[20] Λεύκολλος δὲ τρέπεται πρὸς τὰς ἐν Ἀσίᾳ πόλεις,
ὅπως, τῶν πολεμικῶν ἔργων σχολάζοντος αὐτοῦ,
καὶ δίκης τινὸς μετάσχῃ καὶ θεσμῶν, ὧν ἐπὶ πολὺν
χρόνον ἐνδεῆ τὴν ἐπαρχίαν οὖσαν ἄρρητοι καὶ ἄπιστοι
δυστυχίαι κατεῖχον, ὑπὸ τῶν τελωνῶν καὶ τῶν δανειστῶν
πορθουμένην καὶ ἀνδραποδιζομένην, πιπράσκειν
ἰδίᾳ μὲν υἱοὺς εὐπρεπεῖς θυγατέρας τε παρθένους, δημοσίᾳ
δ´ ἀναθήματα, γραφάς, ἱεροὺς ἀνδριάντας ἀναγκαζομένων.
αὐτοῖς δὲ τέλος μὲν ἦν προσθέτοις γενομένοις
δουλεύειν, τὰ δὲ πρὸ τούτου χαλεπώτερα, σχοινισμοὶ καὶ
κιγκλίδες καὶ ἵπποι καὶ στάσεις ὕπαιθροι, καύματος μὲν
ἡλίῳ, ψύχους δ´ εἰς πηλὸν ἐμβιβαζομένων ἢ πάγον,
ὥστε τὴν δουλείαν σεισάχθειαν δοκεῖν εἶναι καὶ εἰρήνην.
τοιαῦτα μὲν κακὰ Λεύκολλος εὑρὼν ἐν ταῖς πόλεσιν,
ὀλίγῳ χρόνῳ πάντων ἀπήλλαξε τοὺς ἀδικουμένους. πρῶτον
μὲν γὰρ ἑκατοστὴν ἐκέλευσε καὶ μὴ πλέον εἰς τοὺς
τόκους λογίζεσθαι, δεύτερον δὲ τοὺς μακροτέρους τοῦ
ἀρχαίου τόκους ἀπέκοψε, τὸ δὲ τρίτον καὶ μέγιστον
ἔταξε τῶν τοῦ χρεωφειλέτου προσόδων τὴν τετάρτην
μερίδα καρποῦσθαι τὸν δανειστήν· ὁ δὲ τόκον κεφαλαίῳ
συνάψας ἐστέρητο τοῦ παντός· ὥστ´ ἐν ἐλάττονι χρόνῳ
τετραετίας διαλυθῆναι τὰ χρέα πάντα, καὶ τὰς κτήσεις
ἐλευθέρας ἀποδοθῆναι τοῖς δεσπόταις. ἦν δὲ τοῦτο κοινὸν
δάνειον ἐκ τῶν δισμυρίων ταλάντων οἷς τὴν Ἀσίαν
ἐξημίωσεν ὁ Σύλλας, καὶ διπλοῦν ἀπεδόθη τοῖς δανείσασιν,
ὑπ´ ἐκείνων ἀνηγμένον ἤδη τοῖς τόκοις εἰς δώδεκα
μυριάδας ταλάντων. ἐκεῖνοι μὲν οὖν ὡς δεινὰ πεπονθότες
ἐν Ῥώμῃ τοῦ Λευκόλλου κατεβόων, καὶ χρήμασιν ἀνίστασαν
ἐπ´ αὐτὸν ἐνίους τῶν δημαγωγῶν, μέγα δυνάμενοι
καὶ πολλοὺς ὑπόχρεως πεποιημένοι τῶν πολιτευομένων.
ὁ δὲ Λεύκολλος οὐ μόνον ὑπὸ τῶν εὖ πεπονθότων
ἠγαπᾶτο δήμων, ἀλλὰ καὶ ταῖς ἄλλαις ἐπαρχίαις ποθεινὸς
ἦν, εὐδαιμονιζούσαις τοὺς ἡγεμόνος τοιούτου τυχόντας.
| [20] XX. Lucullus se consacra ensuite aux villes d'Asie.
Il voulut, pendant la période où il n'avait pas à s'occuper
de travaux guerriers, les faire bénéficier de quelque
justice et du secours des lois, dont, bien longtemps, la
province avait manqué par suite d'infortunes indicibles
et incroyables. Elle était ravagée et asservie par les
publicains et les usuriers, qui forçaient les particuliers,
{par leurs exactions}, à vendre leurs fils, nobles jeunes
gens, et leurs filles vierges, et les cités à se défaire de
leurs ex-voto, de leurs tableaux et de leurs statues sacrées.
La conclusion de tant de misères, c'était, pour les pères,
d'être à leur tour adjugés comme esclaves; mais ce qui
précédait un pareil dénouement était plus terrible encore
les liens, les fers, les chevalets, les stations en plein
air, l'embarquement, dans la saison chaude, sous les
rayons du soleil, en temps froid, dans la boue et la neige,
de façon que l'esclavage paraissait être un allégement et
apporter la paix. Voilà les maux que Lucullus découvrit
dans les villes. En peu de temps, il apporta aux victimes
une délivrance complète. D'abord, en effet, il ordonna que
le taux de l'emprunt s'élèverait au centième de la somme
prêtée, et pas davantage; en second lieu, il abolit les
intérêts qui surpassaient le capital; en troisième lieu (et
c'était le plus important), il disposa que le prêteur jouirait
du quart des revenus du débiteur; mais celui qui avait
incorporé l'intérêt au capital était privé de tout. Ainsi,
dans l'espace de moins de quatre ans, toutes les dettes
furent éteintes, et les propriétés rendues, libres de toutes
charges, à leurs maîtres. Cette dette était le reliquat de
l'amende de vingt mille talents infligée à l'Asie par
Sylla; et les usuriers avaient perçu le double de la somme
fixée; mais, en accumulant les intérêts, ils avaient fait
monter la dette à cent vingt mille talents. Dans ces
conditions, les usuriers, se jugeant victimes d'un traitement
inique, criaient à Rome contre Lucullus, et, à prix
d'argent, ils suscitèrent des démagogues contre lui, car
ils jouissaient d'une grande influence et avaient pour
débiteurs beaucoup d'hommes politiques. Mais Lucullus
n'était pas seulement aimé des peuples auxquels il avait
rendu service; les autres provinces le désiraient, jugeant
heureux les administrés d'un pareil gouverneur.
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