[13,1] CHAPITRE PREMIER.
(1076a) (8) Περὶ μὲν οὖν τῆς τῶν αἰσθητῶν οὐσίας εἴρηται τίς ἐστιν, ἐν μὲν τῇ μεθόδῳ τῇ τῶν φυσικῶν περὶ τῆς ὕλης, ὕστερον (10) δὲ περὶ τῆς κατ' ἐνέργειαν· ἐπεὶ δ' ἡ σκέψις ἐστὶ πότερον ἔστι τις παρὰ τὰς αἰσθητὰς οὐσίας ἀκίνητος καὶ ἀίδιος ἢ οὐκ ἔστι, καὶ εἰ ἔστι τίς ἐστι, πρῶτον τὰ παρὰ τῶν ἄλλων λεγόμενα θεωρητέον, ὅπως εἴτε τι μὴ καλῶς λέγουσι, μὴ τοῖς αὐτοῖς ἔνοχοι ὦμεν, καὶ εἴ τι δόγμα κοινὸν ἡμῖν κἀκείνοις, (15) τοῦτ' ἰδίᾳ μὴ καθ' ἡμῶν δυσχεραίνωμεν· ἀγαπητὸν γὰρ εἴ τις τὰ μὲν κάλλιον λέγοι τὰ δὲ μὴ χεῖρον. Δύο δ' εἰσὶ δόξαι περὶ τούτων· τά τε γὰρ μαθηματικά φασιν οὐσίας εἶναί τινες, οἷον ἀριθμοὺς καὶ γραμμὰς καὶ τὰ συγγενῆ τούτοις, καὶ πάλιν τὰς ἰδέας.
Ἐπεὶ δὲ οἱ μὲν δύο ταῦτα γένη (20) ποιοῦσι, τάς τε ἰδέας καὶ τοὺς μαθηματικοὺς ἀριθμούς, οἱ δὲ μίαν φύσιν ἀμφοτέρων, ἕτεροι δέ τινες τὰς μαθηματικὰς μόνον οὐσίας εἶναί φασι, σκεπτέον πρῶτον μὲν περὶ τῶν μαθηματικῶν, μηδεμίαν προστιθέντας φύσιν ἄλλην αὐτοῖς, οἷον πότερον ἰδέαι τυγχάνουσιν οὖσαι ἢ οὔ, καὶ πότερον ἀρχαὶ (25) καὶ οὐσίαι τῶν ὄντων ἢ οὔ, ἀλλ' ὡς περὶ μαθηματικῶν μόνον εἴτ' εἰσὶν εἴτε μὴ εἰσί, καὶ εἰ εἰσὶ πῶς εἰσίν· ἔπειτα μετὰ ταῦτα χωρὶς περὶ τῶν ἰδεῶν αὐτῶν ἁπλῶς καὶ ὅσον νόμου χάριν· τεθρύληται γὰρ τὰ πολλὰ καὶ ὑπὸ τῶν ἐξωτερικῶν λόγων, ἔτι δὲ πρὸς ἐκείνην δεῖ τὴν σκέψιν ἀπαντᾶν (30) τὸν πλείω λόγον, ὅταν ἐπισκοπῶμεν εἰ αἱ οὐσίαι καὶ αἱ ἀρχαὶ τῶν ὄντων ἀριθμοὶ καὶ ἰδέαι εἰσίν· μετὰ γὰρ τὰς ἰδέας αὕτη λείπεται τρίτη σκέψις.
Ἀνάγκη δ', εἴπερ ἔστι τὰ μαθηματικά, ἢ ἐν τοῖς αἰσθητοῖς εἶναι αὐτὰ καθάπερ λέγουσί τινες, ἢ κεχωρισμένα τῶν αἰσθητῶν (λέγουσι δὲ καὶ οὕτω τινές)· ἢ εἰ μηδετέρως, ἢ οὐκ εἰσὶν ἢ ἄλλον τρόπον εἰσίν· ὥσθ' ἡ ἀμφισβήτησις ἡμῖν ἔσται οὐ περὶ τοῦ εἶναι ἀλλὰ περὶ τοῦ τρόπου.
| [13,1] CHAPITRE PREMIER.
(1076a) (8) Nous avons dit dans notre traité de Physique, quelle est la nature de la substance des choses sensibles, d’abord en traitant de la matière, puis ensuite 242 (10) quand il s’est agi de la substance en acte. Voici quel est maintenant l’objet de nos recherches : Y a-t-il ou n’y a-t-il pas, en dehors des substances sensibles, une substance immobile et éternelle ; et, si cette substance existe, quelle est sa nature ? Commençons par examiner les systèmes des autres philosophes, afin de ne point partager leurs erreurs, dans le cas où quelques-unes de leurs opinions ne seraient pas fondées. (15) Et si, par aventure, nous trouvions des points de doctrine qui leur fussent communs avec nous, gardons-nous d’éprouver en nous-mêmes aucun sentiment pénible. Ce doit être un titre à nos respects, que d’avoir, sur certaines choses, des vues supérieures aux nôtres, et de n’être pas, sur d’autres points, inférieur à nous.
Il y a deux systèmes (20) relativement au sujet qui nous occupe. On admet comme substances particulières les êtres mathématiques, tels que les nombres, les lignes, 243 les objets du même genre, et avec eux les idées. Il en est qui font de ces êtres deux genres différents, les idées d’un côté, et de l’autre les nombres mathématiques ; d’autres font de ces deux genres une seule et même nature ; quelques autres enfin prétendent que les substances mathématiques seules sont des substances. Commençons par l’examen des substances mathématiques, et examinons-les indépendamment de toute autre nature. Ne nous demandons point, par exemple, si elles sont ou ne sont pas des idées, si elles sont ou ne sont pas les pricipes (25) et les substances des êtres ; demandons-nous, comme si nous n’avions à nous occuper que des êtres mathématiques, si ces substances existent ou n’existent pas, et, si elles existent, quel est le mode de leur existence. Puis nous parlerons séparément des idées elles-mêmes, sans trop de développements, et dans la mesure qui convient au but que nous nous proposons, car presque toutes les questions qui se rapportent à ce sujet ont été rebattues déjà dans nos traités exotériques. Dans le cours de notre examen, nous aurons encore à discuter (30) longuement sur cette question : Les substances et les principes des êtres sont-ils des nombres et des idées ? car c’est-là une troisième question qui vient après celle des idées.
Les êtres mathématiques, s’ils existent, sont nécessairement dans les objets sensibles, comme l’avancent quelques-uns, ou bien ils en sont séparés (et il en est aussi qui admettent cette opinion). S’ils ne sont 244 ni dans les objets sensibles, ni en dehors d’eux, ou ils n’existent pas, ou bien ils existent d’une autre manière. Notre doute portera donc ici, non pas sur l’être lui-même, mais sur la manière d’être.
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