Texte grec :
[1] I. Πολλῶν τοίνυν τοῖς ἀνδράσιν ὑπαρξάντων καλῶν, ἐν τοῖς πρώτοις
δὲ τοῦ μεγίστους ἐλαχίσταις ἀφορμαῖς γενέσθαι, τοῦτο τῷ Δίωνι κάλλιστόν
ἐστιν. Οὐ γὰρ εἶχε τὸν ἀμφισβητοῦντα, καθάπερ ὁ Βροῦτος Κάσσιον,
ἄνδρα πρὸς μὲν ἀρετὴν καὶ δόξαν οὐχ ὁμοίως ἀξιόπιστον, εἰς δὲ τὸν
πόλεμον οὐκ ἐλάττονας τόλμῃ καὶ δεινότητι καὶ πράξει συμβολὰς
παρασχόμενον, ᾧ γε καὶ τοῦ παντὸς ἔργου προσποιοῦσιν ἔνιοι τὴν ἀρχήν,
ἡγεμόνα τῆς ἐπὶ Καίσαρα γνώμης τοῦτον ἀτρεμοῦντι Βρούτῳ γενέσθαι
λέγοντες. Δίων δ´ ὥσπερ ὅπλα καὶ πλοῖα καὶ στρατιωτικὴν δύναμιν, οὕτω
καὶ φίλους καὶ συνεργοὺς ἐπὶ τὴν πρᾶξιν αὐτὸς ἑαυτῷ φαίνεται
κτησάμενος. Οὐ μὴν οὐδ´ ὡς Βροῦτος ἐκ τῶν πραγμάτων αὐτῶν καὶ τοῦ
πολέμου πλοῦτον ἔσχε καὶ δύναμιν, οὕτω καὶ Δίων, ἀλλὰ τῷ πολέμῳ
προεισήνεγκεν αὐτὸς τὸν ἑαυτοῦ πλοῦτον, ὑπὲρ τῆς τῶν πολιτῶν
ἐλευθερίας τοῖς τῆς φυγῆς ἐφοδίοις προκαταχρησάμενος. Ἔτι δὲ Βροῦτος
μὲν καὶ Κάσσιος, οὐκ ὂν ἀσφαλὲς ἡσυχίαν ἄγειν ἐκπεσοῦσι τῆς πατρίδος
{Ῥώμης}, ἀλλ´ ὠφληκόσι δίκην θανάτου καὶ διωκομένοις, ἀναγκαίως εἰς τὸν
πόλεμον κατέφυγον, καὶ τὰ σώματα τοῖς ὅπλοις παρακαταθέμενοι,
διεκινδύνευσαν ὑπὲρ αὑτῶν τὸ πλέον ἢ τῶν πολιτῶν· Δίων δ´ ἀδεέστερον
ἐν τῇ φυγῇ τοῦ φυγαδεύσαντος τυράννου καὶ ἥδιον διάγων, ἀνέρριψεν
ἑκὼν κίνδυνον τοσοῦτον ἐπὶ τῷ σῶσαι Σικελίαν.
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Traduction française :
[1] I. Dion et Brutus eurent l'un et l'autre de grandes qualités, et l'on doit
compter pour la première d'avoir su s'élever par de faibles
commencements à un si grand degré de puissance; mais, sous ce
rapport Dion a sur Brutus un grand avantage : il n'eut pas un concurrent
qui excitât son émulation, comme Brutus l'avait en la personne
de Cassius, homme à la vérité inférieur à Brutus par sa réputation et sa
vertu, mais qui, par son audace, sa valeur et sa capacité dans la guerre,
eût une grande part aux exploits de son collègue. On lui fait même
honneur du commencement de leur entreprise, et l'on assure qu'il fut le
premier auteur de la conspiration contre César, à laquelle Brutus était loin
de penser. Dion, non content de fournir pour son expédition des armes,
des vaisseaux et des soldats, sut encore attirer seul à lui les amis qui le
secondèrent dans l'exécution de son projet. Brutus trouva dans la
situation des affaires, et dans la guerre même, ses richesses et sa
puissance ; mais Dion fit seul tous les frais de la guerre; et, pour rendre la
liberté à sa patrie, il sacrifia à ses concitoyens l'argent qui devait servir à
l'entretenir dans son exil.
Brutus et Cassius ne pouvant, après leur sortie de Rome, trouver
leur sûreté dans le repos, condamnés à mort et poursuivis par leurs
ennemis, furent forcés de se jeter dans la guerre, comme dans le seul
asile qui leur restât ; et, en se faisant un rempart de leurs armes, c'était
plus pour eux-mêmes que pour leurs concitoyens qu'ils s'exposaient au
danger. Dion, au contraire, menait dans son exil une vie plus sûre et plus
douce que le tyran qui l'avait banni ; et ce fut pour sauver là Sicile que,
s'arrachant de cet état paisible, il alla volontairement se précipiter dans
les plus grands périls.
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