[7,0] LIVRE VII.
[7,1] Τίνι μὲν βίῳ Ἀλέξανδρος ἐχρήσατο τέλει τε ὁποίῳ
βασιλεύσας ἐτῶν τεσσαρεσκαίδεκα, ἐν τοῖς προειρημένοις
ἐδηλώσαμεν· ὁ δὲ Μαξιμῖνος παραλαβὼν τὴν ἀρχὴν πολλὴν τὴν
μεταβολὴν ἐποιήσατο, τραχύτατα καὶ μετὰ πολλοῦ φόβου τῇ ἐξουσίᾳ
χρώμενος, ἔκ τε πραείας καὶ πάνυ
ἡμέρου βασιλείας ἐς τυραννίδος ὠμότητα μετάγειν πάντα
ἐπειρᾶτο, δυσμένειαν ἑαυτῷ συνειδώς, ὅτι πρῶτος ἐξ
εὐτελείας τῆς ἐσχάτης ἐς τοσαύτην τύχην ἤλασε. φύσει
δὲ ἦν τὸ ἦθος, ὥσπερ καὶ τὸ γένος, βάρβαρος· τό τε
φονικὸν πάτριον ἔχων καὶ ἐπιχώριον, πρόνοιαν ἐποιεῖτο
τὴν ἀρχὴν δι´ ὠμότητος βεβαιῶσαι, δεδιὼς μή τι τῇ
συγκλήτῳ καὶ τοῖς ὑπηκόοις εὐκαταφρόνητος γένηται,
οὐκ ἐς τὴν παροῦσαν αὐτοῦ τύχην ἀφορῶσιν, ἀλλ´ ἐς
τὰ τῆς γενέσεως εὐτελῆ σπάργανα. τεθρύλητο γὰρ παρὰ
πᾶσι καὶ διεβέβλητο, ὅτι δὴ ποιμαίνων ἐν τοῖς Θρᾳκίοις
ὄρεσιν, ἐπιδούς τε αὑτὸν διὰ μέγεθος καὶ ἰσχὺν σώματος ἐς εὐτελῆ καὶ
ἐπιχώριον στρατείαν, ὑπὸ τῆς τύχης
ἐπὶ τὴν Ῥωμαίων ἀρχὴν κεχειραγώγητο. εὐθέως οὖν
τούς τε φίλους πάντας, οἳ συνῆσαν τῷ Ἀλεξάνδρῳ σύνεδροί {τε} ὑπὸ
τῆς συγκλήτου βουλῆς ἐπιλεχθέντες, ἀπεσκευάσατο, καὶ οὓς μὲν ἐς τὴν
Ῥώμην ἀπέπεμψε, τινὰς
δὲ ἐπὶ προφάσει διοικήσεως ἀπεσείσατο, μόνος εἶναι βουλόμενος
ἐν τῷ στρατῷ καὶ μηδένα αὑτῷ παρεῖναι ἐκ
συνειδήσεως εὐγενοῦς κρείττονα, ἀλλ´ ἵν´ ὥσπερ ἐξ ἀκροπόλεως,
μηδενὸς αὐτῷ παρόντος ᾧ νέμειν αἰδῶ ἀνάγκην
ἔχοι, τοῖς τῆς τυραννίδος ἔργοις σχολάζοι. τήν τε θεραπείαν πᾶσαν, ἣ
συγγεγόνει τῷ Ἀλεξάνδρῳ τοσούτων
ἐτῶν, τῆς βασιλείου αὐλῆς ἀπέπεμψε. τοὺς δὲ πλείστους
αὐτῶν καὶ ἀπέκτεινεν, ἐπιβουλὰς ὑποπτεύων· ᾔδει γὰρ
ἀλγοῦντας ἐπὶ τῇ ἐκείνου ἀναιρέσει.
ἔτι δὲ καὶ μᾶλλον αὐτὸν ἐς ὠμότητα καὶ τὴν πρὸς
ἅπαντας ὀργὴν προυκαλέσατο συνωμοσία τις διαβληθεῖσα
κατ´ αὐτοῦ συγκροτουμένη, πολλῶν τε ἑκατοντάρχων
συμπνεόντων καὶ τῶν ἀπὸ τῆς βουλῆς ἁπάντων. Μάγνος
τις ὄνομα ἦν τῶν εὐπατριδῶν τε καὶ ὑπατευκότων· οὗτος διεβλήθη
συνάγειν κατ´ αὐτοῦ χεῖρα, καὶ στρατιώτας
τινὰς πείθειν ἐς αὑτὸν τὴν ἀρχὴν μετάγειν. ἡ δὲ συσκευὴ
τοιαύτη τις ἐλέγετο ἔσεσθαι. γεφυρώσας τὸν ποταμὸν ὁ
Μαξιμῖνος ἔμελλεν ἐπὶ Γερμανοὺς διαβήσεσθαι· ἅμα γὰρ
τῷ τὴν ἀρχὴν παραλαβεῖν εὐθέως πολεμικῶν ἔργων ἤρξατο, καὶ διὰ
σώματος μέγεθος καὶ ἰσχὺν {στρατιωτικὴν}
καὶ ἐμπειρίαν πολεμικὴν δοκῶν ἐπιλελέχθαι ἔργοις τὴν
δόξαν καὶ τὴν τῶν στρατιωτῶν ὑπόληψιν ἐπιστοῦτο, τήν
τε Ἀλεξάνδρου μέλλησιν καὶ τὴν πρὸς τὰ πολεμικὰ ἔργα
δειλίαν ἐλέγχειν ἐπειρᾶτο εἰκότως κατεγνωσμένην. ἀσκῶν
τε οὖν καὶ γυμνάζων τοὺς στρατιώτας οὐ διέλειπεν, αὐτός τε ἐν ὅπλοις
ὢν καὶ τὸν στρατὸν παρορμῶν. τότε
τοίνυν τὴν γέφυραν ζεύξας ἔμελλεν ἐπὶ Γερμανοὺς διαβήσεσθαι. ὁ δὲ
Μάγνος ἐλέγετο στρατιωτῶν μὲν ὀλίγους,
ἀλλὰ τοὺς ἐξοχωτάτους καὶ μάλιστα τοὺς τὴν φρουρὰν
τῆς γεφύρας καὶ τὴν ἐπιμέλειαν πεπιστευμένους, ἀναπεῖσαι μετὰ τὸ
διαβῆναι τὸν Μαξιμῖνον λύσαντας τὴν
γέφυραν προδοῦναι τοῖς βαρβάροις, οὐχ ὑπαρχούσης
αὐτῷ ἐπανόδου· πλάτει γὰρ καὶ βάθει μέγιστος ὁ ποταμὸς ῥέων ἄβατος
αὐτῷ ἐγίνετο, οὔτε νεῶν οὐσῶν ἐν ταῖς
πολεμίαις ὄχθαις τῆς τε γεφύρας λυθείσης. ἡ μὲν τῆς
ἐπιβουλῆς φήμη τοιαύτη ἐγένετο, εἴτε ἀληθὴς ὑπάρξασα
εἴτε ὑπὸ τοῦ Μαξιμίνου συσκευασθεῖσα· ἀκριβὲς δὲ εἰπεῖν
οὐ ῥᾴδιον, ἐπεὶ ἔμενεν ἀνεξέλεγκτος. μήτε γὰρ κρίσεως
τινι μεταδοὺς μήτε ἀπολογίας, πάντας οὓς ὑπώπτευεν
αἰφνιδίως συναρπασθέντας ἀφειδῶς ἐφόνευσεν.
ἐγένετο δέ τις καὶ Ὀσροηνῶν τοξοτῶν ἀπόστασις, οἳ
πάνυ ἀλγοῦντες ἐπὶ τῇ Ἀλεξάνδρου τελευτῇ, περιτυχόντες τῶν ἀπὸ
ὑπατείας καὶ φίλων Ἀλεξάνδρου τινί (Κουαρτῖνος δὲ ἦν ὄνομα, ὃν
Μαξιμῖνος ἐκπέμψας ἦν τοῦ
στρατοῦ) ἁρπάσαντες ἄκοντα καὶ οὐδὲν προειδότα στρατηγὸν ἑαυτῶν
κατέστησαν, πορφύρᾳ τε καὶ πυρὶ προπομπεύοντι, ὀλεθρίοις τιμαῖς,
ἐκόσμησαν, ἐπί τε τὴν ἀρχὴν ἦγον οὔ τι βουλόμενον. ἐκεῖνος μὲν οὖν ἐν
τῇ σκηνῇ καθεύδων ἐπιβουλευθεὶς νύκτωρ αἰφνιδίως ἀνῃρέθη
ὑπὸ τοῦ συνόντος αὐτῷ καὶ δοκοῦντος φίλου, τῶν τε
Ὀσροηνῶν πρότερον ἡγουμένου (Μακεδὼν ἦν ὄνομα αὐτῷ), καίτοι τῆς
ἁρπαγῆς καὶ τῆς ἀποστάσεως ἀρχηγοῦ
{καὶ ὁμογνώμονος} τοῖς Ὀσροηνοῖς γενομένου· ὃς οὐδεμίαν αἰτίαν
ἔχθρας οὐδὲ μίσους ἔχων ἀπέκτεινεν ὃν αὐτὸς ἥρπασέ τε καὶ ἀνέπεισεν,
οἰόμενός τε μεγάλα χαρίζεσθαι τῷ Μαξιμίνῳ τὴν κεφαλὴν ἀποτεμὼν
ἐκόμισεν. ὃ δὲ ἥσθη μὲν ἐπὶ τῷ ἔργῳ, στερηθεὶς δὲ πολεμίου, ὡς
ᾤετο, - - - ἐκεῖνον μέν, καίτοι μεγάλα ἐλπίζοντα καὶ δοκοῦντα ἀμοιβῆς
ἐξαιρέτου τεύξεσθαι, ἀπέκτεινεν ὡς καὶ τῆς
ἀποστάσεως γεγονότα ἀρχηγὸν καὶ ἀποκτείναντα ὃν αὐτὸς ἄκοντα
ἀνέπεισεν, ἄπιστόν τε γενόμενον περὶ τὸν
φίλον. τοιαῦται μὲν δή τινες αἰτίαι ἔτι μᾶλλον ἐς τραχύτητα
καὶ ὠμότητα ἠκόνησαν τὴν τοῦ Μαξιμίνου ψυχήν, καὶ
πρότερον οὕτω πεφυκυῖαν. ἦν δὲ καὶ τὴν ὄψιν φοβερώτατος,
καὶ μέγιστος τὸ σῶμα, ὡς μὴ ῥᾳδίως αὐτῷ τινὰ μήτε Ἑλλήνων τῶν
σωμασκούντων μήτε βαρβάρων τῶν μαχιμωτάτων ἐξισοῦσθαι.
| [7,1] I. Nous avons consacré le livre précédent à la vie d'Alexandre, et nous
avons raconté sa mort après un règne de quatorze ans. Maximin, parvenu à
l'empire, changea totalement la face des choses : il usa de son pouvoir
avec violence, avec une rigueur qui inspira l'effroi. Il s'efforça de
faire succéder partout au gouvernement le plus doux et le plus modéré
toutes les cruautés de la tyrannie. Il était poussé à ces excès par la
conscience de son origine obscure, par l'idée que, le premier, il avait
été élevé de la condition la plus abjecte à une si haute fortune. Il
n'était pas moins barbare de caractère et de moeurs que de nation. Il
avait conservé ces inclinations sanguinaires, naturelles à son pays et à
son climat, et mettait tous ses soins à affermir son règne par la cruauté,
craignant toujours qu'il ne fût un objet de mépris pour les sénateurs et
pour tous ses sujets, et qu'ils songeassent moins à son élévation présente
qu'aux langes grossières de son berceau. En effet, on répandait partout ce
bruit déshonorant pour sa vanité, qu'après avoir gardé les troupeaux dans
les montagnes de la Thrace, et s'être enrôlé, à cause de sa haute stature
et de sa force corporelle, dans l'obscure milice de ces contrées, la
fortune l'avait conduit comme par la main jusqu'au trône de Rome. Maximin
commença par éloigner tous les amis qui entouraient Alexandre, et les
conseillers qu'on lui avait choisis dans le sénat; il renvoya les uns à
Rome, écarta les autres en leur confiant des charges lointaines. Il
désirait être seul à l'armée; il voulait qu'il n'y eût autour de lui
personne qui se crût supérieur à lui par la conscience d'une naissance
illustre. Il voulait, comme du haut d'une citadelle inexpugnable, sans
qu'il y eût en sa présence aucun homme à qui il fût obligé de témoigner du
respect, se livrer à son aise à tous les actes du despotisme. Il chassa de
la cour impériale tous les officiers qui avaient été au service
d'Alexandre pendant tant d'années, et fit périr la plupart d'entre eux,
les soupçonnant de complots, car il savait qu'ils pleuraient la mort de
leur maître.
II. Mais une circonstance nouvelle vint stimuler encore sa cruauté
naturelle et augmenter sa fureur contre tous les Romains : ce fut la
découverte d'une conjuration tramée contre ses jours, et dans laquelle
avaient trempé beaucoup de centurions et le sénat tout entier. Il y avait
un patricien, personnage consulaire, nommé Magnus. Ce fut lui qu'on
dénonça à Maximin comme rassemblant contre lui des forces, et comme
sollicitant les soldats de transférer l'empire sur sa tête. Telle devait
être, disait-on, la marelle du complot. Maximin, après avoir fait jeter un
pont sur le Rhin, était sur le point de s'avancer contre les Germains;
car, dès qu'il eut pris en main le pouvoir, il s'était vivement occupé de
la guerre. Comme on semblait l'avoir choisi pour le trône à cause de sa
taille élevée, de sa force guerrière et de son expérience dans le métier
des armes, il voulait confirmer sa réputation et l'opinion qu'avaient
conçue de lui les soldats ; il voulait prouver en même temps qu'on avait
eu raison d'accuser l'indolence d'Alexandre et sa timidité dans la guerre.
Aussi ne cessait-il de former et d'exercer ses soldats. Lui-même, toujours
sous les armes, animait par son exemple et par ses discours le zèle de son
armée. Le pont était donc achevé, et Maximin allait passer le fleuve pour
attaquer les Germains. On disait que Magnus avait engagé un grand nombre
de soldats, les meilleurs de toute l'armée, et surtout ceux auxquels
étaient confiées la garde et la conservation du pont, à le détruire
aussitôt que Maximin l'aurait passé, afin de le livrer aux barbares, tout
moyen de retour lui étant enlevé. Ce fleuve est en effet très large et
d'une profondeur extrême, et Maximin n'eût jamais pu revenir sur ses pas,
ne trouvant sur la rive ennemie aucune embarcation qui pût suppléer à la
rupture du pont. Tel était le bruit sur ce complot, soit que l'accusation
fût fondée, soit qu'elle fût supposée par l'empereur. Il serait difficile
de rien affirmer sur ce sujet, car l'affaire ne donna lieu à aucune
enquête. Maximin n'accorda pas même aux accusés la faveur d'un procès, ni
la liberté de la défense; mais, ayant fait saisir sur-le-champ tous ceux
sur qui tombaient ses soupçons, il les fit périr sans en épargner un seul.
III. Une révolte vint aussi à éclater parmi les archers Osroéniens. Ces
soldats, qu'affligeait vivement la mort d'Alexandre, ayant rencontré un
des anciens amis de ce prince, personnage consulaire (il se nommait
Quartinus, et Maximin l'avait renvoyé de l'armée), le saisirent, et malgré
lui, sans qu'il fût prévenu de rien, le placèrent comme chef à leur tête.
Ils le revêtirent de la pourpre, portèrent le feu devant lui, lui
rendirent des honneurs dont il sentait le danger, et l'élevèrent à
l'empire malgré sa résistance. L'infortuné, pendant qu'il dormait dans sa
tente, fut lâchement attaqué de nuit, et tué par celui qui demeurait avec
lui, par un homme qu'il croyait son ami et qui était l'un des anciens
chefs des Osroéniens. Il se nommait Macédo et avait été l'un des
partisans, l'un des auteurs de l'élévation de Quartinus à l'empire et de
la révolte des archers. Sans avoir contre Quartinus aucun motif d'inimitié
ou de haine, il tua celui qu'il avait élevé de force au trône, et qu'il
avait sollicité vivement d'accepter l'empire. Pensant faire à Maximin le
plus magnifique et le plus agréable présent, il lui porta la tête du
malheureux qu'il avait égorgé.
IV. Mais l'empereur, quoique charmé de cette action, qui le délivrait d'un
homme en qui il voyait un ennemi, trompa les grandes espérances du
meurtrier, qui s'attendait à une récompense brillante, et le fit périr,
pour le punir d'avoir été l'auteur de la sédition, d'avoir tué celui qu'il
y avait entraîné par force et de s'être montré sans foi envers un ami. Ces
événements portèrent à une violence et à une cruauté nouvelles le
caractère naturellement féroce de Maximin. Ce prince était terrible par
son seul aspect; on n'eût trouvé personne, ni parmi les athlètes grecs, ni
parmi les plus belliqueux des barbares, qui lui fût comparable pour la
taille et pour la vigueur.
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