[6,19] Ταῦτα ἀκούσας ὁ Θέρσανδρος οὐκ εἶχεν ὅστις γένηται· καὶ
γὰρ ἤρα καὶ ὠργίζετο. θυμὸς δὲ καὶ ἔρως δύο λαμπάδες· ἔχει γὰρ
καὶ ὁ θυμὸς ἄλλο πῦρ, καὶ ἔστι τὴν μὲν φύσιν ἐναντιώτατον, τὴν δὲ
βίαν ὅμοιον. ὁ μὲν γὰρ παροξύνει μισεῖν, ὁ δὲ ἀναγκάζει φιλεῖν·
καὶ ἀλλήλων πάροικος ἡ τοῦ πυρός ἐστι πηγή. ὁ μὲν γὰρ εἰς τὸ
ἧπαρ κάθηται, ὁ δὲ τῇ καρδίᾳ περιβέβληται. ὅταν οὖν ἄμφω τὸν
ἄνθρωπον καταλάβωσι, γίνεται μὲν αὐτοῖς ἡ ψυχὴ τρυτάνη, τὸ δὲ
πῦρ ἑκατέρου ταλαντεύεται. μάχονται δὲ ἄμφω περὶ τῆς ῥοπῆς· καὶ
τὰ πολλὰ μὲν ὁ ἔρως εἴωθε νικᾶν, ὅταν εἰς τὴν ἐπιθυμίαν εὐτυχῇ.
ἢν δὲ αὐτὸν ἀτιμάσῃ τὸ ἐρώμενον, αὐτὸς τὸν θυμὸν εἰς συμμαχίαν
καλεῖ. κἀκεῖνος ὡς γείτων πείθεται, καὶ ἀνάπτουσιν ἄμφω τὸ πῦρ.
ἂν δὲ ἅπαξ ὁ θυμὸς τὸν ἔρωτα παρ´ αὑτῷ λάβῃ καὶ τῆς οἰκείας
ἕδρας ἐκπεσόντα κατάσχῃ, φύσει γε ὢν ἄσπονδος, οὐχ ὡς φίλῳ πρὸς
τὴν ἐπιθυμίαν συμμαχεῖ, ἀλλ´ ὡς δοῦλον τῆς ἐπιθυμίας πεδήσας
κρατεῖ· οὐκ ἐπιτρέπει δὲ αὐτῷ σπείσασθαι πρὸς τὸ ἐρώμενον, κἂν
θέλῃ. ὁ δὲ τῷ θυμῷ βεβαπτισμένος καταδύεται, καὶ εἰς τὴν ἰδίαν
ἀρχὴν ἐκπηδῆσαι θέλων οὐκέτι ἐστὶν ἐλεύθερος, ἀλλὰ μισεῖν ἀναγκάζεται
τὸ φιλούμενον. ὅταν δὲ ὁ θυμὸς καχλάζων γεμισθῇ καὶ τῆς
ἐξουσίας ἐμφορηθεὶς ἀποβλύσῃ, κάμνει μὲν ἐκ τοῦ κόρου, καμὼν δὲ
παρίεται, καὶ ὁ ἔρως ἀμύνεται καὶ ὁπλίζει τὴν ἐπιθυμίαν καὶ τὸν
θυμὸν ἤδη καθεύδοντα νικᾷ. ὁρῶν δὲ τὰς ὕβρεις, ἃς κατὰ τῶν
φιλτάτων ἐπαρῴνησεν, ἀλγεῖ καὶ πρὸς τὸ ἐρώμενον ἀπολογεῖται καὶ
εἰς ὁμιλίαν παρακαλεῖ καὶ τὸν θυμὸν ἐπαγγέλλεται καταμαλάττειν
ἡδονῇ. τυχὼν μὲν οὖν ὧν ἠθέλησεν, ἵλεως γίνεται, ἀτιμούμενος
δὲ πάλιν εἰς τὸν θυμὸν καταδύεται· ὁ δὲ καθεύδων ἐξεγείρεται καὶ
τὰ ἀρχαῖα ποιεῖ· ἀτιμίᾳ γὰρ ἔρωτος σύμμαχός ἐστι θυμός.
| [6,19] En l'entendant, Thersandre ne se connut plus; il
était amoureux, et il était en rage. La colère et l'amour
sont deux torches; car la colère possède, elle aussi, un
feu, qui est d'une nature aussi contraire que possible
à l'autre, mais dont la violence est égale. L'un excite à
haïr, l'autre contraint d'aimer. Et de l'un et de l'autre
feux les sources sont voisines : l'un réside dans le foie,
l'autre se déchaîne autour du coeur. Lorsqu'ils attaquent
tous deux à la fois, l'âme devient une balance dont les
deux plateaux sont chargés de flammes. Tous deux luttent
à qui fera pencher la balance; et, le plus souvent, c'est
l'amour qui l'emporte, toutes les fois qu'il obtient ce
qu'il désire; mais si l'objet aimé n'a que mépris pour lui,
alors il appelle la colère à son aide. Et l'autre, en voisine,
répond à l'appel, et tous deux attisent la flamme.
Et si la colère a une fois succédé à l'amour et l'a remplacé en
l'éloignant de son séjour habituel, alors c'est un ennemi
impitoyable; elle ne lutte pas à ses côtés pour obtenir
ce que celui-ci désire, mais elle le maintient enchaîne,
comme l'esclave de ce désir et c'est elle qui triomphe. Et
elle ne lui permet plus de conclure un accord avec l'objet
aimé, même s'il le souhaite. L'amour est alors submerge
par la colère et sombre, et lorsqu'il souhaite reprendre
son ancien pouvoir, il n'est plus libre; il est contraint de
haïr ce qu'il aime. Mais lorsque la colère a bouillonne
tout son soûl, qu'elle a pleinement joui de toute sa liberté,
elle se dégoûte, elle se ralentit, rassasiée, et, en se calmant,
perd de sa puissance; alors l'amour attaque, arme
le désir et remporte la victoire sur la colère qui déjà
s'endort. Lorsqu'il voit les actes de violence qu'il a
commis, dans son délire, contre ce qu'il a de plus cher,
il souffre et s'excuse auprès de l'objet aimé, l'invite à
s'entretenir avec lui, promet d'apaiser sa colère à force
de plaisir. S'il obtient ce qu'il souhaite, il se fait complaisant;
mais s'il est méprisé, de nouveau il s'abandonne à
la colère. Et celle-ci est éveillée de son sommeil et recommence
comme auparavant. De l'amour méprisé, la colère est l'alliée.
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