[150] Ἐπειδὴ γὰρ ἡ μὲν εἰρήνη τέλος εἶχεν αὕτη, ἡ τοῦ Φιλοκράτους, ᾗ
συνεῖπεν οὗτος, οἱ δὲ πρέσβεις ἀπήρκεσαν οἱ τοῦ Φιλίππου λαβόντες τοὺς
ὅρκους ̔καὶ μέχρι τούτου γ' οὐδὲν ἀνήκεστον ἦν τῶν πεπραγμένων, ἀλλ'
αἰσχρὰ μὲν ἡ εἰρήνη καὶ ἀναξία τῆς πόλεως, ἀντὶ δὲ τούτων δὴ τὰ θαυμάσι'
ἀγάθ' ἡμῖν ἔμελλεν ἔσεσθαἰ, ἠξίουν (ὑμᾶς) ἐγὼ καὶ τούτοις ἔλεγον πλεῖν τὴν
ταχίστην ἐφ' Ἑλλησπόντου, καὶ μὴ προέσθαι μηδ' ἐᾶσαι κατασχεῖν Φίλιππον
μηδὲν ἐν τῷ μεταξὺ χρόνῳ τῶν ἐκεῖ χωρίων. (151) ᾜδειν γὰρ ἀκριβῶς ὅτι
πάνθ' ὅσ' ἂν ἐκ πολέμου γιγνομένης εἰρήνης προεθῇ, ταῦτα τοῖς ἀμελήσασιν
ἀπόλλυται· οὐδεὶς γὰρ πώποθ' ὑπὲρ τῶν ὅλων πεισθεὶς εἰρήνην ἄγειν ὑπὲρ τῶν
ἐγκαταλειφθέντων ἐξ ἀρχῆς ἠθέλησεν πολεμεῖν, ἀλλὰ ταῦθ' οἱ προλαβόντες
ἔχουσιν. Χωρὶς δὲ τούτων δυοῖν χρησίμοιν οὐ διαμαρτήσεσθαι τὴν πόλιν
ἡγούμην πλευσάντων ἡμῶν· ἢ γὰρ παρόντων καὶ κατὰ τὸ ψήφισμ' αὐτὸν
ἐξορκωσάντων, ἃ μὲν εἰλήφει τῆς πόλεως, ἀποδώσειν, τῶν δὲ λοιπῶν
ἀφέξεσθαι, (152) ἢ μὴ ποιοῦντος ταῦτα ἀπαγγελεῖν ἡμᾶς εὐθέως δεῦρο, ὥστ'
ἐν ἐκείνοις τοῖς πόρρω καὶ ἐλάττοσι τὴν πλεονεξίαν καὶ τὴν ἀπιστίαν
ἰδόντας ὑμᾶς περὶ τῶνδε τῶν ἐγγὺς καὶ μειζόνων, λέγω δὲ Φωκέων καὶ Πυλῶν,
οὐ προήσεσθαι· μὴ προλαβόντος δ' ἐκείνου ταῦτα μηδ' ὑμῶν ἐξαπατηθέντων
ἅπαντ' ἐν ἀσφαλεῖ τὰ πράγμαθ' ὑμῖν ἔσεσθαι, καὶ παρ' ἑκόντος ὑπάρξειν
αὐτοῦ τὰ δίκαια. (153) Καὶ ταῦτ' εἰκότως οὕτως ὑπελάμβανον ἕξειν. Εἰ γὰρ
ἦσαν, ὡς ἦσαν τότε, Φωκεῖς σῷοι καὶ Πύλας εἶχον, ἐκεῖνος μὲν οὐδὲν ἂν ὑμῖν
εἶχ' ἀνατείνασθαι φοβερόν, δι' ὃ τῶν δικαίων ἄν τι παρείδετε· οὔτε γὰρ
κατὰ γῆν παρελθὼν οὔτε ναυσὶ κρατήσας εἰς τὴν Ἀττικὴν ἥξειν ἔμελλεν· ὑμεῖς
δ' ἐκείνου παραχρῆμα, εἰ μὴ τὰ δίκαια ποιοίη, κλείσειν τὰ ἐμπόρια, καὶ
χρημάτων τ' ἐν σπάνει καὶ τῶν ἄλλων ἐν πολιορκίᾳ πάλιν αὐτὸν καταστήσειν,
ὥστ' ἐκεῖνος ὁ δουλεύσων ἔμελλεν ἔσεσθαι τοῖς ἀπὸ τῆς εἰρήνης
λυσιτελοῦσιν, οὐχ ὑμεῖς.
(154) Καὶ ταῦθ' ὅτι οὐκ ἐπὶ τοῖς συμβεβηκόσι νῦν πλάττομαι καὶ
προσποιοῦμαι, ἀλλὰ τότ' εὐθὺς ἐγνώκειν καὶ προεωρώμην ὑπὲρ ὑμῶν καὶ
τούτοις ἔλεγον, ἐκεῖθεν εἴσεσθε. Ἐπειδὴ γὰρ ἐκκλησία μὲν οὐκέτ' ἦν
ὑπόλοιπος οὐδεμία διὰ τὸ προκατακεχρῆσθαι, οὗτοι δ' οὐκ ἀπῇσαν, ἀλλ' αὐτοῦ
διέτριβον, γράφω ψήφισμα βουλεύων, τὴν βουλὴν ποιήσαντος τοῦ δήμου κυρίαν,
ἀπιέναι τοὺς πρέσβεις τὴν ταχίστην, τὸν δὲ στρατηγὸν Πρόξενον κομίζειν
αὐτοὺς ἐπὶ τοὺς τόπους ἐν οἷς ἂν ὄντα Φίλιππον πυνθάνηται, γράψας ὥσπερ
νῦν λέγω, τοῖς ῥήμασιν οὕτως ἄντικρυς. Καί μοι λέγε τοῦτο τὸ ψήφὶσμα
λαβών.
Ψήφισμα.
(155) Ἐνθένδε μὲν τοίνυν αὐτοὺς ἐξήγαγον οὕτως ἄκοντας, ὡς καθαρῶς οἷς
μετὰ ταῦτ' ἐποίουν εἴσεσθε. Ἐπειδὴ δ' ἀφικόμεθ' εἰς Ὠρεὸν καὶ συνεμείξαμεν
τῷ Προξένῳ, ἀμελήσαντες οὗτοι τοῦ πλεῖν καὶ τὰ προστεταγμένα πράττειν
ἐπορεύοντο κύκλῳ, καὶ πρὶν εἰς Μακεδονίαν ἐλθεῖν, τρεῖς καὶ εἴκοσιν ἡμέρας
ἀνηλώσαμεν· τὰς δ' ἄλλας πάσας καθήμεθ' ἐν Πέλλῃ, πρὶν Φίλιππον ἐλθεῖν,
σὺν αἷς ἐπορεύθημεν ὁμοῦ πεντήκονθ' ὅλας. (156) Ἐν δὲ τούτῳ Δορίσκον,
Θρᾴκην, τἀπὶ τειχῶν, Ἱερὸν ὄρος, πάντα τὰ πράγματα, ἐν εἰρήνῃ καὶ σπονδαῖς
ᾕρει καὶ διῳκεῖθ' ὁ Φίλιππος, πολλὰ λέγοντος ἐμοῦ καὶ θρυλοῦντος ἀεί, τὸ
μὲν πρῶτον ὡς ἂν εἰς κοινὸν γνώμην ἀποφαινομένου, μετὰ ταῦτα δ' ὡς
ἀγνοοῦντας διδάσκοντος, τελευτῶντος δ' ὡς ἂν πρὸς πεπρακότας αὑτοὺς καὶ
ἀνοσιωτάτους ἀνθρώπους οὐδὲν ὑποστελλομένου. (157) Ὁ δὲ τούτοις ἀντιλέγων
φανερῶς καὶ ἅπασιν ἐναντιούμενος οἷς ἔλεγον μὲν ἐγώ, ἐψήφιστο δ' ὑφ' ὑμῶν,
οὗτος ἦν. Εἰ δὲ καὶ πᾶσιν ἤρεσκε ταῦτα τοῖς ἄλλοις πρέσβεσιν, αὐτίκ'
εἴσεσθε. Ἐγὼ μὲν γὰρ οὐδέν πω λέγω περὶ οὐδενὸς οὐδ' αἰτιῶμαι, οὐδ'
ἀναγκασθέντ' αὐτῶν οὐδένα δεῖ δοκεῖν χρηστὸν εἶναι τήμερον, ἀλλὰ δι' αὑτὸν
καὶ τὸ μὴ κεκοινωνηκέναι τῶν ἀδικημάτων. Ὅτι μὲν γὰρ αἰσχρὰ καὶ δεινὰ καὶ
οὐ προῖκα τὰ πεπραγμένα, πάντες ὑμεῖς ἑοράκατε· οἵτινες δ' οἱ τούτων
μετεσχηκότες, αὐτὸ δηλώσει.
(158) Ἀλλὰ νὴ Δί' ἐν τούτῳ τῷ χρόνῳ τοὺς ὅρκους ἔλαβον παρὰ τῶν συμμάχων,
ἢ τἄλλ' ἃ προσῆκεν ἐποίησαν. Πολλοῦ γε καὶ δεῖ, ἀλλὰ τρεῖς μῆνας ὅλους
ἀποδημήσαντες καὶ χιλίας λαβόντες δραχμὰς ἐφόδιον παρ' ὑμῶν, παρ' οὐδεμιᾶς
πόλεως, οὔθ' ὅτ' ἐκεῖσ' ἐπορεύοντο οὔθ' ὅτ' ἐκεῖθεν δεῦρο, τοὺς ὅρκους
ἔλαβον, ἀλλ' ἐν τῷ πανδοκείῳ τῷ πρὸ τοῦ Διοσκορείου ̔εἴ τις ὑμῶν εἰς Φερὰς
ἀφῖκται, οἶδ' ὃ λέγὠ, ἐνταῦθ' ἐγίγνονθ' οἱ ὅρκοι, ὅτε δεῦρ' ἤδη τὸ
στράτευμ' ἄγων ἐβάδιζε Φίλιππος, αἰσχρῶς, ἄνδρες Ἀθηναῖοι, καὶ ἀναξίως
ὑμῶν. (159) Καίτοι τοῦτο Φίλιππος ἁπάντων ἂν ἐτιμήσατο πλείστου τοῦτον τὸν
τρόπον πραχθῆναι. Τήν τε γὰρ εἰρήνην οὐχὶ δυνηθέντων ὡς ἐπεχείρησαν οὗτοι,
« πλὴν Ἁλέων καὶ Φωκέων, » γράψαι, ἀλλ' ἀναγκασθέντος ὑφ' ὑμῶν τοῦ
Φιλοκράτους ταῦτ' ἀπαλεῖψαι, γράψαι δ' ἄντικρυς, « Ἀθηναίους καὶ τοὺς
Ἀθηναίων συμμάχους, » οὐκ ἐβούλετο τοῦτον ὀμωμοκέναι τὸν ὅρκον οὐδένα τῶν
αὑτοῦ συμμάχων ̔οὐ γὰρ αὐτῷ συστρατεύσειν ἐφ' ἃ νῦν ἔχει τῶν ὑμετέρων
ἔμελλον, ἀλλ' ἕξειν πρόφασιν τοὺς ὅρκους,
| [150] Lorsque cette paix de Philocrate, appuyée par l'accusé, eut été
conclue, lorsque les envoyés de Philippe furent repartis avec nos
serments, rien n'était encore perdu sans ressource : le traité, il est
vrai, n'était ni honorable, ni digne de la République; mais nous devions
recevoir de merveilleux dédommagements. Je vous demandais un ordre de
départ, je pressais mes collègues de s'embarquer au plus tôt pour
l'Hellespont, de ne rien négliger, de ne pas laisser Philippe, dans l'intervalle, s'emparer de quelque place de ces contrées, (151) persuadé
que tout ce qui est pris durant les négociations de la paix est perdu pour
le parti qui s'endort. Aucun peuple, en effet, déterminé à la paix pour
un bien général, n'a jamais voulu recommencer la guerre pour réparer
quelques négligences ; et le conquérant garde ses dernières conquêtes.
D'ailleurs, notre voyage par mer assurait, dans ma pensée, deux
avantages à la République. Présent sur les lieux et faisant prêter
serment à Philippe, d'après le décret, ou nous l'aurions obligé de rendre
ce qu'il avait pris à la République, et de ne pas toucher au reste; (152)
ou, s'il ne l'eût point fait, nous vous l'aurions mandé sur-le-champ. Par
là, instruits de son avidité et de sa mauvaise foi dans des objets
éloignés et moins essentiels, vous ne lui auriez pas abandonné deux postes
voisins et importants, la Phocide et les Thermopyles. Par là encore,
Philippe n'ayant pas fait cet envahissement, et Athènes n'ayant pas donné
dans le piège, vous auriez été à l'abri de toute crainte, et lui-même vous
aurait donné satisfaction. (153) Et mes conjectures étaient fondées. Car,
si la Phocide était, comme alors, debout et maîtresse des Thermopyles, ce
prince ne pourrait lever sur vous une main menaçante, pour vous forcer à
céder vos droits. Sans passage sur terre, sans supériorité maritime, il
n'aurait pu pénétrer dans l'Attique; et, s'il eût refusé de vous faire
justice, vous pouviez à l'instant lui fermer tous les ports, l'appauvrir,
le bloquer, lui couper toutes ses ressources. Ainsi, c'est Philippe, ce
n'est pas Athènes qui eût fléchi pour posséder les avantages de la paix.
(154) Et ces réflexions, je ne viens pas aujourd'hui les modeler sur
l'événement, les revendiquer après coup; je les faisais dès lors; je
lisais pour vous dans l'avenir; j'avertissais mes collègues : en voici la
preuve. Le Peuple n'avait plus à s'assembler, puisque tout était décidé;
les députés n'étaient point partis, et perdaient ici leur temps. Alors,
comme membre du Conseil que le Peuple avait chargé de régler le départ, je
propose, par un arrêté, que l'ambassade parte au plus tôt, et se rende,
sous la conduite du général Proxénos, dans les lieux où il apprendra la
présence de Philippe. Tels étaient les termes mêmes de cet acte qu'on va lire.
Lecture de l'Arrêté du Conseil.
(155) J'entraînai donc mes collègues malgré eux, comme le prouvera
nettement leur conduite postérieure. Arrivés à Oréos, et réunis au
général, au lieu de s'embarquer, conformément à leurs instructions, ils
parcoururent un long circuit; et, avant d'arriver en Macédoine, nous
avions déjà dépensé vingt-trois jours; nous restâmes longtemps à Pella,
inactifs et attendant Philippe ; de sorte que cinquante journées forment
le total de ce voyage. (156) Que se passait-il alors ? Doriskos, les Forts
de Thrace, Mont-Sacré, tout se rangeait sous la loi du monarque,
pendant les ratifications de la paix ; et moi, je ne cessais de murmurer,
de protester, d'abord par l'exposé de mon opinion devant mes collègues,
ensuite par les leçons qui éclairent l'ignorance, enfin par les reproches
qu'on lance aux scélérats, aux perfides qui se sont vendus. (157) Celui
qui me contredisait avec éclat, celui qui combattait tous mes avis, tous
vos ordres, c'était Eschine. Les autres députés pensaient-ils tous comme
lui? vous le saurez bientôt. Je ne parle d'aucun d'eux, je ne les accuse
pas encore. N'en forçons pas un seul à prouver aujourd'hui sa probité;
qu'ils le fassent spontanément, et poussés par leur seule innocence.
(158) Ainsi, honte, crime, vénalité, voilà ce que vous avez tous vu
jusqu'ici. Quant à ceux qui y ont pris part, les faits mêmes les
désigneront. Mais, du moins, pendant ce long intervalle, ont-ils pris les
serments des alliés de Philippe? ont-ils rempli leurs autres devoirs? Non,
mille fois non ! Absents d'Athènes pendant trois mois entiers, ayant reçu
de vous, pour leurs dépenses, mille drachmes, indemnité plus forte que
celles qu'allouent les autres Républiques, ils n'ont fait jurer le traité
à aucun peuple, ni à leur départ, ni à leur retour. Seulement, dans une
auberge située en face du temple des Dioscures et connue de ceux d'entre
vous qui ont fait le voyage de Phères, ils ont reçu la parole de Philippe,
lorsque déjà il marchait vers l'Attique, à la tête d'une armée : quelle
honte, quel affront pour vous, hommes d'Athènes! (159) Mais Philippe
attachait le plus haut prix à ce que tout se passât ainsi. Comme les
coupables n'avaient pu, malgré leurs efforts, exclure du traité les Aliens
et les Phocidiens; comme vous aviez forcé Philocrate à effacer cette
exception, et à désigner formellement les Athéniens et les alliés
d'Athènes, Philippe ne voulait pas qu'aucun de ses alliés prêtât un
serment dont celui-ci se serait prévalu pour ne point concourir à ses
usurpations sur nous;
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