Texte grec :
[1,10] Ἐπεὶ δὲ ἐνέπλησαν τὸν κέλητα τῶν λαφύρων, ἐκέλευσεν ὁ Θήρων
τὸν φύλακα μικρὸν ἀποστῆναι μετὰ τῆς γυναικός· εἶτα βουλὴν
προέθηκε περὶ αὐτῆς. ἐγένοντο δὲ αἱ γνῶμαι διάφοροι καὶ ἀλλήλαις
ὑπεναντίαι. πρῶτος γάρ τις εἶπεν "ἐφ´ ἕτερα μὲν ἤλθομεν, ὦ
συστρατιῶται, βέλτιον δὲ τὸ παρὰ τῆς Τύχης ἀποβέβηκε· χρησώμεθα
αὐτῷ· δυνάμεθα γὰρ ἀκινδύνως εἰργάσθαι. δοκεῖ δή μοι τὰ μὲν
ἐντάφια κατὰ χώραν ἐᾶν, ἀποδοῦναι δὲ τὴν Καλλιρόην ἀνδρὶ καὶ
πατρί, φήσαντας ὅτι προσωρμίσθημεν τῷ τόπῳ κατὰ συνήθειαν
ἁλιευτικήν, ἀκούσαντες δὲ φωνὴν ἠνοίξαμεν κατὰ φιλανθρωπίαν,
ἵνα σώσωμεν τὴν ἔνδον ἀποκεκλεισμένην. ὁρκίσωμεν δὲ τὴν
γυναῖκα πάντα ἡμῖν μαρτυρεῖν. ἡδέως δὲ ποιήσει χάριν ὀφείλουσα
τοῖς εὐεργέταις δι´ ὧν ἐσώθη. πόσης οἴεσθε χαρᾶς ἐμπλήσομεν τὴν
ὅλην Σικελίαν; πόσας ληψόμεθα δωρεάς; ἅμα δὲ καὶ πρὸς ἀνθρώπους
δίκαια καὶ πρὸς θεοὺς ὅσια ταῦτα ποιήσομεν."
Ἔτι δὲ αὐτοῦ λέγοντος ἕτερος ἀντεῖπεν "ἄκαιρε καὶ ἀνόητε, νῦν
ἡμᾶς κελεύεις φιλοσοφεῖν; ἆρά γε τὸ τυμβωρυχεῖν ἡμᾶς ἐποίησε
χρηστούς; ἐλεήσομεν ἣν οὐκ ἠλέησεν ἴδιος ἀνὴρ ἀλλὰ ἀπέκτεινεν;
οὐδὲν γὰρ ἠδίκηκεν ἡμᾶς· ἀλλὰ ἀδικήσει τὰ μέγιστα. πρῶτον μὲν
γάρ, ἂν ἀποδῶμεν αὐτὴν τοῖς προσήκουσιν, ἄδηλον ἣν ἕξουσι γνώμην
περὶ τοῦ γεγονότος, καὶ ἀδύνατον μὴ ὑποπτευθῆναι τὴν αἰτίαν δι´
ἣν ἤλθομεν ἐπὶ τὸν τάφον. ἐὰν δὲ καὶ χαρίσωνται τὴν τιμωρίαν
ἡμῖν οἱ τῆς γυναικὸς συγγενεῖς, ἀλλ´ οἱ ἄρχοντες καὶ ὁ δῆμος αὐτὸς
οὐκ ἀφήσει τυμβωρύχους ἄγοντας κατ´ αὐτῶν τὸ φορτίον· οὐδὲ γὰρ
ἀκίνδυνον βίον ζῶμεν. τάχα δέ τις ἐρεῖ λυσιτελέστερον εἶναι
πωλῆσαι τὴν γυναῖκα· τιμὴν γὰρ εὑρήσει διὰ τὸ κάλλος. ἔχει δὲ
καὶ τοῦτο κίνδυνον. ὁ μὲν γὰρ χρυσὸς οὐκ ἔχει φωνήν, οὐδὲ ὁ
ἄργυρος ἐρεῖ πόθεν αὐτὸν εἰλήφαμεν. ἔξεστιν ἐπὶ τούτοις πλάσασθαί
τι διήγημα. φορτίον δὲ ἔχον ὀφθαλμούς τε καὶ ὦτα καὶ
γλῶσσαν τίς ἂν ἀποκρύψαι δύναιτο; καὶ γὰρ οὐδὲ ἀνθρώπινον τὸ
κάλλος, ἵνα λάθωμεν. ὅτι ‘δούλην’ ἐροῦμεν; τίς αὐτὴν ἰδὼν
τούτῳ πιστεύσει; φονεύσωμεν οὖν αὐτὴν ἐνθάδε, καὶ μὴ περιάγωμεν
καθ´ αὑτῶν τὸν κατήγορον."
Πολλῶν δὲ τούτοις συντιθεμένων οὐδετέραν γνώμην Θήρων
ἐπεψήφισε. "σὺ μὲν γὰρ" εἶπε "κίνδυνον ἐπάγεις, σὺ δὲ κέρδος
ἀπολλύεις. ἐγὼ δὲ ἀποδώσομαι τὴν γυναῖκα μᾶλλον ἢ ἀπολέσω·
πωλουμένη μὲν γὰρ σιγήσει διὰ τὸν φόβον, πραθεῖσα δὲ κατηγορείτω
τῶν μὴ παρόντων. ἀλλ´ ἐμβαίνετε· πλέωμεν· ἤδη γάρ ἐστι πρὸς ἡμέραν."
|
|
Traduction française :
[1,10] Lorsqu'ils eurent rempli leur bateau de butin,
Théron ordonna à l'homme qui gardait la jeune femme
de s'écarter un peu avec elle; après quoi il tint conseil
avec les autres au sujet de celle-ci. Les avis furent différents
et opposés entre eux. Le premier qui parla dit :
«Nous étions venus dans un autre but, camarades, mais
ce que nous a envoyé la Fortune vaut mieux encore;
profitons-en puisque nous pouvons faire du bon travail
sans courir de danger. Je suis d'avis que nous laissions
les trésors à leur place et que nous rendions Callirhoé
à son mari et à son père, en racontant que nous avions
jeté l'ancre en cet endroit, comme le font les pêcheurs, et
qu'en entendant crier, nous avons ouvert, par pitié,
pour sauver la femme qui se trouvait enfermée à l'intérieur.
Faisons jurer à la femme de confirmer notre récit
de son témoignage. Elle le fera volontiers, par reconnaissance
pour ses bienfaiteurs, qui l'ont sauvée. De quelle
joie pensez-vous que nous remplirons la Sicile tout
entière ? Quels présents ne nous offrira-t-on pas ? et, en
même temps, nous accomplirons une action juste aux
yeux des hommes et sainte à ceux des dieux. »
Il parlait encore qu'un autre disait le contraire :
« Homme importun et absurde, c'est maintenant que tu
nous invites à faire les philosophes ? Est-ce donc que la
profanation des tombeaux a fait de nous des honnêtes
gens ? Aurons-nous pitié de celle dont n'a pas eu pitié
son propre mari, et qu'il a tuée ? Certes, elle ne nous
fait aucun mal, mais elle nous en fera, et beaucoup. Et
d'abord, si nous la rendons à sa famille, nous pouvons
nous douter de l'opinion qu'ils auront sur ce qui s'est
passé et il leur sera sans doute impossible de soupçonner
la raison qui nous a conduits à ce tombeau! Et même
si les parents de la dame nous tiennent quittes du châtiment,
les magistrats et le peuple, eux, ne laisseront pas
aller les profanateurs de tombeaux qui leur apporteront
spontanément leur butin. Peut-être quelqu'un dira-t-il
qu'il serait plus avantageux de vendre la femme; car
nous en tirerons cher, à cause de sa beauté. Mais cela
présente aussi un danger. L'or, lui, n'a pas de voix, et
l'argent n'ira pas non plus raconter où nous l'avons pris.
Il nous est possible, sur ce point, d'imaginer une histoire.
Mais un butin qui a des yeux, des oreilles et une
langue, comment pourrait-on le dissimuler ? D'autre
part, sa beauté est plus qu'humaine et nous ne pouvons
passer inaperçus. Lorsque nous dirons que c'est une
esclave, qui, en la voyant, voudra nous croire ? Tuons-la
donc ici même et n'emmenons pas avec nous notre propre
accusatrice. »
Comme beaucoup se prononçaient en faveur de l'un
ou de l'autre parti, Théron, lui, ne se rallia à aucun des
deux : « Toi, dit-il, tu nous fais courir des risques,
quant à toi, tu gaspilles un profit. Moi, je vendrai la
femme plutôt que je ne la tuerai; pendant qu'on la
vendra, elle se taira, par peur; une fois vendue, qu'elle
nous accuse - nous ne serons plus là! Allons, embarquez;
appareillons; le jour approche déjà. »
|
|