[74,12] πολλὰ μὲν οὖν καὶ ἔδρασαν καὶ ἔπαθον οἱ Βυζάντιοι, ἅτε τοῖς ἐκ τῆς
οἰκουμένης ὡς εἰπεῖν στόλοις ἐπὶ ὅλον τριετῆ χρόνον
πολιορκούμενοι· λελέξεται δὲ ὀλίγα καὶ τὰ ἐχόμενά τινος θαύματος. ᾕρουν
μὲν γὰρ καὶ πλοῖά τινα παραπλέοντα εὐκαίρως ἐπιτιθέμενοι, ᾕρουν
δὲ καὶ τριήρεις τῶν ἐν τῷ ὅρμῳ τῶν ἐναντίων οὐσῶν. τὰς γὰρ ἀγκύρας αὐτῶν
ὑφύδροις κολυμβηταῖς ὑποτέμνοντες, καὶ ἥλους ἐς τοὺς
ταρσούς σφων, καλῳδίοις ἐκ τῆς φιλίας ἐκδεδεμένους ἐμπηγνύντες,
ἐπεσπῶντο, ὥστ´ αὐτὰς ἐφ´ ἑαυτῶν αὐτομάτας προσπλεούσας ὁρᾶσθαι,
μήτ´ ἐρέτου μήτ´ ἀνέμου μηδενὸς ἐπισπέρχοντος. ἤδη δὲ καὶ
ἐθελονταί τινες ἔμποροι, ὡς καὶ ἄκοντες, ὑπ´ αὐτῶν ἡλίσκοντο, καὶ
τὰ ἀγώγιμα μεγάλων χρημάτων πωλήσαντες ἐξέπλεον ἐκδιδράσκοντες.
ἐπεὶ δὲ πάντων αὐτοῖς ἐκδαπανηθέντων τῶν ἔνδον ἐς τὸ στενὸν
κομιδῇ τῶν τε πραγμάτων καὶ τῶν ἐλπίδων τῶν ἐπ´ αὐτοῖς
ἐληλύθεσαν, πρότερον μέν, καίπερ πάνυ πιεζόμενοι ἅτε καὶ τῶν ἔξω
πάντων ἀποκεκλειμένοι, ὅμως ἀντεῖχον, καὶ ἔς τε τὰς ναῦς τοῖς
τε ξύλοις τοῖς ἐκ τῶν οἰκιῶν καὶ ταῖς θριξὶ ταῖς {ἐκ} τῶν γυναικῶν,
σχοινία ἀπ´ αὐτῶν πλέκοντες, ἐχρῶντο, καὶ ὁπότε τινὲς τῷ
τείχει προσβάλοιεν, τούς τε λίθους σφίσι τοὺς ἐκ τῶν θεάτρων καὶ
ἵππους χαλκοῦς καὶ ἀνδριάντας χαλκοῦς ὅλους ἐπερρίπτουν· ἐπεὶ δὲ
καὶ ἡ τροφή σφας ἐπέλιπεν ἡ νενομισμένη καὶ δέρματα διαβρέχοντες
ἤσθιον, εἶτα καὶ ταῦτα καταναλώθη, οἱ μὲν πλείους ἐξέπλευσαν,
τηρήσαντες ζάλην καὶ καταιγίδα ὥστε μηδένα ἀνταναχθῆναί σφισιν,
ἵν´ ἢ ἀπόλωνται ἢ ἐπισιτίσωνται, καὶ προσπίπτοντες ἀπροσδοκήτως τοῖς
ἀγροῖς πάνθ´ ὁμοίως ἐλῄζοντο, οἱ δ´ ὑπολειπόμενοι
δεινότατον ἔργον ἔδρασαν· ἐπεὶ γὰρ ἐν τῷ ἀσθενεστάτῳ ἐγένοντο,
ἐπ´ ἀλλήλους ἐτράποντο καὶ ἀλλήλων ἐγεύοντο.
| [74,12] 12. Les Byzantins donc firent et souffrirent beaucoup de choses, attendu qu'ils furent trois ans
entiers assiégés par les flottes, pour ainsi dire, de tout l'univers. Je vais rapporter un certain nombre
de leurs exploits les plus remarquables.
An de Rome 949. Domitius Dexter consul II et Valérius Messala consul I.
Ils prirent plusieurs vaisseaux qui faisaient voile dans leur voisinage par l'à propos avec lequel ils
les attaquèrent ; ils prirent aussi des trirèmes ennemies à leur mouillage, car, faisant couper les
cordes des ancres par des plongeurs et planter des clous dans les flancs des navires, ils les
entraînaient au moyen de câbles attachés à leur rivage, en sorte qu'on voyait les vaisseaux marcher
d'eux-mêmes et de leur propre mouvement, sans qu'ils fussent poussés ni par les rames ni par le
vent. En outre, des navires marchands se laissaient volontairement capturer par eux, tout en faisant
mine de résistance ; puis, après avoir vendu à grand prix leur cargaison, ils s'enfuyaient à toutes
voiles. Mais, lorsque les Byzantins eurent consommé tout ce qu'ils avaient dans l'intérieur de leur
ville et que leurs affaires ainsi que leurs espérances furent réduites à l'étroit, d'abord, bien que
vivement pressés attendu que toutes les communications avec le dehors étaient interceptées, ils n'en
continuèrent pas moins la lutte, et se servirent des bois de leurs maisons pour réparer leurs
vaisseaux, et des cheveux de leurs femmes pour tisser des cordages ; et, quand I'ennemi donnait
I'assaut aux remparts, ils jetaient sur lui des pierres détachées de leurs théâtres, des chevaux et des
statues de bronze tout entières ; puis, lorsque les vivres ordinaires vinrent à leur faire défaut, ils
détrempèrent des cuirs pour les manger ; ensuite, ces ressources épuisées, la plupart des habitants se
mirent en mer à la faveur d'un temps d'orage et de tempête, afin de ne pas rencontrer d'ennemis en
route, dans l'intention de mourir ou de se procurer des vivres, et, fondant à l'improviste sur la
campagne, ils enlevèrent tout sans aucune distinction. Quant à ceux qui étaient restés dans la ville,
ils firent un acte horrible : réduits à une extrême faiblesse, ils se tournèrent les uns contre les autres
et se mangèrent.
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