Texte grec :
[107] Διὸ καὶ μοιρίδιον χρέος εἶναι λέγεται τὸ ζῆν, ὡς ἀποδοθησόμενον ὃ ἐδανείσαντο (107a) ἡμῶν οἱ προπάτορες. Ὃ δὴ καὶ εὐκόλως καταβλητέον καὶ ἀστενάκτως, ὅταν ὁ δανείσας ἀπαιτῇ· εὐγνωμονέστατοι γὰρ ἂν οὕτω φανείημεν.
Οἶμαι δὲ καὶ τὴν φύσιν ὁρῶσαν τό τ´ ἄτακτον καὶ βραχυχρόνιον τοῦ βίου ἄδηλον ποιῆσαι τὴν τοῦ θανάτου προθεσμίαν. Τοῦτο γὰρ ἦν ἄμεινον· εἰ γὰρ προῄδειμεν, κἂν προεξετήκοντό τινες ταῖς λύπαις καὶ πρὶν ἀποθανεῖν ἐτεθνήκεσαν. Ὅρα δὲ καὶ τοῦ βίου τὸ ὀδυνηρὸν καὶ τὸ πολλαῖς φροντίσιν ἐπηντλημένον, ἃς εἰ βουλοίμεθα καταριθμεῖσθαι, λίαν ἂν αὐτοῦ καταγνοίημεν, ἐπαληθεύσαιμεν δὲ καὶ τὴν παρ´ ἐνίοις κρατοῦσαν δόξαν ὡς ἄρα κρεῖττόν ἐστι τὸ τεθνάναι τοῦ ζῆν. Ὁ γοῦν Σιμωνίδης,
(107b) « Ἄνθρώπων, » φησίν, « ὀλίγον μὲν κάρτος, ἄπρακτοι δὲ μεληδόνες,
αἰῶνι δὲ παύρῳ πόνος ἀμφὶ πόνῳ.
Ὁ δ´ ἄφυκτος ὁμῶς ἐπικρέμαται θάνατος·
κείνου γὰρ ἴσον λάχον μέρος οἵ τ´ ἀγαθοί
ὅστις τε κακός. »
Πίνδαρος δέ·
Ἓν παρ´ ἐσθλὸν σύνδυο πήματα δαίονται βροτοῖς
ἀθάνατοι. Τὰ μὲν ὦν οὐ δύνανται νήπιοι κόσμῳ
φέρειν.
Σοφοκλῆς δέ·
Σὺ δ´ ἄνδρα θνητὸν εἰ κατέφθιτο στένεις,
Εἰδὼς τὸ μέλλον οὐδὲν εἰ κέρδος φέρει;
Εὐριπίδης δέ·
Τὰ θνητὰ πράγματ´ οἶσθά γ´ ἣν ἔχει φύσιν;
(107c) Δοκῶ μὲν οὔ· πόθεν γάρ; Ἀλλ´ ἄκουέ μου.
Βροτοῖς ἅπασι κατθανεῖν ὀφείλεται,
κοὐκ ἔστιν αὐτῶν ὅστις ἐξεπίσταται
τὴν αὔριον μέλλουσαν εἰ βιώσεται.
Τὸ τῆς τύχης γὰρ ἀφανὲς οἷ προβήσεται.
Τοιούτου δὴ τοῦ βίου τῶν ἀνθρώπων ὄντος οἷον οὗτοί φασι, πῶς οὐκ εὐδαιμονίζειν μᾶλλον προσήκει τοὺς ἀπολυθέντας τῆς ἐν αὐτῷ λατρείας ἢ κατοικτίρειν τε καὶ θρηνεῖν, ὅπερ οἱ πολλοὶ δρῶσι δι´ ἀμαθίαν;
(107d) Ὁ δὲ Σωκράτης παραπλήσιον ἔλεγεν εἶναι τὸν θάνατον ἤτοι τῷ βαθυτάτῳ ὕπνῳ ἢ ἀποδημίᾳ μακρᾷ καὶ πολυχρονίῳ ἢ τρίτον φθορᾷ τινι καὶ ἀφανισμῷ τοῦ τε σώματος καὶ τῆς ψυχῆς, κατ´ οὐδὲν δὲ τούτων κακὸν εἶναι. Καὶ καθ´ ἕκαστον ἐπεπορεύετο, καὶ πρῶτον τῷ πρώτῳ. Εἰ γὰρ δὴ ὕπνος τίς ἐστιν ὁ θάνατος καὶ περὶ τοὺς καθεύδοντας μηδέν ἐστι κακόν, δῆλον ὡς οὐδὲ περὶ τοὺς τετελευτηκότας εἴη ἄν τι κακόν. Ἀλλὰ μήν γ´ ὅτι ἥδιστός ἐστιν ὁ βαθύτατος τί δεῖ καὶ λέγειν; Αὐτὸ γὰρ τὸ πρᾶγμα φανερόν ἐστι πᾶσιν ἀνθρώποις, μαρτυρεῖ δὲ καὶ Ὅμηρος ἐπ´ αὐτοῦ λέγων·
Νήγρετος ἥδιστος, θανάτῳ ἄγχιστα ἐοικώς.
(107e) Ἀλλαχοῦ δὲ καὶ ταῦτα λέγει·
Ἔνθ´ Ὕπνῳ ξύμβλητο, κασιγνήτῳ Θανάτοιο
καί·
Ὕπνῳ καὶ Θανάτῳ διδυμάοσιν,
ὄψει τὴν ὁμοιότητα αὐτῶν δηλῶν· τὰ γὰρ δίδυμα τὴν ὁμοιότητα μάλιστα παρεμφαίνει. Πάλιν τέ πού φησι τὸν θάνατον εἶναι « Χάλκεον ὕπνον, » τὴν ἀναισθησίαν ἡμῶν αἰνιττόμενος. Οὐκ ἀμούσως δ´ ἔδοξεν ἀποφήνασθαι οὐδ´ ὁ εἰπὼν « Τὸν ὕπνον τὰ μικρὰ τοῦ θανάτου μυστήρια »· προμύησις γὰρ ὄντως ἐστὶ τοῦ θανάτου ὁ ὕπνος. Πάνυ δὲ σοφῶς καὶ ὁ κυνικὸς Διογένης κατενεχθεὶς εἰς ὕπνον καὶ (107f) μέλλων ἐκλείπειν τὸν βίον, διεγείραντος αὐτὸν τοῦ ἰατροῦ καὶ πυθομένου μή τι περὶ αὐτὸν εἴη χαλεπόν, « Οὐδέν, » ἔφη· « ὁ γὰρ ἀδελφὸς τὸν ἀδελφὸν προλαμβάνει. »
Εἴ γε μὴν ἀποδημίᾳ προσέοικεν ὁ θάνατος, οὐδ´ οὕτως ἐστὶ κακόν· μήποτε δὲ καὶ τοὐναντίον ἀγαθόν. Τὸ γὰρ ἀδούλωτον τῇ σαρκὶ καὶ τοῖς ταύτης πάθεσι διάγειν,
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Traduction française :
[107] On a raison de dire que la vie est une dette fatale que nous sommes obligés d'acquitter. Nos pères, qui l'avaient eue par emprunt, (107a) nous l'ont transmise au même titre ; et quand celui qui nous l'a prêtée la redemande, nous devons la lui remettre volontairement et sans regret, sous peine de passer pour des ingrats.
C'est sans doute à cause de l'incertitude et de la brièveté de la vie que la nature nous a caché l'heure de notre mort, et cela pour notre bien. Si nous en avions su l'instant, combien d'entre nous que cette vue aurait fait sécher de frayeur, et mourir mille fois avant que de subir réellement la mort ! Voyez de combien de peines et de chagrins notre vie est comme submergée. Si nous voulions en suivre le détail, nous lui ferions sans doute les plus grands reproches, et nous confirmerions la pensée de ceux qui prétendent que la mort est préférable à la vie. De ce nombre est le poète Simonide, qui a dit :
(107b) Que l'homme est faible et sa puissance vaine!
Que ses soins sont infructueux!
Sans cesse en ses jours malheureux
Un travail à l'autre s'enchaîne.
Cependant la mort menaçante
Tient sur lui son bras étendu,
Et bientôt de sa faux tranchante
Moissonne également le crime et la vertu.
Pindare a dit aussi :
Pour une seule jouissance,
Deux fois l'homme des dieux éprouve la rigueur,
Et rarement il sait opposer la douceur
A des maux qu'il aigrit par sou impatience.
Sophocle :
Le trépas d'un mortel vous fait verser des pleurs.
Mais quoi! s'il eût joui d'une plus longue vie,
Savez-vous de quel sort elle eût été suivie?
Euripide :
Des fragiles mortels connais-tu le destin?
(107c) Non, sans doute, et comment aurais-tu pu l'apprendre?
Mais tu vas le savoir, si tu daignes m'entendre.
l.a mort est pour eux tous une commune loi ,
Et sur le lendemain nul ne peut faire foi.
Doit-on jamais compter sur l'aveugle fortune?
Puisque la vie humaine est telle que nous la dépeignent ces hommes éclairés, ne devons-nous pas estimer heureux ceux qui sont délivrés de la servitude qu'elle impose, plutôt que d'en avoir compassion, et de les pleurer, comme font, par ignorance, la plupart des hommes?
(107d) La mort, disait Socrate, est, ou un sommeil profond, ou un voyage de long cours, ou enfin un anéantissement total de l'âme et du corps; et sous aucun de ces trois rapports, elle ne peut être fâcheuse. Premièrement, ajoutait-il en reprenant ces trois suppositions, si la mort n'est qu'un sommeil, et que ceux qui dorment ne sentent
aucun mal, il est évident que les morts n'en sentent point. Plus le sommeil est profond, et plus il est doux. C'est une vérité trop connue pour qu'elle ait besoin de preuve. Homère lui-même l'atteste en disant du sommeil :
Doux et profond repos, image de la mort.
(107e) En un autre endroit :
Il s'adresse au sommeil, le frère de la mort.
El ailleurs :
Le sommeil et la mort, tous deux frères jumeaux.
Il ne peut rendre leur ressemblance plus sensible qu'en les appelant jumeaux. Il dit encore que la mort est un sommeil d'airain, pour nous faire entendre qu'elle emporte toute privation de sentiment. Quelqu'un comparait avec raison le sommeil aux petits mystères. En effet, le sommeil est comme l'initiation à la mort. Diogène le Cynique, peu d'instants avant de mourir, tomba (107f) dans un sommeil profond. Son médecin l'ayant réveillé, lui demanda s'il ne sentait point de mal. « Non, répondit-il, c'est le frère qui vient au-devant de la sur, le sommeil au-devant de la mort. »
Si la mort est un long voyage, sous ce rapport, loin d'être un mal, elle est au contraire un véritable bien. N'est-ce pas en effet un bonheur réel que d'être affranchi de l'esclavage du corps, de ne plus dépendre de ces passions fougueuses qui emportent l'âme hors d'elle-même,
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