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[38,28] ἂν μὲν γάρ μοι πεισθῇς, καὶ πάνυ ἀγαπήσεις χωρίον τέ τι
παραθαλασσίδιον ἔξω πάτου ἐκλεξάμενος, καὶ ἐν αὐτῷ γεωργῶν τε ἅμα
καὶ συγγράφων τι, ὡς Ξενοφῶν, ὡς Θουκυδίδης. τό τε γὰρ εἶδος τοῦτο
τῆς σοφίας διαρκέστατόν ἐστι καὶ παντὶ μὲν ἀνδρὶ πάσῃ δὲ πολιτείᾳ
ἁρμοδιώτατον, καὶ ἡ φυγὴ φέρει τινὰ σχολὴν γονιμωτέραν. ὥστ´
εἴπερ ὄντως ἀθάνατος καθάπερ ἐκεῖνοι γενέσθαι ἐθέλεις, ζήλωσον
αὐτούς. τά τε γὰρ ἐπιτήδεια ἀρκοῦντα ἔχεις καὶ οὔτ´ ἀξιώματός
τινος προσδέῃ. εἰ γάρ τι καὶ ἐν τούτοις ἀγαθόν ἐστιν, ὑπάτευκας·
καὶ πλέον οὐδὲν τοῖς καὶ δεύτερον καὶ τρίτον ἢ καὶ τέταρτον ἄρξασι,
πλὴν γραμμάτων ἀριθμοῦ κενῶν, ὑπάρχει, ἃ μήτε ζῶντα
μήτ´ ἀποθανόντα τινὰ ὠφελεῖ. οὔκουν ἂν ἕλοιο οὔτε Κορουῖνος
οὔτε Μάριος ὁ ἑπτάκις ὑπατεύσας μᾶλλον ἢ Κικέρων εἶναι. οὔτ´
αὖ ἡγεμονίας τινὸς ἐπιθυμεῖς, ὅς γε καὶ τὴν δοθεῖσάν σοι ἐξέστης,
καταφρονήσας μὲν τῶν ἀπ´ αὐτῆς κερδῶν, καταφρονήσας δὲ καὶ
τῆς ὀλιγοχρονίου τε καὶ ὑπευθύνου πᾶσι τοῖς συκοφαντεῖν ἐθέλουσιν
ἐξουσίας. καὶ ταῦτ´ εἶπον οὐχ ὅτι καὶ ἀναγκαῖόν τι αὐτῶν
πρὸς εὐδαιμονίαν ἐστίν, ἀλλ´ ὅτι καὶ ἐν τοῖς πολιτικοῖς, ἐπείπερ
ἐχρῆν, ἱκανῶς ἐξήτασαι, ἵνα καὶ ἐξ ἐκείνων τὸ διάφορον τῶν βίων
μαθὼν τὰ μὲν ἕλῃ τὰ δὲ ἀπώσῃ καὶ τὰ μὲν διώξῃς τὰ δὲ φύγῃς.
σμικρὸς γὰρ ὁ βίος ἡμῶν, καὶ δεῖ σε μὴ πάντα αὐτὸν ἄλλοις
βιῶναι, ἀλλ´ ἤδη τι καὶ σεαυτῷ χαρίσασθαι. σκέψαι δὲ ὅσον ἥ τε
ἡσυχία τῆς ταραχῆς καὶ ἡ εὔροια τῶν θορύβων ἥ τε ἐλευθερία
τῆς δουλείας καὶ ἡ ἀσφάλεια τῶν κινδύνων διαφέρει, ἵν´ ἐπιθυμήσῃς
ζῆσαι ὡς ἐγώ σοι παραινῶ. οὕτω μὲν γὰρ εὐδαιμονήσεις, καί σου
μέγα ὄνομα {εἶ} καὶ τοῦτο ἀεὶ καὶ ζῶντος ἐπὶ τούτῳ καὶ τελευτήσαντος ἔσται·
| [38,28] "Si tu suis mes conseils, tu pourras être heureux en
choisissant pour retraite un domaine situé sur le bord de
la mer, loin des lieux battus par la foule ; en t'y livrant à
l'agriculture et à quelque composition littéraire, à
l'exemple de Xénophon et de Thucydide. Cette vie
philosophique procure le calme le plus durable : elle
convient plus que toute autre à l'homme, et c'est celle qui
se concilie le mieux avec toutes les formes de
gouvernement : l'exil donne un loisir plus fécond. Si tu
veux être immortel, comme ces grands hommes, imite-les.
Tu possèdes tout ce qui est nécessaire à la vie, et ta
carrière n'est point dépourvue d'éclat. Tu as même été
consul, si c'est un avantage, et ceux qui l'ont été deux,
trois ou quatre fois ne l'emportent sur toi que par de
vains chiffres, qui ne leur seront d'aucune utilité, ni
pendant la vie, ni après leur mort. Tu ne saurais donc
mieux aimer être Corvinus ou Marius, qui fut six fois
consul, que d'être Cicéron. Tu n'ambitionnes pas non
plus le gouvernement d'une province, toi qui refusas
celle qui t'avait été donnée, toi qui fus insensible au gain
qu'elle t'aurait procuré, toi qui dédaignas une autorité
éphémère et exposée aux attaques de tous ceux qui
veulent la calomnier. Je t'ai rappelé ces souvenirs, non
qu'ils soient nécessaires à ton bonheur ; mais parce que
tu as été mêlé suffisamment aux affaires publiques,
lorsque les circonstances l'exigeaient : ainsi, après avoir
connu par ta propre expérience les différents genres de
vie, tu peux choisir et poursuivre l'un, repousser et éviter
l'autre ; car la vie humaine est courte, et tu ne dois pas la
consacrer tout entière aux autres ; mais en garder une
partie pour toi-même. Considère combien la tranquillité
est préférable à l'agitation, le calme au tumulte, la liberté
à l'esclavage, la sécurité au danger, et tu aspireras à vivre
comme je te le conseille. Alors tu seras heureux, et ton
nom sera grand non seulement pendant que tu mèneras
ce genre de vie ; mais même après ta mort."
| [38,29] ἂν δὲ δὴ τήν τε κάθοδον σπουδάσῃς καὶ τὴν ἐν τῇ πολιτείᾳ
λαμπρότητα ζηλώσῃς, δυσχερὲς μὲν οὐδὲν εἰπεῖν βούλομαι,
φοβοῦμαι δέ, ἔς τε τὰ πράγματα ἀποβλέπων καὶ τὴν σὴν παρρησίαν
ἐννοῶν, τήν τε δύναμιν καὶ τὸ πλῆθος τῶν ἀντιστασιωτῶν σου
θεωρῶν, μήποτέ τι καὶ αὖθις σφαλῇς. καὶ εἰ μὲν ἐν φυγῇ γένοιο,
μεταγνώσῃ μόνον, εἰ δέ τι ἕτερον ἀνήκεστον πάθοις, οὐδὲ μετανοῆσαι
δυνήσῃ. καίτοι πῶς μὲν οὐ δεινόν, πῶς δ´ οὐκ αἰσχρὸν
ἀποτμηθῆναί τέ τινος τὴν κεφαλὴν καὶ ἐς τὴν ἀγορὰν τεθῆναι,
κἂν οὕτω τύχῃ, καὶ ἄνδρα τινὰ αὐτῇ καὶ γυναῖκα ἐνυβρίσαι; καί
με μὴ ὡς φαῦλά σοι οἰωνιζόμενον μισήσῃς, ἀλλ´ ὡς διοσημίαν τινὰ
προδεικνύντα φύλαξαι. μηδέ σε ἐξαπατάτω τοῦθ´, ὅτι καὶ φίλους
τινὰς τῶν δυνατῶν ἔχεις· οὐδὲν γάρ σε ὠφελήσουσιν οἱ δοκοῦντες
φιλεῖν πρὸς τοὺς ἐχθρῶς διακειμένους, ὥσπερ που καὶ πεπείρασαι.
οἱ γὰρ δυναστείας ἐρῶντες παρ´ οὐδὲν πάντα τἆλλα, πρὸς τὸ τυχεῖν
ὧν βούλονται, τίθενται, ἀλλὰ καὶ τοὺς φιλτάτους καὶ τοὺς
συγγενεστάτους πολλάκις ἀντὶ τῶν ἐχθίστων ἀντικαταλλάσσονται."
| [38,29] "Si tu soupires après ton retour, si tu ambitionnes un
rang éclatant dans la République, je ne veux rien dire qui
puisse t'affliger ; mais, quand je songe à l'état de Rome,
quand je réfléchis à la liberté de ton éloquence, quand je
vois combien tes adversaires sont puissants et
nombreux, je crains que tu ne coures un jour quelque
nouveau danger. Alors, si tu étais condamné à l'exil, tu
serais en proie au repentir, et si tu étais encore frappé de
quelque coup terrible, tu ne pourrais pas même te
repentir. Et comment, ne serait-il pas horrible et honteux
que la tête d'un citoyen soit tranchée et exposée dans le
Forum, qu'elle puisse être insultée par un homme et
même par une femme ? Ne va pas me haïr comme un
homme qui t'annonce de funestes présages : tiens plutôt
compte de mes paroles, comme d'une prédiction lue
dans les cieux. Ne t'abuse point, parce que tu as pour
amis quelques hommes puissants. Ceux qui paraissent
être tes amis ne te seront d'aucun secours contre tes
ennemis : tu l'as déjà éprouvé. Aux yeux des hommes
qui ont la passion du pouvoir, tout s'efface quand il
s'agit d'atteindre au but de leur ambition : souvent même
ils traitent leurs meilleurs amis et leurs proches parents
comme leurs plus grands ennemis."
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