[1,7] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Ζ'.
§ 1. Ἐχόμενον δ' ἂν εἴη λέγειν πότερον δύο ἢ τρεῖς ἢ πλείους εἰσίν.
§ 2. Μίαν μὲν γὰρ οὐχ οἷόν τε, ὅτι οὐχ ἓν τὰ ἐναντία,
§ 3. ἀπείρους δ', ὅτι οὐκ ἐπιστητὸν τὸ ὂν ἔσται,
§ 4. μία τε ἐναντίωσις ἐν παντὶ γένει ἑνί, ἡ δ' οὐσία ἕν τι γένος, καὶ ὅτι
ἐνδέχεται ἐκ πεπερασμένων,
§ 5. βέλτιον δ' ἐκ πεπερασμένων, ὥσπερ Ἐμπεδοκλῆς, ἢ ἐξ ἀπείρων· πάντα γὰρ
ἀποδιδόναι οἴεται ὅσαπερ Ἀναξαγόρας ἐκ τῶν ἀπείρων.
§ 6. Ἔτι δὲ ἔστιν ἄλλα ἄλλων πρότερα ἐναντία, καὶ γίγνεται ἕτερα ἐξ
ἀλλήλων, οἷον γλυκὺ καὶ πικρὸν καὶ λευκὸν καὶ μέλαν, τὰς δὲ ἀρχὰς ἀεὶ δεῖ
μένειν.
§ 7. Ὅτι μὲν οὖν οὔτε μία οὔτε ἄπειροι, δῆλον ἐκ τούτων·
§ 8. ἐπεὶ δὲ πεπερασμέναι, τὸ μὴ ποιεῖν δύο μόνον ἔχει τινὰ λόγον·
ἀπορήσειε γὰρ ἄν τις πῶς ἢ ἡ πυκνότης τὴν μανότητα ποιεῖν τι πέφυκεν ἢ
αὕτη τὴν πυκνότητα. Ὁμοίως δὲ καὶ ἄλλη ὁποιαοῦν ἐναντιότης· οὐ γὰρ ἡ φιλία
τὸ νεῖκος συνάγει καὶ ποιεῖ τι ἐξ αὐτοῦ, οὐδὲ τὸ νεῖκος ἐξ ἐκείνης, ἀλλ'
ἄμφω ἕτερόν τι τρίτον. Ἔνιοι δὲ καὶ πλείω λαμβάνουσιν ἐξ ὧν κατασκευάζουσι
τὴν τῶν ὄντων φύσιν.
§ 9. Πρὸς δὲ τούτοις ἔτι κἂν τόδε τις ἀπορήσειεν, εἰ μή τις ἑτέραν
ὑποθήσει τοῖς ἐναντίοις φύσιν· οὐθενὸς γὰρ ὁρῶμεν τῶν ὄντων οὐσίαν
τἀναντία, τὴν δ' ἀρχὴν οὐ καθ' ὑποκειμένου δεῖ λέγεσθαί τινος. Ἔσται γὰρ
ἀρχὴ τῆς ἀρχῆς· τὸ γὰρ ὑποκείμενον ἀρχή, καὶ πρότερον δοκεῖ τοῦ
κατηγορουμένου εἶναι.
§ 10. Ἔτι οὐκ εἶναί φαμεν οὐσίαν ἐναντίαν οὐσίᾳ· πῶς οὖν ἐκ μὴ οὐσιῶν
οὐσία ἂν εἴη; ἢ πῶς ἂν πρότερον μὴ οὐσία οὐσίας εἴη;
§ 11. Διόπερ εἴ τις τόν τε πρότερον ἀληθῆ νομίσειεν εἶναι λόγον καὶ
τοῦτον, ἀναγκαῖον, εἰ μέλλει διασώσειν ἀμφοτέρους αὐτούς, ὑποτιθέναι τι
τρίτον, ὥσπερ φασὶν οἱ μίαν τινὰ φύσιν εἶναι λέγοντες τὸ πᾶν, οἷον ὕδωρ ἢ
πῦρ ἢ τὸ μεταξὺ τούτων.
§ 13. Δοκεῖ δὲ τὸ μεταξὺ μᾶλλον· πῦρ γὰρ ἤδη καὶ γῆ καὶ ἀὴρ καὶ ὕδωρ μετ'
ἐναντιοτήτων συμπεπλεγμένα ἐστίν. Διὸ καὶ οὐκ ἀλόγως ποιοῦσιν οἱ τὸ
ὑποκείμενον ἕτερον τούτων ποιοῦντες, τῶν δ' ἄλλων οἱ ἀέρα· καὶ γὰρ ὁ ἀὴρ
ἥκιστα ἔχει τῶν ἄλλων διαφορὰς αἰσθητάς· ἐχόμενον δὲ τὸ ὕδωρ.
§ 14. Ἀλλὰ πάντες γε τὸ ἓν τοῦτο τοῖς ἐναντίοις σχηματίζουσιν, πυκνότητι
καὶ μανότητι καὶ τῷ μᾶλλον καὶ ἧττον.
§ 15. Ταῦτα δ' ἐστὶν ὅλως ὑπεροχὴ δηλονότι καὶ ἔλλειψις, ὥσπερ εἴρηται
πρότερον. Καὶ ἔοικε παλαιὰ εἶναι καὶ αὕτη ἡ δόξα, ὅτι τὸ ἓν καὶ ὑπεροχὴ
καὶ ἔλλειψις ἀρχαὶ τῶν ὄντων εἰσί, πλὴν οὐ τὸν αὐτὸν τρόπον, ἀλλ' οἱ μὲν
ἀρχαῖοι τὰ δύο μὲν ποιεῖν τὸ δὲ ἓν πάσχειν, τῶν δ' ὑστέρων τινὲς
τοὐναντίον τὸ μὲν ἓν ποιεῖν τὰ δὲ δύο πάσχειν φασὶ μᾶλλον.
§ 16. Τὸ μὲν οὖν τρία φάσκειν τὰ στοιχεῖα εἶναι ἔκ τε τούτων καὶ ἐκ
τοιούτων ἄλλων ἐπισκοποῦσι δόξειεν ἂν ἔχειν τινὰ λόγον, ὥσπερ εἴπομεν,
§ 17. τὸ δὲ πλείω τριῶν οὐκέτι· πρὸς μὲν γὰρ τὸ πάσχειν ἱκανὸν τὸ ἕν,
§ 18. εἰ δὲ τεττάρων ὄντων δύο ἔσονται ἐναντιώσεις, δεήσει χωρὶς ἑκατέρᾳ
ὑπάρχειν ἑτέραν τινὰ μεταξὺ φύσιν· εἰ δ' ἐξ ἀλλήλων δύνανται γεννᾶν δύο
οὖσαι, περίεργος ἂν ἡ ἑτέρα τῶν ἐναντιώσεων εἴη.
§ 19. Ἅμα δὲ καὶ ἀδύνατον πλείους εἶναι ἐναντιώσεις τὰς πρώτας. Ἡ γὰρ
οὐσία ἕν τι γένος ἐστὶ τοῦ ὄντος, ὥστε τῷ πρότερον καὶ ὕστερον διοίσουσιν
ἀλλήλων αἱ ἀρχαὶ μόνον, ἀλλ' οὐ τῷ γένει· ἀεὶ γὰρ ἐν ἑνὶ γένει μία
ἐναντίωσις ἔστιν, πᾶσαί τε αἱ ἐναντιώσεις ἀνάγεσθαι δοκοῦσιν εἰς μίαν.
§ 20. Ὅτι μὲν οὖν οὔτε ἓν τὸ στοιχεῖον οὔτε πλείω δυοῖν ἢ τριῶν, φανερόν·
τούτων δὲ πότερον, καθάπερ εἴπομεν, ἀπορίαν ἔχει πολλήν.
| [1,7] CHAPITRE VII.
§ 1. Pour faire suite à ce qui précède, on peut rechercher si les
principes de l'être sont au nombre de deux, de trois ou davantage.
§ 2. D'abord, il est impossible qu'il n'y en ait qu'un seul, puisque les
contraires sont toujours plus d'un.
§ 3. Mais il est impossible, d'autre part, qu'ils soient en nombre infini ;
car, alors, l'être serait inaccessible à la science.
§ 4. Et, dans tout genre qui est un, il n'y a qu'une seule opposition
par contraires ; or, la substance est un genre qui est un.
§ 5. Mais les choses peuvent bien venir aussi de principes finis ; et, si
l'on en croit Empédocle, il vaut mieux qu'elles viennent de principes finis
que de principes infinis ; car il croit pouvoir expliquer par des principes
finis tout ce qui Anaxagore explique avec ses infinis.
§ 6. Il y a en outre des contraires qui sont antérieurs à d'autres
contraires ; et il y en a qui viennent de contraires différents : ainsi, le
doux et l'amer, le blanc et le noir. Mais, quant aux principes, ils doivent
toujours rester immuables.
§ 7. Je tire de tout ceci la conclusion, d'une part, qu'il n'y a pas un
principe unique des choses, et, d'autre part, que les principes ne sont
pas en nombre infini.
§ 8. Du moment que les principes sont limités, il y a quelque raison
de supposer qu'ils ne peuvent pas être seulement deux ; car alors on
pourrait également se demander, ou comment la densité peut jamais
faire quelque chose de la rareté, ou à l'inverse comment la rareté
produirait jamais la moindre action sur la densité ; et de même pour toute
autre opposition par contraires. Par exemple, l'Amour ne peut pas se
concilier la Haine, ni en tirer quoi que ce soit, pas plus que la Haine ne
peut rien faire de l'Amour. Mais tous les deux agissent sur un troisième
terme qui est différent de l'un et de l'autre ; et voilà pourquoi certains
philosophes ont imaginé plus de deux principes pour expliquer le
système entier des choses.
§ 9. Une autre difficulté qu'on rencontrerait si l'on refusait d'admettre
qu'il y a une nature différente servant de support aux contraires, c'est
que, comme l'observation nous le démontre, les contraires ne sont
jamais la substance de rien. Or, le principe ne peut pas du tout être
l'attribut de quoi que ce soit; car alors il y aurait un principe du principe,
puisque le sujet est principe, et qu'il est antérieur à ce qui lui est attribué.
§ 10. De plus, nous soutenons que la substance ne peut être
contraire à la substance ; et, alors, comment la substance pourrait-elle
venir de ce qui n'est pas substance ? Et comment ce qui n'est pas
substance serait-il antérieur à la substance même ?
§ 11. Il résulte de ceci que si l'on admet à la fois l'exactitude de notre
premier raisonnement et l'exactitude de celui-ci, il faut nécessairement,
pour sauver la vérité des deux, admettre un troisième terme outre les
deux contraires.
§ 12. C'est du reste ce que font les philosophes qui constituent
l'univers avec une nature et un élément uniques, prenant l'eau ou le feu,
ou un élément intermédiaire.
§ 13. Mais il nous semble que c'est plutôt à cet intermédiaire qu'il
faudrait prêter ce rôle, puisque le feu, la terre, l'air et l'eau sont toujours,
entremêlés de quelques contraires. Aussi, on peut ne pas trouver
déraisonnables ceux qui pensent que le sujet est encore quelqu'autre
chose que les éléments ; puis, viennent ceux qui prennent l'air pour
premier principe ; car l'air est celui de tous les éléments dont les
différences sont le moins sensibles ; puis, enfin, ceux qui prennent l'eau
pour principe de tout.
§ 14. Mais tous ces philosophes s'accordent à transformer leur
principe unique par des contraires, telles que la rareté, la densité ; le
plus, le moins ; et, comme nous le faisions remarquer un peu plus haut,
ce n'est là, en résumé, qu'excès ou défaut.
§ 15. C'est, du reste, je crois, une opinion fort ancienne que de
trouver dans l'excès ou le défaut tous les principes des choses.
Seulement, tout le monde n'entend pas ceci de la même manière ; car
les anciens prétendaient que ce sont les deux derniers qui agissent et
que c'est l'unité qui souffre, tandis que quelques-uns des philosophes
postérieurs avancent au contraire, que c'est bien plutôt l'unité qui agit, et
que les deux autres ne font que souffrir son action.
§ 16. Ce sont ces arguments-là et des arguments analogues qui
donneraient à penser, non sans raison, que les éléments sont au nombre
de trois, comme nous venons de le dire.
§ 17. Mais on ne peut aller jusqu'à soutenir qu'ils sont plus de trois.
Car, d'abord, l'unité suffit à souffrir les contraires.
§ 18. Puis, si l'on admet qu'ils sont quatre, il y aura dès lors deux
oppositions par contraires, et il faudra, en outre, pour chacune d'elles
séparément une autre nature intermédiaire. Or, s'ils peuvent, en étant
simplement deux, s'engendrer l'un par l'autre, il y a, par conséquent,
l'une des deux oppositions qui devient parfaitement inutile.
§ 19. Enfin, il est également impossible qu'il y ait plus d'une seule
opposition primordiale par contraires ; car la substance étant un genre
unique de l'être, les principes ne peuvent différer entr'eux qu'en tant que
les uns sont postérieurs et les autres antérieurs. Mais ils ne différent plus
en genre, un genre ne pouvant jamais contenir qu'une seule opposition,
et toutes les oppositions pouvant, en définitive, être ramenées à une seule.
§ 20. Ainsi, évidemment, il ne se peut pas qu'il n'y ait qu'un élément
unique ; il ne se peut pas non plus qu'il y en ait plus de deux ou trois. Où
est ici le vrai ? C'est ce qu'il est très difficile de savoir, ainsi que je l'ai dit.
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