[68,6] διατρίψας δὲ ἐν τῇ Ῥώμῃ χρόνον τινὰ ἐστράτευσεν ἐπὶ Δακούς,
τά τε πραχθέντα αὐτοῖς λογιζόμενος, τοῖς τε χρήμασιν ἃ κατ´
ἔτος ἐλάμβανον βαρυνόμενος; τάς τε δυνάμεις αὐτῶν αὐξανομένας
καὶ τὰ φρονήματα ὁρῶν. πυθόμενος δὲ ὁ Δεκέβαλος τὴν ὁρμὴν
αὐτοῦ ἐφοβήθη, ἅτε καὶ εὖ εἰδὼς ὅτι πρότερον μὲν οὐ Ῥωμαίους
ἀλλὰ Δομιτιανὸν ἐνενικήκει, τότε δὲ ὡς πρός τε Ῥωμαίους καὶ
πρὸς Τραϊανὸν αὐτοκράτορα πολεμήσοι.
πλεῖστον γὰρ ἐπί τε δικαιότητι καὶ ἐπ´ ἀνδρείᾳ τῇ τε ἁπλότητι
τῶν ἠθῶν διέπρεπε. τῷ τε γὰρ σώματι ἔρρωτο (δεύτερον
γὰρ καὶ τεσσαρακοστὸν ἄγων ἔτος ἦρξεν) ὡς ἐξ ἴσου πάντα τοῖς
ἄλλοις τρόπον τινὰ πονεῖσθαι, καὶ τῇ ψυχῇ ἤκμαζεν ὡς μήθ´ ὑπὸ
νεότητος θρασύνεσθαι μήθ´ ὑπὸ γήρως ἀμβλύνεσθαι. καὶ οὔτ´
ἐφθόνει οὔτε καθῄρει τινά, ἀλλὰ καὶ πάνυ πάντας τοὺς ἀγαθοὺς
ἐτίμα καὶ ἐμεγάλυνε, καὶ διὰ τοῦτο οὔτε ἐφοβεῖτό τινα αὐτῶν οὔτε
ἐμίσει. διαβολαῖς τε ἥκιστα ἐπίστευε, καὶ ὀργῇ ἥκιστα ἐδουλοῦτο,
τῶν τε χρημάτων τῶν ἀλλοτρίων ἴσα καὶ φόνων τῶν ἀδίκων ἀπείχετο.
| [68,6] 6. Après un séjour de quelque temps à Rome, il entreprit une expédition
contre les Daces, songeant à leur conduite, affligé du tribut qu'ils
recevaient tous les ans, et voyant avec leurs troupes s'augmenter leur
orgueil. Décébale fut saisi de crainte à la nouvelle de sa marche ; il
savait bien, en effet, qu'auparavant ce n'était pas les Romains, mais
Domitien qu'il avait vaincu, et qu'à présent il allait avoir à combattre
contre les Romains et contre l'empereur Trajan. Car Trajan brillait au
plus haut degré par sa justice, par son courage et par la simplicité de
ses moeurs. Il avait le corps robuste (il était âgé de quarante-deux ans
lorsqu'il parvint à l'empire), en sorte qu'il supportait autant que
personne toutes les fatigues ; une âme vigoureuse, en sorte qu'il était
exempt et de la fougue de la jeunessse et de la lenteur de la vieillesse.
Bien loin de porter envie à quelqu'un ou de l'amoindrir, il honorait tous
les gens de bien et il les élevait en dignité ; aussi ne redoutait-il et
ne haïssait-il aucun d'eux. Il n'ajoutait aucune foi aux calomnies, et
n'était nullement esclave de la colère. Il s'abstenait du bien d'autrui à
l'égal des meurtres injustes.
|