[26] (1) Τοὺς δὲ γέροντας αὐτὸς μέν, ὡς εἴρηται, κατέστησε τὸ πρῶτον ἐκ τῶν
μετασχόντων τοῦ βουλεύματος· ὕστερον δὲ ἀντὶ τοῦ τελευτῶντος ἔταξε καθιστάναι
τὸν ἄριστον ἀρετῇ κριθέντα τῶν ὑπὲρ ἑξήκοντα ἔτη γεγονότων. (2) καὶ μέγιστος ἐδόκει
τῶν ἐν ἀνθρώποις ἀγώνων οὗτος εἶναι καὶ περιμαχητότατος· οὐ γὰρ ἐν ταχέσι
τάχιστον οὐδ´ ἐν ἰσχυροῖς ἰσχυρότατον, ἀλλ´ ἐν ἀγαθοῖς καὶ σώφροσιν ἄριστον καὶ
σωφρονέστατον ἔδει κριθέντα νικητήριον ἔχειν τῆς ἀρετῆς διὰ βίου τὸ σύμπαν, ὡς
εἰπεῖν, κράτος ἐν τῇ πολιτείᾳ, κύριον ὄντα καὶ θανάτου καὶ ἀτιμίας καὶ ὅλως τῶν
μεγίστων. (3) ἐγίνετο δὲ ἡ κρίσις τόνδε τὸν τρόπον. ἐκκλησίας ἀθροισθείσης ἄνδρες
αἱρετοὶ καθείργνυντο πλησίον εἰς οἴκημα, τὴν μὲν ὄψιν οὐχ ὁρῶντες οὐδὲ ὁρώμενοι,
τὴν δὲ κραυγὴν μόνον ἀκούοντες ἐκκλησιαζόντων. (4) βοῇ γὰρ ὡς τἆλλα καὶ τοὺς
ἁμιλλωμένους ἔκρινον, οὐχ ὁμοῦ πάντων, ἀλλ´ ἑκάστου κατὰ κλῆρον εἰσαγομένου καὶ
σιωπῇ διαπορευομένου τὴν ἐκκλησίαν. (5) ἔχοντες οὖν οἱ κατάκλειστοι γραμματεῖα, καθ´
ἕκαστον ἐπεσημαίνοντο τῆς κραυγῆς τὸ μέγεθος, οὐκ εἰδότες ὅτῳ γένοιτο, πλὴν ὅτι
πρῶτος ἢ δεύτερος ἢ τρίτος ἢ ὁποστοσοῦν εἴη τῶν εἰσαγομένων. ὅτῳ δὲ πλείστη
γένοιτο καὶ μεγίστη, τοῦτον ἀνηγόρευον. (6) ὁ δὲ στεφανωσάμενος περιῄει τοὺς θεούς·
εἵποντο δὲ πολλοὶ νέοι ζηλοῦντες τὸν ἄνδρα καὶ μεγαλύνοντες, πολλαί τε γυναῖκες
ἐγκωμιάζουσαι δι´ ᾠδῆς τὴν ἀρετὴν καὶ τὸν βίον εὐδαιμονίζουσαι. (7) τῶν δὲ
ἐπιτηδείων ἕκαστος αὐτῷ δεῖπνον παρατιθεὶς ἔλεγεν ὅτι ἡ πόλις ταύτῃ τιμᾷ τῇ
τραπέζῃ. (8) περιελθὼν δὲ εἰς τὸ συσσίτιον ἀπῄει· καὶ τὰ μὲν ἄλλα ἐγίνετο συνήθως,
δευτέρας δὲ μερίδος αὐτῷ παρατεθείσης ἐφύλαττεν ἀράμενος· καὶ μετὰ τὸ δεῖπνον
ἐπὶ ταῖς θύραις τοῦ φιδιτίου τῶν οἰκείων παρουσῶν γυναικῶν, ἣν μάλιστα τυγχάνοι
τιμῶν προσεκαλεῖτο, καὶ διδοὺς τὴν μοῖραν ἔλεγεν ὅτι ταύτην αὐτὸς λαβὼν
ἀριστεῖον ἐκείνῃ δίδωσιν, ὥστε κἀκείνην ζηλουμένην ὑπὸ τῶν ἄλλων προπέμπεσθαι
γυναικῶν.
| [26] (1) Le Sénat, comme je l’ai dit, fut d’abord composé, par Lycurgue lui-même, des citoyens
associés à l’exécution de son plan; mais, par la suite, si un membre de cette assemblée mourait,
il régla qu’on le remplacerait par celui que l’on jugerait le plus vertueux entre les Spartiates
âgés de plus de soixante ans. (2) C’était là, semble-t-il, de toutes les compétitions du monde, la
plus grande et la plus digne d’être disputée; car la palme ne devait pas revenir au plus vite
entre les vites, ni au plus fort entre les forts, mais au meilleur et au plus sage entre les bons et
les sages. Il recevait pour prix de sa vertu, à vie, un pouvoir, autant dire absolu, dans l’État,
étant désormais maître de la mort, du déshonneur, et, en somme, des plus grands intérêts. (3)
L’élection se faisait de la façon suivante. L’assemblée du peuple étant réunie, des citoyens
choisis à cette fin s’enfermaient tout près, dans une salle d’où ils ne pouvaient ni voir, ni être
vus, mais seulement entendre les cris de l’assemblée; (4) car c’est par acclamation que le
peuple se prononçait en matière d’élection, comme en tout le reste. Les candidats n’étaient pas
présentés tous ensemble, mais séparément, dans un ordre réglé par le sort; et chacun, à tour de
rôle, passait en silence dans les rangs de l’assemblée. (5) Les arbitres enfermés avaient des
tablettes où ils notaient, par candidat, l’intensité de l’acclamation, sans savoir à qui elle se
rapportait, mais constatant seulement que c’était au premier, au second, au troisième, et ainsi de
suite. Celui qui avait recueilli les clameurs les plus nombreuses et les plus nourries, ils le
proclamaient élu. (6) Le nouveau sénateur, après s’être couronné de fleurs, faisait le tour des
temples des dieux; il était suivi d’un grand nombre de jeunes gens, qui célébraient hautement
son mérite, et de femmes, qui faisaient entendre des cantates en l’honneur de ses vertus et de sa
vie exemplaire. (7) Chacun de ses amis lui offrait à dîner en disant "La ville t’honore de cette
collation!" (8) Il se rendait ensuite au repas public, où tout se passait comme d’ordinaire, sauf
qu’on lui servait une seconde portion, qu’il gardait. En sortant de table, il trouvait aux portes de
la salle les femmes de sa famille, et il appelait celle qu’il estimait le plus pour lui offrir la part
supplémentaire en ces termes: "Je l’ai reçue comme prix de vertu, et je te la donne!" Cette
privilégiée recevait, elle aussi, les éloges des autres femmes, qui la reconduisaient chez elle.
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