Texte grec :
[8,79] Ὁ μὲν οὖν πιθανώτερος τῶν παραδεδομένων
ὑπὲρ τοῦ ἀνδρὸς λόγων τοιόσδε ἐστίν· δεῖ
δὲ καὶ τὸν ἧσσον πιθανόν, ἐπειδὴ κἀκεῖνος πεπίστευται
ὑπὸ πολλῶν καὶ ἐν γραφαῖς ἀξιοχρέοις φέρεται, μὴ
παρελθεῖν. λέγεται δή τισιν, ὡς ἀδήλου πᾶσιν οὔσης
ἔτι τῆς ὑπ´ αὐτοῦ συσκευαζομένης τυραννίδος, πρῶτος
ὑποπτεύσας ὁ πατὴρ τοῦ Κασσίου καὶ διὰ τῆς ἀκριβεστάτης
βασάνου τὸ πρᾶγμα ἐξετάσας ἧκεν ἐπὶ τὴν
βουλήν· ἔπειτα κελεύσας ἐλθεῖν τὸν υἱὸν μηνυτής τε
καὶ κατήγορος αὐτοῦ ἐγένετο· καταγνούσης δὲ καὶ τῆς
βουλῆς ἀγαγὼν αὐτὸν εἰς τὴν οἰκίαν ἀπέκτεινε. τὸ
μὲν οὖν πικρὸν καὶ ἀπαραίτητον τῆς τῶν πατέρων
ὀργῆς εἰς υἱοὺς ἀδικοῦντας καὶ μάλιστ´ ἐν τοῖς τότε
Ῥωμαίοις οὐδὲ ταύτην ἀπωθεῖται τὴν πρόφασιν· ἐπεὶ
καὶ πρότερον Βροῦτος ὁ τοὺς βασιλεῖς ἐκβαλὼν ἀμφοτέρους τοὺς
υἱοὺς ἐδικαίωσε κατὰ τὸν τῶν κακούργων νόμον ἀποθανεῖν, καὶ
πελέκεσι τοὺς αὐχένας ἀπεκόπησαν, ὅτι συμπράττειν τοῖς βασιλεῦσιν
ἐδόκουν τὴν κάθοδον. καὶ μετὰ ταῦτα Μάλλιος τὸν Γαλατικὸν
πόλεμον στρατηγῶν τὸν υἱὸν ἀριστεύοντα κατὰ πόλεμον τῆς μὲν
ἀνδρείας ἕνεκα τοῖς ἀριστείοις στεφάνοις
ἐκόσμησεν, ἀπείθειαν δ´ ἐπικαλῶν, ὅτι οὐκ ἐν ᾧ ἐτάχθη
φρουρίῳ ἔμεινεν, ἀλλὰ παρὰ τὴν ἐπιταγὴν τοῦ ἡγεμόνος ἐξῆλθεν
ἀγωνιούμενος, ὡς λιποτάκτην ἀπέκτεινε.
καὶ ἄλλοι πολλοὶ πατέρες, οἱ μὲν ἐπὶ μείζοσιν αἰτίαις,
οἱ δ´ ἐπ´ ἐλάττοσιν, οὔτε φειδὼ τῶν παίδων οὔτ´ ἔλεον
ἔσχον. κατὰ μὲν δὴ τοῦτ´ οὐκ ἀξιῶ, ὥσπερ ἔφην,
προβεβλῆσθαι τὸν λόγον ὡς ἀπιθανόν· ἐκεῖνα δέ με
ἀνθέλκει τεκμηρίων ὄντα οὔτ´ ἐλάχιστα οὔτ´ ἀπίθανα
καὶ πρὸς τὴν ἑτέραν ἄγει συγκατάθεσιν, ὅτι μετὰ τὸν
θάνατον τοῦ Κασσίου ἥ τ´ οἰκία κατεσκάφη, καὶ μέχρι
τοῦδε ἀνεῖται ὁ τόπος αὐτῆς αἴθριος ἔξω τοῦ νεὼ τῆς
Γῆς, ὃν ὑστέροις ἡ πόλις κατεσκεύασε χρόνοις ἐν μέρει
τινὶ αὐτῆς κατὰ τὴν ἐπὶ Καρίνας φέρουσαν ὁδόν,
καὶ τὰ χρήματα αὐτοῦ τὸ κοινὸν ἀνέλαβεν· ἐξ ὧν ἀπαρχὰς ἐν
ἄλλοις τε ἱεροῖς ἀνέθηκε, καὶ δὴ καὶ τῇ
Δήμητρι τοὺς χαλκέους ἀνδριάντας ἐπιγραφαῖς δηλοῦντας, ἀφ´
ὧν εἰσι χρημάτων ἀπαρχαί. εἰ δέ γ´ ὁ
πατὴρ μηνυτής τε καὶ κατήγορος καὶ κολαστὴς αὐτοῦ
ἐγένετο, οὔτ´ ἂν ἡ οἰκία αὐτοῦ κατεσκάφη οὔτε ἡ
οὐσία ἐδημεύθη. Ῥωμαίοις γὰρ οὐθὲν ἴδιόν ἐστι κτῆμα
ζώντων ἔτι τῶν πατέρων, ἀλλὰ καὶ τὰ χρήματα καὶ
τὰ σώματα τῶν παίδων, ὅ τι βούλονται διατιθέναι,
τοῖς πατράσιν ἀποδέδοται. ὥστ´ οὐκ ἂν δήπου τὴν
τοῦ πατρὸς οὐσίαν τοῦ μηνύσαντος τὴν τυραννίδα ἐπὶ
τοῖς τοῦ παιδὸς ἀδικήμασιν ἀφαιρεῖσθαι καὶ δημεύειν
ἡ πόλις ἠξίου. διὰ μὲν δὴ ταῦτα τῷ προτέρῳ συγκατατίθεμαι τῶν
λόγων μᾶλλον· ἔθηκα δ´ ἀμφοτέρους, ἵνα ἐξῇ τοῖς ἀναγνωσομένοις,
ὁποτέρῳ βούλονται τῶν λόγων, προσέχειν.
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Traduction française :
[8,79] V. Voila ce que l'on a dit de plus vraisemblable et de plus digne de
foi sur la mort de Cassius. Il ne faut pas néanmoins omettre une autre
manière dont on la raconte : quoique moins probable que la première, elle
a cependant trouvé quelque créance dans les esprits, et des auteurs
assez dignes de foi l'ont rapportée. Il y en a qui disent que le père de
Cassius fut le premier qui eut quelque soupçon des pratiques secrètes
qu'il employait pour parvenir à la tyrannie, qu'avant que ses pernicieux
desseins eussent éclaté, il éclaira sa conduite par lui-même, et qu'ayant
découvert qu'il était coupable, il s'adressa à l'assemblée des sénateurs :
qu'ensuite il fit venir son fils devant le sénat où il découvrit ses intrigues,
et devint lui-même son accusateur ; qu'après que le conseil l'eut
condamné, il le ramena chez lui où il lui ôta la vie.
VI. LA sévérité inexorable avec laquelle les pères traitaient leurs
enfants qui se trouvaient atteints de quelque crime, surtout chez les
Romains des premiers siècles, ne permet pas de rejeter entièrement cette
opinion. C'est ainsi qu'avant lui, Brutus qui châtia les rois de la ville de
Rome, avait condamné à mort ses deux fils, et leur avait fait couper la
tête, parce qu'ils étaient accusés et convaincus de favoriser le
rétablissement des tyrans. Manlius dans la suite, qui commanda en
qualité de général dans la guerre contre les Gaulois, exerça la même
rigueur envers son fils: il lui donna des couronnes de valeur pour avoir
signalé sa bravoure dans la guerre, mais il le fit mourir comme
déserteur et comme coupable de désobéissance, parce qu'au lieu de
demeurer dans le poste où on l'avait placé, il en était sorti sans l'ordre de
son général pour livrer bataille. On trouve encore plusieurs autres pères
qui sans aucune compassion pour leurs fils et sans épargner leur propre
sang, les ont punis avec la dernière sévérité les uns pour de grandes
fautes, les autres pour des sujets plus légers.
VII. QUANT à ces raisons, je ne prétends pas, comme j'ai déjà dit,
rejeter entièrement cette opinion comme improbable. Mais des raisons
plus fortes me font embrasser la première narration. En effet, après la
mort de Cassius sa maison fut rasée : on en voit encore aujourd'hui la
place vide, elle est hors du temple de la déesse de la Terre, que la ville fit
bâtir dans la suite sur une partie de ce terrain, dans la rue qui conduit aux
Carines. En second lieu ses biens furent confisqués et vendus au profit
du public : on en mit les prémices dans différents temples, et on en fit des
statues de bronze à Cérès, qui prouvent par leurs inscriptions de quels
biens proviennent ces présents. Or si le père de Cassius eût été le
délateur et l'accusateur de son fils, et qu'il l'eût lui-même puni de mort,
sa maison n'aurait point été rasée, ni ses biens confisqués. Car chez les
Romains les enfants ne possèdent rien en propre du vivant de leurs pères
: ceux ci peuvent disposer non seulement de tous les biens de la famille,
mais encore de la vie même de leurs enfants , de sorte que le peuple
Romain n'aurait pas enlevé ni confisqué les biens de Cassius pour le
crime de son fils, s'il s'en fut rendu lui même le dénonciateur. C'est ce qui
fait que j'embrasse plus volontiers la première opinion : je les ai
cependant rapportées toutes deux, afin que les lecteurs choisissent celle
qui leur plaira le plus.
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