Texte grec :
[243] πολλοὶ μὲν ἀμφὶ Σικελίαν (243a)
πλεῖστα τρόπαια στήσαντες ὑπὲρ τῆς Λεοντίνων ἐλευθερίας, οἷς βοηθοῦντες
διὰ τοὺς ὅρκους ἔπλευσαν εἰς ἐκείνους τοὺς τόπους, διὰ δὲ μῆκος τοῦ πλοῦ
εἰς ἀπορίαν τῆς πόλεως καταστάσης καὶ οὐ δυναμένης αὐτοῖς ὑπηρετεῖν, τούτῳ
ἀπειπόντες ἐδυστύχησαν· ὧν οἱ ἐχθροὶ καὶ προσπολεμήσαντες πλείω ἔπαινον
ἔχουσι σωφροσύνης καὶ ἀρετῆς ἢ τῶν ἄλλων οἱ φίλοι· πολλοὶ δ' ἐν ταῖς
ναυμαχίαις ταῖς καθ' Ἑλλήσποντον, μιᾷ μὲν ἡμέρᾳ πάσας τὰς τῶν πολεμίων
(243b) ἑλόντες ναῦς, πολλὰς δὲ καὶ ἄλλας νικήσαντες· ὃ δ' εἶπον δεινὸν καὶ
ἀνέλπιστον τοῦ πολέμου γενέσθαι, τόδε λέγω τὸ εἰς τοσοῦτον φιλονικίας
ἐλθεῖν πρὸς τὴν πόλιν τοὺς ἄλλους Ἕλληνας, ὥστε τολμῆσαι τῷ ἐχθίστῳ
ἐπικηρυκεύσασθαι βασιλεῖ, ὃν κοινῇ ἐξέβαλον μεθ' ἡμῶν, ἰδίᾳ τοῦτον πάλιν
ἐπάγεσθαι, βάρβαρον ἐφ' Ἕλληνας, καὶ συναθροῖσαι ἐπὶ τὴν πόλιν πάντας
Ἕλληνάς τε καὶ βαρβάρους. Οὗ δὴ καὶ (243c) ἐκφανὴς ἐγένετο ἡ τῆς πόλεως
ῥώμη τε καὶ ἀρετή. Οἰομένων γὰρ ἤδη αὐτὴν καταπεπολεμῆσθαι καὶ
ἀπειλημμένων ἐν Μυτιλήνῃ τῶν νεῶν, βοηθήσαντες ἑξήκοντα ναυσίν, αὐτοὶ
ἐμβάντες εἰς τὰς ναῦς, καὶ ἄνδρες γενόμενοι ὁμολογουμένως ἄριστοι,
νικήσαντες μὲν τοὺς πολεμίους, λυσάμενοι δὲ τοὺς φιλίους, ἀναξίου τύχης
τυχόντες, οὐκ ἀναιρεθέντες ἐκ τῆς θαλάττης κεῖνται ἐνθάδε. Ὦν χρὴ ἀεὶ
μεμνῆσθαί τε καὶ (243d) ἐπαινεῖν· τῇ μὲν γὰρ ἐκείνων ἀρετῇ ἐνικήσαμεν οὐ
μόνον τὴν τότε ναυμαχίαν, ἀλλὰ καὶ τὸν ἄλλον πόλεμον· δόξαν γὰρ δι' αὐτοὺς
ἡ πόλις ἔσχεν μή ποτ' ἂν καταπολεμηθῆναι μηδ' ὑπὸ πάντων ἀνθρώπων - καὶ
ἀληθῆ ἔδοξεν - τῇ δὲ ἡμετέρᾳ αὐτῶν διαφορᾷ ἐκρατήθημεν, οὐχ ὑπὸ τῶν ἄλλων·
ἀήττητοι γὰρ ἔτι καὶ νῦν ὑπό γε ἐκείνων ἐσμέν, ἡμεῖς δὲ αὐτοὶ ἡμᾶς αὐτοὺς
καὶ ἐνικήσαμεν καὶ ἡττήθημεν. Μετὰ δὲ ταῦτα (243e) ἡσυχίας γενομένης καὶ
εἰρήνης πρὸς τοὺς ἄλλους, ὁ οἰκεῖος ἡμῖν πόλεμος οὕτως ἐπολεμήθη, ὥστε
εἴπερ εἱμαρμένον εἴη ἀνθρώποις στασιάσαι, μὴ ἂν ἄλλως εὔξασθαι μηδένα
πόλιν ἑαυτοῦ νοσῆσαι. Ἔκ τε γὰρ τοῦ Πειραιῶς καὶ τοῦ ἄστεως ὡς ἁσμένως καὶ
οἰκείως ἀλλήλοις συνέμειξαν οἱ πολῖται καὶ παρ' ἐλπίδα τοῖς ἄλλοις Ἕλλησι,
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Traduction française :
[243] un grand nombre aussi reposent en Sicile, (243a) où ils avaient déjà remporté
plusieurs trophées pour la liberté des Léontins, qu'ils étaient allés
secourir en vertu des traités. Mais la longueur du trajet et la détresse
où se trouvait alors Athènes ayant empêché de les soutenir, ils perdirent
tout espoir, et succombèrent; mais leurs ennemis se conduisirent envers
eux avec plus de modération et de générosité que n'en montrent souvent des
amis. Beaucoup périrent encore dans les combats sur l'Hellespont, après
s'être emparés, en un seul jour, de toute la flotte de l'ennemi, (243b) et
après beaucoup d'autres victoires. Mais ce qu'il y eut de terrible et
d'inattendu dans cette guerre, comme je l'ai dit, ce fut l'excès de jalousie auquel les
autres Grecs se portèrent contre Athènes. Ils ne rougirent point d'implorer, par des
envoyés, l'alliance de ce roi, notre implacable ennemi, de ramener, eux-mêmes,
contre des Grecs, le barbare que nos efforts communs avaient chassé ; en un mot, de
réunir tous les Grecs et tous les barbares contre cette ville. Mais ce fut alors
(243c) aussi qu'Athènes déploya sa force et son courage. On la croyait
déjà perdue ; notre flotte était enfermée près de Mitylène. Un secours de
soixante navires arrive; ceux qui les montent sont l'élite de nos
guerriers ; ils battent l'ennemi et dégagent leurs frères; mais, victimes
d'un sort injuste, on ne peut les retirer de la mer, et ils reposent ici,
objet éternel de nos souvenirs et (243d) de nos louanges. Car c'est leur
courage qui nous assura non seulement le succès de cette journée, mais
celui de toute la guerre. Ils ont acquis à notre ville la réputation de ne
pouvoir jamais être réduite, même quand tous les peuples se réuniraient
contre elle ; et cette réputation n'était pas vaine : nous n'avons
succombé que sous nos propres dissensions, et non sous les armes des
ennemis: aujourd'hui encore nous pourrions braver leurs efforts; mais nous
nous sommes vaincus et défaits nous-mêmes.
(243e) La paix et la tranquillité extérieure assurée, nous tombâmes dans
des dissensions intestines, mais elles furent telles, que, si la discorde
est une loi inévitable du destin, on doit souhaiter pour son pays qu'il
n'éprouve que de pareils troubles. Avec quel empressement et quelle
affection cordiale les citoyens du Pirée et ceux de la ville ne se
réunirent-ils pas, contre l'attente des autres Grecs !
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