[10,7] Ταῦτ´ εἰπὼν ἀνίστησιν ἐκ τῶν συναρχόντων
Μάρκον Οὐολούσκιον καὶ λέγειν ἐκέλευσεν, ἃ σύνοιδε
τῷ μειρακίῳ. σιωπῆς δὲ γενομένης καὶ πολλῆς ἐξ
ἁπάντων προσδοκίας μικρὸν ἐπισχὼν ὁ Οὐολούσκιος
εἶπεν· Ἐγὼ μάλιστα ἐβουλόμην ἄν, ὦ πολῖται, δίκην
ἰδίαν, ἣν ὁ νόμος δίδωσί μοι, παρὰ τούτου λαβεῖν
δεινὰ καὶ πέρα δεινῶν πεπονθώς· κωλυθεὶς δὲ τούτου
τυχεῖν διὰ πενίαν καὶ ἀσθένειαν καὶ τὸ τῶν πολλῶν
εἷς εἶναι, νῦν γ´ ἡνίκα ἔξεστί μοι τὸ τοῦ μάρτυρος
σχῆμα, ἐπειδὴ οὐ τὸ τοῦ κατηγόρου, λήψομαι. ἃ δὲ
πέπονθα, ὡς ὠμὰ καὶ ἀνήκεστα, ἀκούσατέ μου. ἀδελφὸς
ἦν μοι Λεύκιος, ὃν ἐγὼ πάντων ἀνθρώπων μᾶλλον
ἠγάπησα. οὗτός μοι συνεδείπνει παρὰ φίλῳ, καὶ μετὰ
ταῦτ´ ἀναστάντες τῆς ἐχομένης νυκτὸς ᾠχόμεθα. διεληλυθόσι
δ´ ἡμῖν τὴν ἀγορὰν περιτυγχάνει Καίσων
οὑτοσὶ κωμάζων σὺν ἑτέροις ἀγερώχοις μειρακίοις.
καὶ οὗτοι τὸ μὲν πρῶτον ἔσκωπτόν τε καὶ ὕβριζον εἰς
ἡμᾶς, οἷα μεθύοντες ἂν νέοι καὶ αὐθάδεις {ὡς ἂν} εἰς
ταπεινοὺς καὶ πένητας {ὑβρίσαιεν}, ὡς δ´ ἠγανακτοῦμεν
πρὸς αὐτούς, ἐλεύθερον ῥῆμα εἰς τοῦτον εἶπε. δεινὸν
δ´ ἡγησάμενος οὑτοσὶ Καίσων ἀκοῦσαί τι, ὧν οὐκ
ἐβούλετο, προσδραμὼν αὐτῷ παίων καὶ λακτίζων καὶ
πᾶσαν ἄλλην ὠμότητα καὶ ὕβριν ἐνδεικνύμενος ἀποκτείνει.
ἐμοῦ δὲ κεκραγότος καὶ ἀμυνομένου τοσαῦτα
ὅσα ἐδυνάμην, ἐκεῖνον ἤδη νεκρὸν κείμενον ἀφεὶς ἐμὲ
πάλιν ἔπαιε καὶ οὐ πρότερον ἐπαύσατο, πρὶν ἀκίνητόν
τε καὶ ἄφωνον εἶδεν ἐρριμμένον, δόξας εἶναι νεκρόν.
μετὰ δὲ ταῦτα οὗτος μὲν ἀπιὼν ᾤχετο χαίρων ὥσπερ
ἐπὶ καλῷ ἔργῳ· ἡμᾶς δὲ οἱ παραγενόμενοι μετὰ ταῦτα
αἵματι πεφυρμένους αἴρουσι καὶ εἰς τὴν οἰκίαν ἀπεκόμισαν,
τὸν μὲν ἀδελφόν μου {Λεύκιον} νεκρόν, ὥσπερ
ἔφην, ἐμὲ δὲ ἡμιθανῆ καὶ ἐλπίδας ἔχοντα τοῦ ζῆν
ὀλίγας. ταῦτα δ´ ἐγένετο Ποπλίου Σερουιλίου καὶ
Λευκίου Αἰβουτίου τὴν ὑπατείαν ἐχόντων, ὅτε ἡ μεγάλη
νόσος κατέλαβε τὴν πόλιν, ἧς ἀπελαύσαμεν καὶ ἡμεῖς
ἀμφότεροι. τότε μὲν οὖν δίκην οὐχ οἷόν τ´ ἦν μοι
παρ´ αὐτοῦ λαβεῖν τεθνηκότων ἀμφοτέρων τῶν ὑπάτων·
Λευκίου δὲ Λοκρητίου καὶ Τίτου Οὐετουρίου παρα–
λαβόντων τὴν ἀρχὴν βουλόμενος αὐτὸν ἀγαγεῖν ὑπὸ
δίκην ἐκωλύθην διὰ τὸν πόλεμον, ἐκλελοιπότων ἀμφοτέρων
τῶν ὑπάτων τὴν πόλιν. ὡς δὲ ἀνέστρεψαν
ἀπὸ τῆς στρατείας, πολλάκις αὐτὸν ἐπὶ τὴν ἀρχὴν
καλῶν, ὁσάκις προσέλθοιμι - καὶ ταῦτα δὴ πολλοὶ
τῶν πολιτῶν ἴσασι - πληγὰς ἐλάμβανον ὑπ´ αὐτοῦ.
ταῦτ´ ἐστὶν ἃ πέπονθα, ὦ δημόται, μετὰ πάσης ἀληθείας
εἰρημένα πρὸς ὑμᾶς.
| [10,7] XI. Ayant parlé de la sorte, il fit lever Marcus Volscius, un de ses collègues, et lui dit de rapporter ce qu'il savait de la conduite du jeune Caeson. Aussitôt on fit silence, et toute l'assemblée fut en suspens. Volscius un moment après, reparla en ces termes.
« J'aurais souhaité, citoyens, être en état de poursuivre ce jeune homme en mon propre et privé nom, comme les lois me le permettent, pour tirer vengeance des insultes atroces et plus qu'atroces que j'ai reçues de lui. Mais ma pauvreté, mon indigence, et mon peu de crédit en qualité de simple citoyen, m'ont ôté jusqu'ici les moyens de me faire justice. Aujourd'hui que j'en trouve l'occasion, si je ne prends le personnage d'accusateur, au moins je ferai celui de témoin. Vous allez apprendre la manière indigne dont Caeson m'a traité, les outrages sanglants qu'il m'a faits, et les cruautés qu'il a exercées sur moi. J'avais un frère nommé Lucius, qui m'était plus cher que tout ce que j'ai au monde. Un jour nous soupâmes ensemble chez un ami. Après le repas comme nous nous en revenions de nuit, nous passâmes par la place publique, où nous rencontrâmes Caeson qui venait de faire la débauche avec une troupe de jeunes libertins. D'abord ils commencent à se moquer de nous: ils nous disent mille injures, telles qu'une jeunesse insolente et pleine de vin a coutume d'en vomir contre les pauvres citoyens qu'elle regarde comme des gens de peu de chose. Indigné de ces outrages, mon frère s'échappe en quelques paroles un peu fortes contre un de la troupe. Caeson ne peut souffrir qu'on lui réponde rien de désagréable: il entre en fureur, il se jette sur mon frère, il le maltraite, tantôt à coups de poing, tantôt à coups de pied ; il lui fait {mille cruautés,} mille indignités, enfin il le terrasse et le tue. Alors je me mets à crier, et je défends mon frère de toutes mes forces. Caeson le lasse mort sur la place: il se jette sur moi, il ne cesse de m'outrager, il frappe, il redouble les coups, jusqu'a ce qu'étendu sur le pavé sans voix, et sans mouvement, il me croie mort. Il quitte prise pour lors, il rejoint ses camarades, il s'applaudit du coup qu'il a fait. Un moment après, quelques passants accourus au bruit, nous trouvent baignés dans notre sang, et nous emportent chez nous : mon frère Lucius était déjà mort, comme j'ai dit, et moi presque sans vie je n'avais pas grande espérance d'en réchapper. Ce malheur nous arriva sous le consulat de Publius Servilius et de Lucius Aebutius, l'année que Rome fut affligée de cette terrible maladie dont nous eûmes tous deux notre part. Je ne pus pas dans ce temps-là demander justice de l'insulte que Caeson avait faite, parce que la contagion avait enlevé les deux consuls. {Lucius} Lucretius et Titus Venturius entrés en charge, je voulus le faire assigner pour comparaitre à leur tribunal. Mais il ne fût pas possible d'y réussir : la guerre se déclara, il fallut que les deux {consuls} sortissent de Rome pour ouvrir la campagne. Quand ils furent revenus de leur expédition, je le citai plusieurs fois devant eux, mais pour toute justice je ne gagnai que des coups qu'il me donna: j'en appelle à témoins, plusieurs citoyens qui le savent. Voila, Romains, ce qui m'est arrivé et ce que j'ai souffert : voila le récit fidèle de mon infortune, je ne vous dis que la vérité,.
|