Texte grec :
[6,60] Ὧν ἐνθυμούμενος ὁ δῆμος ὁ τῶν Ἀθηναίων, καὶ μιμνῃσκόμενος
ὅσα ἀκοῇ περὶ αὐτῶν ἠπίστατο, χαλεπὸς ἦν τότε καὶ
ὑπόπτης ἐς τοὺς περὶ τῶν μυστικῶν τὴν αἰτίαν λαβόντας,
καὶ πάντα αὐτοῖς ἐδόκει ἐπὶ ξυνωμοσίᾳ ὀλιγαρχικῇ καὶ
(6.60.2) τυραννικῇ πεπρᾶχθαι. καὶ ὡς αὐτῶν διὰ τὸ τοιοῦτον
ὀργιζομένων πολλοί τε καὶ ἀξιόλογοι ἄνθρωποι ἤδη ἐν τῷ
δεσμωτηρίῳ ἦσαν καὶ οὐκ ἐν παύλῃ ἐφαίνετο, ἀλλὰ καθ'
ἡμέραν ἐπεδίδοσαν μᾶλλον ἐς τὸ ἀγριώτερόν τε καὶ πλείους
ἔτι ξυλλαμβάνειν, ἐνταῦθα ἀναπείθεται εἷς τῶν δεδεμένων,
ὅσπερ ἐδόκει αἰτιώτατος εἶναι, ὑπὸ τῶν ξυνδεσμωτῶν τινὸς
εἴτε ἄρα καὶ τὰ ὄντα μηνῦσαι εἴτε καὶ οὔ· ἐπ' ἀμφότερα γὰρ
εἰκάζεται, τὸ δὲ σαφὲς οὐδεὶς οὔτε τότε οὔτε ὕστερον ἔχει
(6.60.3) εἰπεῖν περὶ τῶν δρασάντων τὸ ἔργον. λέγων δὲ ἔπεισεν
αὐτὸν ὡς χρή, εἰ μὴ καὶ δέδρακεν, αὑτόν τε ἄδειαν ποιησάμενον
σῶσαι καὶ τὴν πόλιν τῆς παρούσης ὑποψίας παῦσαι·
βεβαιοτέραν γὰρ αὐτῷ σωτηρίαν εἶναι ὁμολογήσαντι μετ'
(6.60.4) ἀδείας ἢ ἀρνηθέντι διὰ δίκης ἐλθεῖν. καὶ ὁ μὲν αὐτός τε
καθ' ἑαυτοῦ καὶ κατ' ἄλλων μηνύει τὸ τῶν Ἑρμῶν· ὁ δὲ
δῆμος ὁ τῶν Ἀθηναίων ἄσμενος λαβών, ὡς ᾤετο, τὸ σαφὲς
καὶ δεινὸν ποιούμενοι πρότερον εἰ τοὺς ἐπιβουλεύοντας
σφῶν τῷ πλήθει μὴ εἴσονται, τὸν μὲν μηνυτὴν εὐθὺς καὶ
τοὺς ἄλλους μετ' αὐτοῦ ὅσων μὴ κατηγορήκει ἔλυσαν, τοὺς
δὲ καταιτιαθέντας κρίσεις ποιήσαντες τοὺς μὲν ἀπέκτειναν,
ὅσοι ξυνελήφθησαν, τῶν δὲ διαφυγόντων θάνατον καταγνόντες
(6.60.5) ἐπανεῖπον ἀργύριον τῷ ἀποκτείναντι. κἀν τούτῳ οἱ
μὲν παθόντες ἄδηλον ἦν εἰ ἀδίκως ἐτετιμώρηντο, ἡ μέντοι
ἄλλη πόλις ἐν τῷ παρόντι περιφανῶς ὠφέλητο.
|
|
Traduction française :
[6,60] LX. - Le peuple athénien, qui n 'avait pas perdu le souvenir de ces
événements et se rappelait tout ce que la tradition lui en avait appris, se montrait
impitoyable et plein de soupçons envers ceux qu'il accusait d'avoir profané les
mystères. Il y voyait uniquement une conspiration oligarchique et tyrannique.
Dans son irritation, il avait déjà fait jeter en prison bien des gens dignes de
considération ; ses rigueurs ne cessaient pas ; chaque jour il prenait des
mesures plus cruelles et procédait à des arrestations plus nombreuses. C'est
alors qu'un des prisonniers, sur qui pesaient le plus de charges, se laissa
convaincre par un de ses compagnons de captivité de faire des révélations,
vraies ou fausses. Toutes les suppositions sont plausibles, car ni alors, ni
plus tard, on n'a jamais rien pu dire de certain sur les auteurs de la
profanation. Quoi qu'il en soit, on fit entendre au prisonnier en question,
qu'il devait, quand lui-même il serait innocent, s'assurer l'impunité et sauver
la ville de la fièvre de suspicion qui s'était emparée d'elle ; en avouant
franchement, il préparerait son salut beaucoup plus sûrement qu'en persistant à
nier et en affrontant les tribunaux. Il se dénonça donc lui-même, et quelques
autres avec lui, comme auteur de la mutilation des Hermès. Le peuple accueillit
avec joie cette dénonciation, qu'il croyait fondée; jusque-là il s'était
vivement indigné de ne pas connaître ceux qui conspiraient contre la démocratie.
Sur-le-champ on relâcha le délateur et tous ses compagnons qui n'avaient pas été
l'objet de sa dénonciation ; on jugea les accusés et on exécuta tous ceux qui
furent pris ; on condamna à mort par contumace tous ceux qui s'étaient enfuis et
l'on mit leur tête à prix. Les victimes furent-elles justement punies ? Rien ne
permet de l'affirmer. Toujours est-il que le reste des citoyens éprouva sur
l'heure un soulagement évident.
|
|