[4,8] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Η'.
§ 1. Διωρισμένων δὲ τούτων φανερὸν ὅτι καὶ τὰ μοναχῶς (30) λεγόμενα καὶ
κατὰ πάντων ἀδύνατον ὑπάρχειν ὥσπερ τινὲς λέγουσιν, οἱ μὲν οὐθὲν φάσκοντες
ἀληθὲς εἶναι (οὐθὲν γὰρ κωλύειν φασὶν οὕτως ἅπαντα εἶναι ὥσπερ τὸ τὴν
διάμετρον σύμμετρον εἶναι), οἱ δὲ πάντ' ἀληθῆ. Σχεδὸν γὰρ οὗτοι οἱ λόγοι
οἱ αὐτοὶ τῷ Ἡρακλείτου· ὁ γὰρ λέγων (35) ὅτι πάντ' ἀληθῆ καὶ πάντα ψευδῆ,
καὶ χωρὶς λέγει τῶν λόγων ἑκάτερον τούτων, (1012b)(1) ὥστ' εἴπερ ἀδύνατα
ἐκεῖνα, καὶ ταῦτα ἀδύνατον εἶναι.
§ 2. Ἔτι δὲ φανερῶς ἀντιφάσεις εἰσὶν ἃς οὐχ οἷόν τε ἅμα ἀληθεῖς εἶναι -
οὐδὲ δὴ ψευδεῖς πάσας· καίτοι δόξειέ γ' ἂν μᾶλλον ἐνδέχεσθαι ἐκ τῶν
εἰρημένων.
§ 3. (5) Ἀλλὰ πρὸς πάντας τοὺς τοιούτους λόγους αἰτεῖσθαι δεῖ, καθάπερ
ἐλέχθη καὶ ἐν τοῖς ἐπάνω λόγοις, οὐχὶ εἶναί τι ἢ μὴ εἶναι ἀλλὰ σημαίνειν
τι, ὥστε ἐξ ὁρισμοῦ διαλεκτέον λαβόντας τί σημαίνει τὸ ψεῦδος ἢ τὸ ἀληθές.
Εἰ δὲ μηθὲν ἄλλο τὸ ἀληθὲς φάναι ἢ ἀποφάναι ψεῦδός ἐστιν, ἀδύνατον (10)
πάντα ψευδῆ εἶναι· ἀνάγκη γὰρ τῆς ἀντιφάσεως θάτερον εἶναι μόριον ἀληθές.
§ 4. Ἔτι εἰ πᾶν ἢ φάναι ἢ ἀποφάναι ἀναγκαῖον, ἀδύνατον ἀμφότερα ψευδῆ
εἶναι· θάτερον γὰρ μόριον τῆς ἀντιφάσεως ψεῦδός ἐστιν.
§ 5. Συμβαίνει δὴ καὶ τὸ θρυλούμενον πᾶσι τοῖς τοιούτοις λόγοις, αὐτοὺς
(15) ἑαυτοὺς ἀναιρεῖν. Ὁ μὲν γὰρ πάντα ἀληθῆ λέγων καὶ τὸν ἐναντίον αὑτοῦ
λόγον ἀληθῆ ποιεῖ, ὥστε τὸν ἑαυτοῦ οὐκ ἀληθῆ (ὁ γὰρ ἐναντίος οὔ φησιν
αὐτὸν ἀληθῆ), ὁ δὲ πάντα ψευδῆ καὶ αὐτὸς αὑτόν.
§ 6. Ἐὰν δ' ἐξαιρῶνται ὁ μὲν τὸν ἐναντίον ὡς οὐκ ἀληθὴς μόνος ἐστίν, ὁ δὲ
τὸν αὑτοῦ ὡς οὐ ψευδής, (20) οὐδὲν ἧττον ἀπείρους συμβαίνει αὐτοῖς
αἰτεῖσθαι λόγους ἀληθεῖς καὶ ψευδεῖς· ὁ γὰρ λέγων τὸν ἀληθῆ λόγον ἀληθῆ
ἀληθής, τοῦτο δ' εἰς ἄπειρον βαδιεῖται.
§ 7. Φανερὸν δ' ὅτι οὐδ' οἱ πάντα ἠρεμεῖν λέγοντες ἀληθῆ λέγουσιν οὐδ' οἱ
πάντα κινεῖσθαι. Εἰ μὲν γὰρ ἠρεμεῖ πάντα, ἀεὶ ταὐτὰ ἀληθῆ καὶ (25) ψευδῆ
ἔσται, φαίνεται δὲ τοῦτο μεταβάλλον ̔ὁ γὰρ λέγων ποτὲ αὐτὸς οὐκ ἦν καὶ
πάλιν οὐκ ἔσταἰ· εἰ δὲ πάντα κινεῖται, οὐθὲν ἔσται ἀληθές· πάντα ἄρα
ψευδῆ· ἀλλὰ δέδεικται ὅτι ἀδύνατον.
§ 8. Ἔτι ἀνάγκη τὸ ὂν μεταβάλλειν· ἔκ τινος γὰρ εἴς τι ἡ μεταβολή. Ἀλλὰ
μὴν οὐδὲ πάντα ἠρεμεῖ (30) ἢ κινεῖται ποτέ, ἀεὶ δ' οὐθέν· ἔστι γάρ τι ὃ
ἀεὶ κινεῖ τὰ κινούμενα, καὶ τὸ πρῶτον κινοῦν ἀκίνητον αὐτό.
| [4,8] CHAPITRE VIII
§ 1. Après tout ce qui précède, on doit voir que ces assertions
appliquées à un seul cas, et celles qui s'appliquent à tout, sont
insoutenables au sens où les comprennent ceux qui les défendent; les uns
affirmant que rien n'est vrai, puisque, selon eux, il se peut fort bien
que toutes les; propositions soient fausses, comme celle où l'on
avancerait que la diagonale est commensurable au côté ; les autres
affirmant au contraire que tout est vrai. Ce sont là des théories qui se
rapprochent beaucoup des opinions d'Héraclite et se confondent presque
avec elles. En effet, celui qui prétend que tout est vrai et que tout
est faux, maintient aussi chacune de ces assertions prises à part; et par
conséquent si, considérées séparément, elles sont fausses, (1012b) elles
le sont également quand on les considère ensemble.
§ 2. D'ailleurs, il y a évidemment des contradictoires qui ne peuvent pas
être vraies toutes les deux à la fois, mais qui ne peuvent pas non plus
être à la fois toutes les deux fausses, bien que cette dernière
alternative pût paraître plus possible que l'autre, d'après les théories
qu'on vient d'exposer.
§ 3. Mais, pour réfuter toutes ces doctrines, il faut, ainsi que nous
l'avons déjà indiqué un peu plus haut, demander à son adversaire, non pas
de dire si la chose est ou si elle n'est pas, mais il faut le sommer
d'exprimer et de préciser une pensée quelconque ; de manière qu'on puisse
la discuter, en s'appuyant sur la définition même de ce que c'est que le
vrai et de ce que c'est que le faux. Si la vérité n'est pas autre chose
que d'affirmer le le vrai et de nier le faux, il est dès lors impossible
que tout soit faux, puisqu'il y a nécessité absolue que l'une des
deux parties de la contradiction soit vraie.
§ 4. D'autre part, si pour toute chose quelconque il faut nécessairement
ou l'affirmer ou la nier, il est impossible que les deux parties soient
fausses, puisque, dans la contradiction, il n'y en a jamais qu'une seule
qui le soit.
§ 5. Le malheur commun de toutes ces belles théories, c'est, comme on l'a
répété cent fois, de se réfuter elles-mêmes. Et en effet, quand on
avance que tout est vrai, on rend vraie par cela même l'assertion opposée
à celle qu'on défend; et, par conséquent, on rend fausse la sienne propre,
puisque l'assertion contraire nie que vous soyez dans le vrai. Également,
quand on dit que tout est faux, on se condamne du même coup soi-même.
§ 6. Que si l'on veut faire des exceptions, et dire que l'opinion
contraire à celle qu'on soutient est la seule à n'être pas vraie, et que
celle qu'on embrasse soi-même est la seule à n'être pas fausse, on
n'en suppose pas moins alors un nombre infini d'assertions vraies et
fausses; car, lorsqu'on dit de telle assertion vraie qu'elle est vraie, on
sous-entend toujours que celui qui dit qu'elle est vraie est dans le vrai
; et ces répétitions pourraient aller à l'infini.
§ 7. Il est d'ailleurs évident que ceux qui prétendent que tout est en
repos, ne sont pas plus dans le vrai que ceux qui prétendent que tout est
en mouvement. Si tout est en repos, alors les mêmes choses seront
éternellement vraies et éternellement fausses. Mais le changement en
ce monde est de toute évidence ; et votre interlocuteur lui-même doit se
dire qu'il fut un temps où il n'existait pas, et qu'il y aura bientôt un
temps où il n'existera plus. Mais, si tout est en mouvement, rien ne sera
vrai; tout sera faux. Or nous avons démontré que c'était là une
impossibilité absolue.
§ 8. Enfin, c'est l'être qui doit nécessairement changer, puisque le
changement n'est que le passage d'un état à un autre état. Mais
certainement les choses ne sont pas toutes en repos ou en mouvement ;
elles n'y sont qu'à certains moments donnés ; aucune n'y est
éternellement. Ce qui est vrai, c'est qu'il existe un principe qui meut
éternellement tout ce qui est mû; et que le moteur premier est lui-même
immobile.
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