[16d,19] Συνάπτει δ´ ἡ τῶν Σαβαίων εὐδαιμονεστάτη,
μεγίστου ἔθνους, παρ´ οἷς καὶ σμύρνα καὶ λίβανος καὶ
κιννάμωμον· ἐν δὲ τῇ παραλίᾳ καὶ βάλσαμον καὶ ἄλλη
τις πόα σφόδρα εὐώδης, ταχὺ δ´ ἐξίτηλον τὴν ὀδμὴν
ἔχουσα· εἰσὶ δὲ καὶ φοίνικες εὐώδεις καὶ κάλαμος,
ὄφεις δὲ σπιθαμιαῖοι φοινικοῖ τὴν χρόαν, προσαλλόμενοι
καὶ μέχρι λαγόνος, τὸ δῆγμα ἔχοντες ἀνήκεστον.
διὰ δὲ τὴν ἀφθονίαν τῶν καρπῶν ἀργοὶ καὶ ῥᾴθυμοι
τοῖς βίοις εἰσὶν οἱ ἄνθρωποι· κοιτάζονται δὲ ἐπὶ * τῶν
ῥιζῶν τῶν δένδρων ἐκτέμνοντες οἱ πολλοὶ καὶ δημοτικοί·
διαδεχόμενοι δ´ οἱ σύνεγγυς ἀεὶ τὰ φορτία, τοῖς
μετ´ αὐτοὺς παραδιδόασι μέχρι Συρίας καὶ Μεσοποταμίας·
καρούμενοι δ´ ὑπὸ τῶν εὐωδιῶν αἴρουσι τὸν
κάρον ἀσφάλτου θυμιάματι καὶ τράγου πώγωνος. ἡ δὲ
πόλις τῶν Σαβαίων, ἡ Μαρίαβα, κεῖται μὲν ἐπ´ ὄρους
εὐδένδρου. βασιλέα δ´ ἔχει κύριον τῶν κρίσεων καὶ
τῶν ἄλλων, ἐκ δὲ τῶν βασιλείων οὐ θέμις ἐξιέναι, ἢ
καταλεύουσιν αὐτὸν παραχρῆμα οἱ ὄχλοι κατά τι λόγιον·
ἐν χλιδῇ δ´ ἐστὶ γυναικείᾳ καὶ αὐτὸς καὶ οἱ περὶ
αὐτόν· τὰ δὲ πλήθη τὰ μὲν γεωργεῖ τὰ δ´ ἐμπορεύεται
τὰ ἀρώματα τά τε ἐπιχώρια καὶ τὰ ἀπὸ τῆς Αἰθιοπίας,
πλέοντες ἐπ´ αὐτὰ διὰ τῶν στενῶν δερματίνοις πλοίοις·
τοσαῦτα δ´ ἐστὶ τὸ πλῆθος ὥστ´ ἀντὶ φρυγάνων καὶ
τῆς καυσίμου ὕλης χρῆσθαι κινναμώμῳ καὶ κασίᾳ καὶ
τοῖς ἄλλοις. γίνεται δ´ ἐν τοῖς Σαβαίοις καὶ τὸ λάριμνον,
εὐωδέστατον θυμίαμα. ἐκ δὲ τῆς ἐμπορίας οὗτοί τε καὶ
Γερραῖοι πλουσιώτατοι πάντων εἰσίν, ἔχουσί τε παμπληθῆ
κατασκευὴν χρυσωμάτων τε καὶ ἀργυρωμάτων,
κλινῶν τε καὶ τριπόδων καὶ κρατήρων σὺν ἐκπώμασι
καὶ τῇ τῶν οἴκων πολυτελείᾳ· καὶ γὰρ θυρώματα καὶ
τοῖχοι καὶ ὀροφαὶ δι´ ἐλέφαντος καὶ χρυσοῦ καὶ ἀργύρου
λιθοκολλήτου τυγχάνει διαπεποικιλμένα. ταῦτα
μὲν περὶ τούτων εἴρηκε, τἆλλα δὲ τὰ μὲν παραπλησίως
τῷ Ἐρατοσθένει λέγει, τὰ δὲ παρὰ τῶν ἄλλων ἱστορικῶν
παρατίθησιν.
| [16d,19] Le pays qui fait suite à celui-là appartient à la plus puissante
nation de l'Arabie, aux Sabéens, et constitue aussi la partie de l'Arabie
la plus fertile, la plus heureuse. Il produit à la fois la myrrhe,
l'encens, le cinnamome, sans compter le balsamier qui croît de préférence
sur la côte et une autre herbe fort odoriférante, dont le parfum
malheureusement s'évapore très vite. Le palmier odorant et le calamus s'y
rencontrent également. En fait d'animaux, il s'y trouve de petits serpents
longs d'une spithame et d'un rouge éclatant, qui sautent à la ceinture du
piéton et lui font des morsures sans remède. Les Sabéens subissent
l'influence d'un pays aussi plantureux : ils sont mous et nonchalants. La
plupart d'entre eux, pour dormir, montent dans les arbres et s'y font {un
lit} sur les branches. Ils s'en remettent aux autres du soin de
transporter leurs marchandises et les confient à leurs voisins pour qu'à
leur tour ceux-ci les fassent passer de main en main jusqu'en Syrie et en
Mésopotamie. Sujets aux maux de tête, par suite de l'atmosphère trop
chargée de parfums dans laquelle ils vivent, les Sabéens les dissipent à
l'aide de fumigations d'asphalte et de barbe de bouc. Mariaba, leur
capitale, est située sur une montagne couverte d'arbres magnifiques et
sert de résidence à un roi, qui est non seulement le juge suprême des
contestations de ses sujets, mais qui dispose en maître de tout dans ses
Etats. Seulement, il est interdit à ce roi de sortir de son palais,
autrement il risquerait d'être lapidé sur l'heure par la foule qu'un très
ancien oracle autorise dans ce cas à s'ameuter contre lui. A l'intérieur
de son palais, le roi et ceux qui l'entourent mènent la vie la plus molle,
la plus efféminée. Quant au peuple, il partage ses soins entre
l'agriculture et le commerce, et son commerce ne se borne pas à écouler
les aromates que produit le pays : les marchands sabéens tirent beaucoup
d'aromates aussi de l'Ethiopie. On les voit à cet effet sur leurs barques
de cuir passer et repasser le détroit. Ajoutons que l'abondance de cette
denrée est telle dans toute la Sabée, qu'on y brûle le cinnamome, la casse
et les autres aromates comme on brûle ailleurs les broussailles et le bois
pour se chauffer. Le larimnum, le plus odorant de tous les aromates, croît
aussi dans la Sabée. C'est au commerce que les Sabéens doivent d'être
devenus, avec les Gerrhéens, la nation la plus riche de toute l'Arabie.
Comme les Gerrhéens, ils ont un très grand luxe d'ameublement, de
vaisselle d'or, d'argenterie, un très grand luxe aussi de lits, de
trépieds, de cratères et de coupes, bien en rapport du reste avec la
magnificence d'habitations, dans lesquelles les portes, les murs, les
toits, ont des revêtements d'ivoire, d'or et d'argent incrustés de pierres
précieuses. Voilà ce que dit Artémidore {de plus intéressant} au sujet des
Arabes, car dans tout le reste de sa description ou bien il se rencontre
avec Eratosthène, ou bien il se borne à citer textuellement les autres
historiens.
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