Texte grec :
[8,840] (Ἀθηναῖος)
ἆρ' οὖν οὐκ ἴσμεν τὸν Ταραντῖνον Ἴκκον ἀκοῇ (840a) διὰ τὸν
Ὀλυμπίασί τε ἀγῶνα καὶ τούς γε ἄλλους; ὧν διὰ φιλονικίαν,
καὶ τέχνην καὶ τὸ μετὰ τοῦ σωφρονεῖν ἀνδρεῖον ἐν τῇ ψυχῇ
κεκτημένος, ὡς λόγος, οὔτε τινὸς πώποτε γυναικὸς ἥψατο οὐδ'
αὖ παιδὸς ἐν ὅλῃ τῇ τῆς ἀσκήσεως ἀκμῇ· καὶ δὴ καὶ Κρίσωνα
καὶ Ἀστύλον καὶ Διόπομπον καὶ ἄλλους παμπόλλους ὁ αὐτός
που λόγος ἔχει. καίτοι τῶν γ' ἐμῶν καὶ σῶν πολιτῶν, ὦ Κλεινία,
πολὺ κάκιον ἦσαν πεπαιδευμένοι (840b) τὰς ψυχάς, τὰ δὲ
σώματα πολὺ μᾶλλον σφριγῶντες.
(Κλεινίας)
ἀληθῆ ταῦτα λέγεις ὅτι σφόδρα ὑπὸ τῶν παλαιῶν ἐστιν
εἰρημένα περὶ τούτων τῶν ἀθλητῶν ὡς ὄντως ποτὲ γενόμενα.
(Ἀθηναῖος)
τί οὖν; οἱ μὲν ἄρα νίκης ἕνεκα πάλης καὶ δρόμων καὶ τῶν
τοιούτων ἐτόλμησαν ἀπέχεσθαι λεγομένου πράγματος ὑπὸ
τῶν πολλῶν εὐδαίμονος, οἱ δὲ ἡμέτεροι παῖδες ἀδυνατήσουσι
καρτερεῖν πολὺ καλλίονος ἕνεκα νίκης, ἣν (840c) ἡμεῖς
καλλίστην ἐκ παίδων πρὸς αὐτοὺς λέγοντες ἐν μύθοις τε καὶ ἐν
ῥήμασιν καὶ ἐν μέλεσιν ᾄδοντες, ὡς εἰκός, κηλήσομεν;
(Κλεινίας) ποίας;
(Ἀθηναῖος)
τῆς τῶν ἡδονῶν νίκης ἐγκρατεῖς ὄντας ἂν ζῆν εὐδαιμόνως,
ἡττωμένους δὲ τοὐναντίον ἅπαν. πρὸς δὲ τούτοις ἔτι φόβος ὁ
τοῦ μηδαμῇ μηδαμῶς ὅσιον αὐτὸ εἶναι δύναμιν ἡμῖν οὐκ ἄρα
ἕξει κρατεῖν ὧν ἄλλοι κεκρατήκασι τούτων ὄντες χείρονες;
(Κλεινίας) εἰκὸς γοῦν.
CHAPITRE VIII. (Ἀθηναῖος)
ἐπειδὴ τοίνυν ἐνταῦθά ἐσμεν τούτου τοῦ νομίμου (840d) πέρι,
διὰ κάκην δὲ τὴν τῶν πολλῶν εἰς ἀπορίαν ἐπέσομεν, φημὶ τὸ
μὲν ἡμέτερον νόμιμον ἀτεχνῶς δεῖν περὶ αὐτῶν τούτων
πορεύεσθαι λέγον ὡς οὐ δεῖ χείρους ἡμῖν εἶναι τοὺς πολίτας
ὀρνίθων καὶ ἄλλων θηρίων πολλῶν, οἳ κατὰ μεγάλας ἀγέλας
γεννηθέντες, μέχρι μὲν παιδογονίας ἠίθεοι καὶ ἀκήρατοι
γάμων τε ἁγνοὶ ζῶσιν, ὅταν δ' εἰς τοῦτο ἡλικίας ἔλθωσι,
συνδυασθέντες ἄρρην θηλείᾳ κατὰ χάριν καὶ θήλεια ἄρρενι,
τὸν λοιπὸν χρόνον ὁσίως καὶ δικαίως ζῶσιν, ἐμμένοντες (840e)
βεβαίως ταῖς πρώταις τῆς φιλίας ὁμολογίαις· δεῖν δὴ θηρίων γε
αὐτοὺς ἀμείνους εἶναι. ἐὰν δ' οὖν ὑπὸ τῶν ἄλλων Ἑλλήνων καὶ
βαρβάρων τῶν πλείστων διαφθείρωνται, τὴν λεγομένην
ἄτακτον Ἀφροδίτην ἐν αὐτοῖς ὁρῶντές τε καὶ ἀκούοντες
μέγιστον δυναμένην, καὶ οὕτω δὴ μὴ δυνατοὶ γίγνωνται
κατακρατεῖν, δεύτερον νόμον ἐπ' αὐτοῖς μηχανᾶσθαι χρὴ τοὺς
νομοφύλακας νομοθέτας γενομένους.
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Traduction française :
[8,840] L'ATHÉNIEN N'avons-nous pas entendu dire qu'Ikkos de Tarente, dans
son désir de remporter la victoire aux jeux olympiques et aux autres,
acquit, dit-on, avec son art, tant de tempérance et de courage qu'il ne
toucha jamais à une femme ni à un garçon durant tout le temps de ses plus
forts exercices. Et l'on dit la même chose de Crison, d'Astylos,
de Diopompos et d'une foule d'autres. Cependant, Clinias, ils étaient
beaucoup plus mal élevés quant à l'âme que mes concitoyens et les tiens,
et ils avaient beaucoup plus de sève dans le corps.
CLINIAS C'est vrai, ce que tu dis-là : les anciens nous ont bien rapporté
que ces athlètes s'étaient réellement comportés ainsi.
L'ATHÉNIEN Quoi donc ? ces gens-Ià, pour remporter le prix de la lutte, de
la course et d'autres exercices pareils ont pris sur eux de s'abstenir de
ce que la plupart des hommes regardent comme un bonheur, et nos enfants ne
pourront pas maîtriser leurs désirs en vue d'une victoire beaucoup plus
belle, que nous leur peindrons dès leur enfance comme la plus belle de
toutes, et dont nous charmerons naturellement leurs oreilles dans nos
récits, nos discours et nos chants !
CLINIAS Quelle victoire ?
L'ATHÉNIEN Celle qu'on remporte sur les plaisirs et qui nous fait vivre
heureux, tandis que, si on s'y laisse vaincre, on est au contraire
malheureux. Outre cela, la crainte de commettre un acte absolument, et
toujours impur n'aura-t-elle pas assez de force pour les faire triompher
de penchants que d'autres ont surmontés, bien qu'ils ne les valussent pas.
CLINIAS Elle en aura assez vraisemblablement.
CHAPITRE VIII.
L'ATHÉNIEN Puisque nous en sommes venus là au sujet de cette loi et que
nous sommes tombés dans l'embarras à cause des mauvais sentiments de la
foule, je dis qu'il faut absolument poursuivre notre législation sur ce
point et déclarer que nos concitoyens ne doivent pas être pires que les
oiseaux et beaucoup d'autres animaux, qui, élevés parmi de grands
troupeaux, vivent chastes et purs, sans connaître l'accouplement jusqu'à
ce qu'ils soient en âge de faire des petits et qui, parvenus à cet âge,
s'unissent, mâle avec femelle et femelle avec mâle, en vue de l'amour, et
vivent dès lors suivant les lois de la sainteté et de la justice, s'en
tenant aux premiers engagements de leur amitié. Or il faut que nos
citoyens soient meilleurs que les animaux. Cependant, s'ils se laissent
corrompre par les autres Grecs et la plupart des barbares, en voyant et
entendant vanter la très grande puissance qu'a chez eux l'Aphrodite qu'on
appelle désordonnée, et que par suite ils ne soient pas capables de la
vaincre, alors il faut que les gardiens des lois, se faisant législateurs,
imaginent une seconde loi pour les brider.
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