[300] θιγεῖν τ´ ὠλέναισι τέκνου;
301 (ΙΟΚΑΣΤΗ) Φοίνισσαν βοὰν κλύουσα
302 ὦ νεάνιδες γηραιῶι ποδὶ τρομερὰν
303 ἕλκω ποδὸς βάσιν.
304 ἰὼ τέκνον, χρόνωι σὸν ὄμμα
305 μυρίαις τ´ ἐν ἁμέραις
306a προσεῖδον· ἀμφίβαλλε μαστὸν
307 ὠλέναισι ματέρος,
307 παρηίδων τ´ ὄρεγμα δὸς
308 τριχῶν τε, κυανόχρωτι χαίτας
309 πλοκάμωι δέραν σκιάζων ἁμάν.
310 ἰὼ ἰώ, μόλις φανεὶς
311 ἄελπτα κἀδόκητα ματρὸς ὠλέναις.
312 τί φῶ σε; πῶς ἁπάνται
313 καὶ χερσὶ καὶ λόγοισι
314 πολυέλικτον ἁδονὰν
315 ἐκεῖσε καὶ τὸ δεῦρο
316 περιχορεύουσα τέρψιν παλαιᾶν λάβω
317 χαρμονᾶν; ἰὼ τέκος,
318 ἔρημον πατρῶιον ἔλιπες δόμον
319 φυγὰς ἀποσταλεὶς ὁμαίμου λώβαι,
320 ἦ ποθεινὸς φίλοις,
321 ἦ ποθεινὸς Θήβαις.
322 ὅθεν ἐμάν τε λευκόχροα κείρομαι
323 δακρυόεσς´ ἀνεῖσα πένθει κόμαν,
324 ἄπεπλος φαρέων λευκῶν, τέκνον,
325 δυσόρφναια δ´ ἀμφὶ τρύχη τάδε
326 σκότι´ ἀμείβομαι·
327 ὁ δ´ ἐν δόμοισι πρέσβυς ὀμματοστερὴς
328 ἀπήνας ὁμοπτέρου τᾶς ἀποζυγείσας
329 δόμων
330 πόθον ἀμφιδάκρυτον ἀεὶ κατέχων
331 ἀνῆιξεν μὲν ξίφους
332 ἐπ´ αὐτόχειρά τε σφαγὰν
333 ὑπὲρ τέραμνά τ´ ἀγχόνας,
334 στενάζων ἀρὰς τέκνοις·
335 σὺν ἀλαλαῖσι δ´ αἰὲν αἰαγμάτων
336 σκότια κρύπτεται.
337 σὲ δ´, ὦ τέκνον, γάμοισιν ἤδη
338a κλύω ζυγέντα
339 παιδοποιὸν ἁδονὰν
339 ξένοισιν ἐν δόμοις ἔχειν,
340 ξένον δὲ κῆδος ἀμφέπειν,
341 ἄλαστα ματρὶ τᾶιδε Λαΐου
342 τε τοῦ πάλαι γένει,
343 γάμων ἐπακτὸν ἄταν.
344 ἐγὼ δ´ οὔτι σοι πυρὸς ἀνῆψα φῶς
345-346 νόμιμον {ἐν γάμοις} ὡς πρέπει ματέρι μακαρίαι·
347 ἀνυμέναια δ´ Ἱσμηνὸς ἐκηδεύθη
348 λουτροφόρου χλιδᾶς, ἀνὰ δὲ Θηβαίων
349 πόλιν ἐσίγαθεν σᾶς ἔσοδοι νύμφας.
| [300] et à venir serrer ton fils dans tes bras?
(JOCASTE) Jeunes filles, j'ai entendu votre cri phénicien, et je
traîne jusqu'à vous mes pas chancelants de vieillesse. O mon
fils! après tant de jours écoulés, je revois donc enfin ton visage!
Entoure de tes bras le sein de ta mère, appuie ta joue
contre la mienne, et laisse tomber tes cheveux noirs sur mon
cou ombragé de leurs longues boucles. O bonheur! te voilà
donc, non sans peine, contre toute attente, contre toute
espérance, rendu aux embrassements de ta mère! Que
te dirai-je? Comment pourrais-je aussi complètement que
je le voudrais, en caresses, en paroles, en effusions
d'une joie qui ne peut tenir en place, t'exprimer ma tendresse
maternelle, depuis longtemps sevrée de cette douceur?
O mon enfant, quel vide tu as laissé dans la maison
paternelle, après avoir été exilé, chassé de ta patrie par
la violence d'un frère! quels regrets à tes amis! quels regrets
à Thèbes! C'est alors que, dans ma douleur, j'ai dénoué en
pleurant et rasé ma chevelure blanche. Je n'ai plus voulu, ô
mon fils, me parer de vêtements blancs : je les ai quittés
pour porter ces haillons noirs en signe de deuil. Cependant
le vieil aveugle qui vit dans le palais, quand il a su que le
couple des deux frères s'était désuni et détaché de la maison
paternelle, n'a pu s'en consoler ni sécher ses larmes : il
s'est élancé pour se tuer d'un coup d'épée, pour se pendre,
mêlant à ses gémissements des malédictions contre ses fils :
et depuis, dans les ténèbres où il se cache, il ne cesse de
faire entendre des cris plaintifs. Mais toi, ô mon fils, j'apprends
que tu t'es enchaîné par les liens du mariage, et que
tu goûtes les joies de l'hymen dans une maison étrangère;
que tu n'as pas craint de t'allier à une famille étrangère, de
faire cette injure à ta mère, à la mémoire de ton ancêtre
Laïos, et d'aller toi-même chercher au loin le fléau de cette
union. Je n'ai donc pas, suivant l'usage, et comme il sied à
une heureuse mère, allumé pour toi la torche nuptiale.
Lisménos n'a pas fêté ton hymen, et tu n'as pas eu la joie de
te purifier dans ses eaux; ta jeune épouse n'a pas fait son
entrée dans Thèbes au milieu des chants d'allégresse.
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