[8,250] ἀλλ᾽ ἄγε, Φαιήκων βητάρμονες ὅσσοι ἄριστοι,
παίσατε, ὥς χ᾽ ὁ ξεῖνος ἐνίσπῃ οἷσι φίλοισιν
οἴκαδε νοστήσας, ὅσσον περιγιγνόμεθ᾽ ἄλλων
ναυτιλίῃ καὶ ποσσὶ καὶ ὀρχηστυῖ καὶ ἀοιδῇ.
Δημοδόκῳ δέ τις αἶψα κιὼν φόρμιγγα λίγειαν
255 οἰσέτω, ἥ που κεῖται ἐν ἡμετέροισι δόμοισιν."
ὣς ἔφατ᾽ Ἀλκίνοος θεοείκελος, ὦρτο δὲ κῆρυξ
οἴσων φόρμιγγα γλαφυρὴν δόμου ἐκ βασιλῆος.
αἰσυμνῆται δὲ κριτοὶ ἐννέα πάντες ἀνέσταν
δήμιοι, οἳ κατ᾽ ἀγῶνας ἐὺ πρήσσεσκον ἕκαστα,
260 λείηναν δὲ χορόν, καλὸν δ᾽ εὔρυναν ἀγῶνα.
κῆρυξ δ᾽ ἐγγύθεν ἦλθε φέρων φόρμιγγα λίγειαν
Δημοδόκῳ· ὁ δ᾽ ἔπειτα κί᾽ ἐς μέσον· ἀμφὶ δὲ κοῦροι
πρωθῆβαι ἵσταντο, δαήμονες ὀρχηθμοῖο,
πέπληγον δὲ χορὸν θεῖον ποσίν. αὐτὰρ Ὀδυσσεὺς
265 μαρμαρυγὰς θηεῖτο ποδῶν, θαύμαζε δὲ θυμῷ.
αὐτὰρ ὁ φορμίζων ἀνεβάλλετο καλὸν ἀείδειν
ἀμφ᾽ Ἄρεος φιλότητος εὐστεφάνου τ᾽ Ἀφροδίτης,
ὡς τὰ πρῶτα μίγησαν ἐν Ἡφαίστοιο δόμοισι
λάθρῃ, πολλὰ δ᾽ ἔδωκε, λέχος δ᾽ ᾔσχυνε καὶ εὐνὴν
270 Ἡφαίστοιο ἄνακτος. ἄφαρ δέ οἱ ἄγγελος ἦλθεν
Ἥλιος, ὅ σφ᾽ ἐνόησε μιγαζομένους φιλότητι.
Ἥφαιστος δ᾽ ὡς οὖν θυμαλγέα μῦθον ἄκουσε,
βῆ ῥ᾽ ἴμεν ἐς χαλκεῶνα κακὰ φρεσὶ βυσσοδομεύων,
ἐν δ᾽ ἔθετ᾽ ἀκμοθέτῳ μέγαν ἄκμονα, κόπτε δὲ δεσμοὺς
275 ἀρρήκτους ἀλύτους, ὄφρ᾽ ἔμπεδον αὖθι μένοιεν.
αὐτὰρ ἐπεὶ δὴ τεῦξε δόλον κεχολωμένος Ἄρει,
βῆ ῥ᾽ ἴμεν ἐς θάλαμον, ὅθι οἱ φίλα δέμνι᾽ ἔκειτο,
ἀμφὶ δ᾽ ἄρ᾽ ἑρμῖσιν χέε δέσματα κύκλῳ ἁπάντῃ·
πολλὰ δὲ καὶ καθύπερθε μελαθρόφιν ἐξεκέχυντο,
280 ἠύτ᾽ ἀράχνια λεπτά, τά γ᾽ οὔ κέ τις οὐδὲ ἴδοιτο,
οὐδὲ θεῶν μακάρων· πέρι γὰρ δολόεντα τέτυκτο.
αὐτὰρ ἐπεὶ δὴ πάντα δόλον περὶ δέμνια χεῦεν,
εἴσατ᾽ ἴμεν ἐς Λῆμνον, ἐυκτίμενον πτολίεθρον,
ἥ οἱ γαιάων πολὺ φιλτάτη ἐστὶν ἁπασέων.
285 οὐδ᾽ ἀλαοσκοπιὴν εἶχε χρυσήνιος Ἄρης,
ὡς ἴδεν Ἥφαιστον κλυτοτέχνην νόσφι κιόντα·
βῆ δ᾽ ἰέναι πρὸς δῶμα περικλυτοῦ Ἡφαίστοιο
ἰσχανόων φιλότητος ἐυστεφάνου Κυθερείης.
ἡ δὲ νέον παρὰ πατρὸς ἐρισθενέος Κρονίωνος
290 ἐρχομένη κατ᾽ ἄρ᾽ ἕζεθ᾽· ὁ δ᾽ εἴσω δώματος ᾔει,
ἔν τ᾽ ἄρα οἱ φῦ χειρί, ἔπος τ᾽ ἔφατ᾽ ἔκ τ᾽ ὀνόμαζε·
"δεῦρο, φίλη, λέκτρονδε τραπείομεν εὐνηθέντες·
οὐ γὰρ ἔθ᾽ Ἥφαιστος μεταδήμιος, ἀλλά που ἤδη
οἴχεται ἐς Λῆμνον μετὰ Σίντιας ἀγριοφώνους."
295 ὣς φάτο, τῇ δ᾽ ἀσπαστὸν ἐείσατο κοιμηθῆναι.
τὼ δ᾽ ἐς δέμνια βάντε κατέδραθον· ἀμφὶ δὲ δεσμοὶ
τεχνήεντες ἔχυντο πολύφρονος Ἡφαίστοιο,
οὐδέ τι κινῆσαι μελέων ἦν οὐδ᾽ ἀναεῖραι.
καὶ τότε δὴ γίγνωσκον, ὅ τ᾽ οὐκέτι φυκτὰ πέλοντο.
| [8,250] Allons ! Tous les meilleurs danseurs de Phéacie,
commencez le jeu, afin que notre hôte puisse conter à ses
amis, une fois de retour en sa demeure, combien nous
l'emportons sur tous les autres pour la navigation et
la course, pour la danse et le chant. Qu'on aille vite
chercher et qu'on apporte à Démodocos la lyre sonore,
restée, je crois, dans notre maison. »
Ainsi parlait Alcinoos semblable à un dieu; un héraut
s'élança pour aller chercher la cithare creuse dans la
maison du roi. Des arbitres, choisis au nombre de neuf
parmi les habitants du pays, se levèrent; ils étaient
experts à tout régler dans les jeux; ils aplanirent une
place pour la danse, ménagèrent une belle et large arène.
Le héraut revint bientôt avec la lyre sonore pour Démodocos;
et l'aède alors s'avança au milieu de l'assemblée;
autour de lui se plaçaient des adolescents dans la première
fleur de la jeunesse, habiles à la danse; ils se mirent
à frapper de leurs pieds le sol consacré. Ulysse contemplait
le chatoiement de leur danse et l'admirait en son coeur.
Cependant sur sa lyre l'aède préludait avec art à son
chant : celui des amours d'Arès et d'Aphrodite au
beau diadème, comme pour la première fois ils s'unirent
en secret dans la demeure d'Héphaistos; il l'avait
séduite par maints présents, et c'est ainsi qu'il déshonora
la couche du puissant Héphaistos. Mais bientôt Hélios
vint tout lui révéler; car il les avait vus s'unir d'amour.
Lors donc qu'Héphaistos eut entendu ce récit qui lui
poignait le coeur, il s'en alla dans sa forge, roulant en
lui-même sa vengeance. Il plaça sur sa base sa grande
enclume, et il fabriquait du marteau des liens infrangibles,
inextricables, afin d'y retenir fixés les amants.
Puis quand il eut, dans sa colère contre Arès, fabriqué
ce piège, il se rendit à la chambre, où sa couche était
dressée; autour de tous les montants du lit, il déploya son
réseau; une grande partie pendait d'en haut, du plafond;
c'était comme une fine toile d'araignée, que personne
ne pouvait apercevoir, pas même l'un des dieux bienheureux,
tant le piège était bien fabriqué. Quand il eut
entouré de ce piège toute sa couche, il feignit de partir
pour Lemnos à l'acropole bien construite, la terre qu'il
préfère de beaucoup à toutes les autres. Et Arès aux
rênes d'or avait l'oeil bien ouvert pour le guetter; car
il vit s'éloigner Héphaistos, le glorieux artisan. Il partit
donc pour la demeure du très noble Héphaistos, avec
l'impatient désir de s'unir à Cythérée au beau diadème.
Elle, qui venait de quitter son père, le fils de Cronos à
la force invincible, s'était assise en arrivant. Entré
dans la maison, l'amant la caressa de la main, prit la
parole et la salua de ces mots : « Viens ici, chérie, dans
cette couche; allons y goûter la volupté; Héphaistos
n'est plus dans l'Olympe; il vient, je crois, de partir
pour Lemnos, chez les Sintiens au parler sauvage. »
Ainsi disait-il, et la déesse sentit le désir de se coucher
avec lui. Tous deux allèrent donc au lit et dormirent :
et autour d'eux était déployé le réseau, artificieux
ouvrage de l'ingénieux Héphaistos. Ils ne pouvaient
plus remuer ni soulever leurs membres. Ils connurent
alors qu'il ne leur restait plus nul moyen d'échapper.
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