Texte grec :
[13a,54] Ἐκ δὲ τῆς Σκήψεως οἵ τε Σωκρατικοὶ γεγόνασιν
Ἔραστος καὶ Κορίσκος καὶ ὁ τοῦ Κορίσκου υἱὸς Νηλεύς,
ἀνὴρ καὶ Ἀριστοτέλους ἠκροαμένος καὶ Θεοφράστου,
διαδεδεγμένος δὲ τὴν βιβλιοθήκην τοῦ
Θεοφράστου, ἐν ᾗ ἦν καὶ ἡ τοῦ Ἀριστοτέλους· ὁ γοῦν
Ἀριστοτέλης τὴν ἑαυτοῦ Θεοφράστῳ παρέδωκεν, ᾧπερ
καὶ τὴν σχολὴν ἀπέλιπε, πρῶτος ὧν ἴσμεν συναγαγὼν
βιβλία καὶ διδάξας τοὺς ἐν Αἰγύπτῳ βασιλέας βιβλιοθήκης σύνταξιν.
Θεόφραστος δὲ Νηλεῖ παρέδωκεν· ὁ
δ´ εἰς Σκῆψιν κομίσας τοῖς μετ´ αὐτὸν παρέδωκεν, ἰδιώταις ἀνθρώποις,
οἳ κατάκλειστα εἶχον τὰ βιβλία οὐδ´
ἐπιμελῶς κείμενα· ἐπειδὴ δὲ ᾔσθοντο τὴν σπουδὴν
τῶν Ἀτταλικῶν βασιλέων ὑφ´ οἷς ἦν ἡ πόλις, ζητούντων βιβλία εἰς τὴν
κατασκευὴν τῆς ἐν Περγάμῳ βιβλιοθήκης, κατὰ γῆς ἔκρυψαν ἐν διώρυγί τινι·
ὑπὸ δὲ νοτίας καὶ σητῶν κακωθέντα ὀψέ ποτε ἀπέδοντο οἱ ἀπὸ
τοῦ γένους Ἀπελλικῶντι τῷ Τηίῳ πολλῶν ἀργυρίων
τά τε Ἀριστοτέλους καὶ τὰ τοῦ Θεοφράστου βιβλία·
ἦν δὲ ὁ Ἀπελλικῶν φιλόβιβλος μᾶλλον ἢ φιλόσοφος·
διὸ καὶ ζητῶν ἐπανόρθωσιν τῶν διαβρωμάτων εἰς ἀντίγραφα
καινὰ μετήνεγκε τὴν γραφὴν ἀναπληρῶν οὐκ
εὖ, καὶ ἐξέδωκεν ἁμαρτάδων πλήρη τὰ βιβλία. συνέβη
δὲ τοῖς ἐκ τῶν περιπάτων τοῖς μὲν πάλαι τοῖς μετὰ Θεόφραστον
οὐκ ἔχουσιν ὅλως τὰ βιβλία πλὴν ὀλίγων,
καὶ μάλιστα τῶν ἐξωτερικῶν, μηδὲν ἔχειν φιλοσοφεῖν
πραγματικῶς, ἀλλὰ θέσεις ληκυθίζειν· τοῖς δ´ ὕστερον,
ἀφ´ οὗ τὰ βιβλία ταῦτα προῆλθεν, ἄμεινον μὲν
ἐκείνων φιλοσοφεῖν καὶ ἀριστοτελίζειν, ἀναγκάζεσθαι
μέντοι τὰ πολλὰ εἰκότα λέγειν διὰ τὸ πλῆθος τῶν ἁμαρτιῶν.
πολὺ δὲ εἰς τοῦτο καὶ ἡ Ῥώμη προσελάβετο· εὐθὺς γὰρ μετὰ τὴν Ἀπελλικῶντος τελευτὴν Σύλλας ἦρε τὴν Ἀπελλικῶντος βιβλιοθήκην ὁ τὰς Ἀθήνας ἑλών,
δεῦρο δὲ κομισθεῖσαν Τυραννίων τε ὁ γραμματικὸς
διεχειρίσατο φιλαριστοτέλης ὤν, θεραπεύσας τὸν ἐπὶ
τῆς βιβλιοθήκης, καὶ βιβλιοπῶλαί τινες γραφεῦσι
φαύλοις χρώμενοι καὶ οὐκ ἀντιβάλλοντες, ὅπερ καὶ ἐπὶ
τῶν ἄλλων συμβαίνει τῶν εἰς πρᾶσιν γραφομένων βιβλίων καὶ ἐνθάδε
καὶ ἐν Ἀλεξανδρείᾳ. περὶ μὲν οὖν τούτων ἀπόχρη.
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Traduction française :
[13a,54] 54. Scepsis a donné naissance à plusieurs philosophes de l'école
socratique, notamment à Eraste, à Coriscus et à Nélée, fils de Coriscus,
disciple d'Aristote et de Théophraste, et légataire qui plus est de la
bibliothèque de Théophraste, laquelle se trouvait comprendre aussi celle
d'Aristote. On sait, en effet, qu'Aristote, en laissant à Théophraste son
école, lui avait laissé tous ses livres : or il avait été le premier, à
notre connaissance, à faire ce qu'on appelle une collection de livres, en
même temps qu'il donnait aux rois d'Egypte l'idée de former leur
bibliothèque. Des mains de Théophraste, ladite collection passa à celles
de Nélée, qui, l'ayant transportée à Scepsis, la laissa à ses héritiers ;
mais ceux-ci étaient des gens grossiers, illettrés, qui se contentèrent de
la garder enfermée, sans prendre la peine de la ranger. Ils se hâtèrent
même, quand ils apprirent avec quel zèle les princes de la famille des
Attales, dans le royaume desquels Scepsis était comprise, faisaient
chercher les livres de toute nature pour en composer la bibliothèque de
Pergame, de creuser un trou en terre et d'y cacher leur trésor. Aussi ces
livres étaient-ils tout gâtés par l'humidité et tout mangés aux vers,
quand plus tard les descendants de Nélée vendirent à Apellicôn de Téos,
pour une somme considérable, la collection d'Aristote, augmentée de celle
de Théophraste. Par malheur, cet Apellicôn était lui-même plutôt un
bibliophile qu'un philosophe, il chercha à réparer le dommage que les vers
et les rats avaient causé et fit faire de ces livres de nouvelles copies,
mais les lacunes furent suppléées tout de travers et il n'en donna qu'une
édition pleine de fautes. Les premiers péripatéticiens, successeurs
immédiats de Théophraste, n'ayant plus à leur disposition les livres mêmes
du Maître, à l'exception d'un petit nombre de traités, mais de traités
exotériques pour la plupart, s'étaient vus dans l'impossibilité d'aborder
aucune question philosophique suivant la vraie méthode d'Aristote et ils
avaient été réduits à développer en style ampoulé de simples lieux
communs. En revanche, du moment que les livres {d'Aristote} eurent reparu,
on put observer chez leurs successeurs un progrès marqué : leur méthode
était devenue plus philosophique, plus aristotélique, bien que
conjecturale encore sur beaucoup de points, par suite des fautes
nombreuses qui s'étaient introduites dans le texte original. Ces fautes,
Rome ne contribua pas peu à en accroître le nombre ; car, à peine
Apellicôn fut-il mort, que Sylla, qui venait de prendre Athènes, mit la
main sur la bibliothèque et la fit transporter ici, à Rome, où le
grammairien Tyrannion, péripatéticien passionné, qui avait su gagner les
bonnes grâces du bibliothécaire, en disposa tout à son aise. Quelques
libraires aussi y eurent accès, mais ils n'employèrent que de mauvais
copistes, dont ils ne prirent pas même la peine de collationner le
travail, ce qui est le cas, du reste, de toutes les copies qui, se font
pour la vente, aussi bien à Alexandrie qu'ici. - Mais nous en avons dit
assez sur ce sujet.
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