Texte grec :
[9b,4] Φησὶ δ´ Ἔφορος τοὺς μὲν Θρᾷκας ποιησαμένους σπονδὰς πρὸς τοὺς
Βοιωτοὺς ἐπιθέσθαι νύκτωρ στρατοπεδεύουσιν ὀλιγωρότερον ὡς εἰρήνης
γεγονυίας· διακρουσαμένων {δ´} αὐτοὺς αἰτιωμένων τε ἅμα ὅτι τὰς σπονδὰς
παρέβαινον, μὴ παραβῆναι φάσκειν ἐκείνους· συνθέσθαι γὰρ ἡμέρας, νύκτωρ δ´
ἐπιθέσθαι· ἀφ´ οὗ δὴ καὶ τὴν παροιμίαν εἰρῆσθαι „Θρᾳκία παρεύρεσις.“ τοὺς δὲ
Πελασγοὺς μένοντος ἔτι τοῦ πολέμου χρηστηριασομένους ἀπελθεῖν, ἀπελθεῖν
δὲ καὶ τοὺς Βοιωτούς· τὸν μὲν οὖν τοῖς Πελασγοῖς δοθέντα χρησμὸν ἔφη μὴ ἔχειν
εἰπεῖν, τοῖς δὲ Βοιωτοῖς ἀνελεῖν τὴν προφῆτιν ἀσεβήσαντας εὖ πράξειν· τοὺς δὲ
θεωροὺς ὑπονοήσαντας χαριζομένην τοῖς Πελασγοῖς τὴν προφῆτιν κατὰ τὸ
συγγενὲς (ἐπειδὴ καὶ τὸ ἱερὸν Πελασγικὸν ἐξ ἀρχῆς ὑπῆρξεν) οὕτως ἀνελεῖν,
ἁρπάσαντας τὴν ἄνθρωπον εἰς πυρὰν ἐμβαλεῖν ἐνθυμηθέντας, εἴτε
κακουργήσασαν εἴτε μή, πρὸς ἀμφότερα ὀρθῶς ἔχειν, εἰ μὲν παρεχρηστηρίασε,
κολασθείσης αὐτῆς, εἰ δ´ οὐδὲν ἐκακούργησε, τὸ προσταχθὲν αὐτῶν πραξάντων.
τοὺς δὲ περὶ τὸ ἱερὸν τὸ μὲν ἀκρίτους κτείνειν τοὺς πράξαντας, καὶ ταῦτ´ ἐν ἱερῷ,
μὴ δοκιμάσαι, καθιστάναι δ´ εἰς κρίσιν, καλεῖν δ´ ἐπὶ τὰς ἱερείας, ταύτας δὲ εἶναι
τὰς προφήτιδας αἳ λοιπαὶ τριῶν οὐσῶν περιῆσαν· λεγόντων δ´ ὡς οὐδαμοῦ νόμος
εἴη δικάζειν γυναῖκας, προσελέσθαι καὶ ἄνδρας ἴσους ταῖς γυναιξὶ τὸν ἀριθμόν·
τοὺς μὲν οὖν ἄνδρας ἀπογνῶναι, τὰς δὲ γυναῖκας καταγνῶναι, ἴσων δὲ τῶν
ψήφων γενομένων τὰς ἀπολυούσας νικῆσαι· ἐκ δὲ τούτων Βοιωτοῖς μόνοις
ἄνδρας προθεσπίζειν ἐν Δωδώνῃ. τὰς μέντοι προφήτιδας ἐξηγουμένας τὸ
μαντεῖον εἰπεῖν, ὅτι προστάττοι ὁ θεὸς τοῖς Βοιωτοῖς τοὺς παρ´ αὐτοῖς τρίποδας *
συλλέγοντας εἰς Δωδώνην πέμπειν κατ´ ἔτος· καὶ δὴ καὶ ποιεῖν τοῦτο· ἀεὶ γάρ
τινα τῶν ἀνακειμένων τριπόδων νύκτωρ καθαιροῦντας καὶ κατακαλύπτοντας
ἱματίοις ὡς ἂν λάθρᾳ τριποδηφορεῖν εἰς Δωδώνην.
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Traduction française :
[9b,4] On lit dans Ephore le trait suivant. Les Thraces venaient de conclure
avec les Béotiens une suspension d'armes, quand, s'étant aperçus que
ceux-ci, sur la foi de la trêve, se gardaient plus négligemment qu'à
l'ordinaire, ils dirigèrent contre leur camp une attaque nocturne. Les
Béotiens, {cependant,} les repoussèrent ; et, comme ils leur faisaient
honte d'avoir ainsi violé l'armistice, ils prétendirent, eux, ne l'avoir
en aucune façon violé, puisque le traité ne stipulait rien que pour les
jours, et qu'ils n'avaient attaqué que la nuit. De là serait venue,
suivant Ephore, la locution proverbiale : «Vraie subtilité de Thrace !».
Ephore raconte aussi comment, pendant cette même guerre, des députés
pélasges, envoyés {à Dodone} pour consulter l'oracle, s'y rencontrèrent
avec des théores béotiens. Qu'avait-il été répondu aux Pélasges ? Ephore
déclare n'en rien savoir, mais il rapporte textuellement la réponse de la
prophétesse aux Béotiens : «Un sacrilège vous vaudra la victoire». Or,
cette réponse parut suspecte aux théores béotiens ; ils pensèrent qu'en
s'exprimant de la sorte la prophétesse avait écouté la voix du sang et
voulu servir les intérêts des Pélasges (l'oracle de Dodone, comme on sait,
est d'origine pélasgique) ; et, s'emparant de la pauvre femme, ils la
jetèrent dans un brasier ardent. Ils s'étaient dit apparemment : «Qu'elle
ait ou non prévariqué, nous aurons toujours, nous, agi au mieux, car nous
l'aurons punie comme elle le méritait si elle a prononcé un faux oracle,
et nous n'aurons fait que lui obéir si ses paroles étaient sincères». Les
surveillants du temple, ajoute Ephore, ne se crurent pas en droit de faire
périr sans jugement et dans l'enceinte sacrée les auteurs de l'attentat,
mais ils les mirent en accusation et les citèrent au tribunal des
prêtresses, des prophétesses pour mieux dire, réduites à deux, par le
meurtre de leur compagne. Seulement, sur la réclamation des accusés que la
loi ne reconnaissait nulle part à des femmes le droit de juger, on
adjoignit aux deux prophétesses un même nombre d'hommes. Or, les hommes
prononcèrent l'acquittement et les femmes la condamnation, et, les voix se
trouvant partagées également, l'opinion favorable aux accusés prévalut.
Voilà d'où vient qu'à Dodone, par exception, ce sont toujours des hommes
qui transmettent et expliquent aux Béotiens les réponses de l'oracle.
Veut-on savoir, du reste, comment les prophétesses avaient interprété
l'oracle en question ? Suivant elles, la volonté expresse du dieu était
que les Béotiens enlevassent chaque année de quelqu'un de leurs temples un
trépied sacré et qu'ils l'envoyassent à Dodone. Les Béotiens, dit Ephore,
se conformèrent à la volonté du dieu, et tous les ans, par leur ordre, on
dérobe, de nuit, dans un de leurs temples, un trépied sacré, qu'on cache
sous des couvertures et qu'on expédie ensuite mystérieusement à Dodone.
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