Texte grec :
[25] Διὸ τῶν πραγμάτων διδόντων ἀναληπτέον
ἑαυτοὺς μήθ´ ὕπνου φθονοῦντας τῷ σώματι μήτ´
ἀρίστου μήτε ῥᾳστώνης τοῦ μέσου ἡδυπαθείας καὶ
κακοπαθείας, μηδὲ φυλάττοντας ὅρον οἷον οἱ
πολλοὶ φυλάττοντες ἐπιτρίβουσι τὸ σῶμα ταῖς
μεταβολαῖς, ὥσπερ τὸν βαπτόμενον σίδηρον, ὅταν
ἐνταθῇ καὶ πιεσθῇ σφόδρα τοῖς πόνοις, αὖθις ἐν
ἡδοναῖς τηκόμενον ἀμέτρως καὶ λειβόμενον, εἶτα
πάλιν ἐξ ἀφροδισίων καὶ οἴνου διάλυτον καὶ
μαλακὸν εἰς ἀγορὰν ἢ αὐλὴν ἤ τινα πραγματείαν
διαπύρου καὶ συντόνου δεομένην σπουδῆς ἐλαυνόμενον.
Ἡράκλειτος μὲν γὰρ ὑδρωπιάσας ἐκέλευσεν
"αὐχμὸν ἐξ ἐπομβρίας" ποιῆσαι τὸν
ἰατρόν· οἱ δὲ πολλοὶ τοῦ παντὸς ἁμαρτάνουσιν,
ὅταν ἐν κόποις καὶ πόνοις καὶ ἐνδείαις γένωνται,
μάλιστα ταῖς ἡδοναῖς ἐξυγραίνειν καὶ ἀνατήκειν
τὰ σώματα παραδιδόντες, αὖθις δὲ μετὰ τὰς ἡδονὰς
οἷον ἐπιστρέφοντες καὶ κατατείνοντες. ἡ γὰρ
φύσις οὐ ζητεῖ τοιαύτην ἀνταπόδοσιν τοῦ σώματος.
ἀλλὰ τῆς ψυχῆς τὸ ἀκόλαστον καὶ ἀνελεύθερον ἐκ
τῶν ἐπιπόνων ὥσπερ οἱ ναῦται πρὸς ἡδονὰς καὶ
ἀπολαύσεις ὕβρει φερόμενον καὶ μετὰ τὰς ἡδονὰς
πάλιν ἐπ´ ἐργασίας καὶ πορισμοὺς ὠθούμενον οὐκ
ἐᾷ λαβεῖν τὴν φύσιν ἧς μάλιστα δεῖται καταστάσεως
καὶ γαλήνης, ἀλλ´ ἐξίστησι καὶ ταράττει διὰ τὴν
ἀνωμαλίαν. οἱ δὲ νοῦν ἔχοντες ἥκιστα μὲν ἡδονὰς
πονοῦντι τῷ σώματι προσφέρουσιν· οὐ γὰρ δέονται
τὸ παράπαν οὐδὲ μέμνηνται τῶν τοιούτων πρὸς τῷ
καλῷ τῆς πράξεως τὴν διάνοιαν ἔχοντες, καὶ τῷ
χαίροντι τῆς ψυχῆς ἢ σπουδάζοντι τὰς ἄλλας
ἐξαμαυροῦντες ἐπιθυμίας. ὅπερ γάρ φασιν εἰπεῖν
τὸν Ἐπαμεινώνδαν μετὰ παιδιᾶς, ἀνδρὸς ἀγαθοῦ
περὶ τὰ Λευκτρικὰ νόσῳ τελευτήσαντος, "ὦ
Ἡράκλεις, πῶς ἐσχόλασεν ἁνὴρ ἀποθανεῖν ἐν
τοσούτοις πράγμασι," τοῦτ´ ἀληθῶς ἔστιν εἰπεῖν
ἐπ´ ἀνδρὸς ἢ πολιτικὴν πρᾶξιν ἢ φιλόσοφον φροντίδα
διὰ χειρὸς ἔχοντος, "τίς δὲ σχολὴ τῷ ἀνδρὶ
τούτῳ νῦν ἀπεπτεῖν ἢ μεθύειν ἢ λαγνεύειν;"
γενόμενοι δὲ πάλιν ἀπὸ τῶν πράξεων ἐν ἡσυχίᾳ
κατατίθενται τὸ σῶμα καὶ διαναπαύουσι, τῶν τε
πόνων τοὺς ἀχρήστους καὶ μᾶλλον ἔτι τῶν ἡδονῶν
τὰς οὐκ ἀναγκαίας ὡς τῇ φύσει πολεμίας φυλαττόμενοι
καὶ φεύγοντες.
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Traduction française :
[25] C'est pourquoi lorsque les circonstances le permettent,
il faut se refaire en ne refusant pas au corps du sommeil,
des repas et cette quiétude qui est aussi éloignée d'un
amollissement voluptueux qu'elle l'est de la souffrance. Mais
généralement on ne garde point de mesure. On épuise le
corps par des changements brusques : il semble que ce soit
une lame de fer qu'il s'agisse de tremper. Tantôt on
l'excède et on l'accable par le travail, tantôt on l'épuise et on
l'affaiblit sous le poids des voluptés excessives. Puis du sein
des plaisirs de l'amour, après des libations copieuses qui
l'ont comme dissous et énervé, on le lance de nouveau sur la
place publique, à la cour, ou dans quelque grosse affaire qui
demande un zèle ardent et continu. Citons un exemple.
Héraclite étant malade d'une hydropisie, demandait à son
médecin, "qu'il changeât la pluie en sécheresse". De même,
aveuglés complétement par leur erreur la plupart des hommes,
lorsqu'ils sont épuisés de fatigue, de travail et de besoin,
se liquéfient en quelque sorte, se fondent plus que
jamais en eau sous l'influence des plaisirs, et après ces voluptés
ils reprennent brusquement leur contention d'esprit.
La nature ne veut pas de ces changements soudains pour
le corps. Du milieu des fatigues se lancer avec l'emportement
honteux d'une véritable frénésie dans les plaisirs et dans
d'insolentes jouissances, comme font les marins, puis après
ces plaisirs s'engager de nouveau dans de laborieuses opérations
pour y gagner de l'argent, c'est ne pas permettre à
l'âme de goûter cette tranquillité, ce calme dont elle a
essentiellement besoin; c'est la faire sortir de sa route; c'est la
troubler à force d'irrégularité. Les gens sensés se gardent
bien de proposer des plaisirs à leur corps au moment où il
est surchargé de travaux. Ils n'en éprouvent alors aucun
besoin, et ne s'en souviennent plus. Leurs pensées se concentrent
sur ce qu'il y a de beau à faire; et les autres désirs
s'effacent et disparaissent pour eux devant les joies sérieuses
de l'âme. On prête à Epaminondas ce mot plaisant sur
un homme de coeur qui était mort de maladie au moment de
la bataille de Leuctres: «Par Hercule! comment a-t-il trouvé
le temps de mourir au milieu de grandes affaires ?» Cette
parole peut s'appliquer d'une manière vraie à celui qui est
occupé d'une négociation politique ou d'une grave question
de morale. Quels instants trouverait-il pour se donner une
indigestion, pour s'enivrer, pour goûter les plaisirs de l'amour?
Quand les affaires sont terminées les sages mettent
leur corps au repos, lui donnent du relâche. Ils évitent, ils
fuient les fatigues inutiles, et encore plus les plaisirs qui ne
sont pas nécessaires, les regardant comme autant d'ennemis
de la nature.
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