνον
ἀφαιροῦνται, ἀλλὰ καὶ ἐπ´ αὐτοῖς μηχανῶνται βλασφημίας
ψευδεῖς. Τούτου καὶ Ἡρακλέα φασὶ καὶ ἄλλους δέ τινας
ἀκράτορας τοῦ πάθους γενέσθαι. Ἐγὼ δὲ οὔτε περὶ ἐκείνων
τῷ λόγῳ πείθομαι, καὶ βασιλέα τεθέαμαι σφόδρα ἐγκρατῶς
τὴν λοιδορίαν τρεψάμενον, οὔτι φαυλότερον ἔργον, ὡς ἐγὼ
κρίνω, τοῦ Τροίαν ἑλεῖν καὶ φάλαγγα γενναίαν τρέψασθαι.
Εἰ δὲ ἀπιστεῖ τις καὶ οὐ μέγα οἴεται οὐδὲ ἄξιον ἐπαίνων
τοσούτων, ἐς αὑτὸν ἀφορῶν, ὅταν ἔν τινι τοιαύτῃ ξυμφορᾷ
γένηται, κρινέτω, καὶ αὐτῷ οὐ σφόδρα ληρεῖν δόξομεν, ὡς
ἐγὼ πείθομαι.
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Traduction française :
[35] Quant aux suites de sa victoire, et comment il ne voulut
point tirer l'épée, ni contre les coupables qu'il avait le droit
de soupçonner, ni contre les amis intimes du tyran, ni contre
celui qui, sous prétexte de venir, le caducée en main, concilier
à l'usurpateur la grâce de l'empereur, s'emporta contre
lui en outrages, sans être puni de sa témérité, parce que ce
n'était point d'ailleurs un méchant homme, que ces faits vous
reviennent à la pensée, au nom de Jupiter, protecteur de
l'amitié ! Et cependant quelle chose que l'outrage! Comme il
mord le coeur ! Comme il déchire I'âme plus que le fer ne
déchire la peau! C'est un outrage qui poussa Ulysse à s'armer,
pour sa vengeance, soit de la parole, soit de l'action. Il s'emporta
contre son hôte, bien qu'errant et étranger, et cela, sachant bien
"Qu'il est d'un malheureux, privé de la raisin,
D'insulter à son hôte, en sa propre maison".
Citons encore Alexandre, fils de Philippe, Achille, fils de
Thétis, et bien d'autres personnages glorieux et d'illustre naissance.
Socrate seul, j'en conviens, et quelques-uns de ses disciples,
gens heureux et fortunés entre tous, se dépouillèrent du
dernier vêtement de l'amour-propre. Or, l'amour-propre est
une passion violente, et qui, pour cela même, est naturelle aux
âmes généreuses. Elles s'irritent contre l'outrage, comme antipathique
à leur nature, et haïssent plus ceux qui déversent
sur eux de semblables paroles, que ceux qui dirigent le fer
contre eux, ou qui les menacent d'un meurtre : ce sont des
ennemis plutôt d'après la nature que d'après la loi ; car ils
aiment la louange et les honneurs, et non seulement on veut
les en priver, mais on invente contre eux des calomnies et des
mensonges. Hercule, dit-on, et d'autres héros ne purent
jamais dominer cette passion. Pour ma part, sans croire à tout
ce qu'on débite sur leur compte, je vois notre empereur se
dominer souverainement en face de l'injure, et je ne crois point
que ce soit un acte moins glorieux que d'avoir pris Troie ou
mis en fuite une phalange valeureuse. Si l'on en doute, si l'on
regarde ce fait connue de peu d'importance et au-dessous
d'aussi grands éloges, que l'on considère, en y jetant les veux,
dans quelle situation était l'empereur, et que l'on juge : on
verra, je crois, que nous n'avons pas tout à fait perdu l'esprit.
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