HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Aristote, Métaphysique, livre XIII

Chapitre 3

  Chapitre 3

[13,3] CHAPITRE III. Ὥσπερ γὰρ καὶ τὰ καθόλου ἐν τοῖς μαθήμασιν οὐ περὶ κεχωρισμένων ἐστὶ παρὰ τὰ μεγέθη καὶ τοὺς ἀριθμοὺς ἀλλὰ περὶ τούτων μέν, οὐχ (20) δὲ τοιαῦτα οἷα ἔχειν μέγεθος εἶναι διαιρετά, δῆλον ὅτι ἐνδέχεται καὶ περὶ τῶν αἰσθητῶν μεγεθῶν εἶναι καὶ λόγους καὶ ἀποδείξεις, μὴ δὲ αἰσθητὰ ἀλλ' τοιαδί. Ὥσπερ γὰρ καὶ κινούμενα μόνον πολλοὶ λόγοι εἰσί, χωρὶς τοῦ τί ἕκαστόν ἐστι τῶν τοιούτων καὶ τῶν συμβεβηκότων αὐτοῖς, (25) καὶ οὐκ ἀνάγκη διὰ ταῦτα κεχωρισμένον τι εἶναι κινούμενον τῶν αἰσθητῶν ἐν τούτοις τινὰ φύσιν εἶναι ἀφωρισμένην, οὕτω καὶ ἐπὶ τῶν κινουμένων ἔσονται λόγοι καὶ ἐπιστῆμαι, οὐχ κινούμενα δὲ ἀλλ' σώματα μόνον, καὶ πάλιν ἐπίπεδα μόνον καὶ μήκη μόνον, καὶ διαιρετὰ (30) καὶ ἀδιαίρετα ἔχοντα δὲ θέσιν καὶ ἀδιαίρετα μόνον, ὥστ' ἐπεὶ ἁπλῶς λέγειν ἀληθὲς μὴ μόνον τὰ χωριστὰ εἶναι ἀλλὰ καὶ τὰ μὴ χωριστά (οἷον κινούμενα εἶναι), καὶ τὰ μαθηματικὰ ὅτι ἔστιν ἁπλῶς (35) ἀληθὲς εἰπεῖν, καὶ τοιαῦτά γε οἷα λέγουσιν. Καὶ ὥσπερ καὶ τὰς ἄλλας ἐπιστήμας ἁπλῶς ἀληθὲς εἰπεῖν τούτου εἶναι, οὐχὶ τοῦ συμβεβηκότος (οἷον ὅτι λευκοῦ, εἰ τὸ ὑγιεινὸν λευκόν, δ' ἔστιν ὑγιεινοῦ) ἀλλ' ἐκείνου οὗ ἐστὶν ἑκάστη, (1078a) (1) εἰ ὑγιεινὸν ὑγιεινοῦ, εἰ δ' ἄνθρωπος ἀνθρώπου, οὕτω καὶ τὴν γεωμετρίαν· οὐκ εἰ συμβέβηκεν αἰσθητὰ εἶναι ὧν ἐστί, μὴ ἔστι δὲ αἰσθητά, οὐ τῶν αἰσθητῶν ἔσονται αἱ μαθηματικαὶ ἐπιστῆμαι, οὐ μέντοι οὐσὲ παρὰ ταῦτα ἄλλων (5) κεχωρισμένων. Πολλὰ δὲ συμβέβηκε καθ' αὑτὰ τοῖς πράγμασιν ἕκαστον ὑπάρχει τῶν τοιούτων, ἐπεὶ καὶ θῆλυ τὸ ζῷον καὶ ἄρρεν, ἴδια πάθη ἔστιν (καίτοι οὐκ ἔστι τι θῆλυ οὐδ' ἄρρεν κεχωρισμένον τῶν ζῴωνὥστε καὶ μήκη μόνον καὶ ἐπίπεδα. Καὶ ὅσῳ δὴ ἂν περὶ προτέρων τῷ (10) λόγῳ καὶ ἁπλουστέρων, τοσούτῳ μᾶλλον ἔχει τὸ ἀκριβές (τοῦτο δὲ τὸ ἁπλοῦν ἐστίν), ὥστε ἄνευ τε μεγέθους μᾶλλον μετὰ μεγέθους, καὶ μάλιστα ἄνευ κινήσεως, ἐὰν δὲ κίνησιν, μάλιστα τὴν πρώτην· ἁπλουστάτη γάρ, καὶ ταύτης ὁμαλή. δ' αὐτὸς λόγος καὶ περὶ ἁρμονικῆς καὶ ὀπτικῆς· οὐδετέρα (15) γὰρ ὄψις φωνὴ θεωρεῖ, ἀλλ' γραμμαὶ καὶ ἀριθμοί (οἰκεῖα μέντοι ταῦτα πάθη ἐκείνων), καὶ μηχανικὴ δὲ ὡσαύτως, ὥστ' εἴ τις θέμενος κεχωρισμένα τῶν συμβεβηκότων σκοπεῖ τι περὶ τούτων τοιαῦτα, οὐθὲν διὰ τοῦτο ψεῦδος ψεύσεται, ὥσπερ οὐδ' ὅταν ἐν τῇ γῇ γράφῃ καὶ (20) ποδιαίαν φῇ τὴν μὴ ποδιαίαν· οὐ γὰρ ἐν ταῖς προτάσεσι τὸ ψεῦδος. Ἄριστα δ' ἂν οὕτω θεωρηθείη ἕκαστον, εἴ τις τὸ μὴ κεχωρισμένον θείη χωρίσας, ὅπερ ἀριθμητικὸς ποιεῖ καὶ γεωμέτρης. Ἓν μὲν γὰρ καὶ ἀδιαίρετον ἄνθρωπος ἄνθρωπος· δ' ἔθετο ἓν ἀδιαίρετον, εἶτ' ἐθεώρησεν εἴ τι (25) τῷ ἀνθρώπῳ συμβέβηκεν ἀδιαίρετος. δὲ γεωμέτρης οὔθ' ἄνθρωπος οὔθ' ἀδιαίρετος ἀλλ' στερεόν. γὰρ κἂν εἰ μή που ἦν ἀδιαίρετος ὑπῆρχεν αὐτῷ, δῆλον ὅτι καὶ ἄνευ τούτων ἐνδέχεται αὐτῷ ὑπάρχειν τὸ δυνατόν, ὥστε διὰ τοῦτο ὀρθῶς οἱ γεωμέτραι λέγουσι, καὶ περὶ ὄντων διαλέγονται, (30) καὶ ὄντα ἐστίν· διττὸν γὰρ τὸ ὄν, τὸ μὲν ἐντελεχείᾳ τὸ δ' ὑλικῶς. Ἐπεὶ δὲ τὸ ἀγαθὸν καὶ τὸ καλὸν ἕτερον (τὸ μὲν γὰρ ἀεὶ ἐν πράξει, τὸ δὲ καλὸν καὶ ἐν τοῖς ἀκινήτοις), οἱ φάσκοντες οὐδὲν λέγειν τὰς μαθηματικὰς ἐπιστήμας περὶ καλοῦ ἀγαθοῦ ψεύδονται. Λέγουσι γὰρ καὶ δεικνύουσι μάλιστα· (35) οὐ γὰρ εἰ μὴ ὀνομάζουσι τὰ δ' ἔργα καὶ τοὺς λόγους δεικνύουσιν, οὐ λέγουσι περὶ αὐτῶν. Τοῦ δὲ καλοῦ μέγιστα εἴδη τάξις καὶ συμμετρία καὶ τὸ ὡρισμένον, (1078b) (1) μάλιστα δεικνύουσιν αἱ μαθηματικαὶ ἐπιστῆμαι. Καὶ ἐπεί γε πολλῶν αἴτια φαίνεται ταῦτα (λέγω δ' οἷον τάξις καὶ τὸ ὡρισμένονà, δῆλον ὅτι λέγοιεν ἂν καὶ τὴν τοιαύτην αἰτίαν τὴν (5) ὡς τὸ καλὸν αἴτιον τρόπον τινά. Μᾶλλον δὲ γνωρίμως ἐν ἄλλοις περὶ αὐτῶν ἐροῦμεν. Περὶ μὲν οὖν τῶν μαθηματικῶν, ὅτι τε ὄντα ἐστὶ καὶ πῶς ὄντα, καὶ πῶς πρότερα καὶ πῶς οὐ πρότερα, τοσαῦτα εἰρήσθω· [13,3] CHAPITRE III. De même que les universaux, dans les mathématiques, n’embrassent pas des existences séparées, des existences en dehors des grandeurs et des nombres, et que ce sont ces nombres et ces grandeurs qui sont l’objet de la science, mais non pas (20) en tant que susceptibles de grandeur ou de division ; de même il est possible qu’il y ait des raisonnements, des démonstrations relatives aux grandeurs sensibles elles-mêmes, non pas considérées en tant que sensibles, mais en tant qu’elles ont telle ou telle propriété. On discute bien sur les êtres considérés uniquement en tant qu’ils se meuvent, sans aucun égard à la nature de ces êtres ni à leurs accidents ; (25) et il n’est pas pour cela nécessaire, ou que l'être en mouvement ait une existence séparée des êtres sensibles, ou qu’il y ait dans les êtres en mouvement une nature déterminée. Ainsi donc il peut y avoir des raisonnements, des sciences relatives aux êtres qui se meuvent, considérés non plus en tant qu’ils subissent le mouvement, mais uniquement en tant que corps, puis uniquement en tant que surfaces, puis uniquement en tant que longueurs, puis en tant qu’ils sont divisibles (30) ou indivisibles, tout en ayant une position, enfin en tant qu’ils sont seulement indivisibles. Puis donc qu’il n’y a absolument aucune erreur à donner le nom d’êtres, non-seulement 251 aux existences séparées, mais encore à celles qu’on ne peut séparer, aux objets en mouvement par exemple ; il n’y a absolument pas d’erreur (35) à attribuer l’être aux objets mathématiques, et à les considérer comme on les considère. Et, de même que les autres sciences ne méritent réellement le titre de science que lorsqu’elles traitent de l’être dont nous parlons, et non pas de l’accident ; lorsqu’elles se demandent, par exemple, non pas si ce qui produit la santé c’est le blanc, parce que l’être qui produit la santé est blanc, mais ce qu’est cet être qui produit la santé ; lorsque chacune d’elles est la science de son objet même, (1078a) (1) science de l’être qui produit la santé, si son objet est ce qui produit la santé, science de l’homme si elle examine l’homme en tant qu’homme : de même aussi la Géométrie ne cherche pas si les objets dont elle s’occupe sont accidentellement des êtres sensibles ; elle ne les étudie point en tant qu’êtres sensibles. Par conséquent, les sciences mathématiques ne traitent pas des êtres sensibles ; elles n’ont pas néanmoins pour objets d’autres êtres séparés. (5) Mais il y a une foule d’accidents qui sont essentiels aux choses, en tant que chacun d’eux réside essentiellement en elles. L’animal en tant que femelle et en tant que mâle est une modification propre du genre ; toutefois il n’y a rien qui soit ni femelle ni mâle indépendamment des animaux. On peut donc considérer les objets sensibles uniquement en tant que longueurs, en tant que surfaces. Et plus les objets de la science 252 sont primitifs selon l’ordre logique, (10) et plus ils sont simples, plus aussi la science a de rigueur, car la rigueur, c’est la simplicité. La science de ce qui n’a pas de grandeur est plus rigoureuse que la science de ce qui a grandeur ; si son objet n’a pas de mouvement, elle est bien plus rigoureuse encore. C’est la science du premier mouvement qui l’est le plus dans les sciences du mouvement ; car c’est là le mouvement le plus simple, et le mouvement uniforme est le plus simple parmi les mouvements premiers. Même raisonnement pour la Musique et pour l’Optique. Ni l’une ni l’autre (15) ne considère la vue en tant que vue, le son en tant que son ; elles traitent de lignes en tant que lignes, de nombres en tant que nombres, lesquels sont des modifications propres de la vue et du son. De même pour la Mécanique. Ainsi donc, lorsqu’on admet comme existences séparées quelques-uns de ces accidents essentiels, lorsqu’on traite de ces accidents en tant qu’existences séparées, on n’est pas pour cela dans le faux, pas plus qu’on n’y serait, par exemple, si, mesurant la terre, on donnait au pied un autre nom (20) que celui de pied. Ce n’est pas dans ce qu’on établit d’abord que réside jamais l’erreur. On peut arriver à des résultats excellents en établissant comme séparé ce qui n’est pas séparé : ainsi fait l’Arithméticien, ainsi le Géomètre. L’homme est en effet un et indivisible en tant qu’homme. L’Arithméticien, après l’avoir posé comme un et indivisible, cherchera ensuite (25) quels sont les accidents propres de l’homme, en tant qu’indivisible ; tandis que le Géomètre ne le considère, ni en tant 253 qu’homme, ni en tant qu’indivisible, mais en tant que corps solide. Car les propriétés qui se manifestent dans l’homme en supposant une division réelle, ces propriétés y existent en puissance, alors même qu’il n’y a pas de division. Aussi les Géomètres n’ont-ils pas tort. C’est sur des êtres que roulent leurs discussions, (30) les objets de leur science sont des êtres : il y a deux sorte d’êtres, l’être en acte et l’être matériel. Le bien et le beau différent l’un de l’autre : le premier réside toujours dans des actions, tandis que le beau se trouve aussi dans les êtres immobiles. Ceux-là sont donc dans l’erreur, qui prétendent que les sciences mathématiques ne parlent ni du beau, ni du bien. C’est du beau surtout qu’elles parlent, c’est le beau qu’elles démontrent. (35) Ce n’est pas une raison, parce qu’elles ne le nomment pas, de dire qu’elles n’en parlent point ; elles en indiquent les effets et les rapports. Les plus imposantes formes du beau, ne sont-ce par l’ordre, la symétrie, la limitation ? (1078b) (1) Or, c’est là surtout ce que font apparaître les sciences mathématiques. Et puisque ces principes, je veux dire l’ordre et la limitation, sont évidemment causes d’une foule de choses, les Mathématiques doivent évidemment considérer comme cause, sous un certain point de vue, la cause dont nous parlons, (5) le beau en un mot. Mais 254 c’est-là un sujet que nous traiterons ailleurs plus à fond. Nous venons de montrer que les objets mathématiques sont des êtres, et comment ils sont des êtres ; à quel titre ils n’ont pas la priorité, et à quel titre ils sont antérieurs.


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Dernière mise à jour : 10/12/2009