[4,14] Ἦσαν δὲ τῶν πραττομένων σκοποὶ πόρρωθεν, οὓς οἱ βουκόλοι
προκαθίσαντες ἐκέλευον, εἰ διαβαίνοντας ἴδοιεν τοὺς πολεμίους,
τὸ χῶμα τοῦ ποταμοῦ κόψαντας ἐπαφεῖναι τὸ ὕδωρ πᾶν τοῖς ἐναντίοις.
ἔχει γὰρ οὕτω τὰ τοῦ Νείλου ῥεύματα.
καθ´ ἑκάστην διώρυχα χῶμα ἔχουσιν Αἰγύπτιοι, ὡς ἂν μὴ πρὸ καιροῦ τῆς χρείας
ὑπερέχων ὁ Νεῖλος τὴν γῆν ἐπικλύσῃ. ὅταν δὲ δεηθῶσιν ἀρδεῦσαι
τὸ πεδίον, ἀνέῳξαν ὀλίγον τοῦ χώματος, εἰς ὃ σαλεύεται. ἦν οὖν τῆς
κώμης ὄπισθεν διῶρυξ τοῦ ποταμοῦ μεγάλη καὶ πλατεῖα.
ταύτῃ οἱ τεταγμένοι τὸ ἔργον, ὡς εἶδον εἰσιόντας τοὺς πολεμίους, διακόπτουσι
ταχὺ τὸ χῶμα τοῦ ποταμοῦ. πάντα οὖν ὁμοῦ γίνεται· οἱ μὲν
γέροντες οἱ κατὰ πρόσωπον ἄφνω διΐστανται, οἱ δὲ τὰς λόγχας ἐγείραντες
ἐκτρέχουσι· τὸ δὲ ὕδωρ ἤδη παρῆν, καὶ ὠγκοῦντο μὲν αἱ
λίμναι πάντοθεν οἰδοῦσαι, ὁ δὲ ἰσθμὸς ἐπεκλύζετο, πάντα δὲ ἦν
ὥσπερ θάλασσα.
ἐμπεσόντες οὖν οἱ βουκόλοι τοὺς μὲν κατὰ πρόσωπον καὶ τὸν στρατηγὸν αὐτὸν
διαπείρουσι ταῖς λόγχαις, ἀπαρασκεύους τε ὄντας καὶ πρὸς τὸ ἀδόκητον
τεταραγμένους. τῶν δ´ ἄλλων ἀδιήγητος θάνατος ἦν.
οἱ μὲν γὰρ εὐθὺς ἐκ πρώτης προσβολῆς μηδὲ κινήσαντες τὰς αἰχμὰς ἀπώλλυντο,
οἱ δὲ οὐ λαβόντες σχολὴν ἀμύνασθαι· ἅμα γὰρ ἐμάνθανον καὶ ἔπασχον·
ἐνίους δὲ ἔφθανε τὸ παθεῖν πρὸ τοῦ μαθεῖν· οἱ δὲ ὑπ´ ἐκπλήξεως παραλόγου
τὸν θάνατον εἱστήκεσαν περιμένοντες· οἱ δὲ καὶ κινηθέντες μόνον
κατωλίσθαινον, ὑποσκελίζοντος αὐτοὺς τοῦ ποταμοῦ· οἱ δὲ καὶ φεύγειν
ὁρμήσαντες εἰς τὸ βαθὺ τῆς λίμνης ἐγκυλισθέντες ὑπεσύρησαν.
τῶν μὲν γὰρ ἐπὶ τῆς γῆς ἑστώτων τὸ ὕδωρ ἦν ἄχρις ὀμφαλοῦ,
ὥστε καὶ ἀνέκρουεν αὐτῶν τὰς ἀσπίδας καὶ ἐγύμνου πρὸς τὰ τραύματα
τὰς γαστέρας· τὸ δὲ κατὰ τὴν λίμνην ὕδωρ πάντῃ ὑπὲρ κεφαλὴν
ἀνδρὸς ἦν.
διακρῖναι δὲ οὐκ ἦν, τί λίμνη καὶ τί πεδίον· ἀλλὰ καὶ ὁ διὰ τῆς γῆς τρέχων
δέει τοῦ μὴ διαμαρτεῖν βραδύτερος ἦν πρὸς τὴν φυγήν, ὥστε ταχέως ἡλίσκετο,
καὶ ὁ κατὰ τῆς λίμνης πλανηθείς, δόξας γῆν εἶναι, κατεδύετο.
καὶ ἦν καινὰ ἀτυχήματα,
καὶ ναυάγια τοσαῦτα, καὶ ναῦς οὐδαμοῦ. ἀμφότερα δὲ καινὰ καὶ
παράλογα, ἐν ὕδατι πεζομαχία, καὶ ἐν τῇ γῇ ναυάγια.
οἱ μὲν δὴ τοῖς πεπραγμένοις ἐπαρθέντες μέγα ἐφρόνουν, ἀνδρείᾳ νομίζοντες
κεκρατηκέναι καὶ οὐκ ἀπάτης κλοπῇ. ἀνὴρ γὰρ Αἰγύπτιος καὶ τὸ
δειλόν, ὅπου φοβεῖται, δεδούλωται, καὶ τὸ μάχιμον, ἐν οἷς θαρρεῖ,
παρώξυνται· ἀμφότερα δὲ οὐ κατὰ μέτρον, ἀλλὰ τὸ μὲν ἀσθενέστερον
δυστυχεῖ, τὸ δὲ προπετέστερον κρατεῖ.
| [4,14] Il y avait des guetteurs, à quelque distance,
pour suivre les événements, et, en les plaçant, les bouviers
leur avaient donné comme mission, s'ils voyaient
l'ennemi en train de traverser, d'abattre les digues du
fleuve et de lâcher toute l'eau contre les adversaires.
Les canaux formés par le Nil présentent en effet la disposition
suivante : à chaque fossé, les Égyptiens construisent
une digue, afin que le Nil ne déborde pas avant
le moment où on en a besoin et n'inonde pas les terres;
et, lorsqu'ils veulent irriguer le sol, ils ouvrent un peu
la digue, jusqu'à ce que la terre forme un marécage.
Or, il y avait, derrière le village, une dérivation du fleuve,
formant un canal long et large; c'est là que les hommes à
qui en avait été confiée la mission, lorsqu'ils virent
l'ennemi avancer, démolirent rapidement la digue. Alors,
tout arrive à la fois : les vieillards qui se trouvaient en
avant disparaissent soudain, les autres pointent leurs
piques et s'élancent à l'assaut; mais déjà l'eau était là,
les lacs grossissaient et s'enflaient partout, l'isthme
était sous l'eau et tout ressemblait à une mer. Les bouviers,
dans leur élan, transpercent de leurs piques les
soldats qui se trouvaient en tête, ainsi que le commandant,
car ils étaient désarmés et, sous l'effet de la surprise,
le désordre se mit dans leurs rangs. La façon dont
les autres périrent ne saurait se raconter. Les uns, dès
la première attaque, moururent sans avoir même pu
bouger leur lance; d'autres n'eurent pas le temps de
se défendre, mais périrent en même temps qu'ils se
voyaient en danger; d'autres moururent avant même de
voir le danger. D'autres, paralysés par la surprise,
attendirent la mort sur place; d'autres, dès qu'ils bougèrent,
s'abattirent, car le fleuve avait miné le sol sous
leurs pieds; d'autres, qui s'élançaient pour fuir, roulèrent
dans les profondeurs du lac et furent entraînés.
Quant à ceux qui se tenaient sur la terre ferme, l'eau
monta jusqu'au milieu de leur ventre, si bien qu'elle
déplaça leurs boucliers et offrit leur ventre aux coups.
L'eau, dans le marais, était partout, et au-dessus de la
hauteur d'un homme. Il était impossible de savoir ce
qui était marais et ce qui était la terre ferme. Si l'on
essayait de courir sur la terre, on devait, pour ne pas
se tromper, ralentir sa fuite, si bien que l'on était rapidement
rattrapé; et si l'on s'égarait à travers le marais,
en pensant que c'était de la terre ferme, on s'enlisait.
C'était un désastre sans précédent : tant de naufrages,
et pas un navire! Deux choses étaient extraordinaires,
contraires à toute attente : un combat d'infanterie dans
l'eau, un naufrage sur la terre. Et les bouviers, emportés
par leur victoire, étaient pleins d'orgueil, croyant qu'ils
avaient eu l'avantage à cause de leur courage, et non
par suite d'un stratagème malhonnête. Car les Egyptiens,
lorsqu'ils ont peur, rampent comme des esclaves, et,
s'ils sont en situation d'être audacieux, se montrent
d'une excessive témérité; dans l'un et l'autre cas, ils
n'ont aucune mesure, mais, quand ils sont les plus faibles,
ils se laissent aller au malheur et, dans le succès, ils
s'enflent d'orgueil.
|