Texte grec :
[950] (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ὁ παῖς δὲ ποῦ ´στιν, ἵνα σὺ μηκέτ´ ἦις ἄπαις;
951 (ΚΡΕΟΥΣΑ) τέθνηκεν, ὦ γεραιέ, θηρσὶν ἐκτεθείς.
952 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) τέθνηκ´; Ἀπόλλων δ´ ὁ κακὸς οὐδὲν ἤρκεσεν;
953 (ΚΡΕΟΥΣΑ) οὐκ ἤρκες´· Ἅιδου δ´ ἐν δόμοις παιδεύεται.
954 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) τίς γάρ νιν ἐξέθηκεν; οὐ γὰρ δὴ σύ γε;
955 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἡμεῖς, ἐν ὄρφνηι σπαργανώσαντες πέπλοις.
956 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) οὐδὲ ξυνήιδει σοί τις ἔκθεσιν τέκνου;
957 (ΚΡΕΟΥΣΑ) αἱ ξυμφοραί γε καὶ τὸ λανθάνειν μόνον.
958 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) καὶ πῶς ἐν ἄντρωι παῖδα σὸν λιπεῖν ἔτλης;
959 (ΚΡΕΟΥΣΑ) πῶς; οἰκτρὰ πολλὰ στόματος ἐκβαλοῦς´ ἔπη.
960 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) φεῦ·
960 τλήμων σὺ τόλμης, ὁ δὲ θεὸς μᾶλλον σέθεν.
961 (ΚΡΕΟΥΣΑ) εἰ παῖδά γ´ εἶδες χεῖρας ἐκτείνοντά μοι.
962 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) μαστὸν διώκοντ´ ἢ πρὸς ἀγκάλαις πεσεῖν;
963 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἐνταῦθ´ ἵν´ οὐκ ὢν ἄδικ´ ἔπασχεν ἐξ ἐμοῦ.
964 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) σοὶ δ´ ἐς τί δόξ´ ἐσῆλθεν ἐκβαλεῖν τέκνον;
965 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ὡς τὸν θεὸν σώσοντα τόν γ´ αὑτοῦ γόνον.
966 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) οἴμοι, δόμων σῶν ὄλβος ὡς χειμάζεται.
967 (ΚΡΕΟΥΣΑ) τί κρᾶτα κρύψας, ὦ γέρον, δακρυρροεῖς;
968 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) σὲ καὶ πατέρα σὸν δυστυχοῦντας εἰσορῶν.
969 (ΚΡΕΟΥΣΑ) τὰ θνητὰ τοιαῦτ´· οὐδὲν ἐν ταὐτῶι μένει.
970 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) μή νυν ἔτ´ οἴκτων, θύγατερ, ἀντεχώμεθα.
971 (ΚΡΕΟΥΣΑ) τί γάρ με χρὴ δρᾶν; ἀπορία τὸ δυστυχεῖν.
972 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) τὸν πρῶτον ἀδικήσαντά ς´ ἀποτίνου θεόν.
973 (ΚΡΕΟΥΣΑ) καὶ πῶς τὰ κρείσσω θνητὸς οὖς´ ὑπερδράμω;
974 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) πίμπρη τὰ σεμνὰ Λοξίου χρηστήρια.
975 (ΚΡΕΟΥΣΑ) δέδοικα· καὶ νῦν πημάτων ἅδην ἔχω.
976 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) τὰ δυνατά νυν τόλμησον, ἄνδρα σὸν κτανεῖν.
977 (ΚΡΕΟΥΣΑ) αἰδούμεθ´ εὐνὰς τὰς τόθ´ ἡνίκ´ ἐσθλὸς ἦν.
978 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) νῦν δ´ ἀλλὰ παῖδα τὸν ἐπὶ σοὶ πεφηνότα.
979 (ΚΡΕΟΥΣΑ) πῶς; εἰ γὰρ εἴη δυνατόν· ὡς θέλοιμί γ´ ἄν.
980 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ξιφηφόρους σοὺς ὁπλίσας´ ὀπάονας.
981 (ΚΡΕΟΥΣΑ) στείχοιμ´ ἄν· ἀλλὰ ποῦ γενήσεται τόδε;
982 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ἱεραῖσιν ἐν σκηναῖσιν οὗ θοινᾶι φίλους.
983 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἐπίσημον ὁ φόνος καὶ τὸ δοῦλον ἀσθενές.
984 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ὤμοι, κακίζηι· φέρε, σύ νυν βούλευέ τι.
985 (ΚΡΕΟΥΣΑ) καὶ μὴν ἔχω γε δόλια καὶ δραστήρια.
986 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ἀμφοῖν ἂν εἴην τοῖνδ´ ὑπηρέτης ἐγώ.
987 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἄκουε τοίνυν· οἶσθα γηγενῆ μάχην;
988 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) οἶδ´, ἣν Φλέγραι Γίγαντες ἔστησαν θεοῖς.
989 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἐνταῦθα Γοργόν´ ἔτεκε Γῆ, δεινὸν τέρας.
990 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ἦ παισὶν αὑτῆς σύμμαχον, θεῶν πόνον;
991 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ναί· καί νιν ἔκτειν´ ἡ Διὸς Παλλὰς θεά.
994 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ἆρ´ οὗτός ἐσθ´ ὁ μῦθος ὃν κλύω πάλαι;
995 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ταύτης Ἀθάναν δέρος ἐπὶ στέρνοις ἔχειν.
996 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ἣν αἰγίδ´ ὀνομάζουσι, Παλλάδος στολήν;
997 (ΚΡΕΟΥΣΑ) τόδ´ ἔσχεν ὄνομα θεῶν ὅτ´ ἦιξεν ἐς δόρυ.
992 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) ποῖόν τι μορφῆς σχῆμ´ ἔχουσαν ἀγρίας;
993 (ΚΡΕΟΥΣΑ) θώρακ´ ἐχίδνης περιβόλοις ὡπλισμένον.
998 (ΠΡΕΣΒΥΤΗΣ) τί δῆτα, θύγατερ, τοῦτο σοῖς ἐχθροῖς βλάβος;
999 (ΚΡΕΟΥΣΑ) Ἐριχθόνιον οἶσθ´ ἢ οὔ; τί δ´ οὐ μέλλεις, γέρον;
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Traduction française :
[950] LE VIEILLARD.
Où est-il, cet enfant auquel tu devras le nom de mère?
CRÊUSE.
Il n'est plus, ô vieillard ! il a été la proie des bêtes sauvages.
LE VIEILLARD.
Il n'est plus ! ce dieu ingrat ne l'a donc pas secouru?
CRÉUSE.
Il ne l'a pas secouru : c'est dans le séjour de Pluton qu'il l'élève.
LE VIEILLARD.
Et qui donc l'exposa? car ce n'est pas toi du moins.
CRÉUSE.
955 C'est moi qui dans l'ombre de la nuit l'enveloppai de mes voiles.
LE VIEILLARD.
Tu n'avais pas de témoin, lorsque tu exposas ton fils?
CRÉUSE.
Je n'en eus pas d'autres que le malheur et le mystère.
LE VIEILLARD.
Et comment eus-tu le courage d'abandonner ton fils dans un antre sauvage ?
CRÉUSE.
Comment? hélas!... en exhalant bien des lamentations.
LE VIEILLARD.
Qu'il dût t'en coûter d'oser une pareille action ! Mais le dieu était bien plus misérable encore !
CRÉUSE.
Si tu avais vu cet enfant tendre les mains vers moi !
LE VIEILLARD.
Cherchait-il à saisir le sein, ou à venir dans les bras?
CRÉUSE.
Dans mes bras : et ne pas l'y recevoir était bien cruel de ma part.
LE VIEILLARD.
Mais quel espoir a pu t'engager à exposer ton fils ?
CRÉUSE.
J'espérais que le dieu veillerait sur son propre enfant.
LE VIEILLARD.
Hélas ! quels orages ont fondu sur la prospérité de ta maison ?
CRÉUSE.
Pourquoi voiler ta tête, ô vieillard, en versant des larmes ?
LE VIEILLARD.
C'est à la vue de tes malheurs et de ceux de ton père,
CRÊUSE.
C'est le sort des mortels d'être les jouets de la fortune.
LE VIEILLARD.
970 Oui, ma fille, ne nous livrons pas à ces lamentations.
CRÊUSE.
Et que dois-je faire ? L'indécision est le partage de l'infortune.
LE VIEILLARD.
Avant tout il faut te venger du dieu qui t'a outragée.
CRÉUSE.
Mortelle, comment triompherais-je de la puissance d'un dieu?
LE VIEILLARD.
Embrase le temple révéré d'Apollon.
CRÉUSE.
La crainte m'arrête, et j'ai déja bien assez de malheurs.
LE VIEILLARD.
Ose du moins ce qui est possible, fais périr ton époux.
CRÉUSE.
Je respecte notre hymen, en mémoire du temps où il m'aima.
LE VIEILLARD.
Eh bien, frappe ce fils né pour ton malheur.
CRÉUSE.
Comment? Ah! si c'était possible ! Combien je le souhaiterais !
LE VIEILLARD.
Arme les hommes de ta suite.
CRÉUSE.
J'y vais ; mais où s'accomplira le sacrifice ?
LE VIEILLARD.
Dans la tente sacrée où il a convié ses amis.
CRÉUSE.
Un meurtre est un acte qui se commet au grand jour, et des esclaves sont des êtres sans énergie.
LE VIEILLARD.
Hélas! ton courage faiblit. Eh bien, décide toi-même.
CRÉUSE.
985 Oui, j'ai un moyen à la fois sûr et secret de me venger,
LE VIEILLARD.
Je suis prêt à te servir dans l'une et l'autre voie.
CRÉUSE.
Écoute donc : tu connais le combat des fils de la Terre.
LE VIEILLARD.
Je connais celui que les Géants ont livré aux dieux dans les champs de Phlégra.
CRÉUSE.
C'est alors que la Terre enfanta la Gorgone, ce monstre terrible.
LE VIEILLARD.
Auxiliaire envoyé à ses fils pour combattre les dieux?
CRÉUSE.
Oui, et Pallas, la fille de Jupiter, lui donna la mort.
LE VIEILLARD.
Quel aspect avait ce monstre sauvage?
CRÉUSE.
Son corps était armé de vipères aux plis tortueux.
LE VIEILLARD.
N'est-ce pas l'antique récit que j'ai entendu faire ?
CRÉUSE.
Minerve couvrit sa poitrine de sa terrible dépouille.
LE VIEILLARD.
C'est ce qu'on appelle l'égide, armure de Pallas ?
CREUSE.
Ce nom lui fut donné dans le combat des dieux.
LE VIEILLARD.
Eh bien, ma fille, quel dommage en attends-tu contre tes ennemis?
CRÉUSE.
O vieillard ! pourrais-tu ignorer qui fut Érichthonius ?
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