[1,9] Ὑπολαβὼν δὲ ὁ πατήρ, «Κακῶς», ἔφη, «τοῦτο
γινώσκεις, ὦ παῖ· ἡ γὰρ θεία μερὶς ἐν τῷ κόσμῳ πρὸς
ἄλλοις ἐστί, τὰ μὲν πολλὰ κατὰ τὴν πρώτην ἐν αὐτῇ
δύναμιν ἐνεργοῦσα καὶ ἐμφορουμένη τοῦ νοητοῦ κάλλους.
ἐκεῖ γὰρ ἄλλο γένος θεῶν ὑπερκόσμιον, ὃ συνέχει μὲν
πάντα μέχρις ἐσχάτων τὰ ὄντα· αὐτὸ δὲ ἀκλινές ἐστι καὶ
πρὸς ὕλην ἀμείλικτον· ἐκεῖνο τοῖς μὲν φύσει θεοῖς τὸ μακάριον
θέαμα· τὸ δὲ καὶ τὴν ἐκείνου πηγὴν ἰδεῖν ἔτι μακαριώτερον.
κᾆτα ἐκεῖνο μὲν τῷ παρ´ ἑαυτῷ μένειν ὑπερπλῆρές
ἐστιν ἀγαθῶν, ὑπερπλῆρες ὂν ἑαυτοῦ· τοῖς δὲ ἀγαθὸν τὸ
πρὸς τὸν ἐκεῖ θεὸν ἐπεστράφθαι. οὐ μὴν ἁπλῆ τίς ἐστιν
ἀγαθῶν οὐδὲ μονοειδὴς ἡ ἐνέργεια, ἀλλὰ καὶ μερίδων ἐπιμελοῦνται
τοῦ κόσμου, τὴν ἐν τῇ θεωρίᾳ πρᾶξιν, ὅσον
χωρεῖ, καταβιβάζοντες εἰς τὸ ἐπιτροπευόμενον. τὸ μὲν οὖν
εἰλικρινὲς αὐτῶν εὐθὺς ὑπ´ ἐκείνην μὲν τὴν πρώτην οὐσίαν
τετάχαται· τάττουσι δὲ αὐτοὶ τοὺς ἄγχιστα αὐτῶν, καὶ
κάτεισιν ἐφεξῆς ἡ διαδοχὴ τῶν τάξεων μέχρις ἐσχάτων
τῶν ὄντων, καὶ ἀπολαύει πάντα διὰ τῶν μέσων τῆς ἐπιμελείας
τῶν πρώτων· οὐ μὴν ἐπ´ ἴσης ἐστίν· οὐ γὰρ ἂν
ἦν τὸ ἑξῆς· ἀλλ´ ἀσθενεῖ κατιόντα τὰ ὄντα, μέχρι πλημμελήσει
καὶ παραχαράξει τὴν τάξιν, ἐν ᾧ καὶ τὸ εἶναι
τῶν ὄντων παύεται. γίνεται δέ τι περὶ τὰ τῇδε τοιόνδε·
τὸ φύσει πλάνον τῆς ἐν γενέσει φύσεως, τῆς τε σωματικῆς
μοίρας τὸ ἔσχατον εἴληχεν καὶ ἐπικηρότατον· οὐρανὸς δὲ
τὸ πρῶτόν τε καὶ ἀκηρότατον, καὶ ψυχῆς τὸ ἀνάλογον
εἶδος ἐνείματο. ὅπερ οὖν οἵδε ἐκεῖ», δεικνὺς ἔφη τοὺς θεούς,
«τοῦτο ὁ δαίμων ἐν τοῖς πολυκλονήτοις στοιχείοις, φύσις
ἔμπληκτος καὶ θρασεῖα, καὶ τῷ πλήθει τῆς ἐκεῖθεν ἀποστάσεως
οὐκ ἐπαΐουσα τῆς εὐθημοσύνης τῶν θείων. οὐκ
οὔσης οὖν τῆς ὑποστάθμης τῶν ὄντων πρὸς οἰκείαν σωτηρίαν
ἀρκούσης· αὐτή τε γὰρ ὑπορρεῖ, καὶ οὐ περιμένει
τὸ εἶναι, μιμεῖται δὲ αὐτὸ τῷ γίνεσθαι· καὶ τῶν δαιμόνων,
ἅτε συγγενῶν ὄντων τῆς τῇδε φύσεως, ἀφανιστικὴν οὐσίαν
λαχόντων, ἐπεστράφθαι μὲν ἀνάγκη τὸ θεῖον, καὶ ἐνδιδόναι
τινὰς ἀρχάς, αἷς ἕπεται τὸ ἐνθάδε καλῶς ἐπὶ χρόνον,
ἐφ´ ὅσον ἡ ἔνδοσις ἤρκεσεν. ὥσπερ δὲ τὰ νευρόσπαστα
ὄργανα κινεῖται μὲν καὶ πεπαυμένου τοῦ τὴν πηγὴν τῆς
κινήσεως ἐνδόντος τῇ μηχανῇ, κινεῖται δὲ οὐκ ἐπ´ ἄπειρον,
οὐ γὰρ οἴκοθεν ἔχει τὴν πηγὴν τῆς κινήσεως, ἀλλ´ ἕως
ἡ δοθεῖσα δύναμις ἰσχύει, καὶ οὐκ ἐκλύεται τῇ προόδῳ
τῆς οἰκείας ἀφισταμένη γενέσεως· τὸν αὐτὸν οἴου τρόπον,
ὦ φίλε Ὄσιρι, τὸ μὲν καλῶς καὶ τὸ θεῖον ἅμα τε εἶναι
καὶ οὐκ εἶναι τοῦδε τοῦ τόπου, καταπέμπεσθαι δὲ ἑτέρωθεν·
καὶ διὰ τοῦτο ψυχαί τε ἀγαθαὶ μόλις μέν, ἀλλὰ
φανεῖεν ἂν ἐνταῦθα, καὶ ἐφορεῖαι θεῶν, ὅταν τοῦτο δρῶσιν,
οἰκεῖα μὲν δρῶσιν, οὐ μὴν τῇ πρώτῃ ζωῇ· ἕτερον γὰρ
αὐτοῖς τὸ μακάριον, ὅτι τὸ ἀπολαύειν αὐτὸ κόσμου παρὰ
τοῦ πρώτου, τοῦ κοσμεῖν τὰ χείρω μακαριώτερον· τὸ μὲν
γάρ ἐστιν ἀπεστράφθαι, τὸ δὲ ἐπεστράφθαι. καί που τελετὴν
ἐπώπτευσας, ἐν ᾗ δύ´ ἐστὸν συνωρίδες ὀμμάτων, καὶ δεῖται
τὰ κάτω μύειν, ὅταν δεδόρκῃ τὰ ὑπερκείμενα· τούτοιν δὲ
μυσάντοιν, ἀντιπεριίσταται τὸ ἀνοίγνυσθαι. οἴου τοίνυν
αὐτὸ θεωρίας εἶναι καὶ πράξεως αἴνιγμα, τῶν μέσων παρὰ
μέρος ἑκάτερον ἐνεργούντων, ἀλλ´ ἐν τοῖς τῶν τελειοτέρων
πλέονι χρωμένων τῷ λῴονι· τῷ χείρονι δέ, ὅσα ἀναγκαῖα,
μόνον προσομιλούντων. ἔστιν οὖν καὶ ταῦτα ἔργα θεῶν,
ἀναγκαῖα μὲν τῷ κόσμῳ δρώντων, οὐ μὴν προηγούμενα
ἀγαθά, ὅτι καὶ ἄνθρωποι νῦν μὲν οἰκωροῦσι μείω καὶ μείζω,
νῦν δὲ φιλοσοφοῦσιν, ἀλλ´ ἐν τούτῳ θεσπεσιώτεροι.
| [1,9] Son père prenant alors la parole: « Tu es dans l’erreur, dit-il, ô mon fils. Il y a
des dieux dans notre univers: tantôt ils exercent leur action, tantôt ils se rassasient de
la beauté intelligible. Il en est d’autres, placés au-dessus du monde, et de qui
dépendent tous les êtres jusqu’aux derniers degrés; mais jamais ils ne descendent et
ne s’abaissent vers la matière. Pour ces dieux, le monde est un spectacle plein de
charmes; mais ils trouvent encore plus de charme à contempler la source d’où émane
tout ce qui existe. Sans sortir d’eux-mêmes, ils jouissent d’une félicité parfaite, parce
qu’en eux tout est divin; mais ceux de l’ordre inférieur ne trouvent leur véritable
bonheur qu’en retournant vers le Dieu souverain. Tout ce qu’il y a de bien dans
l’univers ne provient pas d’une cause une et simple; les diverses parties du monde
sont régies par différents dieux, qui, se détournant avec effort de la contemplation pour
l’action, s’acquittent du ministère qui leur est confié. Les esprits les plus purs viennent
immédiatement au-dessous de l’Essence suprême; puis, tout près d’eux, mais un peu
plus bas, d’autres intelligences. Toute une série d’êtres se continue ainsi jusqu’aux
extrémités de l’univers. C’est par les intermédiaires que se fait sentir dans le monde la
Providence d’en haut; mais elle ne se fait pas sentir partout également, car il n’y aurait
plus d’échelle des êtres: à mesure que l’on descend, les choses s’altèrent, se troublent
et se corrompent, pour finir par n’être même plus rien. C’est ce qui arrive ici-bas: au
dernier degré les corps qui naissent et qui sont soumis au changement n’ont qu’une
existence humble et périssable; à l’autre extrémité le ciel immuable est comme l’image
visible de l’âme. Si là-haut résident ces nobles personnages », — et en même temps
le père d’Osiris lui montrait les dieux, — « c’est parmi les éléments toujours agités que
séjournent les démons, race fougueuse et brutale: trop éloignés des régions
supérieures, ils sont insensibles aux charmes de l’ordre divin. La lie des êtres ne peut
rien pour sa propre conservation: elle s’écoule, elle ne persiste point; elle a beau se
transformer, elle n’a qu’un semblant d’existence. Comme les démons, à cause de leur
affinité avec la matière, n’ont que le génie de la destruction, il faut que la Divinité
tourne ses regards vers le monde, et donne une heureuse impulsion à laquelle
l’univers obéit pendant un certain temps, mais dont l’effet doit s’affaiblir par degrés.
Vois des poupées : même quand on cesse de tirer le fil qui les fait remuer, elles
s’agitent encore; mais elles ne s’agiteront pas toujours, car elles n’ont pas en elles-
mêmes le principe du mouvement: elles remuent tant que la force qui les a mises en
branle continue de se faire sentir, mais elle s’épuise à la longue. Il en est ainsi du
monde, ô mon cher Osiris : sache que tout ce qui est bien est divin, et tire son origine,
non pas de cette terre, mais d’ailleurs: voilà pourquoi des âmes excellentes ne
paraissent ici-bas que rarement; et quand les dieux s’occupent des choses humaines,
le soin qu’ils prennent n’est pas sans doute contraire à leur nature, mais n’est plus
d’accord avec leur vie antérieure. Ce n’est pas dans l’action que consiste leur félicité;
car il y a plus de bonheur à jouir de l’ordre établi par le souverain maître qu’à bien
ordonner soi-même les choses inférieures: dans le premier cas la pensée se tourne
vers la parfaite beauté, dans l’autre elle s’en détourne. Tu as vu dans les mystères
cette figure symbolique avec deux paires d’yeux: ceux qui sont au-dessous sont
fermés quand les autres sont ouverts; ils s’ouvrent au contraire quand les autres se
ferment. C’est la contemplation et l’action qui sont désignées par là: tantôt l’une, tantôt
l’autre, retient les dieux secondaires; mais ils se livrent avec plus de goût à la plus
noble de ces deux occupations: ils ne se portent vers l’autre que lorsque la nécessité
l’exige. Les dieux, quand il en est besoin, agissent et sauvent le monde; mais ce n’est
pas là ce qui fait leur excellence. Il en est de même des hommes: tantôt ils sont
retenus par des travaux domestiques, tantôt ils s’adonnent à la philosophie, et c’est
alors surtout qu’ils se rapprochent de la Divinité. »
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