[4,18] Ἐν τούτῳ δὲ καὶ τοὺς λῃστὰς ἐπελθοῦσα δύναμις μείζων
ἀπὸ τῆς μητροπόλεως παρεστήσατο καὶ πᾶσαν αὐτῶν εἰς ἔδαφος
κατέστρεψε τὴν πόλιν. ἐλευθερωθέντος δὲ τοῦ ποταμοῦ τῆς τῶν
βουκόλων ὕβρεως παρεσκευαζόμεθα τὸν ἐπὶ τὴν Ἀλεξάνδρειαν πλοῦν.
συνέπλει δὲ ἡμῖν καὶ ὁ Χαιρέας, φίλος ἤδη γενόμενος ἐκ τῆς τοῦ
φαρμάκου μηνύσεως.
ἦν δὲ τὸ μὲν γένος ἐκ τῆς νήσου τῆς Φάρου, τὴν δὲ τέχνην ἁλιεύς· ἐστρατεύετο
δὲ μισθῷ κατὰ τῶν βουκόλων τὴν ἐν ταῖς ναυσὶ στρατείαν, ὥστε μετὰ τὸν
πόλεμον τῆς στρατείας ἀπήλλακτο.
ἦν οὖν ἐξ ἀπλοίας μακρᾶς πλεόντων πάντα μεστὰ
καὶ πολλή τις ὄψεως ἡδονή· ναυτῶν ᾠδή, πλωτήρων κρότος, χορεία
νεῶν· καὶ ἦν ἅπας ὁ ποταμὸς ἑορτή, ἐῴκει δὲ ὁ πλοῦς κωμάζοντι
ποταμῷ. ἔπινον δὲ καὶ τοῦ Νείλου τότε πρῶτον ἄνευ τῆς πρὸς οἶνον
ὁμιλίας, κρῖναι θέλων τοῦ πόματος τὴν ἡδονήν· οἶνος γὰρ φύσεως
ὕδατος κλοπή.
ἀρυσάμενος οὖν ὑέλου τῆς διαφανοῦς κύλικα, τὸ ὕδωρ ἑώρων ὑπὸ λευκότητος
πρὸς τὸ ἔκπωμα ἁμιλλώμενον καὶ τὸ ἔκπωμα νικώμενον. γλυκὺ δὲ πινόμενον
ἦν καὶ ψυχρὸν ἐν μέτρῳ τῆς ἡδονῆς· οἶδα γὰρ ἐνίους τῶν παρ´ Ἕλλησι ποταμῶν
καὶ τιτρώσκοντας· τούτῳ συνέκρινον αὐτοὺς τῷ ποταμῷ.
διὰ τοῦτο αὐτὸν ἄκρατον ὁ Αἰγύπτιος πίνων οὐ φοβεῖται, Διονύσου μὴ δεόμενος.
ἐθαύμασα δὲ αὐτοῦ καὶ τὸν τρόπον τοῦ ποτοῦ. οὔτε γὰρ ἀρύσαντες
πίνειν ἐθέλουσιν οὔτε ἐκπωμάτων ἀνέχονται, ἔκπωμα αὐτουργὸν
ἔχοντες· ἔκπωμα γὰρ αὐτοῖς ἐστιν ἡ χείρ.
εἰ γάρ τις αὐτῶν διψήσειε πλέων, προκύψας ἐκ τῆς νηὸς τὸ μὲν πρόσωπον εἰς
τὸν ποταμὸν προβέβληκε, τὴν δὲ χεῖρα εἰς τὸ ὕδωρ καθῆκε καὶ κοίλην
βαπτίσας καὶ πλησάμενος ὕδατος ἀκοντίζει κατὰ τοῦ στόματος τὸ
πόμα καὶ τυγχάνει τοῦ σκοποῦ· τὸ δὲ κεχηνὸς περιμένει τὴν βολὴν
καὶ δέχεται καὶ κλείεται καὶ οὐκ ἐᾷ τὸ ὕδωρ αὖθις ἔξω πεσεῖν.
| [4,18] Sur ces entrefaites arriva du chef-lieu une troupe
plus considérable, qui régla l'affaire des brigands et
rasa leur ville jusqu'aux fondations. Le fleuve ainsi
délivré de la terreur que faisaient régner les bouviers,
nous nous préparâmes à nous embarquer pour Alexandrie.
Nous avions avec nous sur le bateau Chaeréas,
qui était désormais devenu notre ami après nous avoir
renseigné sur le philtre. Il était originaire de l'île de
Pharos et pêcheur de son métier, et il s'était engagé
pour participer, comme marin, à l'expédition contre les
bouviers; aussi, l'opération terminée, il quittait l'armée.
Après une longue période où l'on n'avait pas navigué,
tout, sur le fleuve, était maintenant couvert de bateaux,
et le spectacle était plein de charme, chant des bateliers,
bruit cadencé des rames, longue théorie de bateaux, le
fleuve entier n'était qu'une fête. Et notre voyage sembla
se dérouler sur un fleuve en liesse. Je bus alors pour la
première fois de l'eau du Nil sans la mêler à du vin,
désirant juger de sa qualité comme boisson, car le vin
dissimule la vraie nature de l'eau. J'en remplis un
verre fait du cristal le plus pur et je vis que l'eau, par
sa limpidité, rivalisait avec le vase et même le surpassait.
Elle était douce au goût, et juste assez froide pour être
agréable. Je sais qu'il y a en Grèce des fleuves dont
l'eau va jusqu'à faire mal, tant elle est froide, et c'est à
eux que je comparai l'eau du Nil. Telle est la raison pour
laquelle les Égyptiens n'hésitent pas à boire cette eau
toute pure, sans avoir besoin des présents de Dionysos.
Je remarquai avec étonnement la façon dont ils boivent;
ils ne la versent pas dans un verre avant de boire, ils
ne se servent pas de récipients pour la recevoir, car ils
ont un récipient naturel : le verre dont ils se servent
est leur main. Si l'un d'eux a soif alors qu'il est sur un
bateau, il se penche sur le bordage, le visage tourné
vers le fleuve, plonge la main dans l'eau, en la creusant
et, quand elle est pleine d'eau, lance le liquide à sa bouche
et jamais il ne manque le but. Sa bouche, ouverte, attend le jet,
le reçoit et se referme, et ne laisse pas échapper l'eau.
|