Texte grec :
[3] ( Γ) Καὶ ἡμεῖς τοίνυν λέγειν. ἀρκτέον δὲ πρῶτον ἀπὸ
τῶν ἀρετῶν, ἐφ´ αἷς ὁρῶμεν ὑμᾶς μέγα φρονοῦντας, ὡς
τῶν θηρίων πολὺ καὶ δικαιοσύνῃ καὶ φρονήσει καὶ ἀνδρείᾳ
καὶ ταῖς ἄλλαις ἀρεταῖς διαφέροντας. ἀπόκριναι δή μοι,
σοφώτατ´ ἀνδρῶν· ἤκουσα γάρ σού ποτε διηγουμένου τῇ
Κίρκῃ περὶ τῆς τῶν Κυκλώπων γῆς, ὡς οὔτ´ ἀρουμένη
τὸ παράπαν οὔτε τινὸς εἰς αὐτὴν φυτεύοντος οὐδὲν οὕτως
ἐστὶν γενναία καὶ ἀγαθὴ τὴν φύσιν, ὥσθ´ ἅπαντας ἐκφέρειν
τοὺς καρποὺς ἀφ´ αὑτῆς· | πότερον οὖν ταύτην ἐπαινεῖς
μᾶλλον ἢ τὴν αἰγίβοτον Ἰθάκην καὶ τραχεῖαν, ἣ μόλις
ἀπ´ ἔργων τε πολλῶν καὶ διὰ πόνων μεγάλων μικρὰ
καὶ γλίσχρα καὶ μηδενὸς ἄξια τοῖς γεωργοῦσιν ἀναδίδωσι;
καὶ ὅπως οὐ χαλεπῶς οἴσεις, παρὰ τὸ φαινόμενον
εὐνοίᾳ τῆς πατρίδος ἀποκρινόμενος.
(Ο) Ἀλλ´ οὐ δεῖ ψεύδεσθαι· φιλῶ μὲν γὰρ καὶ ἀσπάζομαι
τὴν ἐμαυτοῦ πατρίδα καὶ χώραν μᾶλλον, ἐπαινῶ δὲ
καὶ θαυμάζω τὴν ἐκείνων.
( Γ) Οὐκοῦν τοῦτο μὲν οὕτως ἔχειν φήσομεν, ὡς ὁ φρονιμώτατος
ἀνθρώπων ἄλλα μὲν οἴεται δεῖν ἐπαινεῖν καὶ
δοκιμάζειν ἄλλα δ´ αἱρεῖσθαι καὶ ἀγαπᾶν, ἐκεῖνο δ´ οἶμαί
σε καὶ περὶ τῆς ψυχῆς ἀποκεκρίσθαι· ταὐτὸν γάρ ἐστι τῷ
περὶ τῆς χώρας, ὡς ἀμείνων ἥτις ἄνευ πόνου τὴν ἀρετὴν
ὥσπερ αὐτοφυῆ καρπὸν ἀναδίδωσιν.
(Ο) Ἔστω καὶ τοῦτό σοι οὕτως.
( Γ) Ἤδη μὲν οὖν ὁμολογεῖς τὴν τῶν θηρίων ψυχὴν
εὐφυεστέραν εἶναι πρὸς γένεσιν ἀρετῆς καὶ τελειοτέραν·
ἀνεπίτακτος γὰρ καὶ ἀδίδακτος ὥσπερ ἄσπορος καὶ ἀνήροτος
ἐκφέρει καὶ αὔξει κατὰ φύσιν τὴν ἑκάστῳ προσήκουσαν
ἀρετήν.
(Ο) Καὶ τίνος ποτ´ ἀρετῆς, ὦ Γρύλλε, μέτεστι τοῖς θηρίοις;
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Traduction française :
[3] GRYLLUS. Autant que moi je le suis de m'expliquer.
Je dois commencer d'abord par les vertus dont je vois que
vous êtes si fiers. Vous croyez l'emporter de beaucoup sur
les animaux par la justice, par la prudence, par la bravoure
et par les autres vertus. Or, réponds-moi, le plus éclairé
des humains. J'ai entendu ce que tu contais à Circé de la
terre habitée par les Cyclopes : terre, où sans qu'on la cultive
le moins du monde, sans que personne y plante rien, la
nature est d'une bonté et d'une générosité incroyable,
produisant d'elle-même toutes sortes de fruits. Eh bien, dis:
préfères-tu cette terre-là à ton Ithaque, vrai pays de chèvres,
sol montueux, qui à grand'peine, au prix de travaux nombreux
et de fatigues excessives, ne rend à ceux qui le
cultivent que des productions insignifiantes, chétives et sans
valeur? Et ne va pas, te formalisant de mes paroles, me
répondre contrairement à ta pensée, par amour de ta patrie.
ULYSSE. Je n'ai pas besoin de mentir. J'aime, je chéris
ma patrie et mon sol natal par-dessus tout, en même temps
que je loue et que j'admire cette autre contrée.
GRYLLUS. Ainsi donc, nous constaterons ce premier point :
à savoir que l'homme le plus sensé de tous croit devoir accorder
ses louanges et son admiration à certaines choses, et
sa préférence, son affection à d'autres. Je suppose que tu
répondras dans un sens analogue, si je te parle de l'âme.
Car il en est de même pour elle que pour un sol : la meilleure
est celle qui sans travail produit la vertu comme un
fruit naturel.
ULYSSE. C'est un point que je t'accorde aussi.
GRYLLUS. Te voilà donc amené à convenir que l'âme des
bêtes est mieux organisée naturellement pour que la vertu
y naisse et s'y perfectionne. Sans nulle prescription, sans
nul enseignement, comme une terre qu'on n'a ni semée ni
labourée, leur âme porte et développe naturellement la
vertu qui leur convient.
ULYSSE. Et quelle vertu, seigneur Gryllus, accordez-vous
donc aux bêtes?
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