Texte grec :
[352] (352a) Ἆρ´ οὖν, ἦν δ´ ἐγώ, τῇδέ πῃ καταφανὲς ἂν ἡμῖν γένοιτο;
ὥσπερ εἴ τις ἄνθρωπον σκοπῶν ἐκ τοῦ εἴδους ἢ πρὸς ὑγίειαν
ἢ πρὸς ἄλλο τι τῶν τοῦ σώματος ἔργων, ἰδὼν τὸ πρόσωπον
καὶ τὰς χεῖρας ἄκρας εἴποι· "Ἴθι δή μοι ἀποκαλύψας καὶ τὰ
στήθη καὶ τὸ μετάφρενον ἐπίδειξον, ἵνα ἐπισκέψωμαι σαφέστερον,"
καὶ ἐγὼ τοιοῦτόν τι ποθῶ πρὸς τὴν σκέψιν· θεασάμενος
ὅτι οὕτως ἔχεις πρὸς τὸ ἀγαθὸν καὶ τὸ ἡδὺ ὡς
φῄς, δέομαι τοιοῦτόν τι εἰπεῖν· Ἴθι δή μοι, ὦ Πρωταγόρα,
(352b) καὶ τόδε τῆς διανοίας ἀποκάλυψον· πῶς ἔχεις πρὸς ἐπιστήμην;
πότερον καὶ τοῦτό σοι δοκεῖ ὥσπερ τοῖς πολλοῖς
ἀνθρώποις, ἢ ἄλλως; δοκεῖ δὲ τοῖς πολλοῖς περὶ ἐπιστήμης
τοιοῦτόν τι, οὐκ ἰσχυρὸν οὐδ´ ἡγεμονικὸν οὐδ´ ἀρχικὸν εἶναι·
οὐδὲ ὡς περὶ τοιούτου αὐτοῦ ὄντος διανοοῦνται, ἀλλ´ ἐνούσης
πολλάκις ἀνθρώπῳ ἐπιστήμης οὐ τὴν ἐπιστήμην αὐτοῦ
ἄρχειν ἀλλ´ ἄλλο τι, τοτὲ μὲν θυμόν, τοτὲ δὲ ἡδονήν, τοτὲ
δὲ λύπην, ἐνίοτε δὲ ἔρωτα, πολλάκις δὲ φόβον, ἀτεχνῶς
(352c) διανοούμενοι περὶ τῆς ἐπιστήμης ὥσπερ περὶ ἀνδραπόδου,
περιελκομένης ὑπὸ τῶν ἄλλων ἁπάντων. ἆρ´ οὖν καὶ σοὶ
τοιοῦτόν τι περὶ αὐτῆς δοκεῖ, ἢ καλόν τε εἶναι ἡ ἐπιστήμη
καὶ οἷον ἄρχειν τοῦ ἀνθρώπου, καὶ ἐάνπερ γιγνώσκῃ τις
τἀγαθὰ καὶ τὰ κακά, μὴ ἂν κρατηθῆναι ὑπὸ μηδενὸς ὥστε
ἄλλ´ ἄττα πράττειν ἢ ἃν ἐπιστήμη κελεύῃ, ἀλλ´ ἱκανὴν εἶναι
τὴν φρόνησιν βοηθεῖν τῷ ἀνθρώπῳ;
Καὶ δοκεῖ, ἔφη, ὥσπερ σὺ λέγεις, ὦ Σώκρατες, καὶ ἅμα,
(352d) εἴπερ τῳ ἄλλῳ, αἰσχρόν ἐστι καὶ ἐμοὶ σοφίαν καὶ ἐπιστήμην
μὴ οὐχὶ πάντων κράτιστον φάναι εἶναι τῶν ἀνθρωπείων πραγμάτων.
Καλῶς γε, ἔφην ἐγώ, σὺ λέγων καὶ ἀληθῆ. οἶσθα οὖν
ὅτι οἱ πολλοὶ τῶν ἀνθρώπων ἐμοί τε καὶ σοὶ οὐ πείθονται,
ἀλλὰ πολλούς φασι γιγνώσκοντας τὰ βέλτιστα οὐκ ἐθέλειν
πράττειν, ἐξὸν αὐτοῖς, ἀλλὰ ἄλλα πράττειν· καὶ ὅσους δὴ
ἐγὼ ἠρόμην ὅτι ποτε αἴτιόν ἐστι τούτου, ὑπὸ ἡδονῆς φασιν
(352e) ἡττωμένους ἢ λύπης ἢ ὧν νυνδὴ ἐγὼ ἔλεγον ὑπό τινος
τούτων κρατουμένους ταῦτα ποιεῖν τοὺς ποιοῦντας.
Πολλὰ γὰρ οἶμαι, ἔφη, ὦ Σώκρατες, καὶ ἄλλα οὐκ ὀρθῶς
λέγουσιν οἱ ἄνθρωποι.
Ἴθι δὴ μετ´ ἐμοῦ ἐπιχείρησον πείθειν τοὺς ἀνθρώπους
καὶ διδάσκειν ὅ ἐστιν αὐτοῖς τοῦτο τὸ πάθος,
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Traduction française :
[352] - Voici peut-être, dis-je, un moyen d'éclairer le sujet. Supposons
qu'on examine un homme sur son extérieur pour juger de sa santé ou
de ses facultés physiques ; après avoir vu le visage et les mains, on lui
dirait : Allons, déshabille-toi et découvre-moi ta poitrine et ton dos,
pour que je voie plus clairement ce qui en est. C'est une méthode
semblable que je voudrais suivre dans cette recherche. Maintenant
que je connais, d'après ce que tu as dit, ta manière de voir sur le bien
et l'agréable, voici la demande que je voudrais te faire : Allons,
Protagoras, découvre-moi un autre coin de ta pensée : quelle opinion
as-tu de la science ? En juges-tu ici encore comme le peuple, ou
autrement ? Or voici à peu près l'idée qu'il se forme de la science. Il
se figure qu'elle n'est ni forte, ni capable de guider et de commander ;
au lieu de lui reconnaître ces qualités, il est persuadé que souvent la
science a beau se trouver dans un homme, ce n'est point elle qui le
gouverne, mais quelque autre chose, tantôt la colère, tantôt le plaisir,
tantôt la douleur, quelquefois l'amour, souvent la crainte. Il regarde
tout bonnement la science comme une esclave que toutes les autres
choses traînent à leur suite. T'en fais-tu la même idée, ou juges-tu
qu'elle est une belle chose, capable de commander à l'homme, que
lorsqu'un homme a la connaissance du bien et du mal, rien ne peut le
vaincre et le forcer à faire autre chose que ce que la science lui
ordonne, et que l'intelligence est pour l'homme une ressource qui
suffit à tout ?
- Je pense de la science tout ce que tu en dis, Socrate, répondit-il, et
il serait honteux à moi plus qu'à tout autre de ne pas reconnaître que
la sagesse et la science sont ce qu'il y a de plus fort parmi toutes les
choses humaines.
- Ta réponse est belle et juste, lui dis-je ; mais tu n'ignores pas que la
plupart des hommes ne sont ni de ton avis, ni du mien, et qu'ils
prétendent qu'on a souvent beau connaître ce qui est le meilleur, on
ne veut pas le faire, bien qu'on le puisse, et on fait tout autre chose.
Tous ceux à qui j'ai demandé la cause d'une telle conduite répondent
que ce qui fait qu'on agit de la sorte, c'est qu'on cède au plaisir ou à la
douleur ou à quelqu'une des passions dont je parlais tout à l'heure, et
qu'on se laisse vaincre par elles.
- Vraiment, Socrate, dit-il, il y a bien d'autres choses sur lesquelles
les hommes n'ont pas des idées justes.
- Eh bien ! essaye avec moi de les détromper et de leur apprendre ce
qu'est réellement ce phénomène
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