Texte grec :
[1,2,32] Εἰ δ' οὖν καὶ σύρρουν ποτὲ ὑπάρξαντα τὸν ἰσθμὸν τοῦτον ὁ ποιητὴς
ἱστορήκει, πόσῳ μείζονα ἂν ἔχοιμεν πίστιν τοῦ τοὺς Αἰθίοπας διχθὰ
διῃρῆσθαι, πορθμῷ τηλικούτῳ διειργομένους; Τίς δὲ καὶ χρηματισμὸς
παρὰ τῶν ἔξω καὶ κατὰ τὸν ὠκεανὸν Αἰθιόπων; Ἅμα μὲν γὰρ
θαυμάζουσι τοῦ κόσμου τῶν βασιλείων οἱ περὶ Τηλέμαχον τὸ πλῆθος
ὅ ἐστι
Χρυσοῦ τ' ἠλέκτρου τε καὶ ἀργύρου ἠδ' ἐλέφαντος.
Τούτων δ' οὐδενὸς πλὴν ἐλέφαντος εὐπορία παρ' ἐκείνοις ἐστίν,
ἀπορωτάτοις τῶν ἁπάντων οὖσι τοῖς πλείστοις καὶ νομάσι. Νὴ Δία,
ἀλλ' ἡ Ἀραβία προσῆν καὶ τὰ μέχρι τῆς Ἰνδικῆς· τούτων δ' ἡ μὲν
εὐδαίμων κέκληται μόνη τῶν ἁπασῶν, τὴν δέ, εἰ καὶ μὴ ὀνομαστὶ
καλοῦσιν, οὕτως ὑπολαμβάνουσί γε καὶ ἱστοροῦσιν ὡς
εὐδαιμονεστάτην· τὴν μὲν οὖν Ἰνδικὴν οὐκ οἶδεν Ὅμηρος, εἰδὼς δὲ
ἐμέμνητο ἄν· τὴν δ' Ἀραβίαν, ἣν εὐδαίμονα προσαγορεύ ουσιν οἱ νῦν,
τότε δ' οὐκ ἦν πλουσία, ἀλλὰ καὶ αὐτὴ ἄπορος καὶ ἡ πολλὴ αὐτῆς
σκηνιτῶν ἀνδρῶν· ὀλίγη δ' ἡ ἀρωματοφόρος, δι' ἣν καὶ τοῦτο τοὔνομα
εὕρετο ἡ χώρα διὰ τὸ καὶ τὸν φόρτον εἶναι τὸν τοιοῦτον ἐν τοῖς παρ'
ἡμῖν σπάνιον καὶ τίμιον. Νυνὶ μὲν οὖν εὐποροῦσι καὶ πλουτοῦσι διὰ τὸ
καὶ τὴν ἐμπορίαν εἶναι πυκνὴν καὶ δαψιλῆ, τότε δ' οὐκ εἰκός. Αὐτῶν δὲ
χάριν τῶν ἀρωμάτων ἐμπόρῳ μὲν καὶ καμηλίτῃ γένοιτ' ἄν τις ἐκ τῶν
τοιούτων φορτίων εὐπορία· Μενελάῳ δὲ λαφύρων ἢ δωρεῶν ἔδει
παρὰ βασιλέων καὶ δυναστῶν, ἐχόντων τε ἃ δώσουσι καὶ βουλομένων
{διδόναι} διὰ τὴν ἐπιφάνειαν αὐτοῦ καὶ εὔκλειαν. Οἱ μὲν οὖν Αἰγύπτιοι
καὶ οἱ πλησίον Αἰθίοπες καὶ Ἄραβες οὔθ' οὕτω τελέως ἄβιοι, οὔτ'
ἀνήκοοι τῆς τῶν Ἀτρειδῶν δόξης, καὶ μάλιστα διὰ τὴν κατόρθωσιν τοῦ
Ἰλιακοῦ πολέμου, ὥστ' ἐλπὶς ἦν τῆς ἐξ αὐτῶν ὠφελείας· καθάπερ ἐπὶ
τοῦ θώρακος τοῦ Ἀγαμέμνονος λέγεται,
Τόν ποτέ οἱ Κινύρης δῶκε ξεινήιον εἶναι·
πεύθετο γὰρ Κύπρονδε μέγα κλέος.
Καὶ δὴ καὶ τὸν πλείω χρόνον τῆς πλάνης λεκτέον μὲν ἐν τοῖς κατὰ
Φοινίκην καὶ Συρίαν καὶ <O·P>Αἴγυπτον καὶ Λιβύην γενέσθαι καὶ τὰ
περὶ Κύπρον χωρία καὶ ὅλως τὴν καθ' ἡμᾶς παραλίαν καὶ τὰς νήσους·
καὶ γὰρ ξένια παρὰ τούτοις καὶ τὸ βίᾳ καὶ τὸ ἐκ λεηλασίας
πορίσασθαι, καὶ μάλιστα παρὰ τῶν συμμαχησάντων τοῖς Τρωσίν,
ἐντεῦθεν ἦν. Οἱ δ' ἐκτὸς καὶ πόρρω βάρβαροι οὐδεμίαν τοιαύτην
ὑπηγόρευον ἐλπίδα. Εἰς οὖν τὴν Αἰθιοπίαν ἀφῖχθαι λέγεται ὁ
Μενέλαος, οὐχ ὅτι - - - μέχρι τῶν ὅρων τῶν πρὸς Αἰγύπτῳ. Τάχα μὲν
γὰρ καὶ πλησιαίτεροι ἦσαν ταῖς Θήβαις οἱ τότε ὅροι, ἀλλὰ καὶ οἱ νῦν
πλησίον εἰσίν, οἱ κατὰ Συήνην καὶ τὰς Φίλας· ὧν ἡ μὲν τῆς Αἰγύπτου
ἐστίν, αἱ δὲ Φίλαι κοινὴ κατοικία τῶν Αἰθιόπων καὶ τῶν Αἰγυπτίων. Ὁ
οὖν εἰς Θήβας ἀφιγμένος εἰ καὶ μέχρι τῶν ὅρων ἀφῖκτο ἢ καὶ
περαιτέρω τῶν αἰθιόπων, καὶ ταῦτα τῇ βασιλικῇ ξενίᾳ χρώμενος,
οὐδὲν ἄλογον. Οὕτω δὲ καὶ Κυκλώπων εἰς γαῖαν ἀφῖχθαί φησιν ὁ
Ὀδυσσεύς, μέχρι τοῦ σπηλαίου προεληλυθὼς ἀπὸ θαλάττης· ἐπ'
ἐσχατιᾶς γὰρ ἱδρῦσθαί που λέγει. Καὶ εἰς Αἰολίαν δὲ καὶ
Λαιστρυγόνας καὶ τοὺς ἄλλους, ὅπου ποτὲ καὶ καθωρμίσατο, ἐκεῖσέ
φησιν ἀφῖχθαι. Καὶ ὁ Μενέλαος οὖν οὕτως εἰς Αἰθιοπίαν ἧκεν, οὕτω
δὲ καὶ εἰς Λιβύην, ὅτι προσέσχε τόποις τισίν· ἀφ' οὗ καὶ ὁ κατὰ τὴν
Ἀρδανίαν λιμὴν τὴν ὑπὲρ Παραιτονίου Μενέλαος καλεῖται.
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Traduction française :
[1,2,32] 32. D'ailleurs, s'il est vrai qu'Homère d'une ou d'autre façon ait été instruit
qu'anciennement la mer couvrait de ses eaux l'isthme tout entier, ce serait
une raison de plus pour nous de croire à cette division des Éthiopiens en
deux corps de nation, puisque, dans ce cas-là, la ligne de démarcation
aurait été représentée par un bras de mer aussi considérable. Quelles
richesses, en outre, Ménélas eût-il pu rapporter de chez les Éthiopiens de
la mer extérieure et des bords de l'Océan? Quand Télémaque s'extasie
sur la somptuosité de son palais, que distingue-t-il dans cette quantité
infinie d'objets précieux? «L'or, l'électre, et l'argent, et l'ivoire.»
Or, de ces différentes substances, aucune, si ce n'est l'ivoire, n'abonde
chez ces peuples, extrêmement pauvres pour la plupart, et tous encore
nomades. - Soit, dira-t- on; mais près de là était l'Arabie et tout le pays
jusqu'à l'Inde, l'Arabie, qui, seule entre toutes les contrées de la terre, a
reçu le nom d' Heureuse, et l'Inde, qui sans porter expressément le même
nom, n'en est pas moins réputée et représentée aussi comme une très-
heureuse contrée. - A quoi nous répondrons à notre tour qu'Homère n'a
point connu l'Inde, car autrement il n'eût point manqué d'en parler; et, en
ce qui concerne l'Arabie, l'Arabie heureuse, comme on l'appelle
aujourdhui, tout en convenant qu'il l'a connue, nous ferons remarquer
que, de son temps, elle était loin d'être riche encore, qu'elle manquait
même du nécessaire et n'était guère peuplée que de scénites. Quant au
canton, qui pro-bisait les parfums ou aromates, et d'où est venu ce nom
d'aromatophore, étendu plus tard à l'Arabie entière à cause de la rareté
de cette denrée et du prix qu'on y attache en nos contrées, il n'en formait
que la moindre partie. Aujourd'hui, à la vérité, les Arabes ne manquent de
rien ; l'activité, le développement de leur commerce les enrichit sans
cesse, mais dans ce temps-là en était-il déjà ainsi? La chose est peu
probable. Si le commerce des aromates, d'ailleurs, suffisait à enrichir un
marchand, un simple chamelier, ce qu'il fallait à l'avide Ménélas, c'étaient
ou les profits de la guerre, ou les présents de rois et de chefs ayant le
moyen et en même temps la volonté de donner à proportion de
l'illustration de sa race et de la gloire de son nom; et, comme en effet les
Égyptiens, voire même ceux des Éthiopiens et des Arabes qui confinent à
l'Égypte, possédaient déjà un certain degré de civilisation et pouvaient
avoir entendu quelque chose du retentissement de la gloire des Atrides,
surtout après l'heureuse issue de la guerre de Troie , Ménélas avait tout
lieu d'espérer en leur munificence. Qu'on se rappelle ce que dit Homère à
propos de cette fameuse cuirasse d'Agamemnon :
«Cinyras la lui avait donnée naguère, comme gage d'hospitalité; car le
grand renom du héros avait pénétré jusqu'à Cypre.»
Ajoutons que Ménélas, dans ses longues erreurs, avait passé la plus
grande partie du temps dans les parages de la Phénicie, de la Syrie, de
l'Égypte et de la Libye ainsi que dans les eaux de Chypre, sur les côtes
en un mot et parmi les îles de notre mer intérieure, tous pays en effet où il
lui était facile soit d'obtenir de ces précieux gages d'hospitalité, soit de
s'enrichir par la violence et la piraterie aux dépens surtout des anciens
alliés des Troyens, tandis que les populations barbares, les populations
lointaines des bords de la mer extérieure n'auraient guère pu offrir au
héros une perspective semblable. Cela étant, quand le piète nous dit que
Ménélas était venu jusqu'en Éthiopie, {le mieux n'est-il point d'entendre
que ce héros n'avait pas pénétré au coeur même du pays}, mais qu'il
s'était contenté d'en toucher la frontière du côté de l'Égypte? D'autant qu'il
n'est pas impossible que cette frontière fût alors plus rapprochée de
Thèbes qu'elle ne l'est aujourd'hui, bien que la frontière actuelle en soit
déjà, assez rapprochée, puisqu'elle passe près de Syène et de Philae, la
première de ces deux villes, Syène, appartenant à l'Égypte, et l'autre,
Philae, ayant une population mixte d'Éthiopiens et d'Égyptiens. Or, une
fois arrivé à Thèbes, Ménélas aura bien pu, surtout à la faveur de
l'hospitalité royale, atteindre ces premières limites de l'Éthiopie, voire
même les dépasser un peu : cette supposition n'a rien qui choque la
raison. C'est ainsi qu'Ulysse dit être venu dans le pays des Cyclopes,
pour s'être avancé seulement depuis la mer jusqu'à l'antre de Polyphème,
situé, comme il le marque lui-même, tout à l'entrée du pays; pour l'Aeolie
et le pays des Loestrygons la même chose. En général, il lui suffit d'avoir
un jour abordé en tel ou tel point d'un pays pour dire qu'il l'a visité. Voilà
donc comment Ménélas sera venu en Éthiopie; en Libye pareillement, il
lui aura suffi de toucher à quelques points de la côte, comme est ce port
voisin d'Ardanie, au-dessus de Paraetonium, qui a retenu le nom de Ménélas.
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