[5,9] CHAPITRE IX.
Ἀλλ´, ὡς ἔοικεν, ἔλαθον ὑπὸ φιλοτιμίας ἀποδεικτικῆς περαιτέρω τοῦ δέοντος
παρεκβάς. ἐπιλείψει γάρ με ὁ βίος τὸ πλῆθος τῶν συμβολικῶς φιλοσοφούντων
παρατιθέμενον. μνήμης τε οὖν ἕνεκεν καὶ συντομίας καὶ τοῦ πρὸς τὴν ἀλήθειαν
ἀνατετάσθαι τοιαῦταί τινες αἱ τῆς βαρβάρου φιλοσοφίας γραφαί. τῶν γὰρ
πολλάκις αὐταῖς πλησιαζόντων καὶ δοκιμασίαν δεδωκότων κατά τε τὴν πίστιν
κατά τε τὸν βίον. ἅπαντα μόνων ἐθέλουσιν ὑπάρχειν τὴν ὄντως οὖσαν
φιλοσοφίαν καὶ τὴν ἀληθῆ θεολογίαν. ναὶ μὴν ἐξηγητοῦ τινος καὶ καθηγητοῦ
χρείαν ἔχειν ἡμᾶς βούλονται· οὕτως γὰρ καὶ σπουδασθήσεσθαι μᾶλλον καὶ
ὠφελήσειν τοὺς ἀξίους αὐτῶν διελάμβανον καὶ ἀνεξαπατήτους 〈τούτους〉
ἔσεσθαι, παρὰ τῶν εὖ εἰδότων παραλαμβάνοντας. ἄλλως τε καὶ πάνθ´, ὅσα διά
τινος παρακαλύμματος ὑποφαίνεται, μείζονά τε καὶ σεμνοτέραν δείκνυσι τὴν
ἀλήθειαν. καθάπερ τὰ μὲν ὥρια διαφαίνοντα τοῦ ὕδατος, αἱ μορφαὶ δὲ διὰ τῶν
παρακαλυμμάτων συνεμφάσεις τινὰς αὐταῖς προσχαριζομένων. ἐλεγκτικαὶ γὰρ
αἱ περιαύγειαι πρὸς τῷ καὶ τὰ φανερὰ μονοτρόπως κατανοεῖσθαι. συνεκδοχὰς
τοίνυν πλείονας ἐξὸν εἶναι λαμβάνειν. ὥσπερ οὖν λαμβάνομεν, ἐκ τῶν μετ´
ἐπικρύψεως εἰρημένων. ὧν οὕτως ἐχόντων σφάλλεται μὲν ὁ ἄπειρος καὶ ἀμαθής,
καταλαμβάνει δὲ ὁ γνωστικός. ἤδη γοῦν οὐδὲ τοῖς τυχοῦσιν ἤθελον ἀνέδην
ἐκκεῖσθαι πάντα,
« Οὐδὲ κοινοποιεῖσθαι τὰ σοφίας ἀγαθὰ τοῖς μηδ´ ὄναρ τὴν ψυχὴν
κεκαθαρμένοις· οὐ γὰρ θέμις ὀρέγειν τοῖς ἀπαντῶσι τὰ μετὰ τοσούτων ἀγώνων
πορισθέντα οὐδὲ μὴν βεβήλοις τὰ τοῦ λόγου μυστήρια διηγεῖσθαι.»
Φασὶ γοῦν Ἵππαρχον τὸν Πυθαγόρειον, αἰτίαν ἔχοντα γράψασθαι τὰ τοῦ
Πυθαγόρου σαφῶς, ἐξελαθῆναι τῆς διατριβῆς καὶ στήλην ἐπ´ αὐτῷ γενέσθαι οἷα
νεκρῷ. διὸ καὶ ἐν τῇ βαρβάρῳ φιλοσοφίᾳ νεκροὺς καλοῦσι τοὺς ἐκπεσόντας τῶν
δογμάτων καὶ καθυποτάξαντας τὸν νοῦν τοῖς πάθεσι τοῖς ψυχικοῖς.
« Τίς γὰρ μετοχὴ δικαιοσύνῃ καὶ ἀνομίᾳ,» κατὰ τὸν θεῖον ἀπόστολον, « Ἢ τίς
κοινωνία φωτὶ πρὸς σκότος; τίς δὲ συμφώνησις Χριστοῦ πρὸς Βελίαρ; ἢ τίς μερὶς
πιστῷ μετὰ ἀπίστου;»
Δίχα γὰρ Ὀλυμπίων καὶ φθιμένων τιμαί.
« Διὸ καὶ ἐξέρχεσθε ἐκ μέσου αὐτῶν καὶ ἀφορίσθητε, λέγει κύριος, καὶ
ἀκαθάρτου μὴ ἅπτεσθε· κἀγὼ εἰσδέξομαι ὑμᾶς καὶ ἔσομαι ὑμῖν εἰς πατέρα, καὶ
ὑμεῖς ἔσεσθέ μοι εἰς υἱοὺς καὶ θυγατέρας.»
Οὐ μόνοι ἄρα οἱ Πυθαγόρειοι καὶ Πλάτων τὰ πολλὰ ἐπεκρύπτοντο, ἀλλὰ καὶ οἱ
Ἐπικούρειοί φασί τινα καὶ παρ´ αὐτοῦ ἀπόρρητα εἶναι καὶ μὴ πᾶσιν ἐπιτρέπειν
ἐντυγχάνειν τούτοις τοῖς γράμμασιν. ἀλλὰ καὶ οἱ Στωϊκοὶ λέγουσι Ζήνωνι τῷ
πρώτῳ γεγράφθαι τινά, ἃ μὴ ῥᾳδίως ἐπιτρέπουσι τοῖς μαθηταῖς ἀναγινώσκειν,
μὴ οὐχὶ πεῖραν δεδωκόσι πρότερον, εἰ γνησίως φιλοσοφοῖεν. λέγουσι δὲ καὶ οἱ
Ἀριστοτέλους τὰ μὲν ἐσωτερικὰ εἶναι τῶν συγγραμμάτων αὐτοῦ, τὰ δὲ κοινά τε
καὶ ἐξωτερικά. ἀλλὰ καὶ οἱ τὰ μυστήρια θέμενοι, φιλόσοφοι ὄντες, τὰ αὑτῶν
δόγματα τοῖς μύθοις κατέχωσαν, ὥστε μὴ εἶναι ἅπασι δῆλα· εἶθ´ οἳ μέν,
ἀνθρωπίνας κατακρύψαντες δόξας, τοὺς ἀμαθεῖς ἐκώλυσαν ἐντυγχάνειν, τὴν δὲ
τῶν ὄντων ὄντως ἁγίαν καὶ μακαρίαν θεωρίαν οὐ παντὸς μᾶλλον ἐπικεκρύφθαι
συνέφερεν; πλὴν οὔτε τὰ τῆς βαρβάρου φιλοσοφίας οὔθ´ οἱ μῦθοι οἱ
Πυθαγόρειοι, ἀλλ´ οὐδ´ οἱ παρὰ Πλάτωνι ἐν Πολιτείᾳ Ἠρὸς τοῦ Ἀρμενίου καὶ ἐν
Γοργίᾳ Αἰακοῦ καὶ Ῥαδαμάνθυος καὶ ἐν Φαίδωνι ὁ τοῦ Ταρτάρου καὶ ἐν
Πρωταγόρᾳ ὁ Προμηθέως καὶ Ἐπιμηθέως πρός τε τούτοις ὁ τοῦ πολέμου τῶν
Ἀτλαντικῶν καὶ τῶν Ἀθηναίων ἐν τῷ Ἀτλαντικῷ, οὐχ ἁπλῶς κατὰ πάντα τὰ
ὀνόματα ἀλληγορητέοι, ἀλλ´ ὅσα τῆς διανοίας τῆς καθόλου σημαντικά, καὶ δὴ
ταῦτα ἐξεύροιμεν ἂν διὰ συμβόλων ὑπὸ παρακαλύμματι τῇ ἀλληγορίᾳ
μηνυόμενα. Ναὶ μὴν καὶ ἡ Πυθαγόρου συνουσία καὶ ἡ πρὸς τοὺς ὁμιλητὰς διττὴ
κοινωνία, ἀκουσματικοὺς τοὺς πολλοὺς καί τινας μαθηματικοὺς ἑτέρους
καλοῦσα, τοὺς γνησίως ἀνθαπτομένους τῆς φιλοσοφίας,
ἀλλὰ τὸ μὲν φάσθαι, τὸ δὲ 〈καὶ〉 κεκρυμμένον εἶναι
πρὸς τοὺς πολλοὺς ᾐνίσσετο. ἴσως δὲ καὶ τὸ διττὸν ἐκεῖνο εἶδος τῶν ἐκ τοῦ
Περιπάτου, τὸ ἐν τοῖς λόγοις ἔνδοξόν τε καὶ ἐπιστημονικὸν καλούμενον, οὐκ
ἀπήλλακται 〈τοῦ〉 διαιρεῖν δόξαν ἀπό τε εὐκλείας καὶ ἀληθείας.
Μηδέ σέ γ´ εὐδόξοιο βιήσεται ἄνθεα τιμῆς
πρὸς θνητῶν ἀνελέσθαι, ἐφ´ ᾧ θ´ ὁσίης πλέον εἰπεῖν.
Αἱ γοῦν Ἰάδες μοῦσαι διαρρήδην λέγουσι τοὺς μὲν πολλοὺς καὶ δοκησισόφους
δήμων ἀοιδοῖσιν ἕπεσθαι καὶ νόμοισι χρέεσθαι, εἰδότας ὅτι πολλοὶ κακοί, ὀλίγοι
δὲ ἀγαθοί· τοὺς ἀρίστους δὲ τὸ κλέος μεταδιώκειν.
« Αἱρεῦνται γάρ», φησίν, «ἓν ἀντὶ πάντων οἱ ἄριστοι κλέος ἀέναον θνητῶν, οἱ δὲ
πολλοὶ κεκόρηνται ὅπως κτήνεα,»
« Γαστρὶ καὶ αἰδοίοις καὶ τοῖς αἰσχίστοις τῶν ἐν ἡμῖν μετρήσαντες τὴν
εὐδαιμονίαν·»
ὅ τ´ Ἐλεάτης Παρμενίδης ὁ μέγας διττῶν εἰσηγεῖται διδασκαλίαν ὁδῶν ὧδέ πως
γράφων·
Ἠμὲν Ἀληθείης εὐπειθέος ἀτρεμὲς ἦτορ,
ἠδὲ βροτῶν δόξας, ταῖς οὐκ ἔνι πίστις ἀληθής.
| [5,9] CHAPITRE IX.
Je crains bien que le désir de prouver l'universalité du langage symbolique ne m'ait
entraîné, à mon insu, dans une trop longue digression. La vie ne me suffirait pas s'il
me fallait énnmérer la multitude des philosophes qui ont emprunté cette forme.
Aider la mémoire, s'exprimer d'une manière plus concise, aiguiser l'intelligence dans
la recherche de la vérité, tel a été le triple but de l'allégorie et du symbolisme chez les
Barbares. Le symbolisme n'admet pour auditeurs que des disciples assidus à
l'interroger, qui ont déjà payé de leur personne, qui, par la vivacité de leur fol et la
pureté de leur conduite, soupirent après la philosophie véritable et la véritable
théologie. Il nous rappelle le besoin que nous avons d'un guide et d'un interprète.
Par-là, nous apportons plus d'effort à cette étude, et nous ne courons pas risque de
nous égarer, puisque la science nous est communiquée par ceux qui la possèdent, et
qui nous ont jugés dignes de participer à ces trésors. Ajoutez à cela que la vérité,
aperçue à travers un voile, prend un aspect plus auguste et plus grandiose, pareille à
ces fruits dont la transparence de l'eau relève la beauté, ou comme ces formes qui se
laissent deviner à travers les vêtements qui les recouvrent, tandis que la lumière, en
frappant de tous côtés sur un objet, en fait saillir les défauts. Encore une réflexion. Il
n'y a qu'une seule manière de comprendre les vérités nues et sans voile. L'homme
ayant reçu la faculté de comprendre de diverses manières, comme il arrive, par
exemple, pour ce qui est presenté sous des formes emblématiques, l'ignorant et
l'inexpérimenté sont inhabiles à pénétrer le mystère, tandis que le Gnostique soulève
aisément tous ces voiles. Les dogmes sacrés ne veulent donc pas être livrés
inconsidérément entre les mains du premier venu, ni les trésors de la sagesse
prostitués à ceux chez lesquels il n'y a rien de pur, pas même le sommeil. De là les
recommandations du secret. Est-il juste, en effet, de prodiguer à tous indistinctement
des biens si laborieusement conquis, et de révéler aux profanes les mystères du Verbe ?
On dit que le pythagoricien Hipparque, accusé par les siens d'avoir divulgué dans
ses écrits les dogmes de Pythagore, fut chassé de l'école, et qu'on lui érigea une
colonne funéraire comme s'il était mort;. Voilà pourquoi la philosophie barbare, c'est-
à-dire, celle des Hébreux et des Chrétiens, appelle du nom de mort quiconque trahit
ses doctrines, et asservit son âme à l'empire des passions. En effet,
« que peut-il y avoir de commun entre la justice et l'iniquité, s'écrie le divin apôtre?
Quelle union entre la lumière et les ténèbres ? Quel accord entre Jésus-Christ et Bélial
? Quelle société entre le fidèle et l'infidèle? »
Les honneurs réservés aux dieux de l'Olympe ne diffèrent-ils pas des honneurs que
l'on accorde aux simples morts ?
« C'est pourquoi, retirez-vous du milieu d'eux, dit le Seigneur; séparez-vous d'eux et
ne touchez point à ce qui est impur, et je vous recevrai ; et je serai votre père : et vous
serez mes fils et mes filles. »
Parmi les philosophes de la Grèce, Platon et les disciples de Pythagore n'étaient
pas les seuls qui fissent un fréquent usage de la langue symbolique. Les Epicuriens se
vantent aussi d'avoir certaines doctrines mystérieuses, et ne permettent pas à tout le
monde de lire les écrits où elles sont consignées. Les Stoïciens attribuent au premier
des Zénon quelques arcanes qu'ils dérobent soigneusement à la connaissance de
leurs disciples, jusqu'à ce qu'ils aient prouvé la sincérité de leur affection pour la
philosophie. L'école d'Aristote a des ouvrages de deux espèces : elle appelle les uns,
ésotériques, ou secrets; le autres exotériques, c'est-à-dire, ouverts à tous. Ce n'est
point assez. Les fondateurs des mystères, adonnés qu'ils étaient a la philosophie,
cachèrent leurs dogmes sous des mythes, afin de les soustraire aux yeux de la
multitude. Quand nous voyons des hommes envelopper de voiles leurs propres
inventions, afin d'en interdire la vue aux ignorants, comment nous étonner ensuite
que la sagesse divine ait caché sous des formes symboliques la sainte et bienheureuse
contemplation de l'éternelle vérité? Toutefois ni les dogmes de la philosophie
barbare, ni les fables de Pythagore, ni celles que Platon raconte dans sa République
sur Eros, fils d'Arménius ; dans son Gorgias sur Éaque et Rhadamante ; dans son
Phédon, sur le tartare ; dans son Protagoras, sur Promethée et Epiméthée ; dans son
Atlantique, sur la guerre qui divisa les Atlantins et les Athéniens, rien de tout cela ne
doit être entendu allégoriquement dans toutes ses parties, mais seulement chaque
fois que la phrase formule une pensée générale. Nous trouverons toujours ces sortes
de pensées revêtues de symboles et cachées sous le voile de l'allégorie.
Pythagore avait des disciples classés suivant les degrés de relations et d'intimité. La
catégorie qui comprenait le plus grand nombre était celle des Acousmatiques, en
français, Auditeurs. L'autre renfermait des disciples de choix, qu'il nommait
Mathématiciens, et qui se livraient avec un zèle ardent à l'étude de la philosophie.
Que signifiait cette délimitation, sinon qu'il y a des choses accessibles au vulgaire et
d'autres choses qu'il tout tenir en réserve ? Il me semble que l'école
péripatéticienne, avec ses catégories des choses probables et des choses scientifiques,
n'est pas loin de distinguer les opinions humaines de la gloire réelle et de l'immuable
vérité.
« Ne te laisse point asservir par le désir des honneurs et des récompenses, fleurs d'un
jour que distribue la main des hommes. Tes paroles en seront plus droites et plus
agréables aux dieux. »
Les muses de l'Ionie disent clairement que le vulgaire et les prétendus sages suivent
en aveugles les poètes et les lois, tout en sachant bien que le grand nombre en est
mauvais, et que de lois et de poètes il y eu a bien peu de bons. Les hommes d'élite, au
contraire, recherchent la gloire véritable.
« Loin d'imiter la multitude qui s'attache à des choses d'un jour, poursuit le même
poète, les hommes d'élite se prennent d'amour pour une gloire immortelle ; mais,
semblable aux animaux, la foule ne songe qu'à satisfaire les appétits les plus
grossiers. L'intempérance, la débauche, voilà l'unique mesure de son bonheur. »
Le célèbre Parménide d'EIée distingue aussi deux voies différentes:
« L'une, dit-il, est celle de la vérité, déesse aux paroles persuasives et au cœur
immuable. L'autre est celle des opinions humaines, fantômes mobiles, auxquels il est
dangereux de se confier. »
|