| Texte grec :
 
 
  
  
    | [4,1124] (1124a) (1) Ἔοικε μὲν οὖν ἡ μεγαλοψυχία οἷον κόσμος τις εἶναι τῶν ἀρετῶν· 
 μείζους γὰρ αὐτὰς ποιεῖ, καὶ οὐ γίνεται ἄνευ ἐκείνων. Διὰ τοῦτο χαλεπὸν τῇ 
 ἀληθείᾳ μεγαλόψυχον εἶναι· οὐ γὰρ οἷόν τε ἄνευ καλοκαγαθίας. 
 Μάλιστα (5) μὲν οὖν περὶ τιμὰς καὶ ἀτιμίας ὁ μεγαλόψυχός ἐστι· καὶ ἐπὶ μὲν 
 ταῖς μεγάλαις καὶ ὑπὸ τῶν σπουδαίων μετρίως ἡσθήσεται, ὡς τῶν οἰκείων 
 τυγχάνων ἢ καὶ ἐλαττόνων· ἀρετῆς γὰρ παντελοῦς οὐκ ἂν γένοιτο ἀξία τιμή, 
 οὐ μὴν ἀλλ᾽ ἀποδέξεταί γε τῷ μὴ ἔχειν αὐτοὺς μείζω αὐτῷ ἀπονέμειν· (10) 
 τῆς δὲ παρὰ τῶν τυχόντων καὶ ἐπὶ μικροῖς πάμπαν ὀλιγωρήσει· οὐ γὰρ τούτων 
 ἄξιος· ὁμοίως δὲ καὶ ἀτιμίας· οὐ γὰρ ἔσται δικαίως περὶ αὐτόν. Μάλιστα μὲν 
 οὖν ἐστίν, ὥσπερ εἴρηται, ὁ μεγαλόψυχος περὶ τιμάς, οὐ μὴν ἀλλὰ καὶ περὶ 
 πλοῦτον καὶ δυναστείαν καὶ πᾶσαν εὐτυχίαν καὶ ἀτυχίαν (15) μετρίως ἕξει, 
 ὅπως ἂν γίνηται, καὶ οὔτ᾽ εὐτυχῶν περιχαρὴς ἔσται οὔτ᾽ ἀτυχῶν περίλυπος. 
 Οὐδὲ γὰρ περὶ τιμὴν οὕτως ἔχει ὡς μέγιστον ὄν. Αἱ γὰρ δυναστεῖαι καὶ ὁ 
 πλοῦτος διὰ τὴν τιμήν ἐστιν αἱρετά· οἱ γοῦν ἔχοντες αὐτὰ τιμᾶσθαι δι᾽ 
 αὐτῶν βούλονται· ᾧ δὲ καὶ ἡ τιμὴ μικρόν ἐστι, τούτῳ καὶ τἆλλα. (20) Διὸ 
 ὑπερόπται δοκοῦσιν εἶναι. 
 Δοκεῖ δὲ καὶ τὰ εὐτυχήματα συμβάλλεσθαι πρὸς μεγαλοψυχίαν. Οἱ γὰρ εὐγενεῖς 
 ἀξιοῦνται τιμῆς καὶ οἱ δυναστεύοντες ἢ πλουτοῦντες· ἐν ὑπεροχῇ γάρ, τὸ δ᾽ 
 ἀγαθῷ ὑπερέχον πᾶν ἐντιμότερον. Διὸ καὶ τὰ τοιαῦτα μεγαλοψυχοτέρους ποιεῖ· 
 τιμῶνται γὰρ ὑπὸ τινῶν· 
 (25) κατ᾽ ἀλήθειαν δ᾽ ὁ ἀγαθὸς μόνος τιμητός· ᾧ δ᾽ ἄμφω ὑπάρχει, μᾶλλον 
 ἀξιοῦται τιμῆς. Οἱ δ᾽ ἄνευ ἀρετῆς τὰ τοιαῦτα ἀγαθὰ ἔχοντες οὔτε δικαίως 
 ἑαυτοὺς μεγάλων ἀξιοῦσιν οὔτε ὀρθῶς μεγαλόψυχοι λέγονται· ἄνευ γὰρ ἀρετῆς 
 παντελοῦς οὐκ ἔστι ταῦτα. Ὑπερόπται δὲ καὶ ὑβρισταὶ καὶ οἱ (30) τὰ τοιαῦτα 
 ἔχοντες ἀγαθὰ γίνονται. Ἄνευ γὰρ ἀρετῆς οὐ ῥᾴδιον φέρειν ἐμμελῶς τὰ 
 εὐτυχήματα· (1124b) (1) οὐ δυνάμενοι δὲφέρειν καὶ οἰόμενοι τῶν ἄλλων 
 ὑπερέχειν ἐκείνων μὲν καταφρονοῦσιν, αὐτοὶ δ᾽ ὅ τι ἂν τύχωσι πράττουσιν. 
 Μιμοῦνται γὰρ τὸν μεγαλόψυχον οὐχ ὅμοιοι ὄντες, τοῦτο δὲ δρῶσιν ἐν οἷς 
 δύνανται· τὰ μὲν οὖν κατ᾽ ἀρετὴν οὐ πράττουσι, καταφρονοῦσι (5) δὲ τῶν 
 ἄλλων. 
 Ὁ μὲν γὰρ μεγαλόψυχος δικαίως καταφρονεῖ (δοξάζει γὰρ ἀληθῶς), οἱ δὲ 
 πολλοὶ τυχόντως. Οὐκ ἔστι δὲ μικροκίνδυνος οὐδὲ φιλοκίνδυνος διὰ τὸ ὀλίγα 
 τιμᾶν, μεγαλοκίνδυνος δέ, καὶ ὅταν κινδυνεύῃ, ἀφειδὴς τοῦ βίου ὡς οὐκ 
 ἄξιον ὂν πάντως ζῆν. Καὶ οἷος εὖ ποιεῖν, εὐεργετούμενος (10) δ᾽ 
 αἰσχύνεται· τὸ μὲν γὰρ ὑπερέχοντος, τὸ δ᾽ ὑπερεχομένου. Καὶ ἀντευεργετικὸς 
 πλειόνων· οὕτω γάρ οἱ προσοφλήσει ὁ ὑπάρξας καὶ ἔσται εὖ πεπονθώς. Δοκοῦσι 
 δὲ καὶ μνημονεύειν οὗ ἂν ποιήσωσιν εὖ, ὧν δ᾽ ἂν πάθωσιν οὔ (ἐλάττων γὰρ ὁ 
 παθὼν εὖ τοῦ ποιήσαντος, βούλεται δ᾽ ὑπερέχειν), καὶ (15) τὰ μὲν ἡδέως 
 ἀκούειν, τὰ δ᾽ ἀηδῶς· διὸ καὶ τὴν Θέτιν οὐ λέγειν τὰς εὐεργεσίας τῷ Διί, 
 οὐδ᾽ οἱ Λάκωνες πρὸς τοὺς Ἀθηναίους, ἀλλ᾽ ἃ πεπόνθεσαν εὖ. 
 Μεγαλοψύχου δὲ καὶ τὸ μηδενὸς δεῖσθαι ἢ μόλις, ὑπηρετεῖν δὲ προθύμως, καὶ 
 πρὸς μὲν τοὺς ἐν ἀξιώματι καὶ εὐτυχίαις μέγαν εἶναι, πρὸς δὲ (20) τοὺς 
 μέσους μέτριον· τῶν μὲν γὰρ ὑπερέχειν χαλεπὸν καὶ σεμνόν, τῶν δὲ ῥᾴδιον, 
 καὶ ἐπ᾽ ἐκείνοις μὲν σεμνύνεσθαι οὐκ ἀγεννές, ἐν δὲ τοῖς ταπεινοῖς 
 φορτικόν, ὥσπερ εἰς τοὺς ἀσθενεῖς ἰσχυρίζεσθαι· καὶ εἰς τὰ ἔντιμα μὴ 
 ἰέναι, ἢ οὗ πρωτεύουσιν ἄλλοι· καὶ ἀργὸν εἶναι καὶ μελλητὴν ἀλλ᾽ ἢ ὅπου 
 (25) τιμὴ μεγάλη ἢ ἔργον, καὶ ὀλίγων μὲν πρακτικόν, μεγάλων δὲ καὶ 
 ὀνομαστῶν. 
 Ἀναγκαῖον δὲ καὶ φανερομισῆ εἶναι καὶ φανερόφιλον (τὸ γὰρ λανθάνειν 
 φοβουμένου, καὶ ἀμελεῖν τῆς ἀληθείας μᾶλλον ἢ τῆς δόξης), καὶ λέγειν καὶ 
 πράττειν φανερῶς (παρρησιαστὴς γὰρ διὰ τὸ καταφρονητικὸς εἶναι, (30) καὶ 
 ἀληθευτικός, πλὴν ὅσα μὴ δι᾽ εἰρωνείαν (εἰρωνεία δὲ) πρὸς τοὺς πολλούς), 
 καὶ πρὸς ἄλλον μὴ δύνασθαι ζῆν ἀλλ᾽ ἢ φίλον· |  | Traduction française :
 
 
 
  
       
  | [4,1124] (1124a) On peut donc dire que la magnanimité est, en quelque sorte, 
l'ornement de toutes les vertus; car elle leur donne plus de grandeur, et ne saurait 
exister sans elles. Aussi est-il très difficile d'être véritablement magnanime ; car on 
ne saurait l'être sans réunir toutes les qualités qui font l'honnête homme. 
La magnanimité étant surtout relative aux honneurs, ou au déshonneur, celui 
qui possède cette vertu ne sera que médiocrement sensible aux grands honneurs, 
même quand ils lui seront accordés par les gens de bien, parce qu'il lui semblera 
qu'ils lui appartiennent, ou même qu'il en mérite de plus grands. Car il n'y a presque 
point d'honneurs qui soient le digne prix d'une vertu parfaite. Toutefois il les 
acceptera, puisqu'on ne peut pas lui en accorder de plus grands; mais il dédaignera 
ceux qui lui seraient offerts par les âmes vulgaires, ou pour des services de 
peu d'importance : car ce n'est pas là ce qu'il mérite ; et il en sera de même de la 
privation des honneurs, puisque jamais il ne pourra y être exposé avec justice. On 
voit donc que c'est principalement dans ces sortes de choses, comme je l'ai dit, que 
se montre le caractère du magnanime. Toutefois il saura modérer ses désirs pour 
les richesses, aussi bien que pour la puissance, et il conservera les mêmes 
sentiments de modération dans les prospérités et dans  les infortunes de toute 
espèce. Il ne se laissera point emporter à une joie excessive, quand la fortune le 
favorisera, ni ne s'abandonnera à l'excès de la douleur, quand elle lui deviendra 
contraire : car ce ne sont pas les honneurs et la considération qui sont à ses yeux 
les plus grands des biens, quoique ce soit principalement le motif qui fait rechercher 
la puissance et la richesse, et quoique ceux qui possèdent ces deux sortes 
d'avantages prétendent surtout être honorés à cause d'eux. Mais celui qui n'attache 
pas un grand prix aux honneurs, ne sera pas plus ébloui des autres sortes 
d'avantages:  et voilà pourquoi les hommes magnanimes  passent quelquefois pour 
hautains et dédaigneux.
Cependant il semble qu'une situation prospère contribue à la magnanimité : 
une naissance illustre, la possession d'un grand pouvoir, ou d'un grande richesse, 
donnent de la considération, car c'est une sorte de supériorité, et la supériorité en 
quelque genre que ce soit est un moyen de considération. De tels avantages 
inspirent donc la magnanimité; car certaines personnes y attachent de l'importance. 
Mais, à vrai dire, il n'y a que l'homme vertueux qui mérite d'être honoré. Sans 
doute quand on réunit la richesse et la puissance à la vertu, on obtient 
communément une plus grande considération: mais quiconque possède ces 
avantages, sans la vertu, ne peut ni justement prétendre à une haute considération, 
ni être appelé avec raison magnanime; car la vertu parfaite donne seule ce droit. 
Sans elle, on devient orgueilleux et insolent, et l'on contracte d'autres vices pareils; 
car on ne peut guère soutenir avec dignité les faveurs de la fortune; (1124b) et 
comme on croit pourtant être supérieur aux autres, on les méprise : mais on agit au 
hasard, car on veut se donner l'air de la magnanimité, sans avoir rien qui y 
ressemble. On le fait du moins autant qu'on peut, et cependant on n'agit point d'une 
manière conforme à la vertu, et l'on a pour les autres hommes un orgueilleux 
mépris. 
Mais le magnanime n'a pas tort de les mépriser; car il juge sainement des 
choses, au lieu que le vulgaire en juge au hasard. Au reste, il n'est ni avide de 
dangers, ni disposé à les braver pour de frivoles motifs, parce qu'il n'y a guère de 
choses qui aient une grande importance à ses yeux; mais dans les grandes 
occasions, il ne ménage point sa vie, parce qu'elle ne lui paraît pas d'un prix à qui 
tout doive céder. Toujours disposé à rendre service, il rougit, en quelque sorte, du 
bien qu'on lui fait : la supériorité se manifeste dans le premier cas, et l'infériorité 
dans le second ; et il s'applique  à surpasser en générosité ceux qui l'ont obligé, 
parce qu'alors on lui devra davantage, et qu'ainsi le bienfaiteur devient l'obligé à 
son tour. D'ailleurs l'homme est, en général, plus disposé à se ressouvenir du bien 
qu'il a fait que de celui qu'on lui a fait ; car l'obligé est, par rapport au bienfaiteur 
dans une sorte d'infériorité, et l'on veut toujours avoir l'avantage de son côté ; on se 
plaît à entendre parler de sa supériorité; la situation contraire fait toujours quelque 
peine. Aussi Thétis, dans Homère, ne fait-elle pas à Jupiter une longue 
énumération des services qu'elle lui a rendus ; et les députés de Lacédémone, 
dans leur harangue aux Athéniens, s'arrêtent-ils plus volontiers sur les services 
que ceux-ci leur avaient rendus, 
Il est encore dans le caractère du magnanime de ne demander aucun service 
à personne, ou au moins de ne s'y résoudre qu'avec peine, et d'être toujours prêt à 
obliger les autres; de se conduire avec fierté envers ceux qui sont constitués en 
dignité, ou qui sont comblés des faveurs de la fortune, tandis qu'il se montre doux 
et traitable envers ceux qui sont dans une condition médiocre : car il est difficile 
d'obtenir la supériorité sur les premiers, il y faut de la dignité; au lieu que cela est 
facile avec les autres. La hauteur même, à l'égard des puissants, n'est pas sans 
quelque générosité; elle devient grossièreté et rudesse à l'égard des personnes 
d'un état humble, comme l'abus de la force envers le faible. Il convient encore à 
l'homme vraiment magnanime de ne pas rechercher toutes les occasions d'obtenir 
des honneurs, et surtout, là où d'autres occupent le premier rang, de ne montrer de 
l'activité et de l'empressement que dans les occasions où il y a beaucoup de 
considération à obtenir, ou quelque chose de grand à exécuter; en un mot, de ne 
faire que des choses importantes et qui procurent de la gloire. 
Il doit nécessairement être ami prononcé et ennemi déclaré, car la 
dissimulation est l'indice de la crainte; se montrer plus soigneux de la vérité que de 
l'opinion, et enfin agir et parler sans feinte et sans détours; car c'est le propre d'une 
âme élevée. Aussi s'exprime-t-il toujours avec une noble franchise et avec une 
grande sincérité, à moins qu'il ne veuille avoir recours à l'ironie, ce qui lui arrive 
souvent avec le vulgaire. 
L'homme d'un caractère magnanime est incapable de régler sa vie sur les 
désirs ou les volontés d'un autre, si ce n'est de son ami; |  |