[3,8,6] Ἡ ἄρα πρᾶξις ἕνεκα θεωρίας καὶ θεωρήματος· ὥστε καὶ τοῖς πράττουσιν ἡ θεωρία τέλος, καὶ οἷον ἐξ εὐθείας ὃ μὴ ἠδυνήθησαν λαβεῖν τοῦτο περιπλανώμενοι ἑλεῖν ζητοῦσι. Καὶ γὰρ αὖ ὅταν τύχωσιν οὗ βούλονται, ὃ γενέσθαι ἠθέλησαν, οὐχ ἵνα μὴ γνῶσιν, ἀλλ᾽ ἵνα γνῶσι καὶ παρὸν ἴδωσιν ἐν ψυχῇ, δῆλον ὅτι κείμενον θεατόν. Ἐπεὶ καὶ ἀγαθοῦ χάριν πράττουσι· τοῦτο δὲ οὐχ ἵνα ἔξω αὐτῶν, οὐδ᾽ ἵνα μὴ ἔχωσιν, ἀλλ᾽ ἵνα ἔχωσι τὸ ἐκ τῆς πράξεως ἀγαθόν. Τοῦτο δὲ ποῦ; Ἐν ψυχῇ. Ἀνέκαμψεν οὖν πάλιν ἡ πρᾶξις εἰς θεωρίαν· ὃ γὰρ ἐν ψυχῇ λαμβάνει λόγῳ οὔσῃ, τί ἂν ἄλλο ἢ λόγος σιωπῶν εἴη; Καὶ μᾶλλον, ὅσῳ μᾶλλον. Τότε γὰρ καὶ ἡσυχίαν ἄγει καὶ οὐδὲν ζητεῖ ὡς πληρωθεῖσα, καὶ ἡ θεωρία ἡ ἐν τῷ τοιούτῳ τῷ πιστεύειν ἔχειν εἴσω κεῖται. Καὶ ὅσῳ ἐναργεστέρα ἡ πίστις, ἡσυχαιτέρα καὶ ἡ θεωρία, ἧι μᾶλλον εἰς ἓν ἄγει, καὶ τὸ γινῶσκον ὅσῳ γινώσκει – ἤδη γὰρ σπουδαστέον – εἰς ἓν τῷ γνωσθέντι ἔρχεται. Εἰ γὰρ δύο, τὸ μὲν ἄλλο, τὸ δὲ ἄλλο ἔσται· ὥστε οἷον παράκειται, καὶ τὸ διπλοῦν τοῦτο οὔπω ὠικείωσεν, οἷον ὅταν ἐνόντες λόγοι ἐν ψυχῇ μηδὲν ποιῶσι. Διὸ δεῖ μὴ ἔξωθεν τὸν λόγον εἶναι, ἀλλ᾽ ἑνωθῆναι τῇ ψυχῇ τοῦ μανθάνοντος, ἕως ἂν οἰκεῖον εὕρῃ. Ἡ μὲν οὖν ψυχή, ὅταν οἰκειωθῇ καὶ διατεθῇ, ὅμως προφέρει καὶ προχειρίζεται – οὐ γὰρ πρώτως εἶχε – καὶ καταμανθάνει, καὶ τῇ προχειρίσει οἷον ἑτέρα αὐτοῦ γίνεται, καὶ διανοουμένη βλέπει ὡς ἄλλο ὂν ἄλλο· καίτοι καὶ αὕτη λόγος ἦν καὶ οἷον νοῦς, ἀλλ᾽ ὁρῶν ἄλλο. Ἔστι γὰρ οὐ πλήρης, ἀλλὰ ἐλλείπει τῷ πρὸ αὐτῆς· ὁρᾶι μέντοι καὶ αὐτὴ ἡσύχως ἃ προφέρει. Ἃ μὲν γὰρ εὖ προήνεγκεν, οὐκέτι προφέρει, ἃ δὲ προφέρει, τῷ ἐλλιπεῖ προφέρει εἰς ἐπίσκεψιν καταμανθάνουσα ὃ ἔχει. Ἐν δὲ τοῖς πρακτικοῖς ἐφαρμόττει ἃ ἔχει τοῖς ἔξω. Καὶ τῷ μὲν μᾶλλον ἔχειν ἢ ἡ φύσις ἡσυχαιτέρα, καὶ τῷ πλέον θεωρητικὴ μᾶλλον, τῷ δὲ μὴ τελέως ἐφιεμένη μᾶλλον ἔχειν τὴν τοῦ θεωρηθέντος καταμάθησιν καὶ θεωρίαν τὴν ἐξ ἐπισκέψεως. Καὶ ἀπολείπουσα δὲ καὶ ἐν ἄλλοις γινομένη, εἶτ᾽ ἐπανιοῦσα πάλιν, θεωρεῖ τῷ ἀπολειφθέντι αὐτῆς μέρει· ἡ δὲ στᾶσα ἐν αὑτῇ ἧττον τοῦτο ποιεῖ. Διὸ ὁ σπουδαῖος λελόγισται ἤδη καὶ τὸ παρ᾽ αὑτοῦ πρὸς ἄλλον ἀποφαίνει· πρὸς δὲ αὑτὸν ὄψις. Ἤδη γὰρ οὗτος πρὸς τὸ ἓν καὶ πρὸς τὸ ἥσυχον οὐ μόνον τῶν ἔξω, ἀλλὰ καὶ πρὸς αὑτόν, καὶ πάντα εἴσω.
| [3,8,6] Quand on agit, c'est pour contempler et pour posséder l'objet contemplé. La pratique a donc pour fin la contemplation. Ce qu'elle ne peut atteindre directement, elle tâche de l'obtenir par une voie détournée. Il en est de même quand on atteint l'objet de ses vœux : ce qu'on souhaite, ce n'est pas de posséder l'objet de ses vœux sans le connaître, c'est au contraire de le connaître à fond, de le voir présent en son âme et de pouvoir l'y contempler. En effet, c'est toujours en vue du bien qu'on agit: on veut l'avoir intérieurement, se l'approprier et trouver dans sa possession le résultat de son action ; or, comme on ne peut posséder le bien que par l'âme, l'action nous ramène encore ici à la contemplation. Puisque l'âme est une raison, ce qu'elle est capable de posséder ne saurait être qu'une raison silencieuse, d'autant plus silencieuse qu'elle est plus raison : car la raison parfaite ne cherche plus rien : elle se repose dans l'évidence de ce dont elle est remplie ; plus l'évidence est complète, plus la contemplation est calme, plus elle ramène l'âme à l'unité. En effet, dans l'acte de la connaissance (et nous parlons ici sérieusement), il y a identité entre le sujet connaissant et l'objet connu. S'ils faisaient deux choses, ils seraient différents, étrangers l'un à l'autre, sans véritable liaison, comme les raisons {sont étrangères à l'âme} quand elles y sommeillent sans être y aperçues. La raison ne doit donc pas rester étrangère à l'âme qui apprend, mais lui être unie, lui devenir propre. Donc, quand l'âme s'est approprié une raison et s'est familiarisée avec elle, elle la tire en quelque sorte de son sein pour l'examiner. Elle remarque ainsi la chose qu'elle possédait {sans le savoir}, s'en distingue en l'examinant, et, par la conception qu'elle s'en forme, la considère comme une chose étrangère à elle-même : car, quoique l'âme soit elle-même une raison et une espèce d'intelligence, cependant, quand elle considère une chose, elle la considère comme distincte d'elle-même, parce qu'elle ne possède pas la plénitude véritable et qu'elle est défectueuse à l'égard de son principe {qui est l'intelligence}. Elle considère d'ailleurs avec calme ce qu'elle tire d'elle-même : car elle ne tire pas d'elle-même ce dont elle n'avait pas déjà quelque notion. Si d'ailleurs elle tire quelque chose de son sein, c'est qu'elle en avait une vue incomplète et qu'elle veut le connaître. Dans ses actes {tels que la sensation}, elle adapte aux objets extérieurs les raisons qu'elle possède. D'un côté, comme elle possède {les intelligibles} mieux que la nature, elle est aussi plus calme et en même temps plus contemplative ; d'un autre côté, comme elle ne possède pas parfaitement {les intelligibles}, elle désire plus {que l'intelligence} avoir de l'objet qu'elle contemple cette connaissance et cette contemplation qu'on acquiert d'un objet en l'examinant. Après s'être écartée de sa partie supérieure et avoir parcouru {par la raison discursive} la série des différences, elle revient à elle-même, et se livre de nouveau à la contemplation par sa partie supérieure {l'intelligence}, dont elle s'était écartée {pour considérer les différences} : car cette partie ne s'occupe pas des différences, parce qu'elle demeure en elle-même. Aussi l'esprit sage est-il identique avec la raison et possède-t-il en lui-même ce qu'il découvre aux autres. Il se contemple lui-même; il est arrivé à l'unité non-seulement par rapport aux objets extérieurs, mais encore par rapport à lui-même ; il se repose dans cette unité et il trouve toutes choses en son propre sein.
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