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[46] 46.1
Μηδαμοῦ σεαυτὸν εἴπῃς φιλόσοφον μηδὲ λάλει τὸ πολὺ ἐν ἰδιώταις περὶ τῶν
θεωρημάτων, ἀλλὰ ποίει τὸ ἀπὸ τῶν θεωρημάτων· οἷον ἐν συμποσίῳ μὴ λέγε, πῶς δεῖ
ἐσθίειν, ἀλλ' ἔσθιε, ὡς δεῖ. μέμνησο γάρ, ὅτι οὕτως ἀφῃρήκει πανταχόθεν Σωκράτης
τὸ ἐπιδεικτικόν, ὥστε ἤρχοντο πρὸς αὐτὸν βουλόμενοι φιλοσόφοις ὑπ' αὐτοῦ
συσταθῆναι, κἀκεῖνος ἀπῆγεν
46.2
αὐτούς. οὕτως ἠνείχετο παρορώμενος. κἂν περὶ θεωρήματός τινος ἐν ἰδιώταις
ἐμπίπτῃ λόγος, σιώπα τὸ πολύ· μέγας γὰρ ὁ κίνδυνος εὐθὺς ἐξεμέσαι, ὃ οὐκ ἔπεψας.
καὶ ὅταν εἴπῃ σοί τις, ὅτι οὐδὲν οἶσθα, καὶ σὺ μὴ δηχθῇς, τότε ἴσθι, ὅτι ἄρχῃ τοῦ ἔργου.
ἐπεὶ καὶ τὰ πρόβατα οὐ χόρτον φέροντα τοῖς ποιμέσιν ἐπιδεικνύει πόσον, ἔφαγεν,
ἀλλὰ τὴν νομὴν ἔσω πέψαντα ἔρια ἔξω φέρει καὶ γάλα· καὶ σὺ τοίνυν μὴ τὰ
θεωρήματα τοῖς ἰδιώταις ἐπιδείκνυε, ἀλλ' ἀπ' αὐτῶν πεφθέντων τὰ ἔργα.
| [46] 1. Ne te donne jamais pour philosophe et le plus souvent ne parle pas
maximes devant ceux qui ne sont pas philosophes ; fais plutôt ce que les
maximes prescrivent : ainsi, dans un repas, ne dis pas comment on doit
manger, mais mange comme on le doit. Souviens-toi que Socrate s’était
interdit toute ostentation, au point que des gens venaient le trouver pour
se faire présenter par lui à des philosophes ; et il les menait, tant
il souffrait qu’on ne fit pas attention à lui.
2. Si, entre gens qui ne sont pas philosophes, la conversation tombe sur
quelque maxime, garde le plus souvent le silence ; tu cours grand risque
de rendre aussitôt ce que tu n’as pas encore digéré. Quand on te dit que
tu ne sais rien, si tu n’en es pas piqué, sache qu’alors tu commences à
être philosophe. En effet, ce n’est pas en rendant leur herbe aux bergers,
que les brebis leur montrent combien elles ont mangé ; mais quand elles
ont bien digéré leur pâture au dedans, elles produisent au dehors de la
laine et du lait : de même ne fais pas étalage des maximes devant ceux qui
ne sont pas philosophes, mais commence par les digérer pour les produire
en pratique.
| [47] 47.1
Ὅταν εὐτελῶς ἡρμοσμένος ᾖς κατὰ τὸ σῶμα, μὴ καλλωπίζου ἐπὶ τούτῳ μήδ', ἂν ὕδωρ
πίνῃς, ἐκ πάσης ἀφορμῆς λέγε, ὅτι ὕδωρ πίνεις. κἂν ἀσκῆσαί ποτε πρὸς πόνον θέλῃς.
σεαυτῷ καὶ μὴ τοῖς ἔξω· μὴ τοὺς ἀνδριάντας περιλάμβανε· ἀλλὰ διψῶν ποτε σφοδρῶς
ἐπίσπασαι ψυχροῦ ὕδατος καὶ ἔκπτυσον καὶ μηδενὶ εἴπῃς.
| [47] Quand tu es parvenu à satisfaire à peu de frais à tous les besoins du
corps, ne fais pas tes embarras, et si tu ne bois que de l’eau, ne dis pas
à tout propos que tu ne bois que de l’eau. Si tu veux t’endurcir à la
peine, fais-le pour toi et non pour les autres, ne tiens pas les statues
embrassées ; mais quand tu as soif, prends dans ta bouche un peu
d’eau fraîche, rejette-la et n’en dis rien.
| [48] 48.1
Ἰδιώτου στάσις καὶ χαρακτήρ· οὐδέποτε ἐξ ἑαυτοῦ προσδοκᾷ ὠφέλειαν ἢ βλάβην, ἀλλ'
ἀπὸ τῶν ἔξω. φιλοσόφου στάσις καὶ χαρακτήρ· πᾶσαν ὠφέλειαν καὶ βλάβην ἐξ
ἑαυτοῦ προσδοκᾷ.
48.2
σημεῖα προκόπτοντος· οὐδένα ψέγει, οὐδένα ἐπαινεῖ, οὐδένα μέμφεται, οὐδενὶ
ἐγκαλεῖ, οὐδὲν περὶ ἑαυτοῦ λέγει ὡς ὄντος τινὸς ἢ εἰδότος τι. ὅταν ἐμποδισθῇ τι ἢ
κωλυθῇ, ἑαυτῷ ἐγκαλεῖ. κἄν τις αὐτὸν ἐπαινῇ, καταγελᾷ τοῦ ἐπαινοῦντος αὐτὸς παρ'
ἑαυτῷ· κἂν ψέγῃ, οὐκ ἀπολογεῖται. περίεισι δὲ καθάπερ οἱ ἄρρωστοι, εὐλαβούμενός τι
κινῆσαι τῶν καθισταμένων, πρὶν πῆξιν λαβεῖν.
48.3
ὄρεξιν ἅπασαν ἦρκεν ἐξ ἑαυτοῦ· τὴν δ' ἔκκλισιν εἰς μόνα τὰ παρὰ φύσιν τῶν ἐφ' ἡμῖν
μετατέθεικεν. ὁρμῇ πρὸς ἅπαντα ἀνειμένῃ χρῆται. ἂν ἠλίθιος ἢ ἀμαθὴς δοκῇ, οὐ
πεφρόντικεν. ἐνί τε λόγῳ, ὡς ἐχθρὸν ἑαυτὸν παραφυλάσσει καὶ ἐπίβουλον.
| [48] 1. Conduite et caractère de celui qui n’est pas philosophe : il n’attend
pas de profit ni de dommage de lui-même, mais de l’extérieur. Conduite et
caractère du philosophe : il n’attend de profit ni de dommage que de
lui-même.
2. Signes de celui qui est en progrès : il ne blâme personne, il ne loue
personne, il ne se plaint de personne, il n’accuse personne, il ne parle
jamais de lui-même comme de quelqu’un d’importance ou qui sait quelque
chose. Quand il se sent contrarié ou empêché, il ne s’en prend qu’à
lui-même. Quand on le loue, il se moque à part soi de celui qui le loue,
et quand on le blâme, il ne se justifie pas. Il fait comme les gens
relevant de maladie qui se promènent avec précaution pour ne pas déranger
ce qui se remet, avant que cela ait pris de la consistance. 3. Il a
supprimé en lui tout désir, et il a transporté toutes ses aversions sur ce
qui est contraire à la nature dans ce qui dépend de nous. En toutes choses
ses tendances sont modérées. S’il parait bête ou ignorant, il ne s’en
inquiète pas. En un mot il se défie de lui-même comme d’un ennemi dont on
craint les piéges.
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