[11,500] πέφνον λαὸν ἄριστον, ἀμύνων Ἀργείοισιν·	
 εἰ τοιόσδ᾽ ἔλθοιμι μίνυνθά περ ἐς πατέρος δῶ·
 τῷ κέ τεῳ στύξαιμι μένος καὶ χεῖρας ἀάπτους,
 οἳ κεῖνον βιόωνται ἐέργουσίν τ᾽ ἀπὸ τιμῆς.᾽
 "ὣς ἔφατ᾽, αὐτὰρ ἐγώ μιν ἀμειβόμενος προσέειπον·
 505 ᾽ἦ τοι μὲν Πηλῆος ἀμύμονος οὔ τι πέπυσμαι,	
 αὐτάρ τοι παιδός γε Νεοπτολέμοιο φίλοιο
 πᾶσαν ἀληθείην μυθήσομαι, ὥς με κελεύεις·
 αὐτὸς γάρ μιν ἐγὼ κοίλης ἐπὶ νηὸς ἐίσης
 ἤγαγον ἐκ Σκύρου μετ᾽ ἐυκνήμιδας Ἀχαιούς.
 510 ἦ τοι ὅτ᾽ ἀμφὶ πόλιν Τροίην φραζοίμεθα βουλάς,	
 αἰεὶ πρῶτος ἔβαζε καὶ οὐχ ἡμάρτανε μύθων·
 Νέστωρ ἀντίθεος καὶ ἐγὼ νικάσκομεν οἴω.
 αὐτὰρ ὅτ᾽ ἐν πεδίῳ Τρώων μαρναίμεθα χαλκῷ,
 οὔ ποτ᾽ ἐνὶ πληθυῖ μένεν ἀνδρῶν οὐδ᾽ ἐν ὁμίλῳ,
 515 ἀλλὰ πολὺ προθέεσκε τὸ ὃν μένος οὐδενὶ εἴκων,	
 πολλοὺς δ᾽ ἄνδρας ἔπεφνεν ἐν αἰνῇ δηιοτῆτι.
 πάντας δ᾽ οὐκ ἂν ἐγὼ μυθήσομαι οὐδ᾽ ὀνομήνω,
 ὅσσον λαὸν ἔπεφνεν ἀμύνων Ἀργείοισιν,
 ἀλλ᾽ οἷον τὸν Τηλεφίδην κατενήρατο χαλκῷ,
 520 ἥρω᾽ Εὐρύπυλον, πολλοὶ δ᾽ ἀμφ᾽ αὐτὸν ἑταῖροι	
 Κήτειοι κτείνοντο γυναίων εἵνεκα δώρων.
 κεῖνον δὴ κάλλιστον ἴδον μετὰ Μέμνονα δῖον.
 αὐτὰρ ὅτ᾽ εἰς ἵππον κατεβαίνομεν, ὃν κάμ᾽ Ἐπειός,
 Ἀργείων οἱ ἄριστοι, ἐμοὶ δ᾽ ἐπὶ πάντα τέταλτο,
 525 ἠμὲν ἀνακλῖναι πυκινὸν λόχον ἠδ᾽ ἐπιθεῖναι,	
 ἔνθ᾽ ἄλλοι Δαναῶν ἡγήτορες ἠδὲ μέδοντες
 δάκρυά τ᾽ ὠμόργνυντο τρέμον θ᾽ ὑπὸ γυῖα ἑκάστου·
 κεῖνον δ᾽ οὔ ποτε πάμπαν ἐγὼν ἴδον ὀφθαλμοῖσιν
 οὔτ᾽ ὠχρήσαντα χρόα κάλλιμον οὔτε παρειῶν
 530 δάκρυ ὀμορξάμενον· ὁ δέ γε μάλα πόλλ᾽ ἱκέτευεν	
 ἱππόθεν ἐξέμεναι, ξίφεος δ᾽ ἐπεμαίετο κώπην
 καὶ δόρυ χαλκοβαρές, κακὰ δὲ Τρώεσσι μενοίνα.
 ἀλλ᾽ ὅτε δὴ Πριάμοιο πόλιν διεπέρσαμεν αἰπήν,
 μοῖραν καὶ γέρας ἐσθλὸν ἔχων ἐπὶ νηὸς ἔβαινεν
 535 ἀσκηθής, οὔτ᾽ ἂρ βεβλημένος ὀξέι χαλκῷ	
 οὔτ᾽ αὐτοσχεδίην οὐτασμένος, οἷά τε πολλὰ
 γίγνεται ἐν πολέμῳ· ἐπιμὶξ δέ τε μαίνεται Ἄρης.᾽ 
 "ὣς ἐφάμην, ψυχὴ δὲ ποδώκεος Αἰακίδαο
 φοίτα μακρὰ βιβᾶσα κατ᾽ ἀσφοδελὸν λειμῶνα,
 540 γηθοσύνη ὅ οἱ υἱὸν ἔφην ἀριδείκετον εἶναι.	
 "αἱ δ᾽ ἄλλαι ψυχαὶ νεκύων κατατεθνηώτων
 ἕστασαν ἀχνύμεναι, εἴροντο δὲ κήδε᾽ ἑκάστη.
 οἴη δ᾽ Αἴαντος ψυχὴ Τελαμωνιάδαο
 νόσφιν ἀφεστήκει, κεχολωμένη εἵνεκα νίκης,
 545 τήν μιν ἐγὼ νίκησα δικαζόμενος παρὰ νηυσὶ	
 τεύχεσιν ἀμφ᾽ Ἀχιλῆος· ἔθηκε δὲ πότνια μήτηρ.
 παῖδες δὲ Τρώων δίκασαν καὶ Παλλὰς Ἀθήνη.
 ὡς δὴ μὴ ὄφελον νικᾶν τοιῷδ᾽ ἐπ᾽ ἀέθλῳ·
 τοίην γὰρ κεφαλὴν ἕνεκ᾽ αὐτῶν γαῖα κατέσχεν,
 | [11,500] dans la vaste Troade, quand je tuais les plus vaillants 
guerriers pour la défense des Argiens, oui, si je revenais tel, fût-ce 
très peu de temps, dans la maison de mon père, comme 
je ferais haïr ma force et mes mains invincibles à ceux 
qui lui font violence et l'écartent de ses honneurs ! »
Il dit, et je lui répliquai : « Non, je n'ai point de nouvelles 
de l'irréprochable Pélée; mais sur ton cher fils Néoptolème, 
je te dirai toute la vérité, comme tu me le 
demandes. C'est moi-même, qui sur un vaisseau creux et 
bien équilibré l'amenai de Scyros rejoindre les Achéens
aux bonnes jambières. Certes, quand autour de la ville de 
Troie nous tenions conseil, il était toujours le premier 
à parler, et jamais son avis n'était en défaut. Seuls, le divin 
Nestor et moi le surpassions. Et quand dans la plaine 
troyenne nous combattions, le bronze en mains, jamais 
dans la foule et la poussée des hommes il ne restait en 
arrière; avant tous il courait au premier rang; pour la 
fougue il ne le cédait à personne et frappait maints 
guerriers à mort dans l'effroyable mêlée; je ne saurais 
dénombrer et nommer tous ceux qu'il tua en défendant 
les Argiens. Mais quel guerrier était le fils de Télèphe,
le héros Eurypyle, qu'il tua par le bronze ! et nombre de 
ses compagnons Cétéens tombèrent autour de lui, à 
cause de présents faits à une femme; je n'ai connu aucun 
autre homme plus beau après l'illustre Memnon. Et 
lorsque nous, les meilleurs des Argiens, nous descendions 
dans le cheval, qu'avait construit Épeios (c'est moi 
qu'on avait chargé de veiller à tout, d'ouvrir et de fermer 
la solide porte), alors les autres chefs et conseillers Danaens 
essuyaient des larmes et tremblaient de tous leurs
membres; mais lui, jamais je ne vis une seule fois pâlir 
son teint magnifique; jamais il n'essuya de larme sur ses  
joues; au contraire, il me suppliait instamment de le 
laisser sortir du cheval; il serrait la poignée de son épée 
et sa javeline lourde de bronze; il méditait des malheurs 
pour les Troyens. Et quand on eut mis à sac l'acropole 
escarpée de Priam, lui avec sa part de butin, glorieuse 
récompense, il s'embarqua sans blessure, sans avoir été 
touché par le bronze aigu ni atteint dans le corps à corps, 
comme il arrive souvent dans la bataille, quand Arès 
furieux frappe en aveugle. » Ainsi parlais-je; et l'âme du 
petit-fils d'Èaque, aux pieds légers s'en allait, traversant
à grands pas la prairie d'asphodèles, joyeuse de m'entendre  
dire que son fils se distinguait entre tous.
Les autres âmes des défunts se tenaient affligées et 
m'interrogeaient chacune sur l'objet de son souci. Seule 
l'âme d'Ajax, fils de Télamon, restait à l'écart; elle me 
gardait rancune de la victoire que j'avais remportée sur 
elle dans le jugement rendu près des vaisseaux pour les 
armes d'Achille, comme l'avait voulu sa vénérable mère. 
Les fils des Troyens et Pallas Athéné rendirent la sentence. 
Combien j'aurais dû ne pas vaincre dans cette lutte ! 
Car c'est à cause de ces armes que la terre recouvrit une
si vaillante tête, 
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