Texte grec :
[4,3] CHAPITRE III : ΠΟΛΕΜΩΝ.
16) Πολέμων Φιλοστράτου μὲν ἦν υἱός, Ἀθηναῖος τῶν δήμων Οἴηθεν.
Νέος δ' ὢν ἀκόλαστός τε καὶ διακεχυμένος ἦν οὕτως ὥστε καὶ περιφέρειν
ἀργύριον πρὸς τὰς ἑτοίμους λύσεις τῶν ἐπιθυμιῶν· ἀλλὰ καὶ ἐν τοῖς
στενωποῖς διέκρυπτεν. Καὶ ἐν Ἀκαδημείᾳ πρὸς κίονί τινι τριώβολον εὑρέθη
προσπεπλασμένον αὐτοῦ διὰ τὴν) ὁμοίαν τῇ προειρημένῃ πρόφασιν.
Καί ποτε συνθέμενος τοῖς νέοις μεθύων καὶ ἐστεφανωμένος εἰς τὴν
Ξενοκράτους ᾖξε σχολήν· ὁ δὲ οὐδὲν διατραπεὶς εἶρε τὸν λόγον ὁμοίως· ἦν
δὲ περὶ σωφροσύνης. Ἀκούων δὴ τὸ μειράκιον κατ' ὀλίγον ἐθηράθη καὶ
οὕτως ἐγένετο φιλόπονος ὡς ὑπερβάλλεσθαι τοὺς ἄλλους καὶ αὐτὸν
διαδέξασθαι τὴν σχολήν, ἀρξάμενον ἀπὸ τῆς ἕκτης καὶ δεκάτης καὶ
ἑκατοστῆς Ὀλυμπιάδος.
17) Φησὶ δὲ Ἀντίγονος ὁ Καρύστιος ἐν τοῖς Βίοις
τὸν πατέρα αὐτοῦ πρῶτόν τε εἶναι τῶν πολιτῶν καὶ ἁρματοτροφῆσαι.
Φυγεῖν δὲ τὸν Πολέμωνα καὶ δίκην κακώσεως ὑπὸ τῆς γυναικός, ὡς
μειρακίοις συνόντα. Τοσοῦτον δὲ ἐπιτεῖναι τὸ ἦθος ἀρξάμενον φιλοσοφεῖν,
ὥστ' ἐπὶ ταὐτοῦ σχήματος τῆς μορφῆς πάντοτε μένειν. Ἀλλὰ καὶ τὴν φωνὴν
ἀναλλοίωτος ἦν· διὸ καὶ θηραθῆναι Κράντορα ὑπ' αὐτοῦ. Κυνὸς γοῦν
λυττῶντος καὶ) τὴν ἰγνύαν διασπάσαντος μόνον μὴ ὠχριᾶσαι· καὶ ταραχῆς
γενομένης ἐπὶ τῆς πόλεως πυθόμενον τὸ γινόμενον ἄτρεπτον μεῖναι.
18) Ἔν τε τοῖς θεάτροις ἀσυμπαθέστατος ἦν. Νικοστράτου γοῦν ποτε τοῦ
ἐπικαλουμένου Κλυταιμνήστρα ἀναγινώσκοντός τι τοῦ ποιητοῦ αὐτῷ τε καὶ
Κράτητι, τὸν μὲν συνδιατίθεσθαι, τὸν δ' ἴσα καὶ μὴ ἀκοῦσαι. Καὶ ὅλως ἦν
τοιοῦτος οἷόν φησι Μελάνθιος ὁ ζωγράφος ἐν τοῖς Περὶ ζωγραφικῆς· φησὶ
γὰρ δεῖν αὐθάδειάν τινα καὶ ξηρότητα τοῖς ἔργοις ἐπιτρέχειν, ὁμοίως δὲ κἀν
τοῖς ἤθεσιν.
Ἔφασκε δὲ ὁ Πολέμων δεῖν ἐν τοῖς πράγμασι γυμνάζεσθαι καὶ μὴ ἐν
τοῖς διαλεκτικοῖς θεωρήμασι, καθάπερ ἁρμονικόν τι τέχνιον καταπιόντα καὶ
μὴ μελετήσαντα, ὡς κατὰ μὲν τὴν ἐρώτησιν θαυμάζεσθαι, κατὰ δὲ τὴν
διάθεσιν ἑαυτοῖς μάχεσθαι. Ἦν οὖν ἀστεῖός τις καὶ γενναῖος, παρῃτημένος
ἅ φησιν Ἀριστοφάνης περὶ Εὐριπίδου, « Ὀξωτὰ καὶ σιλφιωτά· » Ἅπερ, ὡς
αὐτός φησι,
« Καταπυγοσύνη ταῦτ' ἐστὶ πρὸς κρέας μέγα. »
19) Ἀλλὰ μὴν οὐδὲ καθίζων ἔλεγε πρὸς τὰς θέσεις, φασί, περιπατῶν
δὲ ἐπεχείρει. Διὰ δὴ οὖν τὸ φιλογενναῖον ἐτιμᾶτο ἐν τῇ πόλει. Οὐ μὴν ἀλλὰ
καὶ ἐκπεπατηκὼς ἦν διατρίβων ἐν τῷ κήπῳ, παρ' ὃν οἱ μαθηταὶ μικρὰ
καλύβια ποιησάμενοι κατῴκουν πλησίον τοῦ μουσείου καὶ τῆς ἐξέδρας.
Ἐῴκει δὴ ὁ Πολέμων κατὰ πάντα ἐζηλωκέναι τὸν Ξενοκράτην· καὶ
ἐρασθῆναι αὐτοῦ φησιν Ἀρίστιππος ἐν τῷ τετάρτῳ Περὶ παλαιᾶς τρυφῆς.
Ἀεὶ γοῦν ἐμέμνητο ὁ Πολέμων αὐτοῦ, τήν τ' ἀκακίαν καὶ τὸν αὐχμὸν
ἐνεδέδυτο τἀνδρὸς καὶ τὸ βάρος οἱονεὶ Δώριός τις οἰκονομία. 20) Ἦν δὲ καὶ
φιλοσοφοκλῆς, καὶ μάλιστα ἐν ἐκείνοις ὅπου κατὰ τὸν κωμικὸν τὰ ποιήματα
αὐτῷ
Κύων τις ἐδόκει συμποιεῖν Μολοττικός,
καὶ ἔνθα ἦν κατὰ τὸν Φρύνιχον
Οὐ γλύξις οὐδ' ὑπόχυτος, ἀλλὰ Πράμνιος.
Ἔλεγεν οὖν τὸν μὲν Ὅμηρον ἐπικὸν εἶναι Σοφοκλέα, τὸν δὲ Σοφοκλέα
Ὅμηρον τραγικόν.
Ἐτελεύτησε δὲ γηραιὸς ἤδη ὑπὸ φθίσεως, ἱκανὰ συγγράμματα
καταλιπών. Καὶ ἔστιν ἡμῶν εἰς αὐτόν·
Οὐκ ἀΐεις; Πολέμωνα κεκεύθαμεν, ὃν θέτο τῇδε
ἀρρωστίη, τὸ δεινὸν ἀνθρώποις πάθος.
Οὐ μᾶλλον Πολέμωνα, τὸ σῶμα δέ· τοῦτο γὰρ αὐτὸς
βαίνων ἐς ἄστρα διάβορον θῆκεν χαμαί.
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Traduction française :
[4,3] CHAPITRE III : POLÉMON.
(16) Polémon, fils de Philostrate, était Athénien, du dème d’Oeé.
Jeune, il s’abandonnait sans réserve à ses passions ; son incontinence
était telle qu’il portait toujours de l’argent sur lui pour être à même de
satisfaire à son gré ses désirs ; il en cachait même dans les carrefours
pour cet usage, et l’on trouva une fois jusque dans l’Académie, au pied
d’une colonne, trois oboles qu’il y avait mises en réserve dans le même but.
Un jour il se réunit à d’autres jeunes gens, et se précipita, ivre, une
couronne sur la tête, dans l’école de Xénocrate ; mais celui-ci, sans se
déconcerter, continua son discours qui roulait sur la tempérance ;
Polémon , séduit peu à peu par ses paroles, montra dès lors une telle
ardeur qu’il surpassa tous ses compagnons et succéda à Xénocrate, la
cent seizième olympiade. (17) Antigonus de Caryste dit, dans les Vies,
que son père était le premier citoyen de sa bourgade, et qu’il envoyait des
chars concourir aux jeux publics. Il ajoute que Polémon eut à
repousser en justice les imputations de sa femme qui l’accusait d’avoir
des relations avec des jeunes gens ; mais qu’il réforma si bien ses mœurs
et prit un tel empire sur lui-même à partir du moment où il se livra à la
philosophie, que, dès lors, on ne vit jamais la moindre altération sur
son visage : sa voix même ne trahissait jamais aucune émotion, et c’est là
ce qui lui gagna Crantor. Un chien lui ayant un jour déchiré le mollet, il ne
pâlit même pas. Une autre fois, une sédition s’étant élevée dans la ville, il
demanda tranquillement ce qui se passait et resta indifférent. (18) Il n’était
pas moins impassible au théâtre : Nicostrate, celui qu’on appelait
Clytemnestre, ayant récité une composition poétique devant lui et devant
Cratès, ce dernier fut vivement ému ; mais Polémon demeura comme s’il
n’avait rien entendu. En un mot, il possédait au plus haut degré les
qualités que réclame Mélanthius le peintre, dans le traité de la Peinture. Il
dit en effet qu’il doit y avoir dans les œuvres d’art, aussi bien que dans les
mœurs, une certaine rigidité, une certaine dureté de touche.
Polémon prétendait qu’il faut s’exercer à l’action et non aux
spéculations dialectiques : il disait que, quand on est devenu habile dans
ce dernier art, quand on a pris ce breuvage agréable, mais tout factice, on
peut bien briller dans la discussion, mais non mettre de l’harmonie dans
sa conduite et dans son caractère. Il était affable, généreux, et évitait ce
qu’Aristophane reproche à Euripide : « Un discours parfumé et musqué,»
ce qui n’est, suivant le même auteur,
Qu’une chair flasque et mollasse, au prix d’un bon morceau succulent.
(19) Il ne discutait jamais assis, mais répondait en se promenant aux
questions qu’on lui adressait. La noblesse de ses sentiments lui avait
concilié l’estime universelle à Athènes. Cependant il vivait isolé, se
renfermant dans son jardin, auprès duquel ses disciples s’étaient construit
de modestes demeures, à portée de son école.
Polémon paraît avoir pris pour modèle en tout Xénocrate, auquel il
avait lui-même inspiré une vive passion, suivant Aristippe, au quatrième
livre de la Sensualité antique. Il avait sans cesse à la bouche le nom de
Xénocrate , et, semblable à une maison dorienne, grave et sévère, il
s’était paré de la pureté, de la gravité, de la sévérité de son maître. (20) Il
aimait beaucoup Sophocle, surtout dans les passages où, suivant
l’expression d’un comique, il paraît avoir eu pour collaborateur un chien
molosse ; dans ceux où il ne verse pas
Un vin doux et mélangé, mais un vin généreux de Pramnos.
Aussi disait-il qu’Homère était un Sophocle épique et Sophocle un
Homère tragique.
Il mourut d’épuisement, dans un âge avancé, laissant un assez grand
nombre d’ouvrages.
J’ai fait sur lui ces vers :
Passant, n’entends-tu pas ? je couvre Polémon qu’a conduit ici un mal
cruel, l’épuisement. Que dis-je ? ce n’est pas Polémon, car il n’a laissé que
son corps à la terre au moment ou il s’est élancé vers les astres.
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