[20] (XX) Εἰ δ´ ἔστιν ὅσιόν μοι καὶ θεμιτὸν εἰπεῖν ἃ φρονῶ, δοκεῖ μοι κράτιστον
ἂν γενέσθαι τὸ προοίμιον, εἰ τὸ τελευταῖον αὐτοῦ μέρος τῇ προθέσει
προσήρμοσε πάντα τὰ ἐν μέσῳ παραλιπὼν καὶ τοῦτον τὸν τρόπον αὐτὸ
κατεσκεύασε·
« Θουκυδίδης Ἀθηναῖος συνέγραψε τὸν πόλεμον τῶν Πελοποννησίων καὶ
Ἀθηναίων, ὡς ἐπολέμησαν πρὸς ἀλλήλους, ἀρξάμενος εὐθὺς καθισταμένου καὶ
ἐλπίσας μέγαν τε ἔσεσθαι καὶ ἀξιολογώτατον τῶν προγεγενημένων·
τεκμαιρόμενος, ὅτι ἀκμάζοντές τε ἦσαν ἐς αὐτὸν ἀμφότεροι παρασκευῇ τῇ
πάσῃ, καὶ τὸ ἄλλο Ἑλληνικὸν ὁρῶν ξυνιστάμενον πρὸς ἑκατέρους, τὸ μὲν
εὐθύς, τὸ δὲ καὶ διανοούμενον. Κίνησις γὰρ αὕτη δὴ μεγίστη τοῖς Ἕλλησιν
ἐγένετο καὶ μέρει τινὶ τῶν βαρβάρων, ὡς δ´ εἰπεῖν καὶ ἐπὶ πλεῖστον
ἀνθρώπων. Τὰ γὰρ πρὸ αὐτῶν καὶ ἔτι παλαιότερα σαφῶς μὲν εὑρεῖν διὰ χρόνου
πλῆθος ἀδύνατον ἦν· ἐκ δὲ τεκμηρίων, ὧν ἐπὶ μακρότατον σκοποῦντι πιστεύειν
ξυμβαίνει, οὐ μεγάλα νομίζω γενέσθαι οὔτε κατὰ τοὺς πολέμους οὔτε ἐς τὰ
ἄλλα· οὔτε ὡς ποιηταὶ ὑμνήκασι περὶ αὐτῶν ἐπὶ τὸ μεῖζον κοσμοῦντες, μᾶλλον
πιστεύων, οὔτε ὡς λογογράφοι συνέθεσαν ἐπὶ τὸ προσαγωγότερον τῇ ἀκροάσει ἢ
ἀληθέστερον, ὄντα ἀνεξέλεγκτα καὶ τὰ πολλὰ ὑπὸ χρόνου αὐτῶν ἀπίστως ἐπὶ τὸ
μυθῶδες ἐκνενικηκότα· εὑρῆσθαι δὲ ἡγησάμενος ἐκ τῶν ἐπιφανεστάτων ὡς
παλαιὰ εἶναι ἀποχρώντως. Καὶ ὁ πόλεμος οὗτος, καίπερ τῶν ἀνθρώπων, ἐν ᾧ
μὲν ἂν πολεμῶσι, τὸν παρόντα ἀεὶ μέγιστον κρινόντων, παυσαμένων δὲ τἀρχαῖα
μᾶλλον θαυμαζόντων, ἀπ´ αὐτῶν τῶν ἔργων σκοποῦσι δηλώσει ὅμως μείζων
γεγενημένος αὐτῶν. Καὶ ὅσα μὲν λόγῳ εἶπον ἕκαστοι ἢ μέλλοντες πολεμήσειν ἢ
ἐν αὐτῷ ἤδη ὄντες, χαλεπὸν τὴν ἀκρίβειαν αὐτὴν τῶν λεχθέντων
διαμνημονεῦσαι ἦν ἐμοί τε ὧν αὐτὸς ἤκουσα καὶ τοῖς ἄλλοθέν ποθεν ἐμοὶ
ἀπαγγέλλουσιν· ὡς δ´ ἂν ἐδόκουν μοι ἕκαστοι περὶ τῶν ἀεὶ παρόντων τὰ
δέοντα μάλιστα εἰπεῖν, ἐχομένῳ ὅ τι ἐγγύτατα τῆς ξυμπάσης γνώμης τῶν
ἀληθῶς λεχθέντων, οὕτως εἴρηται. Τὰ δὲ ἔργα τῶν πραχθέντων ἐν τῷ πολέμῳ
οὐκ ἐκ τοῦ παρατυχόντος ἠξίωσα γράφειν οὐδ´ ὡς ἐμοὶ δοκεῖ, ἀλλ´ οἷς τε
αὐτὸς παρῆ καὶ παρὰ τῶν ἄλλων ὅσον δυνατὸν ἀκριβείᾳ περὶ ἑκάστου
ἐπεξελθών. Ἐπιπόνως δὲ εὑρίσκετο, διότι οἱ παρόντες τοῖς ἔργοις οὐ τὰ αὐτὰ
περὶ τῶν αὐτῶν ἔλεγον, ἀλλ´ ὡς ἑκατέρων τις εὐνοίας ἢ μνήμης ἔχοι. Καὶ ἐς
μὲν ἀκρόασιν ἴσως τὸ μὴ μυθῶδες αὐτῶν ἀτερπέστερον φανεῖται· ὅσοι δὲ
βουλήσονται τῶν γεγονότων τὸ σαφὲς σκοπεῖν καὶ τῶν μελλόντων ποτὲ αὖθις
κατὰ τὸ ἀνθρώπινον τοιούτων καὶ παραπλησίων ἔσεσθαι, ὠφέλιμα κρίνειν αὐτά,
ἀρκούντως ἕξει· κτῆμά τε ἐς ἀεὶ μᾶλλον ἢ ἀγώνισμα εἰς τὸ παραχρῆμα ἀκούειν
ξύγκειται. Τῶν δὲ πρότερον ἔργων μέγιστον ἐπράχθη τὸ Μηδικόν· καὶ τοῦτο
ὅμως δυεῖν ναυμαχίαιν καὶ πεζομαχίαιν τὴν κρίσιν ἔσχεν· τούτου δὲ τοῦ
πολέμου μῆκός τε μέγα προὔβη παθήματά τε ξυνηνέχθη γενέσθαι ἐν αὐτῷ τῇ
Ἑλλάδι οἷα οὐχ ἕτερα ἐν ἴσῳ χρόνῳ. Οὔτε γὰρ πόλεις τοσαίδε ληφθεῖσαι
ἠρημώθησαν αἳ μὲν ὑπὸ βαρβάρων, αἳ δ´ ὑπὸ σφῶν αὐτῶν ἀντιπολεμούντων, εἰσὶ
δὲ αἳ καὶ οἰκήτορας μετέβαλον ἁλισκόμεναι· οὔτε φυγαὶ τοσαίδε ἀνθρώπων καὶ
φόνος ὃ μὲν κατ´ αὐτὸν τὸν πόλεμον, ὃ δὲ διὰ τὸ στασιάζειν. Τά τε πρότερον
ἀκοῇ μὲν λεγόμενα, ἔργῳ δὲ σπανιώτερον βεβαιούμενα οὐκ ἄπιστα κατέστη
σεισμῶν τε πέρι, οἳ ἐπὶ πλεῖστον ἅμα μέρος γῆς καὶ ἰσχυρότατοι οἱ αὐτοὶ
ἐπέσχον, ἡλίου τε ἐκλείψεις, αἳ πυκνότεραι παρὰ τὰς ἐκ τοῦ πρὶν χρόνου
μνημονευομένας ξυνέβησαν, αὐχμοί τε ἔστι παρ´ οἷς μεγάλοι, καὶ ἀπ´ αὐτῶν
καὶ λιμοί· καὶ ἡ οὐχ ἥκιστα βλάψασα καὶ μέρος τι φθείρασα, ἡ λοιμώδης
νόσος· ταῦτα γὰρ πάντα μετὰ τοῦδε τοῦ πολέμου ἅμα ξυνεπέθετο. Ἤρξαντο δὲ
αὐτοῦ Ἀθηναῖοι καὶ Πελοποννήσιοι λύσαντες τὰς τριακοντούτεις σπονδάς, αἳ
αὐτοῖς ἐγένοντο μετ´ Εὐβοίας ἅλωσιν. Διότι δὲ ἔλυσαν, τὰς αἰτίας προέγραψα
πρῶτον καὶ τὰς διαφορὰς τοῦ μή τινα ζητῆσαί ποτε, ἐξ ὅτου τοσοῦτος πόλεμος
τοῖς Ἕλλησι κατέστη.»
| [20] (XX) S'il m'est permis de dire toute ma pensée, son introduction aurait
été à l'abri de la critique, s'il avait placé la fin immédiatement après
le début, et laissé de côté tous les faits intermédiaires ; s'il eût dit par exemple :
« Thucydide d'Athènes a écrit la guerre qui eut lieu entre les
Lacédémoniens et les Athéniens, ainsi que les divers exploits des deux
peuples ; il en a rassemblé tous les événements, depuis son origine, parce
qu'elle lui a paru plus importante que toutes celles qui l'ont précédée ;
il a fondé ses conjectures sur ce que les nations belligérantes étaient
dans la plus grande prospérité, et déployèrent toutes leurs forces. De
plus, le reste de la Grèce se déclara pour un des deux peuples, dès le
commencement, ou du moins en formait le projet. Ce fut la plus terrible
des secousses non seulement pour la Grèce, mais encore pour les pays
barbares, et pour la plupart des nations. Les événements qui l'ont
immédiatement précédée et d'autres plus anciens encore ne peuvent être
bien connus, à cause de l'éloigneraient des temps ; mais d'après toutes
les probabilités, et autant qu'il m'est possible d'en juger avec quelque
assurance, en portant mes regards vers les siècles passés, ils furent peu
remarquables, tant dans la guerre que dans tout le reste. Je n'ajoute pas
une grande confiance aux poètes, toujours portés à embellir, ni aux
anciens historiens, qui s'attachèrent à charmer le lecteur, bien plus qu'à
faire connaître la vérité. Le temps a relégué leurs récits dans le domaine
de la fable : ils ne paraissent plus croyables aujourd'hui. J'espère avoir
appuyé tous les faits sur des conjectures aussi certaines que le
permettait la distance des temps. Quoique les hommes soient portés à
regarder comme très importantes les entreprises auxquelles ils prennent
part, tandis que, rendus au repos, ils admirent davantage les événements
anciens, à en juger par les faits mêmes, cette guerre paraîtra toujours
plus mémorable que celles qui l'avaient précédée. Rappeler avec exactitude
tous les discours prononcés, lorsqu'on se préparait à la guerre ou pendant
sa durée, c'était un travail difficile pour moi, quand je les avais
entendus, et pour ceux qui m'en rendaient compte, quelle que fût la source
où ils les avaient puisés. J'ai cherché à donner à chaque orateur le ton
qu'exigeaient les circonstances, et je me suis tenu, pour le fond des
pensées, le plus près qu'il était possible de ce qui avait dû être dit en
effet. Quant aux faits, je n'ai pas cru devoir les raconter au hasard et
tels qu'ils m'ont été transmis, ni m'en rapporter à moi seul ; j'ai pris
auprès des autres les informations les plus exactes même sur ceux dont
j'avais été le témoin. Il m'a été difficile de découvrir la vérité, parce
que ceux qui avaient assisté aux événements les racontaient diversement,
d'après leurs dispositions personnelles, ou la fidélité de leur mémoire.
Mon ouvrage, dépouillé du merveilleux, aura peut-être moins d'agréments ;
mais si les hommes jaloux de connaître le passé ou de lire dans l'avenir,
qui, suivant toutes les probabilités, doit ressembler au passé, retirent
quelque utilité de mon travail, tous mes vœux seront satisfaits. C'est un
monument durable que j'ai voulu composer pour la postérité, et non pas un
écrit d'apparat, destiné à n'amuser qu'un moment. Jusqu'à cette époque,
l'événement le plus mémorable, dans la Grèce, fut l'expédition contre les
Perses : cependant, deux combats sur mer et un combat sur terre la
conduisirent bientôt à son terme. La guerre dont j'entreprends le récit
fut d'une longue durée et attira sur la Grèce des désastres tels que
jamais on n'en vit d'aussi grands dans le même espace de temps. Jamais
autant de villes ne tombèrent au pouvoir des ennemis, ou ne furent
détruites ; les unes par les barbares, les autres par les deux peuples
rivaux : plusieurs même eurent de nouveaux maîtres et changèrent
d'habitants. Jamais on ne vit tant de bannissements ni tant de massacres,
nés de la guerre ou des divisions. Des événements connus par la tradition,
mais rarement confirmés par les effets, ne doivent plus paraître
incroyables, après les violents tremblements de terre qui, durant cette
guerre, agitèrent une partie de l'Univers : il y eut aussi beaucoup plus
d'éclipsés de soleil qu'on n'en compta dans tout autre temps ; de grandes
sécheresses, et, avec elles, la famine et des maladies contagieuses qui
firent des ravages horribles et dévorèrent une partie de la population; en
un mot, tous les fléaux à la fois vinrent fondre sur la Grèce. Cette
guerre éclata entre Athènes et le Péloponnèse, à la suite de la violation
des traités qui avaient été conclus pour trente ans, après la prise
d'Eubée. J'ai déjà fait connaître les divisions qui furent la source de
cette rupture, afin qu'on n'ait pas à rechercher un jour l'origine de
cette guerre. »
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