HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

PLOTIN, Les Ennéades, IV, livre VI

ὁμοιότητι



Texte grec :

[4,6,3] Νῦν δὲ τούτων εἰρημένων περὶ μνήμης ἐφεξῆς λεκτέον εἰποῦσι πρότερον, ὡς οὐ θαυμαστόν, μᾶλλον δὲ θαυμαστὸν μέν, ἀπιστεῖν δὲ οὐ δεῖ τῆι τοιαύτηι δυνάμει τῆς ψυχῆς, εἰ μηδὲν λαβοῦσα εἰς αὑτὴν ἀντίληψιν ὧν οὐκ ἔσχε ποιεῖται. Λόγος γάρ ἐστι πάντων, καὶ λόγος ἔσχατος μὲν τῶν νοητῶν καὶ τῶν ἐν τῶι νοητῶι ἡ ψυχῆς φύσις, πρῶτος δὲ τῶν ἐν τῶι αἰσθητῶι παντί. Διὸ δὴ καὶ πρὸς ἄμφω ἔχει, ὑπὸ μὲν τῶν εὐπαθοῦσα καὶ ἀναβιωσκομένη, ὑπὸ δὲ τῶν τῆι ὁμοιότητι ἀπατωμένη καὶ κατιοῦσα ὥσπερ θελγομένη. Ἐν μέσωι δὲ οὖσα αἰσθάνεται ἀμφοῖν, καὶ τὰ μὲν νοεῖν λέγεται εἰς μνήμην ἐλθοῦσα, εἰ πρὸς αὐτοῖς γίγνοιτο· γινώσκει γὰρ τῶι αὐτά πως εἶναι· γινώσκει γὰρ οὐ τῶι ἐνιζάνειν αὐτά, ἀλλὰ τῶι πως ἔχειν αὐτὰ καὶ ὁρᾶν αὐτὰ καὶ εἶναι αὐτὰ ἀμυδρότερον καὶ γίνεσθαι ἐκ τοῦ ἀμυδροῦ τῶι οἷον ἐγείρεσθαι ἐναργεστέρα καὶ ἐκ δυνάμεως εἰς ἐνέργειαν ἰέναι. Τὰ δ᾽ αἰσθητὰ τὸν αὐτὸν τρόπον οἷον συναψάμενα καὶ ταῦτα παρ᾽ αὑτῆς οἷον ἐκλάμπειν ποιεῖ καὶ πρὸ ὀμμάτων εἶναι ἐργάζεται ἑτοίμης οὔσης καὶ πρὸ οἷον ὠδινούσης πρὸς αὐτὰ τῆς δυνάμεως. Ὅταν τοίνυν ῥωσθῆι πρὸς ὁτιοῦν τῶν φανέντων, ὥσπερ πρὸς παρὸν διάκειται ἐπὶ πολὺν χρόνον καὶ ὅσωι μᾶλλον, τόσωι ἀεί. Διὸ καὶ τὰ παιδία μνημονεύειν λέγεται μᾶλλον, ὅτι μὴ ἀφίστανται, ἀλλὰ κεῖται αὐτοῖς πρὸ ὀμμάτων ὡς ἂν ὁρῶσιν οὔπω εἰς πλῆθος, ἀλλὰ πρὸς ὀλίγα· οἷς δὲ ἐπὶ πολλὰ ἡ διάνοια καὶ ἡ δύναμις, ὥσπερ παραθέουσι καὶ οὐ μένουσιν. Εἰ δέ γε ἔμενον οἱ τύποι, οὐκ ἂν ἐποίησε τὸ πλῆθος ἧττον μνήμας. Ἔτι, εἰ τύποι μένοντες, οὐδὲν ἔδει σκοπεῖν, ἵνα ἀναμνησθῶμεν, οὐδὲ πρότερον ἐπιλαθομένους ὕστερον ἀναμιμνήσκεσθαι κειμένων. Καὶ αἱ εἰς ἀνάληψιν δὲ μελέται δηλοῦσι δυνάμωσιν ψυχῆς τὸ γινόμενον ὑπάρχον, ὥσπερ χειρῶν ἢ ποδῶν τὰ γυμνάσια εἰς τὸ ποιεῖν ῥαιδίως, ἃ μὴ ἐν ταῖς χερσὶν ἢ ποσὶ κεῖται, ἀλλὰ πρὸς ἃ τῆι συνεχείαι ἡτοίμασται. Διὰ τί γὰρ ἅπαξ μὲν ἀκούσας ἢ δεύτερον οὐ μέμνηται, ὅταν δὲ πολλάκις, καὶ ὃ πρότερον ἀκούσας οὐκ ἔσχε, πολλῶι ὕστερον χρόνωι μέμνηται ἤδη; Οὐ γὰρ δὴ τῶι μέρη ἐσχηκέναι πρότερον τοῦ τύπου· ἔδει γὰρ τούτων μεμνῆσθαι· ἀλλ᾽ οἷον ἐξαίφνης γίγνεται τοῦτο ἔκ τινος {τῆς} ὑστέρας ἀκροάσεως ἢ μελέτης. Ταῦτα γὰρ μαρτυρεῖ πρόκλησιν τῆς δυνάμεως καθ᾽ ἣν μνημονεύομεν τῆς ψυχῆς ὡς ῥωσθεῖσαν ἢ ἁπλῶς ἢ πρὸς τοῦτο. Ὅταν δὲ μὴ μόνον πρὸς ἃ ἐμελετήσαμεν τὸ τῆς μνήμης ἡμῖν παρῆι, ἀλλ᾽ οἵπερ πολλὰ ἀνειλήφασιν ἐκ τοῦ εἰθίσθαι ἀπαγγελίαις χρῆσθαι, ῥαιδίας ἤδη καὶ τῶν ἄλλων τὰς λεγομένας ἀναλήψεις ποιῶνται, τί ἄν τις ἐπαιτιῶιτο τῆς μνήμης ἢ τὴν δύναμιν τὴν ῥωσθεῖσαν εἶναι; Οἱ μὲν γὰρ τύποι μένοντες ἀσθένειαν μᾶλλον ἢ δύναμιν κατηγοροῖεν· τὸ γὰρ ἐντυπώτατον τῶι εἴκειν ἐστὶ τοιοῦτον, καὶ πάθους ὄντος τοῦ τύπου τὸ μᾶλλον πεπονθὸς τοῦτό ἐστι τὸ μνημονεῦον μᾶλλον. Τούτου δὲ τοὐναντίον φαίνεται συμβαῖνον· οὐδαμοῦ γὰρ ἡ πρὸς ὁτιοῦν γυμνασία εὐπαθὲς τὸ γυμνασάμενον ποιεῖ· ἐπεὶ καὶ ἐπὶ τῶν αἰσθήσεων οὐ τὸ ἀσθενὲς ὁρᾶι οἷον ὀφθαλμός, ἀλλ᾽ ὅτωι δύναμίς ἐστιν εἰς ἐνέργειαν πλείων. Διὸ καὶ οἱ γεγηρακότες καὶ πρὸς τὰς αἰσθήσεις ἀσθενέστεροι καὶ πρὸς τὰς μνήμας ὡσαύτως. Ἰσχὺς ἄρα τις καὶ ἡ αἴσθησις καὶ ἡ μνήμη. Ἔτι τῶν αἰσθήσεων τυπώσεων οὐκ οὐσῶν, πῶς οἷόν τε τὰς μνήμας κατοχὰς τῶν οὐκ ἐντεθέντων οὐδὲ τὴν ἀρχὴν εἶναι; Ἀλλ᾽ εἰ δύναμίς τις καὶ παρασκευὴ πρὸς τὸ ἕτοιμον, πῶς οὐχ ἅμα, ἀλλ᾽ ὕστερον εἰς ἀναπόλησιν τῶν αὐτῶν ἐρχόμεθα; Ἢ ὅτι τὴν δύναμιν δεῖ οἷον ἐπιστῆσαι καὶ ἑτοιμάσασθαι. Τοῦτο γὰρ καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων δυνάμεων ὁρῶμεν εἰς τὸ ποιῆσαι ὃ δύνανται ἑτοιμαζομένων καὶ τὰ μὲν εὐθύς, τὰ δέ, εἰ συλλέξαιντο ἑαυτάς, ἐργαζομένων. Γίγνονται δὲ ὡς ἐπὶ τὸ πολὺ οὐχ οἱ αὐτοὶ μνήμονες καὶ ἀγχίνοι {πολλάκις}, ὅτι οὐχ ἡ αὐτὴ δύναμις ἑκατέρου, ὥσπερ οὐδ᾽ ὁ αὐτὸς πυκτικὸς καὶ δρομικός· ἐπικρατοῦσι γὰρ ἄλλαι ἐν ἄλλωι ἰδέαι. Καίτοι οὐκ ἐκώλυε τὸν ἁστινασοῦν ἔχοντα πλεονεξίας ψυχῆς ἀναγινώσκειν τὰ κείμενα, οὐδὲ τὸν ταύτηι ῥυέντα τὴν τοῦ πάσχειν καὶ ἔχειν τὸ πάθος ἀδυναμίαν κεκτῆσθαι. Καὶ τὸ τῆς ψυχῆς δὲ ἀμέγεθες {καὶ ὅλως} ψυχὴν μαρτυρεῖ δύναμιν εἶναι. Καὶ ὅλως τὰ περὶ ψυχὴν πάντ᾽ οὐ θαυμαστὸν ἄλλον τρόπον ἔχειν, ἢ ὡς ὑπειλήφασιν ὑπὸ τοῦ μὴ ἐξετάζειν ἄνθρωποι, ἢ ὡς πρόχειροι αὐτοῖς ἐπιβολαὶ ἐξ αἰσθητῶν ἐγγίνονται δι᾽ ὁμοιοτήτων ἀπατῶσαι. Οἷον γὰρ ἐν πίναξιν ἢ δέλτοις γεγραμμένων γραμμάτων, οὕτως περὶ τῶν αἰσθήσεων καὶ τοῦ μνημονεύειν διάκεινται, καὶ οὔτε οἱ σῶμα αὐτὴν τιθέμενοι ὁρῶσιν, ὅσα ἀδύνατα τῆι ὑποθέσει αὐτῶν συμβαίνει, οὔτε οἱ ἀσώματον.

Traduction française :

[4,6,3] Il nous reste maintenant à parler de la mémoire. Commençons par dire que nous attribuons à l'âme une puissance qui n'est pas étonnante, ou qui est étonnante si l'on veut, mais qui n'est pas incroyable : elle consiste en ce que l'âme, sans rien recevoir, perçoit cependant les choses qu'elle n'a pas. C'est que l'âme est par sa nature la raison de toutes choses, la raison dernière des choses intelligibles, la raison première des choses sensibles. Aussi a-t-elle des relations avec toutes les deux ; elle est améliorée et vivifiée par les choses intelligibles; mais elle est trompée par la ressemblance qu'ont les choses sensibles avec les choses intelligibles, et elle descend ici-bas comme entraînée par le charme qui la séduit. Elle connaît donc également les choses intelligibles et les choses sensibles parce qu'elle occupe une position intermédiaire entre elles. On dit qu'elle pense les choses intelligibles quand elle se les rappelle en s'y appliquant. Elle les connaît parce qu'elle est ces choses d'une certaine manière; elle les connaît, non parce qu'elle les place en elle-même, mais parce qu'elle les possède en quelque sorte, qu'elle en a l'intuition; parce que, étant ces choses d'une manière obscure, elle se réveille, passe de l'obscurité à la clarté, de la puissance à l'acte. Elle se comporte de la même façon pour les choses sensibles : en les rapprochant de ce qu'elle a en elle-même, elle les rend lumineuses, elle en a l'intuition, parce qu'elle possède une puissance prête {à les percevoir et} à les enfanter pour ainsi dire. Quand l'âme a appliqué toute la force de son attention à un des objets qui s'offrent à elle, elle en reste longtemps affectée comme si cet objet était présent, et plus elle l'a considéré avec attention, plus longtemps elle le voit. C'est pour cela que les enfants ont plus de mémoire : ils n'abandonnent pas vite un objet, ils y attachent longtemps leurs regards : au lieu de se laisser distraire par une foule d'objets, ils accordent leur attention uniquement à quelques-uns d'entre eux. Ceux au contraire dont la pensée et les facultés s'occupent de beaucoup de choses les parcourent en quelque sorte et ne s'y arrêtent pas. Si la mémoire consistait à conserver des images, leur nombre ne l'affaiblirait pas; si elle les gardait renfermées en elle-même, elle n'aurait pas besoin de réfléchir pour se les rappeler, elle ne pourrait non plus se les rappeler tout à coup après les avoir oubliées. L'exercice ne fait autre chose qu'accroître l'énergie et la force de la mémoire, comme l'exercice que nous donnons à nos pieds ou à nos mains n'a d'autre but que de nous mettre en état de faire plus facilement certaines choses qui ne sont ni dans nos pieds ni dans nos mains, mais auxquelles ces membres deviennent plus aptes par l'habitude. Pourquoi d'ailleurs ne se souvient-on pas d'une chose quand on ne l'a entendue qu'une ou deux fois ? Pourquoi, lorsqu'on l'a souvent entendue, se la rappelle-t-on longtemps, bien qu'on ne l'ait pas d'abord retenue? Ce n'est pas parce qu'on n'aurait d'abord retenu que quelques parties de l'image : car alors on se rappellerait ces parties. Au contraire, le souvenir se produit tout d'un coup à la suite de la dernière audition ou de la dernière réflexion. Ce fait montre assez qu'on ne fait qu'éveiller dans l'âme la faculté de la mémoire, que lui donner une nouvelle énergie, soit pour toutes choses en général, soit pour une en particulier. La mémoire d'ailleurs ne nous rend pas seulement les choses auxquelles nous avons réfléchi; elle nous suggère encore une foule d'autres souvenirs par l'habitude qu'elle a de se servir de certains indices dont il suffit de retrouver un seul pour se rappeler le reste facilement: comment peut-on expliquer ce fait autrement qu'en admettant que la faculté de la mémoire s'est fortifiée? La conservation d'images dans l'âme indiquerait plutôt de la faiblesse que de la force : car, pour recevoir plusieurs empreintes, il faut se prêter facilement à toute forme. Toute empreinte étant une passion, il s'ensuivrait que la mémoire serait proportionnée à la passivité. Or, c'est évidemment le contraire qui a lieu. Jamais un exercice, quel qu'il soit, ne rend l'être qui s'y livre plus propre à pâtir. D'ailleurs, dans les sensations, ce n'est pas l'organe débile et impuissant par lui-même qui perçoit; ce n'est pas l'œil qui voit, par exemple, c'est la puissance active de l'âme. C'est pour cela que les vieillards ont à la fois des sensations et des souvenirs plus faibles. La sensation et la mémoire impliquent donc quelque énergie. Puisque la sensation n'est pas l'impression d'une image dans l'âme, comment la mémoire pourrait-elle être le dépôt de choses qu'elle n'a pas reçues ? — Mais, si elle est une faculté, une disposition, pourquoi ne nous rappelons-nous pas sur-le-champ ce que nous avons appris et nous faut-il quelque temps pour nous en souvenir?— C'est que nous avons besoin de nous rendre maître de notre faculté et de l'appliquer à son objet. Il en est de même pour nos autres facultés : il faut que nous les préparions à remplir leurs fonctions; tantôt elles agissent sur-le-charnp, tantôt elles ont besoin de recueillir leurs forces. Souvent les mêmes hommes n'ont pas à la fois de la mémoire et de la pénétration, parce que ce n'est pas la même faculté qui est en jeu dans ces deux cas. Ainsi, l'athlète n'est pas le même que le coureur. Des dispositions différentes dominent dans chacun. D'ailleurs rien n'empêche que l'homme qui a l'âme forte et tenace ne relise en quelque sorte ce que retient sa mémoire, et que celui qui laisse échapper beaucoup de choses ne soit disposé par sa faiblesse à éprouver et à conserver des affections passives. D'ailleurs, la propriété qu'a l'âme de n'être pas étendue prouve qu'elle est une puissance. En général, tous les faits qui se passent, dans l'âme s'y produisent d'une manière fort différente de celle qu'imaginent les hommes qui ne les ont jamais examinés, et fort différente aussi de celle dont s'opèrent les phénomènes sensibles qui induisent en erreur par leur analogie. De là vient que les hommes dont nous parlons croient que les sensations et les souvenirs ressemblent à des caractères inscrits sur des tablettes ou des feuilles de papier. Or, qu'ils regardent l'âme comme matérielle ou immatérielle, ils ignorent certainement les conséquences absurdes qui ressortent d'une telle opinion.





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Dernière mise à jour : 3/06/2010