[18] (1) Ὁ δὲ Νικίας ἄκων μὲν ᾑρέθη στρατηγός, οὐχ ἥιστα
τὴν ἀρχὴν καὶ διὰ τὸν συνάρχοντα φεύγων· ἐφαίνετο γὰρ
τοῖς Ἀθηναίοις τὰ τοῦ πολέμου βέλτιον ἕξειν μὴ προιεμένοις
τὸν Ἀλκιβιάδην ἄκρατον, ἀλλὰ μειχθείσης πρὸς
τὴν τόλμαν αὐτοῦ τῆς Νικίου προνοίας· (2) καὶ γὰρ ὁ τρίτος
στρατηγὸς ὁ Λάμαχος ἡλικίᾳ προήκων ὅμως ἐδόκει μηδὲν
ἧττον εἶναι τοῦ Ἀλκιβιάδου διάπυρος καὶ φιλοκίνδυνος
ἐν τοῖς ἀγῶσι. βουλευομένων δὲ περὶ πλήθους καὶ τρόπου
παρασκευῆς, ἐπεχείρησεν αὖθις ὁ Νικίας ἐνίστασθαι καὶ
καταπαύειν τὸν πόλεμον. (3) ἀντειπόντος δὲ τοῦ Ἀλκιβιάδου
καὶ κρατήσαντος, ἔγραψε τῶν ῥητόρων Δημόστρατος καὶ
εἶπεν ὡς χρὴ τοὺς στρατηγοὺς αὐτοκράτορας εἶναι καὶ
τῆς παρασκευῆς καὶ τοῦ πολέμου παντός. (4) ἐπιψηφισαμένου
δὲ τοῦ δήμου καὶ γενομένων ἑτοίμων πάντων πρὸς
τὸν ἔκπλουν, οὐ χρηστὰ παρῆν οὐδὲ τὰ τῆς ἑορτῆς. (5) Ἀδωνίων
γὰρ εἰς τὰς ἡμέρας ἐκείνας καθηκόντων, εἴδωλά τε
πολλαχοῦ νεκροῖς ἐκκομιζομένοις ὅμοια προὔκειντο ταῖς
γυναιξί, καὶ ταφὰς ἐμιμοῦντο κοπτόμεναι καὶ θρήνους
ᾖδον. (6) ἡ μέντοι τῶν Ἑρμῶν περικοπή, μιᾷ νυκτὶ τῶν πλείστων
ἀκρωτηριασθέντων τὰ πρόσωπα, πολλοὺς καὶ τῶν
περιφρονούντων τὰ τοιαῦτα διετάραξεν. (7) ἐλέχθη μὲν οὖν,
ὅτι Κορίνθιοι διὰ τοὺς Συρακουσίους ἀποίκους ὄντας, ὡς
ἐπισχέσεως ἐσομένης πρὸς τὸν οἰωνὸν ἢ μεταγνώσεως τοῦ
πολέμου, ταῦτα δράσειαν. (8) οὐ μὴν ἥπτετό γε τῶν πολλῶν
οὔθ´ οὗτος ὁ λόγος οὔθ´ ὁ τῶν σημεῖον δεινὸν εἶναι μηδὲν
οἰομένων, ἀλλ´ οἷα φιλεῖ φέρειν ἄκρατος ἀκολάστων νέων
εἰς ὕβριν ἐκ παιδιᾶς ὑποφερομένων· ὀργῇ δ´ ἅμα καὶ φόβῳ
τὸ γεγονὸς λαμβάνοντες ὡς ἀπὸ συνωμοσίας ἐπὶ πράγμασι
μεγάλοις τετολμημένον, ἅπασαν ἐξήταζον ὑπόνοιαν πικρῶς
ἥ τε βουλὴ συνιοῦσα περὶ τούτων καὶ ὁ δῆμος ἐν ὀλίγαις
ἡμέραις πολλάκις.
| [18] (1) Contre son gré, Nicias fut nommé stratège - il
cherchait par-dessus tout à éviter le commandement, surtout
à cause de son collègue. C'est qu'il paraissait aux
Athéniens que la guerre marcherait mieux s'ils n'y
laissaient pas aller simplement Alcibiade mais si, à son
audace, se mêlait la prévoyance de Nicias. (2) Aussi bien le
troisième stratège, Lamachos, pourtant d'un âge avancé, ne
semblait pas moins ardent qu'Alcibiade, ni moins téméraire
dans les combats. Comme on délibérait sur l'importance et le
genre des moyens logistiques, Nicias entreprit à nouveau de
s'opposer à la guerre et de l'empêcher. (3) Mais ce fut
Alcibiade qui lui répliqua et qui s'imposa; Dèmostratos, un
des orateurs, rédigea un décret prévoyant que les stratèges
devaient disposer des pleins pouvoirs tant pour la
préparation logistique que pour l'ensemble de la guerre. (4)
Le peuple ayant voté ce décret, et alors que tout était prêt
pour l'appareillage, survinrent des présages fâcheux, jusque
dans la fête en cours. (5) Les fêtes d'Adonis tombaient en
effet ces jours-là, jours où les femmes, un peu partout,
présentaient des simulacres figurant des morts conduits en
terre, où elles imitaient, en se frappant la poitrine, des
rites d'ensevelissement et où elles entonnaient des hymnes
funèbres. (6) Ensuite, il y eut la mutilation des Hermès: en
une nuit, la très grande majorité d'entre eux se trouvèrent
mutilés sur leur face antérieure et nombre de gens en furent
profondément troublés, même ceux qui affichaient du mépris
pour ce genre de choses. (7) On dit alors que c'étaient les
Corinthiens qui avaient fait cela (parce que les Syracusains
étaient colons de Corinthe), dans la pensée que ce mauvais
présage provoquerait un retard, voire un retournement
d'opinion à propos de la guerre. (8) Mais assurément, cette
rumeur ne toucha pas le peuple; pas davantage celle répandue
par des gens qui ne voyaient rien de terrible dans le
présage, mais plutôt quelque chose comme l'effet habituel du
vin pur chez de jeunes libertins portés par jeu à l'excès.
Avec colère et crainte tout ensemble, les citoyens prenaient
l'événement pour le trait d'audace d'une conspiration
fomentée en vue de grands projets. Le Conseil, réuni à ce
sujet, et le peuple qui s'assembla plusieurs fois en peu de
jours se mirent à examiner sévèrement tout objet de soupçon.
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