Texte grec :
[19] Οὐ γὰρ ἔστιν ὡς χαλινῶν ἐφαψαμένους ἐπισχεῖν
τὸν ἀδολέσχην, ἀλλ´ ἔθει δεῖ κρατῆσαι τοῦ νοσήματος.
πρῶτον μὲν οὖν ἐν ταῖς τῶν πέλας ἐρωτήσεσιν ἑαυτὸν
ἐθιζέτω σιωπᾶν, μέχρις οὗ πάντες ἀπείπωνται τὴν ἀπόκρισιν·
‘οὐ γάρ τι βουλῆς ταὐτὸ καὶ δρόμου τέλος’
ὥς φησιν ὁ Σοφοκλῆς, οὐδέ γε φωνῆς καὶ ἀποκρίσεως·
ἀλλ´ ἐκεῖ μὲν ἡ νίκη τοῦ φθάσαντός ἐστιν, ἐνταῦθα
δέ, ἐὰν μὲν ἱκανῶς ἕτερος ἀποκρίνηται, καλῶς ἔχει
συνεπαινέσαντα καὶ συνεπιφήσαντα δόξαν εὐμενοῦς ἀνθρώπου
λαβεῖν· ἐὰν δὲ μή, τότε καὶ διδάξαι τὸ ἠγνοημένον
καὶ ἀναπληρῶσαι τὸ ἐλλεῖπον ἀνεπίφθονον καὶ οὐκ
ἄκαιρόν ἐστι. μάλιστα δὲ φυλάττωμεν ἑαυτούς, ὅπως μὴ
ἑτέρου τινὸς ἐρωτηθέντος αὐτοὶ προλαμβάνωμεν ὑποφθάνοντες
τὴν ἀπόκρισιν. ἴσως μὲν γὰρ οὐδ´ ἄλλοτε καλῶς
ἔχον ἐστὶν αἰτηθέντος ἑτέρου παρωσαμένους ἐκεῖνον
αὐτοὺς ἐπαγγέλλεσθαι (δόξομεν γὰρ ἅμα καὶ τοῦτον ὡς
παρασχεῖν ὃ αἰτεῖται μὴ δυνάμενον, κἀκεῖνον ὡς αἰτεῖν
παρ´ ὧν δύναται λαβεῖν οὐκ ἐπιστάμενον ὀνειδίζειν)· μάλιστα
δ´ ὕβριν φέρει περὶ τὰς ἀποκρίσεις ἡ τοιαύτη προπέτεια
καὶ θρασύτης. συνεμφαίνει γὰρ ὁ φθάνων ἐν τῷ
ἀποκρίνασθαι τὸν ἐρωτώμενον τὸ ‘τί τούτου δέῃ;’ καί ‘τί
οὗτος οἶδεν;’ καὶ ‘ἐμοῦ παρόντος περὶ τούτων οὐδένα δεῖ
ἄλλον ἐρωτᾶν.’ καίτοι πολλάκις τινὰς ἐρωτῶμεν οὐ τοῦ
λόγου δεόμενοι, φωνὴν δέ τινα καὶ φιλοφροσύνην ἐκκαλούμενοι
παρ´ αὐτῶν καὶ προαγαγεῖν εἰς ὁμιλίαν ἐθέλοντες,
ὡς Σωκράτης Θεαίτητον καὶ Χαρμίδην. ὅμοιον οὖν
τῷ τὸν ὑφ´ ἑτέρου βουλόμενον φιληθῆναι προσδραμόντα
φιλεῖν αὐτὸν ἢ τὸν ἑτέρῳ προσβλέποντα μεταστρέφειν εἰς
ἑαυτὸν τὸ προλαμβάνειν τὰς ἀποκρίσεις καὶ τὰ ὦτα μετάγειν
καὶ τὴν διάνοιαν ἕλκειν καὶ ἀποστρέφειν πρὸς ἑαυτόν·
ὅπου, κἂν ἀπείπηται τὸν λόγον ὁ αἰτηθείς, ἐπισχόντα
καλῶς ἔχει καὶ πρὸς τὸ βουλόμενον τοῦ ἐρωτῶντος ἁρμοσάμενον
ὡς ἐπὶ κλῆσιν ἀλλοτρίαν {τὴν ἀπόκρισιν} αἰδημόνως
καὶ κοσμίως ἀπαντᾶν. καὶ γὰρ οἱ μὲν ἐρωτηθέντες,
ἂν σφαλῶσιν ἐν τῷ ἀποκρίνασθαι, συγγνώμης δικαίας
τυγχάνουσιν, ὁ δ´ αὐθαιρέτως ὑφιστάμενος καὶ προλαμβάνων
τὸν λόγον ἀηδὴς μέν ἐστι καὶ κατορθῶν, διαμαρτάνων
δὲ παντάπασιν ἐπίχαρτος γίνεται καὶ καταγέλαστος.
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Traduction française :
[19] Il n'est pas possible d'arrêter le bavardage comme si
l'on avait une bride en main. C'est par l'habitude que l'on
se rendra maître de cette maladie. Premièrement donc,
quand on questionnera vos voisins habituez-vous à vous
taire jusqu'à ce que tous aient refusé de répondre.
"Le but n'est pas le même au conseil qu'à la course",
dit Sophocle : comme il n'est pas non plus le même à la question
qu'à la réponse. Dans une course la victoire est pour
celui qui est arrivé le premier. Mais ici, du moment qu'un
autre a bien répondu il est juste de le louer, de l'approuver,
et l'on passe ainsi pour un homme plein de bienveillance.
Si ce qu'il a dit n'a pas été satisfaisant, c'est le cas de lui
apprendre ce qu'il ignorait, de suppléer ce qui manque à
sa réponse; et on peut le faire sans paraître odieux et importun.
Mais gardons-nous principalement de prendre les
premiers la parole quand c'est notre voisin qu'on interroge,
et n'allons pas prévenir sa réponse. Un autre travers qui
n'est pas convenable non plus, c'est d'écarter en quelque
sorte la personne à qui est faite une question et de se proposer
pour y répondre soi-même. On semble, de cette façon,
humilier à la fois celui qui est interrogé comme ne pouvant
satisfaire à la demande, et celui qui questionne comme ne
sachant pas choisir les gens qui peuvent l'éclairer. Rien
n'est plus injurieux que cette précipitation, que cette hardiesse
à devancer les autres dans leurs réponses. Se hâter
de parler avant celui à qui a été adressée la question, c'est
dire implicitement : « Pourquoi vous adresser à celui-ci?
Est-ce qu'il sait rien! Quand je suis là, il ne faut consulter
que moi sur ces matières. » Or bien souvent lorsque nous
interrogeons quelqu'un, ce n'est pas que nous ayons besoin
qu'il nous éclaire de sa parole : on provoque de sa part un
mot affectueux, on veut simplement entrer en conversation,
comme Socrate dans le Théétète et dans le Charmide. C'est
comme si vous vous apprêtiez à embrasser un ami et qu'un
autre accourût vous sauter au cou; comme si vos regards se
dirigeaient sur une personne et qu'un autre vînt s'interposer
et les attirer sur lui. On fait précisément la même chose
quand on répond avant celui qui est interrogé, quand on
détourne les oreilles vers soi, quand on s'empare avec arrogance
de l'attention à son profit exclusif. Il y a plus. Si celui
qui est questionné se déclare incapable de répondre, il est
de bon goût de se tenir sur la réserve. Tout en satisfaisant
celui qui interroge on s'arrangera de manière à répondre
comme si c'était un autre que lui qui fît la question, et ce
sera une manière modeste et convenable de se rencontrer
avec lui. D'ailleurs, quand on est interrogé, la réponse, fût-elle
même une erreur, trouve naturellement de l'indulgence.
Mais quand on prend sur soi de se substituer à celui
qui est questionné et de prendre la parole avant lui, on
déplaît si l'on dit bien; e t si l'on se trompe, c'est à la satisfaction
de tous que l'on est l'objet d'une risée universelle.
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