| Texte grec :
 
 
  
  
    | [4,1126] (1126a) (1) ἁμαρτάνειν δὲ δοκεῖ μᾶλλον ἐπὶ τὴν ἔλλειψιν· 
 οὐ γὰρ τιμωρητικὸς ὁ πρᾶος, ἀλλὰ μᾶλλον συγγνωμονικός. 
 Ἡ δ᾽ ἔλλειψις, εἴτ᾽ ἀοργησία τίς ἐστιν εἴθ᾽ ὅ τι δή ποτε, ψέγεται. Οἱ γὰρ 
 μὴ ὀργιζόμενοι ἐφ᾽ οἷς (5) δεῖ ἠλίθιοι δοκοῦσιν εἶναι, καὶ οἱ μὴ ὡς δεῖ 
 μηδ᾽ ὅτε μηδ᾽ οἷς δεῖ· δοκεῖ γὰρ οὐκ αἰσθάνεσθαι οὐδὲ λυπεῖσθαι, μὴ 
 ὀργιζόμενός τε οὐκ εἶναι ἀμυντικός, τὸ δὲ προπηλακιζόμενον ἀνέχεσθαι καὶ 
 τοὺς οἰκείους περιορᾶν ἀνδραποδῶδες. 
 Ἡ δ᾽ ὑπερβολὴ κατὰ πάντα μὲν γίνεται (καὶ γὰρ οἷς οὐ δεῖ, (10) καὶ ἐφ᾽ οἷς 
 οὐ δεῖ, καὶ μᾶλλον ἢ δεῖ, καὶ θᾶττον, καὶ πλείω χρόνον), οὐ μὴν ἅπαντά γε 
 τῷ αὐτῷ ὑπάρχει. Οὐ γὰρ ἂν δύναιτ᾽ εἶναι· τὸ γὰρ κακὸν καὶ ἑαυτὸ ἀπόλλυσι, 
 κἂν ὁλόκληρον ᾖ, ἀφόρητον γίνεται. Οἱ μὲν οὖν ὀργίλοι ταχέως μὲν 
 ὀργίζονται καὶ οἷς οὐ δεῖ καὶ ἐφ᾽ οἷς οὐ δεῖ καὶ μᾶλλον ἢ (15) δεῖ, 
 παύονται δὲ ταχέως· ὃ καὶ βέλτιστον ἔχουσιν. Συμβαίνει δ᾽ αὐτοῖς τοῦτο, 
 ὅτι οὐ κατέχουσι τὴν ὀργὴν ἀλλ᾽ ἀνταποδιδόασιν ᾗ φανεροί εἰσι διὰ τὴν 
 ὀξύτητα, εἶτ᾽ ἀποπαύονται. Ὑπερβολῇ δ᾽ εἰσὶν οἱ ἀκρόχολοι ὀξεῖς καὶ πρὸς 
 πᾶν ὀργίλοι καὶ ἐπὶ παντί· ὅθεν καὶ τοὔνομα. 
 Οἱ δὲ πικροὶ (20) δυσδιάλυτοι, καὶ πολὺν χρόνον ὀργίζονται· κατέχουσι γὰρ 
 τὸν θυμόν. Παῦλα δὲ γίνεται ὅταν ἀνταποδιδῷ· ἡ γὰρ τιμωρία παύει τῆς 
 ὀργῆς, ἡδονὴν ἀντὶ τῆς λύπης ἐμποιοῦσα. Τούτου δὲ μὴ γινομένου τὸ βάρος 
 ἔχουσιν· διὰ γὰρ τὸ μὴ ἐπιφανὲς εἶναι οὐδὲ συμπείθει αὐτοὺς οὐδείς, ἐν 
 αὑτῷ δὲ πέψαι (25) τὴν ὀργὴν χρόνου δεῖ. Εἰσὶ δ᾽ οἱ τοιοῦτοι ἑαυτοῖς 
 ὀχληρότατοι καὶ τοῖς μάλιστα φίλοις. Χαλεποὺς δὲ λέγομεν τοὺς ἐφ᾽ οἷς τε 
 μὴ δεῖ χαλεπαίνοντας καὶ μᾶλλον ἢ δεῖ καὶ πλείω χρόνον, καὶ μὴ 
 διαλλαττομένους ἄνευ τιμωρίας ἢ κολάσεως. 
 Τῇ πραότητι δὲ μᾶλλον τὴν ὑπερβολὴν ἀντιτίθεμεν· καὶ (30) γὰρ μᾶλλον 
 γίνεται· ἀνθρωπικώτερον γὰρ τὸ τιμωρεῖσθαι· καὶ πρὸς τὸ συμβιοῦν οἱ 
 χαλεποὶ χείρους. Ὃ δὲ καὶ ἐν τοῖς πρότερον εἴρηται, καὶ ἐκ τῶν λεγομένων 
 δῆλον· οὐ γὰρ ῥᾴδιον διορίσαι τὸ πῶς καὶ τίσι καὶ ἐπὶ ποίοις καὶ πόσον 
 χρόνον ὀργιστέον, καὶ τὸ μέχρι τίνος ὀρθῶς ποιεῖ τις ἢ ἁμαρτάνει. (35) Ὁ 
 μὲν γὰρ μικρὸν παρεκβαίνων οὐ ψέγεται, οὔτ᾽ ἐπὶ τὸ μᾶλλον οὔτ᾽ ἐπὶ τὸ 
 ἧττον· ἐνίοτε γὰρ τοὺς ἐλλείποντας ἐπαινοῦμεν καὶ πράους φαμέν, (1126b) 
 (1) καὶ τοὺς χαλεπαίνοντας ἀνδρώδεις ὡς δυναμένους ἄρχειν. Ὁ δὴ πόσον καὶ 
 πῶς παρεκβαίνων ψεκτός, οὐ ῥᾴδιον τῷ λόγῳ ἀποδοῦναι· ἐν γὰρ τοῖς καθ᾽ 
 ἕκαστα κἀν τῇ αἰσθήσει ἡ κρίσις. Ἀλλὰ τό γε τοσοῦτον (5) δῆλον, ὅτι ἡ μὲν 
 μέση ἕξις ἐπαινετή, καθ᾽ ἣν οἷς δεῖ ὀργιζόμεθα καὶ ἐφ᾽ οἷς δεῖ καὶ ὡς δεῖ 
 καὶ πάντα τὰ τοιαῦτα, αἱ δ᾽ ὑπερβολαὶ καὶ ἐλλείψεις ψεκταί, καὶ ἐπὶ μικρὸν 
 μὲν γινόμεναι ἠρέμα, ἐπὶ πλέον δὲ μᾶλλον, ἐπὶ πολὺ δὲ σφόδρα. Δῆλον οὖν 
 ὅτι τῆς μέσης ἕξεως ἀνθεκτέον. Αἱ μὲν οὖν (10) περὶ τὴν ὀργὴν ἕξεις 
 εἰρήσθωσαν. 
 VI. Ἐν δὲ ταῖς ὁμιλίαις καὶ τῷ συζῆν καὶ λόγων καὶ πραγμάτων κοινωνεῖν οἳ 
 μὲν ἄρεσκοι δοκοῦσιν εἶναι, οἱ πάντα πρὸς ἡδονὴν ἐπαινοῦντες καὶ οὐθὲν 
 ἀντιτείνοντες, ἀλλ᾽ οἰόμενοι δεῖν ἄλυποι τοῖς ἐντυγχάνουσιν εἶναι· οἱ δ᾽ 
 ἐξ ἐναντίας τούτοις (15) πρὸς πάντα ἀντιτείνοντες καὶ τοῦ λυπεῖν οὐδ᾽ 
 ὁτιοῦν φροντίζοντες δύσκολοι καὶ δυσέριδες καλοῦνται. Ὅτι μὲν οὖν αἱ 
 εἰρημέναι ἕξεις ψεκταί εἰσιν, οὐκ ἄδηλον, καὶ ὅτι ἡ μέση τούτων ἐπαινετή, 
 καθ᾽ ἣν ἀποδέξεται ἃ δεῖ καὶ ὡς δεῖ, ὁμοίως δὲ καὶ δυσχερανεῖ· 
 ὄνομα δ᾽ οὐκ ἀποδέδοται αὐτῇ (20) τι, ἔοικε δὲ μάλιστα φιλίᾳ. Τοιοῦτος γάρ 
 ἐστιν ὁ κατὰ τὴν μέσην ἕξιν οἷον βουλόμεθα λέγειν τὸν ἐπιεικῆ φίλον, τὸ 
 στέργειν προσλαβόντα. Διαφέρει δὲ τῆς φιλίας, ὅτι ἄνευ πάθους ἐστὶ καὶ τοῦ 
 στέργειν οἷς ὁμιλεῖ· οὐ γὰρ τῷ φιλεῖν ἢ ἐχθαίρειν ἀποδέχεται ἕκαστα ὡς 
 δεῖ, ἀλλὰ τῷ τοιοῦτος (25) εἶναι. Ὁμοίως γὰρ πρὸς ἀγνῶτας καὶ γνωρίμους 
 καὶ συνήθεις καὶ ἀσυνήθεις αὐτὸ ποιήσει, πλὴν καὶ ἐν ἑκάστοις ὡς ἁρμόζει· 
 οὐ γὰρ ὁμοίως προσήκει συνήθων καὶ ὀθνείων φροντίζειν, οὐδ᾽ αὖ λυπεῖν. 
 Καθόλου μὲν οὖν εἴρηται ὅτι ὡς δεῖ ὁμιλήσει, ἀναφέρων δὲ πρὸς τὸ καλὸν καὶ 
 τὸ συμφέρον στοχάσεται (30) τοῦ μὴ λυπεῖν ἢ συνηδύνειν. 
 Ἔοικε μὲν γὰρ περὶ ἡδονὰς καὶ λύπας εἶναι τὰς ἐν ταῖς ὁμιλίαις γινομένας· 
 τούτων δ᾽ ὅσας μὲν αὐτῷ ἐστὶ μὴ καλὸν ἢ βλαβερὸν συνηδύνειν, δυσχερανεῖ, 
 καὶ προαιρήσεται λυπεῖν· κἂν τῷ ποιοῦντι δ᾽ ἀσχημοσύνην φέρῃ, καὶ ταύτην 
 μὴ μικράν, ἢ βλάβην, ἡ δ᾽ ἐναντίωσις (35) μικρὰν λύπην, οὐκ ἀποδέξεται 
 ἀλλὰ δυσχερανεῖ. |  | Traduction française :
 
 
 
  
       
  | [4,1126] (1126a) Cependant ce caractère semble pécher par défaut, parce que l'homme 
indulgent est plus enclin à pardonner qu'à punir. 
Or ce défaut, cette incapacité d'éprouver de la colère, quelque nom qu'on lui 
donne, est blâmable; car ceux qui n'ont aucun ressentiment des choses qui le 
méritent, passent pour stupides, aussi bien que ceux qui n'en ont ni contre les 
personnes, ni dans les occasions, ni de la manière qu'il faut ; car il semble qu'ils 
soient insensibles et incapables d'éprouver aucune peine. D'ailleurs celui qui 
n'éprouve jamais de colère ne peut pas repousser l'outrage ; or il y a quelque chose 
de lâche et de servile à le supporter soi-même, et à y laisser exposés ceux qu'on 
doit protéger. 
L'excès en ce genre peut avoir lieu de toutes les manières; car on peut 
éprouver de la colère ou contre les choses, ou contre les personnes qui ne le 
méritent pas, ou plus tôt ou plus longtemps qu'il ne faut. Mais la même personne ne 
réunit pas tous ces inconvénients à la fois; cela serait impossible : car tout mal se 
détruit, en quelque sorte, lui-même; et, porté au dernier degré, il devient tout-à-fait 
intolérable. Les hommes irascibles sont donc sujets à s'emporter promptement; ils 
s'irritent hors de propos, soit contre les choses, soit contre les personnes, et plus 
qu'il ne faut ; mais ils s'apaisent avec la même facilité, et c'est là ce qu'ils ont de 
meilleur. Cela vient de ce qu'ils ne sauraient contenir leur ressentiment, et qu'ils le 
témoignent à l'instant même ; son impétuosité les rend redoutables, mais ils 
s'apaisent presque aussitôt. Les hommes qui sont d'une humeur emportée pèchent 
donc par cet excès, et s'irritent à propos de tout et contre tout le monde, d'où vient 
le nom d'irascible qu'on donne à ce caractère. 
Mais les hommes capables de rancune ne reviennent pas facilement, et leur 
ressentiment dure longtemps ; car ils savent contenir leur colère, et elle ne s'apaise 
que quand ils ont rendu mal pour mal. Car la vengeance les apaise, et fait succéder 
dans leur cœur un sentiment de plaisir à la peine qu'ils éprouvaient. Mais, tant que 
ce moment n'est pas venu, ils sentent comme un poids qui les oppresse; car, 
comme ils ne manifestent rien au dehors, personne ne peut entreprendre de les 
ramener par la persuasion : et il faut du temps pour user la colère que l'on 
concentre ainsi en soi-même. Rien de plus incommode qu'un pareil caractère, pour 
ceux qui en sont dominés, et pour les personnes qu'ils aiment le plus. Aussi 
appelle-t-on moroses, gens difficiles à vivre, ceux qui s'irritent plus qu'il ne faut, et 
plus longtemps qu'il ne convient, pour des sujets qui n'en valent pas la peine, et qui 
ne peuvent être apaisés que par la punition de l'offenseur, ou quand ils se sont 
vengés. 
Au reste, l'excès de la colère est plus opposé à la douceur, parce qu'il est plus 
commun, que l'homme est plus naturellement enclin à la vengeance, et qu'il est 
plus difficile de vivre avec les gens de ce caractère. Mais, comme je l'ai dit 
précédemment, et comme on a pu s'en convaincre par ce que je viens de dire, 
il n'est pas facile de marquer avec précision, comment, contre quelles personnes, 
pour quels sujets, et combien de temps il convient d'avoir de la colère, et quelle est 
la limite où s'arrête la raison, et où commence l'erreur. En effet, on ne blâme pas 
généralement celui qui ne s'en écarte que d'une manière peu sensible, soit en plus, 
soit en moins ; puisqu'on loue quelquefois ceux qui restent en deçà du degré 
convenable, et qu'on les appelle des hommes doux et faciles, (1126b) et que 
d'autres fois ceux qui montrent du ressentiment sont appelés des hommes 
courageux et dignes de commander. Il n'est donc pas facile d'exprimer 
exactement par le langage combien et comment  on peut s'écarter du juste milieu ; 
car on n'en peut juger que par le sentiment, et dans les cas particuliers. Mais 
toujours est-il évident que la disposition moyenne, en vertu de laquelle on s'irrite 
contre les choses ou les personnes, dans les occasions et de la manière qui 
convient, et ainsi du reste, est une disposition louable; et qu'au contraire, on blâme 
avec raison tout ce qui s'en écarte par excès ou par défaut, et qu'on le blâme plus 
ou moins à proportion qu'il s'en écarte, en sorte que c'est à cette disposition 
moyenne qu'il faut surtout s'attacher. En voilà assez sur les dispositions de l'âme 
qui se rapportent à la colère. 
VI. Mais, dans les rapports qui naissent de la vie sociale et des 
communications que les hommes ont entre eux par le langage et pour leurs 
affaires, les uns s'attachent à être agréables à tout le monde; le désir de plaire leur 
fait tout approuver, éviter toute contestation, regardant comme un devoir de ne faire 
de la peine à personne; tandis que d'autres, au contraire, toujours en contradiction 
avec tout le monde, et se souciant peu d'affliger ou de déplaire, sont querelleurs, 
d'une humeur chagrine et difficile. Or, il est facile de voir que ces deux 
manières d'être sont blâmables, et que le caractère qui tient entre elles le juste 
milieu, qui consiste à se montrer traitable et doux, et pareillement à manifester du 
mécontentement et de l'indignation dans les choses qui le méritent, et de la 
manière qui convient, est digne d'éloges. 
Cependant, on n'a point donné de nom particulier à ce caractère, qui semble 
avoir quelque ressemblance principalement avec la bienveillance ou l'amitié. 
Car celui qui est dans cette disposition d'esprit, qui tient le juste milieu, a 
précisément le degré d'obligeance et de convenance que je veux dire. Il ne faut 
qu'y joindre une affection vive et tendre pour en faire le sentiment de l'amitié. 
Cependant elle en diffère par l'absence de cette affection tendre envers ceux avec 
qui l'on a des relations, car ce n'est ni par amour, ni par haine qu'on se détermine à 
prendre les choses comme il convient, mais simplement parce qu'on a le caractère 
dont je parle ici, et l'on sera disposé à agir  
de même à l'égard des gens inconnus, et à l'égard de ceux qu'on connaît; envers 
ceux avec qui l'on vit familièrement, comme envers ceux avec qui l'on n'a jamais eu 
aucun rapport. Seulement, on observera les convenances envers chacun : car 
lorsqu'il y a lieu de témoigner de l'intérêt, ou du mécontentement, on s'y prend 
autrement avec ceux qu'on fréquente habituellement, qu'avec des étrangers. 
Au reste, je l'ai dit, celui qui a ce caractère, se conduit, en général, avec les autres 
hommes comme il convient, n'ayant en vue que ce qui est honorable et utile : et il 
aspire à partager leurs plaisirs, ou du moins il ne veut pas les contrarier. 
En effet, cette manière d'être semble surtout relative aux plaisirs et aux peines 
qui naissent du commerce des hommes entre eux. Or, avec un tel caractère, on ne 
prendra point part à tous les plaisirs qui peuvent nuire aux autres ou les dégrader, 
et l'on aimera mieux, sans doute, les affliger que leur plaire ; et si une action est de 
nature à déshonorer celui qui la fait, ou à lui causer un dommage considérable, 
tandis qu'en s'y opposant on ne lui causera qu'une peine légère, on n'hésitera point 
à s'y opposer avec fermeté. |  |